LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Amiens, 23 mai 2017), que M. X... a été engagé par la société des Houillères des Charbonnages de France, aux droits de laquelle vient l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs (ANGDM) en juillet 1975 en qualité de menuisier ; qu'il relevait du statut du mineur instauré par le décret du 14 juin 1946 et bénéficiait, en application des articles 22 et 23 de ce décret, d'indemnités de logement et de chauffage à vie ; que le salarié a signé le 29 juillet 2005 avec l'ANGDM deux contrats prévoyant le rachat anticipé de ses indemnités de logement et de chauffage moyennant le versement d'un capital ; qu'il a été placé en retraite le 31 mai 2010 ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable la demande en annulation des conventions et de le débouter de sa demande tendant à ordonner la compensation entre les sommes versées en capital et les indemnités perçues par l'ANGDM en ses lieu et place alors, selon le moyen :
1°/ qu'un salarié ne peut valablement renoncer, tant que son contrat de travail est en cours, aux avantages qu'il tire d'une convention collective ou de dispositions statutaires d'ordre public ; que les actions en nullité se prescrivent, en application des dispositions de l'article 2262 du code civil, dans sa rédaction antérieure – et applicable au litige – à celle issue de la loi du 17 juin 2008, applicable au litige, par trente ans lorsque le contrat est atteint d'une cause de nullité absolue ; que l'action en nullité d'une convention conclue en violation de la règle d'ordre public absolu tiré de l'interdiction faite au salarié dont le contrat de travail est en cours de renoncer aux avantages qu'il tire d'une convention collective ou de dispositions statutaires d'ordre public, se prescrit en application de ces mêmes dispositions par trente ans ; qu'en application de ces dispositions et des dispositions transitoires de la loi du 17 juin 2008, l'action en nullité des contrats signés le 29 juillet 2005, introduite le 14 février 2012, n'était pas prescrite à cette date ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 2262 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile, et l'article 26 II de ladite loi ;
2°/ que le point de départ de la prescription est fixé au moment où le titulaire du droit avait connaissance des faits lui permettant de l'exercer ; que le délai de prescription de l'action en nullité ne court qu'à compter de la connaissance par celui qui l'invoque de la cause de nullité qui affecte l'acte ; qu'en l'état de stipulations contractuelles selon lesquelles les contrats prendraient fin au décès de l'agent ou au plus tôt dès l'amortissement de son capital, M. X... avait légitimement pu penser qu'il ne renonçait pas par ces contrats au versement des indemnités après amortissement du capital alloué ; que ce n'est qu'à l'occasion de l'abondant contentieux né du refus de l'ANGDM de reprendre le versement des indemnités au profit des salariés dont le capital était amorti que M. X... a pu prendre connaissance qu'il avait, par la convention litigieuse, renoncé par avance au paiement des indemnités après amortissement du capital ; qu'en jugeant pourtant que le point de départ de la prescription quinquennale applicable est la signature du contrat soit le 29 juillet 2005, la cour d'appel a violé l'article 2224 du code civil ;
3°/ que le point de départ de la prescription est fixé au moment où le titulaire du droit avait connaissance des faits lui permettant de l'exercer ; que la prescription quinquennale de l'action en nullité pour erreur a pour point de départ le jour où le contractant a découvert l'erreur qu'il allègue ; que M. X... faisait état, outre de la cause de nullité tirée de la violation du principe selon lequel un salarié ne peut valablement renoncer, tant que son contrat de travail est en cours, aux avantages qu'il tire d'une convention collective ou de dispositions statutaires d'ordre public, de la cause de nullité tirée de l'erreur ; que les contrats signés par M. X... stipulaient qu'ils prendraient fin à son décès ou au plus tôt dès l'amortissement de son capital ; que M. X..., qui avait légitimement pu penser qu'il ne renonçait pas par ces contrats au versement des indemnités après amortissement du capital alloué n'a pu prendre connaissance que tel n'était pas le cas qu'après que l'ANGDM a refusé de reprendre le versement des indemnités au profit des salariés dont le capital était amorti ; qu'en jugeant pourtant que le point de départ de la prescription quinquennale applicable est la signature du contrat soit le 29 juillet 2005, la cour d'appel a violé l'article 2224 du code civil ;
