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16/01/2019 | FRANCE | N°17-83881;18-86127

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 16 janvier 2019, 17-83881 et suivant


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

- M. Sid Ahmed X...,

contre :

- l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 6e section, en date du 11 mai 2017, qui, dans la procédure suivie notamment contre lui pour infractions à la législation sur les stupéfiants et association de malfaiteurs, a rejeté des requêtes en annulation de la procédure ;

- l'arrêt de la même chambre de l'instruction, en date du 20 septembre 2018, qui, dans la même procédure, a ordonné

son renvoi devant le tribunal correctionnel et son maintien sous contrôle judiciaire ;

La C...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

- M. Sid Ahmed X...,

contre :

- l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 6e section, en date du 11 mai 2017, qui, dans la procédure suivie notamment contre lui pour infractions à la législation sur les stupéfiants et association de malfaiteurs, a rejeté des requêtes en annulation de la procédure ;

- l'arrêt de la même chambre de l'instruction, en date du 20 septembre 2018, qui, dans la même procédure, a ordonné son renvoi devant le tribunal correctionnel et son maintien sous contrôle judiciaire ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 9 janvier 2019 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. de Larosière de Champfeu, conseiller rapporteur, M. Castel, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Bray ;

Sur le rapport de M. le conseiller de LAROSIÈRE de CHAMPFEU, les observations de la société civile professionnelle SPINOSI et SUREAU, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général MORACCHINI ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation dirigé contre l'arrêt du 11 mai 2017, pris de la violation de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 706-95, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que la chambre de l'instruction a refusé de prononcer l'annulation de l'autorisation d'interception de correspondances téléphoniques portant sur la ligne [...] ;

