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10/01/2019 | FRANCE | N°17-28805

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 10 janvier 2019, 17-28805


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles 117 et 121 du code de procédure civile ;

Attendu selon ces textes, que l'irrégularité de fond que constitue le défaut de capacité d'une personne assurant la représentation d'une partie en justice peut être couverte si la cause de cette nullité a disparu au moment où le juge statue ;

Attendu selon l'arrêt attaqué que la société Record Bank (la banque) ayant fait délivrer un commandement de payer valant saisie immobilière à l'encontre de M.

et Mme X..., a fait assigner ces derniers à l'audience d'orientation d'un juge de l'exéc...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles 117 et 121 du code de procédure civile ;

Attendu selon ces textes, que l'irrégularité de fond que constitue le défaut de capacité d'une personne assurant la représentation d'une partie en justice peut être couverte si la cause de cette nullité a disparu au moment où le juge statue ;

Attendu selon l'arrêt attaqué que la société Record Bank (la banque) ayant fait délivrer un commandement de payer valant saisie immobilière à l'encontre de M. et Mme X..., a fait assigner ces derniers à l'audience d'orientation d'un juge de l'exécution ;

Attendu que pour prononcer la nullité du commandement de payer valant saisie immobilière et ordonner sa radiation, l'arrêt, après avoir relevé que ce commandement portait constitution d'un avocat honoraire dépourvu de la capacité de représenter une partie en justice, retient que cette irrégularité constitue une nullité de fond qui affecte la validité et partant, l'existence même de l'acte et ne saurait faire l'objet d'une régularisation ;

Qu'en statuant ainsi alors que l'irrégularité de fond avait été couverte, avant que le juge de l'exécution ne statue, par la délivrance à M. et Mme X... d'une assignation à comparaître à l'audience d'orientation mentionnant la constitution d'un avocat ayant le pouvoir de représenter la banque dans la procédure de saisie immobilière, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 juillet 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;

Condamne M. et Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. et Mme X... ; les condamne à payer à la société Record Bank la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix janvier deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Record Bank

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR prononcé la nullité du commandement de payer valant saisie du 4 janvier 2016 et de tout acte subséquent, d'AVOIR ordonné la radiation du commandement de saisie délivré le 4 janvier 2016 et publié le 25 février 2016 au service de publicité foncière de Versailles 2 volume 2016 S N°2, et d'AVOIR condamné la société Record Bank à payer à M. Jean X... et à Mme Fatima Y... épouse X... la somme globale de 2.500 euros au titre des frais irrépétibles ;

AUX MOTIFS QU' « en application de l'article R. 321-3, 1° du Code des procédures civiles d'exécution "outre les mentions prescrites pour les actes d'huissier, le commandement de payer valant saisie comporte : 1° la constitution d'avocat du créancier poursuivant, laquelle emporte élection de domicile".
Le commandement de payer valant saisie immobilière de l'immeuble appartenant à M. et Mme X..., délivré le 4 janvier 2016, est versé aux débats.
Il y est indiqué que le créancier élit domicile auprès de "Maître E... B..., avocat au barreau de Versailles, demeurant [...] lequel est constitué sur le présent commandement et ses suites".
Il résulte de la pièce 2 versée par M. et Mme X... que depuis le 15 juillet 2015, M. E... B... est avocat honoraire de sorte que depuis cette date, il n'est plus avocat en exercice.
En effet, l'honorariat ne confère pas à celui qui l'obtient "la possibilité d'exercer des actes de la profession hormis la consultation ou la rédaction d'actes, sur autorisation du bâtonnier" (Conseil National des Barreaux, règlement intérieur de la profession d'avocat).
Il en découle que la constitution d'avocat ne pouvait être faite par M. E... B... qui n'en avait plus la capacité, et non le pouvoir, depuis le 15 juillet 2015.
Aux termes de l'article 117 du Code de procédure civile "constituent des irrégularités de fond affectant la validité de l'acte :
- le défaut de capacité d'ester en justice ;
- le défaut de pouvoir d'une partie ou d'une personne figurant au procès comme représentant soit d'une personne morale, soit d'une personne atteinte d'une incapacité d'exercice ;
- le défaut de capacité ou de pouvoir d'une personne assurant la représentation d'une partie en justice".
Au demeurant, s'il est patent que l'irrégularité de fond tirée du défaut de pouvoir est couverte quand la cause de ce défaut a disparu au moment où le juge statue, il ne peut en être ainsi d'un défaut de capacité puisque, par essence, le commandement est délivré par une personne qui ne peut le faire non parce qu'elle n'en pas le pouvoir -irrégularité susceptible de régularisation- mais parce qu'elle est dénuée de toute qualité pour faire délivrer un acte initiant la mesure d'exécution forcée diligentée.
Enfin, il ne peut être ici utilement soutenu que l'erreur ne porterait que sur le nom de l'avocat -soit M. E... B... aux lieu et place de Mme D... B...-, l'erreur en question intervenant tant sur la personne ayant délivré le commandement -un homme et non une femme- que sur la structure juridique à laquelle cette personne appartient, M. E... B... n'apparaissant pas, à la lecture du commandement à fin de saisie comme membre d'une structure juridique spécifique alors que Mme D... B... fait partie de la société civile professionnelle d'avocats B... etamp; ASSOCIES.
La procédure de saisie immobilière est une voie d'exécution particulièrement lourde en conséquence en ce que le patrimoine des débiteurs poursuivis est vendu aux enchères ce qui induit le formalisme renforcé, protecteur des droits du débiteur saisi, propre à cette procédure.
Il s'en suit que l'incapacité d'immobiliser l'immeuble de M. B... par la délivrance de l'acte initiant la procédure de saisie immobilière par une personne dépourvue de capacité à agir conduit au prononcé de la nullité du commandement délivré dans de telles circonstances, l'irrégularité retenue constituant une nullité de fond qui affecte la validité et partant, l'existence même de l'acte et ne saurait dès lors faire l'objet d'une régularisation.
Le commandement de saisie est nul de sorte que la procédure de saisie immobilière est réduite à néant » ;

ALORS QUE constitue une irrégularité de fond affectant la validité de l'acte, le défaut de capacité ou de pouvoir d'une personne assurant la représentation d'une partie en justice ; que dans les cas où elle peut être couverte, la nullité ne sera pas prononcée si sa cause a disparu avant que le juge statue ; que la nullité de fond dont est affecté le commandement de payer valant saisie immobilière portant constitution d'un avocat honoraire, dépourvu de la capacité de représentation en justice, peut être régularisée par la constitution ultérieure, notamment dans l'assignation à comparaître à l'audience d'orientation, d'un avocat inscrit au barreau du lieu de la vente ; qu'en jugeant que la constitution de Mme D... B..., inscrite au barreau du lieu de la vente, aux lieu et place d'un avocat honoraire dépourvu de capacité de représentation, n'avait pas permis de régulariser la procédure, aux motifs que la procédure de saisie immobilière est une voie d'exécution « lourde en conséquences » induisant un « formalisme renforcé », toutes considérations indifférentes au regard de la faculté de régularisation de l'acte, la Cour d'appel a violé l'article 117 du Code de procédure civile, ensemble l'article 121 du même Code.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 17-28805
Date de la décision : 10/01/2019
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 06 juillet 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 10 jan. 2019, pourvoi n°17-28805, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : Mme Brouard-Gallet (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Ohl et Vexliard

Origine de la décision
Date de l'import : 30/01/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:17.28805
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