Mais attendu, d'abord, que la nullité d'une convention résultant de la violation de l'interdiction pour un salarié de renoncer, tant que son contrat de travail est en cours, aux avantages qu'il tire d'une convention collective ou de dispositions statutaires d'ordre public, est une nullité relative qui se prescrit par cinq ans ;
Attendu, ensuite, que la cour d'appel, qui a constaté que le salarié avait eu une parfaite connaissance de l'étendue de son engagement lors de la signature de la convention, a retenu à bon droit que l'irrégularité entachant la convention devait être appréciée au jour de sa conclusion ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu, que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de condamnation de l'ANGDM à reprendre le versement des indemnités de logement et de chauffage alors, selon le moyen :
1°/ que la cassation à intervenir sur le premier moyen entraînera par voie de conséquence la cassation du chef ici critiqué en application de l'article 624 du code de procédure civile ;
2°/ que le principe selon lequel la prescription d'une action en nullité n'éteint pas le droit d'opposer celle-ci comme exception en défense à une action principale ; qu'en retenant que l'action en nullité était éteinte pour débouter M. X... de sa demande tendant à la reprise du versement des indemnités de logement et de chauffage, la cour d'appel a méconnu le principe selon lequel la prescription d'une action en nullité n'éteint pas le droit d'opposer celle-ci comme exception en défense à une action principale ;
Mais attendu, d'une part, que le rejet du premier moyen entraîne le rejet de la première branche du deuxième moyen, qui invoque une cassation par voie de conséquence ;
Attendu, d'autre part, que la cour d'appel a relevé que le salarié avait agi par voie principale en annulation de la convention et en reprise du versement des indemnités de logement et de chauffage et qu'il n'était pas défendeur ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le troisième moyen ci-après annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale , et prononcé et signé par M. Cathala, président et par Mme Piquot, greffier de chambre, présente lors de la mise à disposition de l'arrêt le vingt-trois janvier deux mille dix-neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré irrecevable la demande en annulation des conventions, et d'avoir débouté M. X... de sa demande tendant à voir ordonner la compensation entre les sommes versées en capital et les indemnités perçues par l'ANGDM en lieu et place de M. X....
AUX MOTIFS QUE il est constant que M. X... bénéficie des articles 22 et 23 du statut des mineurs qui allouent aux salariés des établissements concernés, en activité et ensuite de celle-ci, des avantages en nature ou indemnités de logement et de combustibles ; que par contrat en date du 29 juillet 2005, M. X... a reçu un capital de 48 596,27 euros et a autorisé l'ANGDM à retenir totalement la prestation des droits différés versés trimestriellement, aux fins d'amortir le capital ; que l'article IV du contrat précise que le contrat prend fin au décès du souscripteur ou au plus tôt dès l'amortissement du capital ; que dans le cas de M. X..., l'amortissement final interviendra en fin 2022 ; que par requête en date du 14 février 2012, M. X... a saisi la juridiction prud'homale, afin notamment de contester la validité des contrats de capitalisation et d'obtenir la reprise du versement des indemnités, qui a statué tel que rappelé précédemment ; que sur la nullité des conventions, sur la prescription, pour la première fois à hauteur de Cour, l'ANGDM soulève l'irrecevabilité de la demande au regard de la prescription quinquennale qui aurait commencé à courir à compter de la signature du contrat et n'aurait pas connu d'interruption ; que dès lors, l'action se trouverait prescrite depuis le 30 juillet 2010, en application de l'article 1304 du code civil ; que le salarié oppose que la violation des articles 22 et 23 du statut des mineurs tel qu'invoqué au soutien de sa demande de nullité des conventions querellées se rapporte à un ordre public absolu relevant de la prescription trentenaire, qui trouve à s'appliquer malgré l'intervention de la loi du 17 juin 2008 unifiant les délais de nullités par application des