"aux motifs que : « concernant l'interception des conversations téléphoniques de la ligne " [...] " ; que le rapport en date du 1er décembre 2015 adressé par M. Y..., le capitaine de police au magistrat instructeur, cote D1 du dossier d'instruction indique : " Le 25 août 2015 nous étions destinataire d'un renseignement anonyme selon lequel un individu utilisateur de la ligne [...] s'adonnait depuis plusieurs mois à la revente de cocaïne sur Paris et sa banlieue ; l'analyse de cette ligne démontrait une activité en adéquation avec un trafic de stupéfiants. Le 10 septembre 2015, un second renseignement nous indiquait que la ligne exploitée n'émettait plus mais que le trafiquant utilisait désormais la ligne [...] . Interceptée, il s'avérait que l'objectif avait un livreur qui travaillait pour lui et utilisait une ligne ([...] ) dédiée à la vente de stupéfiants (...)" ; que le rapport en date du 29 septembre 2015 adressé au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris par le même officier de police judiciaire, cote D 12 du dossier d'instruction ; qu'intitulé « demande d'interception de la ligne 0/61 30 09 27 » indique de manière détaillée : "Le 25 août 2015 nous étions destinataires d'un renseignement anonyme selon lequel un individu, âgé d'une quarantaine d'années, de type nord africain, utilisateur de la ligne [...] s'adonnait depuis plusieurs mois à la revente de cocaïne sur Paris et sa banlieue, après autorisation, cette ligne était exploitée et il apparaissait les éléments suivants, la ligne était utilisée depuis le 8 avril 2015 et ressortait à une identité (U... Lilian, née le [...] , domiciliée [...] ) qui semblait n'avoir aucun lien avec l'affaire en cours, la ligne ne bornant jamais dans ce secteur. L'activité de cette ligne débutait dans l'après-midi avec un fort pic d'activité à partir de 18 heures et ce jusqu'à 2 heures du matin. En fin de semaine, les jeudi, vendredi et samedi, l'activité était plus importante (plus de 75 appels par jour). Les sms représentaient pas moins de 78 % des appels. Les bornes déclenchées confirmaient des déplacements principalement sur Paris mais également en banlieue. À la fin de l'activité de la ligne, les bornes déclenchées étaient le 17e arrondissement. Certains contacts étaient identifiés et quelques-uns d'entre eux étaient connus pour usage de stupéfiants. L'analyse confirmait donc que cette ligne avait toutes les caractéristiques d'une ligue utilisée par un trafiquant de stupéfiants. Le 10 septembre 2015, un second renseignement nous indiquait que la ligue exploitée n'émettait plus mais que le mis en cause utilisait désormais la ligne [...] . L'interception des communications de la ligne [...] pourrait ainsi permettre d'identifier son réel utilisateur, d'éventuels complices, de déterminer l'ampleur du trafic, les quantités des produits écoulés et les sources d'approvisionnement" ; que la requête aux fins d'interceptions de communications en date du 30 septembre 2015 adressée par le procureur de la République près le TGI de Paris au juge des libertés et de la détention de ce tribunal, cote DI6 du dossier d'instruction, est motivée comme suit : "Attendu qu'il ressort du rapport du capitaine M. Benjamin Y..., officier de police judiciaire, qu'un trafic de cocaïne serait en cours à Paris ; que les investigations téléphoniques par voie de réquisitions ont confirmé une activité compatible avec un trafic, du fait des modalités de contact et de l'identification de certains contacts comme des consommateurs ce produits stupéfiants ; que dès lors, seule l'écoute de la ligne [...] attribuée à une personne non identifiée en l'état, mais étant la ligne de travail utilisée dans le trafic objet de la présente procédure d'après les premiers éléments de l'enquête, permettrait de faire progresser l'enquête . Prions en conséquence le Juge des libertés et de la détention de bien vouloir autoriser l'interception pour la durée d'un mois de la ligne téléphonique [...] utilisée par une personne non identifiée, ainsi que l'enregistrement des appels envoyés ou reçus par ces lignes et la retranscription des conversations utiles à la manifestation de la vérité " ; que l'autorisation d'interception de correspondances téléphoniques en date du 30 septembre 2015 faisant droit à cette requête, cote D15 du dossier d'instruction, a été prise aux motifs déterminants suivants : "Vu le rapport en date du 29 septembre 2015 du capitaine de police M. Y..., en fonction au 2e District de police judiciaire ; que vu la requête du procureur de la République en date du 30 septembre 2015 relative à une enquête préliminaire conduite sur les faits d'infractions à la législation sur les stupéfiants commis à Paris et en Ile-de-France depuis le 25 août 2015, en tout cas sur le territoire national et depuis temps non prescrit ; faits prévus et réprimés par les articles 222-37, 222-40, 222-41, 222-43, 222-44, 222-45, 222-47, 222-48 ,222-49,222-50, du code pénal, L3421-1-1, L3424-2, L3421-2, R. 5149, R. 5179, R. 5180 et R. 5181 du code de la santé publique, et par la Convention internationale unique sur tes stupéfiants du 30 mars 1961 ; qu'il ressort du rapport de police sus visé et des éléments communiqués, que la surveillance technique delà ligne téléphonique portant le numéro [...] , attribuée à une personne non identifiée en l'état, est de nature à apporter des éléments utiles à l'enquête et est de nature à servir ta manifestation de la vérité, en ce que cette ligne serait celle utilisée dans le cadre d'un trafic de stupéfiants, que les investigations téléphoniques ont confirmé une activité compatible avec on trafic, du fait des modalités de contact et de l'identification de certains contacts comme des consommateurs de produits stupéfiants ; que cette mesure permettrait notamment d'identifier et de déterminer le rôle précis des auteurs et complices de ce trafic" ; qu'il ne résulte pas du dossier d'information, et en particulier des éléments exposés plus haut, que