La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/01/2019 | FRANCE | N°18-40041

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 23 janvier 2019, 18-40041


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que la question transmise est ainsi rédigée :

« Les dispositions de l'article L. 2411-8, alinéa 1, du code du travail, telles qu'interprétées par une jurisprudence constante de la Cour de cassation dont il résulte que le salarié protégé licencié sans autorisation administrative, ou dont la rupture du contrat de travail produit les effets d'un tel licenciement, et qui ne demande pas, ou ne peut pas demander, sa réintégration, a droit à une indemnité pour violation du statut protecteur égale

aux salaires qu'il aurait dû percevoir entre son éviction et la fin de la pé...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que la question transmise est ainsi rédigée :

« Les dispositions de l'article L. 2411-8, alinéa 1, du code du travail, telles qu'interprétées par une jurisprudence constante de la Cour de cassation dont il résulte que le salarié protégé licencié sans autorisation administrative, ou dont la rupture du contrat de travail produit les effets d'un tel licenciement, et qui ne demande pas, ou ne peut pas demander, sa réintégration, a droit à une indemnité pour violation du statut protecteur égale aux salaires qu'il aurait dû percevoir entre son éviction et la fin de la période de protection, dans la limite de 30 mois, durée de la protection minimale accordée aux représentants du. personnel, ne sont-elles pas contraires aux droits et libertés garanties par la Constitution :
En ce qu'elles sont entachées d'incompétence négative au regard de l'article 34 de la Constitution, qui confie au seul législateur le soin de déterminer les principes fondamentaux des obligations civiles, du droit du travail et du droit syndical, puisqu'elles posent en principe que «Le licenciement d'un membre élu du comité d'entreprise, titulaire ou suppléant, ou d'un représentant syndical au comité d'entreprise, ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail» sans définir les modalités d'indemnisation applicables aux licenciements intervenus sans autorisation ou aux ruptures produisant les effets d'un tel licenciement, le législateur n'ayant donc pas exercé pleinement sa compétence, de sorte que le juge s'est donc trouvé contraint de définir lui-même des principes relevant de la compétence du seul législateur, qui est au demeurant seul habilité à aménager les conditions dans lesquelles la responsabilité de l'auteur 'd'une faute peut être engagée, ce qui affecte :

(i)le principe de participation des salariés à la détermination de leurs conditions de travail, fondé sur l'article 8 du Préambule de la Constitution de 1946, dont les conditions et garanties de mise en oeuvre incombent au seul législateur, qui doit notamment à ce titre assortir de garanties suffisantes la protection dont bénéficient les représentants du personnel, ce qui implique une définition législative des modalités d'indemnisation applicables aux licenciements intervenus sans autorisation ou aux ruptures produisant les effets d'un tel licenciement, les garanties qui résultent de la portée conférée aux dispositions de l'article 1. 2411-8, alinéa 1, du code du travail, par la jurisprudence constante de la Cour de cassation ne pouvant suppléer la carence ·du législateur dans l'exercice d'une compétence que la Constitution lui réserve ;

(ii)le principe de responsabilité, qui découle de l'article 4 de la Déclaration de 1789, et le droit à un recours juridictionnel effectif qui découle de l'article 16 de cette même Déclaration qui en est inséparable, au titre desquels le législateur est seul compétent pour aménager la faculté d'agir en responsabilité, au moyen notamment de la définition d'un plancher et/ou d'un plafond d'indemnisation, en cas de licenciement d'un salarié protégé sans autorisation ou de rupture de son contrat de travail produisant les effets d'un licenciemen4 les plancher et plafond d'indemnisation qui résultent de la portée conférée aux dispositions de l'article L. 2411-8, alinéa I, du code du travail, par la jurisprudence constante de la Cour de cassation, ne pouvant suppléer la carence du législateur dans l'exercice d'une compétence que la Constitution lui réserve ;

(iii) le droit de propriété, fondé sur les articles 2 et 17 de la Déclaration de 1789, dont la protection profite aux créances, au titre desquels le législateur est seul compétent pour définir les modalités de détermination des sommes que l'employeur doit au salarié protégé ayant fait l'objet d'un licenciement sans autorisation, ou dont la rupture du contrat de travail produit les effets d'un tel licenciement, les plancher et plafond d'indemnisation qui résultent de la portée confortée aux dispositions de l'article L. 2411-8, alinéa 1, du code du travail par la jurisprudence constante de la Cour de cassation, ne pouvant suppléer la carence du législateur dans l'exercice d'une compétence que la Constitution lui réserve ;

(iv)le principe d'égalité devant la loi, garanti par l'article 6 de la Déclaration de 1789, au titre duquel le législateur est seul compétent pour définir les modalités de détermination des sommes que l'employeur doit au salarié protégé ayant fait l'objet d'un licenciement sans autorisation, ou dont la rupture du contrat de travail produit les effets d'un tel licenciement, au regard des modalités d'indemnisation applicables en cas de licenciement faisant suite à une autorisation de licenciement annulée par le Ministre ou par le juge, les règles d'indemnisation différentes qui résultent de la portée conférée aux dispositions de l'article 1. 2411-8, alinéa 1, du Code du travail par la jurisprudence constante de la Cour de cassation, ne pouvant suppléer la carence du législateur dans l'exercice d'une compétence que la Constitution lui réserve ? » ;

Mais attendu, d'une part, que la question, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle ;

Et attendu, d'autre part, que la question posée ne présente pas un caractère sérieux dès lors que le législateur a subordonné le licenciement d'un salarié investi d'un mandat de représentant du personnel ou d'un syndicat à l'autorisation préalable de l'inspecteur du travail sur le fondement de l'exigence constitutionnelle de participation des travailleurs à la gestion des entreprises, que la nullité du licenciement qui, pour cette raison, résulte nécessairement de la méconnaissance des dispositions législatives, a pour conséquence un droit à réintégration ou à indemnisation réparant l'intégralité du préjudice subi pendant tout le temps de la protection conférée par ces textes, de sorte que la disposition législative critiquée n'est entachée d'aucune incompétence négative du législateur affectant par elle-même un droit ou une liberté que la Constitution garantit ;

D'où il suit qu'il n'y a pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel ;

PAR CES MOTIFS :

DIT N'Y AVOIR LIEU A RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois janvier deux mille dix-neuf.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-40041
Date de la décision : 23/01/2019
Sens de l'arrêt : Qpc seule - non-lieu à renvoi au cc
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Metz, 23 octobre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 23 jan. 2019, pourvoi n°18-40041, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : M. Cathala (président)
Avocat(s) : SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia

Origine de la décision
Date de l'import : 05/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.40041
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award