dispositions transitoires ; que de surcroît, il soutient que le délai de prescription, fut-t-il de 5 années, ne commence à courir, en vertu de l'article 2224 du code civil, qu'à compter du jour où le titulaire du droit à Faction a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; que sur le délai de prescription applicable, en l'espèce, les dispositions dont le salarié invoque la violation au soutien de sa demande de nullité appartiennent à l'ordre public de protection dès lors qu'elles bénéficient exclusivement au salarié, d'une catégorie particulière, par la création d'un statut dérogatoire, dont lui seul peut se prévaloir ; qu'en conséquence, le délai de prescription trouvant à s'appliquer est- quinquennal ; que sur le point de départ de la prescription, en application de l'article 2224 du code civil, la prescription de cinq années court à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits permettant de l'exercer ; qu'en l'espèce, il ne peut être retenu tel qu'allégué par l'appelant qu'eu égard à sa qualité de salarié, la date de découverte des faits, à savoir la renonciation à bénéficier d'une rente à vie même après le remboursement du capital, permettant d'exercer l'action en nullité, ait été différée ; qu'en effet, les termes simples de la convention, limitée à quatre articles clairs et précis, de même que son préambule visant un "contrat en vue de l'indemnisation sous forme de capital versé pour solde de tout compte a et ses dispositions finales " le présent contrat prend fin au décès du souscripteur ou au plus tôt dès l'amortissement du capital conduisent à retenir que le salarié était pleinement informé de l'étendue de ses droits et engagements, en ce compris la non reprise des prestations des droits différés après remboursement du capital ; qu'en conséquence, le point de la prescription quinquennale applicable est la signature du contrat soit le 29 juillet 2005 ; que l'action en nullité exercée par M. X... par sa saisine du conseil des prud'hommes de Creil le 2012 était prescrite au moment de son engagement et doit être déclarée irrecevable.
1/ ALORS OU'un salarié ne peut valablement renoncer, tant que son contrat de travail est en cours, aux avantages qu'il tire d'une convention collective ou de dispositions statutaires d'ordre public ; que les actions en nullité se prescrivent, en application des dispositions de l'article 2262 du code civil, dans sa rédaction antérieure – et applicable au litige – à celle issue de la loi du 17 juin 2008, applicable au litige, par trente ans lorsque le contrat est atteint d'une cause de nullité absolue ; que l'action en nullité d'une convention conclue en violation de la règle d'ordre public absolu tiré de l'interdiction faite au salarié dont le contrat de travail est en cours de renoncer aux avantages qu'il tire d'une convention collective ou de dispositions statutaires d'ordre public, se prescrit en application de ces mêmes dispositions par trente ans ; qu'en application de ces dispositions et des dispositions transitoires de la loi du 17 juin 2008, l'action en nullité des contrats signés le 29 juillet 2005, introduite le 14 février 2012, n'était pas prescrite à cette date ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 2262 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile, et l'article 26 II de ladite loi.
2/ ALORS QUE le point de départ de la prescription est fixé au moment où le titulaire du droit avait connaissance des faits lui permettant de l'exercer ; que le délai de prescription de l'action en nullité ne court qu'à compter de la connaissance par celui qui l'invoque de la cause de nullité qui affecte l'acte ; qu'en l'état de stipulations contractuelles selon lesquelles les contrats prendraient fin au décès de l'agent ou au plus tôt dès l'amortissement de son capital, M. X... avait légitimement pu penser qu'il ne renonçait pas par ces contrats au versement des indemnités après amortissement du capital alloué ; que ce n'est qu'à l'occasion de l'abondant contentieux né du refus de l'ANGDM de reprendre le versement des indemnités au profit des salariés dont le capital était amorti que M. X... a pu prendre connaissance qu'il avait, par la convention litigieuse, renoncé par avance au paiement des indemnités après amortissement du capital ; qu'en jugeant pourtant que le point de départ de la prescription quinquennale applicable est la signature du contrat soit le 29 juillet 2005, la cour d'appel a violé l'article 2224 du code civil.