la requête du 30 septembre 2015 adressée par le procureur de la République au juge des libertés et de la détention soit entachée d'un stratagème déloyal, ni que les termes de l'autorisation donnée le même jour par ce magistrat indiquent que celui-ci ait été abusé ; qu'en effet, la première affirmation contenue dans la requête selon laquelle "il ressort du rapport de M. Y..., capitaine, officier de police judiciaire, qu'un trafic de cocaïne serait en cours à Paris ; que les investigations téléphoniques par voie de réquisitions ont confirmé une activité compatible avec un trafic, du fait des modalités de contact et de l'identification de certains contacts comme des consommateurs de produits stupéfiants" ne peut être considérée comme inexacte ; que les investigations téléphoniques par voie de réquisitions menées sur la ligne [...] , dans des conditions dont la régularité n'est pas contestée, ont bien confirmé une activité compatible avec un trafic, du fait des modalités de contact et de l'identification de certains contacts comme des consommateurs de produits stupéfiants, ainsi qu'il ressort du rapport précité en date du 29 septembre 2015 adressé par l'OPJ compétent au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris ; que la circonstance que la requête en cause ne précise pas expressément que ces investigations téléphoniques par voie de réquisitions ayant confirmé une activité compatible avec un trafic de stupéfiants avaient été menées sur une autre ligne, désormais inactive, que celle dont elle demandait l'interception, est en l'espèce indifférente et ne constitue pas un stratagème, dès lors qu'il s'agissait du même trafic de stupéfiants, poursuivi au moyen d'une nouvelle ligne par la même personne ainsi qu'il ressort clairement du rapport précité en date du 29 septembre 2015 indiquant : "Le 10 septembre 2015, un second renseignement nous indiquait que la ligne exploitée n'émettait plus mais que le mis en cause utilisait désormais la ligne [...] " ; qu'au surplus, il y a lieu de constater, de manière surabondante, que le rapport du 29 septembre 2015 était en l'espèce visé par le juge des libertés et de la détention, dans son autorisation d'interception de correspondances téléphoniques en date du 30 septembre 2015 portant sur ligne [...] ; qu'aucune disposition légale, en particulier les dispositions de l'article 706-95 alinéa premier du code de procédure pénale, n'exigeait que la requête aux fins d'interception, enregistrement et transcription de correspondances présentée par le procureur de la République au juge des libertés et de la détention ait été précédée par des réquisitions téléphoniques de transmission de factures détaillées (FADET) concernant la ligne dont l'interception était demandée ; que la seconde affirmation contenue dans la requête en cause, selon laquelle "seule l'écoute de la ligne [...] attribuée à une personne non identifiée en l'état mais étant la ligne de travail utilisée dans le trafic objet de la présente procédure d'après les premiers éléments de l'enquête, permettrait de faire progresser l'enquête" ne peut elle non plus être considérée comme inexacte ; qu'en effet, la ligne [...] était bien la ligne de travail utilisée pour le trafic de stupéfiants en cause, ainsi qu'il résultait des premiers éléments de l'enquête figurant dans le rapport précité en date du 29 septembre 2015, mentionnant que le 10 septembre 2015, un second renseignement avait indiqué aux enquêteurs que le mis en cause utilisait désormais la ligne [...] ; qu'au vu de l'ensemble de ces éléments, il apparaît que la requête aux fins d'interceptions de communications en date du 30 septembre 2015 adressée par le procureur de la République près le TGI de Paris au juge des libertés et de la détention était motivée de manière conforme aux éléments de l'enquête, exempte de stratagème, et que l'autorisation d'interception de correspondances téléphoniques délivrée le même jour par le juge des libertés et de la détention, dont les motifs ont été rappelés plus haut et correspondent également aux éléments de l'enquête, a été donnée sans que le juge des libertés et de la détention ait été abusé ; que cette autorisation n'a pas été donnée sur la seule et unique base d'un renseignement anonyme, mais au vu d'une requête du procureur de la République elle-même basée sur le rapport des enquêteurs en date du 29 septembre 2015, qui relatait que des investigations téléphoniques par voie de réquisitions avaient confirmé uns activité compatible avec un trafic de stupéfiants, et qu'un second renseignement leur avait indiqué que la ligne exploitée n'émettait plus mais que le mis en cause utilisait désormais la ligne [...] ; que l'autorisation d'interception de communications donnée au vu de la requête du procureur de la République indiquant notamment qu'il ressortait du rapport de M. Y..., capitaine, officier de police judiciaire, qu'un trafic de cocaïne serait en cours à Paris ; que les investigations téléphoniques par voie de réquisitions avaient confirmé une activité compatible avec un trafic, du fait des modalités de contact et de l'identification de certains contacts comme des consommateurs de produits stupéfiants, et que dès lors, seule l'écoute de la ligne [...] attribuée, à une personne non identifiée en l'étal, mais étant la ligne de travail utilisée dans le trafic objet de la procédure d'après les premiers éléments de l'enquête, permettrait de faire progresser l'enquête, était donc bien nécessaire et proportionnée dans une société démocratique au sens de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH), afin de démanteler un important trafic de cocaïne ; qu'il résulte de ce qui précède que l'interception des conversations téléphoniques de la ligne [...] a été menée de manière régulière, et qu'il n'y a pas lieu d'annuler la requête aux fins d'interception de communications sur cette ligne ni l'autorisation d'interception donnée par le juge des libertés et de la détention » ;

"1°) alors que toute ingérence dans la vie privée doit faire l'objet d'un contrôle judiciaire efficace de nature à garantir sa stricte nécessité ; que si les nécessités de l'enquête l'exigent, le juge des libertés et de la détention peut, sur la seule requête du procureur de la République, autoriser l'interception, l'enregistrement et la transcription de correspondances émises par la voie des communications électroniques ; qu'il en résulte que les « nécessités de l'enquête » ressortent exclusivement de la requête adressée par le procureur de la République ; que dès lors, en refusant d'annuler une autorisation d'interception de correspondances téléphoniques fondée sur une requête présentant le dossier de manière erronée, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés ;

"2°) alors qu'à tout le moins, les juges sont tenus de répondre aux moyens péremptoires des conclusions des parties; que dès lors, en ne répondant pas au moyen tiré de la contradiction manifeste de la motivation de la requête du procureur de la République, la chambre de l'instruction a violé les textes susvisés" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que, par rapport du 29 septembre 2015, adressé au procureur de la République à Paris, le capitaine Y..., officier de police judiciaire, a indiqué que son service avait été destinataire d'un renseignement selon lequel un homme, utilisant la ligne téléphonique numéro [...], revendait de la cocaïne, la surveillance de cette ligne, par voie de réquisitions faites par les enquêteurs, ayant établi une forte activité, et caractérisé des contacts avec des personnes identifiées comme faisant usage de stupéfiants ; que ce rapport ajoute que, selon un second renseignement, le trafic continuait, par l'utilisation d'une autre ligne téléphonique numéro [...], dont l'interception des communications permettrait de faire progresser l'enquête ;

Que le procureur de la République a présenté, le 30 septembre 2015, une requête au juge des libertés et de la détention, sollicitant, sur le fondement de l'article 706-95 du code de procédure pénale, l'interception des communications téléphoniques de la ligne [...], au motif que les investigations téléphoniques, faites par réquisitions, avaient confirmé une activité compatible avec un trafic de stupéfiants ;

Que, le même 30 septembre 2015, le juge des libertés et de la détention a ordonné l'interception demandée, relevant qu'il résultait des éléments qui lui avaient été communiqués, parmi lesquels le rapport de police précité, que la connaissance des communications tenues sur la ligne [...] permettrait d'identifier les auteurs du trafic et de déterminer le rôle de chacun d'eux ;

Que l'interception des conversations tenues sur cette ligne a permis l'interpellation des auteurs du trafic, parmi lesquels M. X..., qui a été mis en examen ;

Attendu que M. X..., ainsi que d'autres personnes mises en examen, ont sollicité l'annulation de la décision d'interception de la ligne [...] et des actes de procédure qui en résultent, au motif que la requête du procureur de la République, sollicitant l'interception des conversations tenues sur cette ligne, faisait état du résultat de réquisitions téléphoniques faites par les enquêteurs, sans préciser sur quelle ligne, ce qui pouvait faire croire au juge des libertés et de la détention, saisi de la requête en interception, que cette ligne avait fait l'objet de réquisitions de la part des enquêteurs, alors que leurs réquisitions visaient la ligne distincte, numéro [...] ; que, selon la requête en nullité, il s'agissait d'un stratagème, visant à tromper le juge des libertés et de la détention, en lui demandant d'ordonner l'interception des conversations tenues sur une ligne téléphonique en motivant cette demande par le résultat de réquisitions faites en réalité sur une ligne différente, sans le préciser ;

Attendu que, pour rejeter cette requête en annulation, la chambre de l'instruction relève que l'absence de précision, sur la demande d'interception, de la ligne sur laquelle des réquisitions avaient été faites, ne procède pas d'un stratagème ni d'une manoeuvre quelconque, cette requête étant motivée de manière conforme au déroulement de l'enquête ; qu'elle ajoute que le rapport de police, mentionnant le numéro de la ligne sur laquelle les réquisitions avaient été faites, et le numéro, distinct, de la ligne dont l'interception était souhaitée, a été communiqué par le procureur de la République au juge des libertés et de la détention, qui le vise dans sa décision d'interception ; qu'elle ajoute qu'aucune disposition légale n'impose qu'une requête en interception des communications téléphoniques tenues sur une ligne téléphonique soit précédée de réquisitions de transmission de factures détaillées ; qu'elle en déduit que les pièces de la procédure et les termes de l'autorisation donnée par le juge des libertés et de la détention montrent qu'il n'a pas été abusé ;