3/ ALORS en outre QUE le point de départ de la prescription est fixé au moment où le titulaire du droit avait connaissance des faits lui permettant de l'exercer ; que la prescription quinquennale de l'action en nullité pour erreur a pour point de départ le jour où le contractant a découvert l'erreur qu'il allègue ; que M. X... faisait état, outre de la cause de nullité tirée de la violation du principe selon lequel un salarié ne peut valablement renoncer, tant que son contrat de travail est en cours, aux avantages qu'il tire d'une convention collective ou de dispositions statutaires d'ordre public, de la cause de nullité tirée de l'erreur ; que les contrats signés par M. X... stipulaient qu'ils prendraient fin à son décès ou au plus tôt dès l'amortissement de son capital ; que M. X..., qui avait légitimement pu penser qu'il ne renonçait pas par ces contrats au versement des indemnités après amortissement du capital alloué n'a pu prendre connaissance que tel n'était pas le cas qu'après que l'ANGDM a refusé de reprendre le versement des indemnités au profit des salariés dont le capital était amorti ; qu'en jugeant pourtant que le point de départ de la prescription quinquennale applicable est la signature du contrat soit le 29 juillet 2005, la cour d'appel a violé l'article 2224 du code civil.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. X... de sa demande tendant à voir condamner l'ANGDM à reprendre le versement des indemnités de logement et de chauffage.
AUX MOTIFS QUE sur la demande de prise de versement de indemnités de logement et de chauffage, en conséquence des précédents développements, la convention du 29 juillet 2005 conservant son plein effet il n'y a pas lieu de faire droit à cette demande.
1/ ALORS QUE la cassation à intervenir sur le premier moyen entrainera par voie de conséquence la cassation du chef ici critiqué en application de l'article 624 du code de procédure civile.
2/ ALORS QUE le principe selon lequel la prescription d'une action en nullité n'éteint pas le droit d'opposer celle-ci comme exception en défense à une action principale ; qu'en retenant que l'action en nullité était éteinte pour débouter M. X... de sa demande tendant à la reprise du versement des indemnités de logement et de chauffage, la cour d'appel a méconnu le principe selon lequel la prescription d'une action en nullité n'éteint pas le droit d'opposer celle-ci comme exception en défense à une action principale.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. X... de sa demande tendant au paiement de la somme de 9 719 euros correspondant à la partie du capital non versé au moment de sa signature augmentée des intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes.
AUX MOTIFS QUE sur le versement de la somme de 9 719 euros par l'ANGDM, M. X... sollicite le versement de la partie du capital non perçu au moment de la signature, à savoir 9 719 euros correspondant à 5/30ème du capital total non versé à souscription ; que M. X... ne développe aucun moyen à l'appui de cette demande, exposant au demeurant dans ses écritures que pareil abattement relevait d'un accord d'entreprise signé entre les Charbonnage, de France, Ineris et les délégués du personnel, en application d'un coefficient d'ancienneté ; qu'il sera débouté de cette demande.
1/ ALORS QUE M. X... soutenait n'avoir perçu que 25/30 du capital prévu au contrat signé par lui et poursuivait le versement du solde du capital non versé ; qu'en affirmant que M. X... « ne développe aucun moyen à l'appui de cette demande » quand il lui soumettait au contraire un moyen tiré de l'inexécution de ses obligations contractuelles par l'ANGDM, la cour d'appel a dénaturé ses écritures d'appel et violé le principe selon lequel le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les éléments de la cause.
2/ ALORS QU'en retenant qu'un accord d'entreprise signé entre les Charbonnage, de France, Ineris et les délégués du personnel, prévoyait un abattement en application d'un coefficient d'ancienneté quand elle était invitée à rechercher si M. X... n'avait pas été privée d'une partie du capital que lui garantissait le contrat signé avec l'ANGDM, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige en violation de l'article 455 du code de procédure civile.