Attendu qu'en l'état de ces motifs dénués d'insuffisance, et dès lors que, saisi d'une requête du procureur de la République tendant à l'interception des conversations tenues sur une ligne téléphonique, le juge des libertés et de la détention peut se référer, pour prendre sa décision, non seulement au contenu de cette requête, mais encore à celui des pièces qui y sont jointes, la chambre de l'instruction, qui n'avait pas à répondre davantage sur la prétendue contradiction affectant la requête, son imprécision relative au numéro de la ligne visée par les réquisitions des enquêteurs ayant été réparée par la communication, au juge des libertés et de la détention, avec cette requête, du rapport des enquêteurs, où cette indication figurait, la chambre de l'instruction a justifié sa décision sans encourir le grief allégué ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le moyen unique de cassation dirigé contre l'arrêt du 20 septembre 2018, pris de la violation des articles 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, 138, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que la chambre de l'instruction a ordonné le renvoi de M. X... devant le tribunal correctionnel et son maintien sous contrôle judiciaire ;

"aux motifs que : « que c'est à juste titre que l'ordonnance en cause a renvoyé les appelants devant le tribunal correctionnel, en soulignant l'existence des éléments suivants :
- Concernant Mme Z... Alexandra : les objets trouvés à son domicile ne correspondant pas à son train de vie et à ses ressources les écoutes téléphoniques, les recherches bancaires, ses déclarations ;
- Concernant M. V... François : les écoutes téléphoniques, les surveillances, les déclarations de Mme A..., ses déclarations, la découverte de produits stupéfiants lors de la perquisition ;
- Concernant M. X... Sid Ahmed : les écoutes téléphoniques, les géolocalisations, ses déclarations où il reconnaît à minima ; l'exploitation de ses comptes, les surveillances les déclarations de M. B... ;
- Concernant M. C... D... : les surveillances, les géo localisations, les écoutes téléphoniques, l'absence de compte bancaire ou de déclaration d'impôt lui permettant d'assurer son train de vie, la sonorisation, la vidéo surveillance de la fourrière de Levallois-Perret, la montre Rolex découverte lors de la perquisition, ses déclarations ;
- Concernant M. AA... Moustapha E... BB... : les écoutes téléphoniques et ses achats de véhicule haut de gamme, son train de vie et celui de Mme F... Lynda ainsi que des compte de celle-ci qui ne peuvent s'expliquer par ses revenus légaux, les objets retrouvés lors de la perquisition, ses déclarations ;
- Concernant Mme F... : les écoutes téléphoniques, la différence entre le train de vie de Mme F... et le RSA qu'elle touche et le fait que son compagnon soit sans emploi fixe les voyages, les objets achetés, les opérations, ses déclarations ;
- Concernant AA... Moustafa G... : la vidéo-surveillance de la fourrière de Levallois, ses déclarations sur les balises, les écoutes permettant de conclure à la gérance de fait par M. Moustapha G... de la société LZ, les réquisitions bancaires et les rentrées d'argent inexplicables, ses déclarations ; que ces éléments constituent, à l'égard de chacun des appelants, des charges suffisantes d'avoir commis les faits pour lesquels ils ont été respectivement renvoyés devant le tribunal correctionnel ; que les autres dispositions de l'ordonnance en cause ayant dit : - n'y avoir lieu à suivre des chefs de proxénétisme aggravé contre quiconque, - n'y avoir lieu à suivre contre M. Joseph H... du chef d'association de malfaiteur du 25 mai au 24 juin 2016, - n'y avoir lieu à suivre contre M. Thierry I... des chefs de détention, acquisition d'arme de catégorie C, acquisition, détention, d'armes, éléments d'armes, munitions de catégorie B, - n'y avoir lieu à suivre contre M. V... , X..., C..., d'avoir commis les délits d'acquisition, détention, transport, offre ou cession de stupéfiant le 24 mai 2016 - requalifié les faits de recel de délit d'entrave concernant M. E... BB... AA... Moustafa en délit d'association de malfaiteurs - requalifié les faits de détention, acquisition, d'arme de catégorie C, acquisition, détention d'armes, éléments d'armes, munitions, de catégorie A et B, au regard des nouveaux textes de prévention et répression tels qu'issus de la loi du 3 juin 2016 sont justifiées par les éléments du dossier et ne font l'objet d'aucune critique de la part des personnes appelantes, dont il convient de rappeler qu'elles n'ont pas déposé de mémoire ; qu'il convient donc de confirmer l'ordonnance entreprise ; que les appelants ayant été placés sous contrôle judiciaire au cours de l'information, à l'exception de M. C... placé sous assignation à résidence avec surveillance électronique assorti d'obligations visées à l'article 138 du code de procédure pénale, il convient de statuer sur le maintien ou non de ces mesures en application de l'article 213 du code de procédure pénale ; (
)que sur le contrôle judiciaire de M. X... ; que M. X... été placé sous contrôle judiciaire par ordonnance en date du 16 janvier 2018 du juge des libertés et de la détention avec pour obligations de :
- Ne pas sortir sans autorisation préalable du territoire national métropolitain,
- Fixer sa résidence [...] chez Mme W... Farida,
- Se présenter deux fois par semaine à la gendarmerie de Louvres,
- Répondre aux convocations de l'AAPE (association d'aide pénale) du palais de Justice,
- Justifier de ses activités professionnelles,
- Remettre son passeport au greffe du tribunal de grande instance de Paris,
- S'abstenir de recevoir, de rencontrer ou d'entrer en relation de quelque façon que ce soit avec les personnes suivantes : M. H... Joseph, Mme A... Catherine, MM. J... Paul, C... Hakim, K... Abdou, L... Jawed, Mme Z..., MM. V... , M... Youssef, N... Rudy, C..., Farouk Moustàfa E... BB..., I..., Mmes O... Nadia, F..., P... Heidi, MM. Q... Mamady, AA... Moustafa G..., Beneddine Alexandre, R... Damien, S... Maxime, B... Hayat, T... Philippe, Mme CC... DD... ,
- Verser entre les mains du régisseur de recettes du tribunal, la somme de six mille euros en trois versements de deux mille euros chacun le 1er versement devant intervenir le 31 janvier 2018 au plus tard puis le deuxième versement le 28 février 2018 au plus tard et le troisième versement devant intervenir le 31 mai 2018 au plus tard, ce cautionnement garantissant la représentation à tous les actes de la procédure (à concurrence de mille euros pour la représentation à tous les actes de la procédure ainsi que l'exécution des autres obligations prévues dans l'ordonnance, à concurrence de cinq mille euros pour le paiement dans l'ordre suivant a) de la réparation des dommages causés par l'infraction et des restitutions, b) des amendes ; que ces obligations sont justifiées par la nécessité de garantir le maintien de M. X... à la disposition de la justice et de prévenir le renouvellement des infractions pour lesquelles il est renvoyé devant le tribunal correctionnel, soit : avoir acquis , détenu, offert ou cédé transporté de manière illicite des stupéfiants (cocaïne, MDMA, cannabis) et ce en état de récidive légale, avoir participé à un groupement ou une entente établie en vue de la commission de délits punis de dix ans d'emprisonnement, infractions d'acquisition, détention, transport, offre ou cession de stupéfiant, et ce en état de récidive légale ; qu'en effet, il résulte des éléments recueillis au cours de l'information rappelés plus haut que M. X... était impliqué dans les faits de trafic de stupéfiants particulièrement structuré faisant l'objet de l'information et en lien avec les autres personnes mises en examen, de telle sorte qu'il convient de maintenir, outre l'obligation de ne pas sortir sans autorisation préalable du territoire national métropolitain, de fixer sa résidence chez Mme W... à Louvres, de se présenter deux fois par semaine à la gendarmerie de Louvres, de répondre aux convocations de TAAPE (association d'aide pénale) du palais de Justice, de justifier de ses activités professionnelles, et de laisser son passeport au greffe du tribunal de grande instance de Paris - obligations destinées à garantir sa représentation en justice - le cautionnement mis à sa charge, ainsi que l'interdiction de recevoir, de rencontrer ou d'entrer en relation de quelque façon avec les personnes énumérées par l'ordonnance en date du 16 janvier 2018 du juge des libertés et de la détention, celles-ci étant également impliquées dans les faits de trafic de stupéfiants ayant fait l'objet de l'information de telle sorte que leur fréquentation entraînerait un risque sérieux de renouvellement de l'infraction, d'autant plus qu'il est renvoyé devant le tribunal correctionnel en état de récidive légale » ;

"1°) alors que l'ordonnance de renvoi doit contenir des motifs exempts d'insuffisance établissant qu'il existe des charges suffisantes contre le mis en examen ; qu'en l'espèce, en se bornant à relever contre M. X... « l'existence des élément suivants (
) les écoutes téléphoniques, les géolocalisations, ses déclarations où il reconnaît à minima ; l'exploitation de ses comptes, les surveillances, les déclarations de M. B... », la chambre de l'instruction a dépourvu sa décision de base légale ;

"2°) alors que le contrôle judiciaire astreint la personne concernée à se soumettre à une ou plusieurs obligations limitativement énumérées par l'article 138 du code de procédure pénale ; qu'en l'espèce, en soumettant M. X... à l'obligation de fixer sa résidence au [...] ) chez Mme W... , la chambre de l'instruction a méconnu le principe de légalité ;

"3°) alors que les juges sont tenus de motiver spécialement l'obligation de se soumettre à un cautionnement en fonction des ressources et des charges de la personne concernée ; qu'en se bornant à énoncer qu' « il résulte des éléments recueillis au cours de l'information rappelés plus haut que M. X... était impliqué dans les faits de trafic de stupéfiants particulièrement structuré faisant l'objet de l'information et en lien avec les autres personnes mises en examen, de telle sorte qu'il convient de maintenir, (
) le cautionnement mis à sa charge », la chambre de l'instruction a dépourvu sa décision de base légale" ;

Sur le moyen, pris en sa première branche :

Attendu que, sous couvert d'insuffisance de motifs, le grief revient à critiquer les énonciations de l'arrêt relatives aux charges que la chambre de l'instruction a retenues contre les prévenus et à la qualification qu'elle a donnée aux faits poursuivis ; que, ces énonciations ne présentant aucune disposition que le tribunal saisi de la prévention n'aurait pas le pouvoir de modifier, ce grief est irrecevable en application de l'article 574 du code de procédure pénale ;

Sur le moyen, pris en sa deuxième branche :

Attendu que l'arrêt attaqué a ordonné le maintien de M. X... sous contrôle judiciaire avec, notamment, pour obligation de fixer sa résidence à Louvres, chez Mme W... ; que le requérant ne saurait soutenir qu'il s'agit d'une mesure non prévue par la loi, dès lors que l'article 138, alinéa 2, 2° du code de procédure pénale énonce, parmi les obligations pouvant être imposées, dans le cadre du contrôle judiciaire, à la personne poursuivie, l'interdiction de s'absenter de la résidence fixée par la juridiction d'instruction ;

Qu'ainsi, le grief ne peut être accueilli ;

Mais sur le moyen, pris en sa troisième branche :

Vu les articles 138, alinéa 2, 11°, et 593 du code de procédure pénale ;

Attendu que, selon le premier de ces textes, le montant et les délais de versement du cautionnement, dont peut être assorti le contrôle judiciaire de la personne mise en examen, doivent être fixés compte tenu, notamment, des ressources et des charges de celle-ci ;

Attendu que, selon le second, tout arrêt de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;

Attendu que l'arrêt attaqué du 20 septembre 2018 énonce que M. X... a été placé sous contrôle judiciaire, par ordonnance du juge des libertés et de la détention, en date du 16 janvier 2018, avec, notamment, pour obligation, de verser un cautionnement de 6 000 euros en trois versements de 2 000 euros chacun, garantissant, à hauteur de 1 000 euros, sa représentation aux actes de la procédure, et, à hauteur d'un même montant, le paiement de la réparation des dommages causés par l'infraction, des restitutions et des amendes ; que l'arrêt ajoute qu'il convient de maintenir cette obligation jusqu'à sa comparution devant la juridiction de jugement ;

Mais attendu qu'en prononçant ainsi, sans s'expliquer sur les ressources et les charges de M. X..., la chambre de l'instruction n'a pas donné de base légale à sa décision ;

D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;

Que, n'impliquant pas qu'il soit à nouveau statué sur le fond, la cassation aura lieu sans renvoi, ainsi que le permet l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire ;

Par ces motifs :

Sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 11 mai 2017 :

Le REJETTE ;

Sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 20 septembre 2018 :

CASSE et ANNULE l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, en date du 20 septembre 2018, mais en ses seules dispositions ayant maintenu les effets de l'obligation du versement d'un cautionnement, par M. X..., dans le cadre des obligations du contrôle judiciaire, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le seize janvier deux mille dix-neuf ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 17-83881;18-86127
Date de la décision : 16/01/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 20 septembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 16 jan. 2019, pourvoi n°17-83881;18-86127


Composition du Tribunal
Président : M. Soulard (président)
Avocat(s) : SCP Spinosi et Sureau

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:17.83881
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