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08/01/2019 | FRANCE | N°16-82684

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 08 janvier 2019, 16-82684


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Charles-Henri X..., partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de VERSAILLES, en date du 9 février 2016, qui, dans l'information suivie, sur sa plainte, contre Mme Z... Y... du chef de dénonciation calomnieuse, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 27 novembre 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article

567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme A..., conseiller r...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Charles-Henri X..., partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de VERSAILLES, en date du 9 février 2016, qui, dans l'information suivie, sur sa plainte, contre Mme Z... Y... du chef de dénonciation calomnieuse, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 27 novembre 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme A..., conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : M. Bétron ;

Sur le rapport de Mme le conseiller A..., les observations de la société civile professionnelle SEVAUX et MATHONNET, la société civile professionnelle NICOLAŸ, DE LANOUVELLE et HANNOTIN, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général B... ;

Vu les mémoires, personnel, ampliatif et en défense, produits ;

Sur les premier, deuxième, troisième, quatrième, cinquième, sixième, huitième, neuvième et dixième moyens de cassation proposés par le mémoire personnel ;

Vu l'article 567-1-1 du code de procédure pénale ;

Attendu que les moyens ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Sur le septième moyen de cassation du mémoire personnel, pris de la violation des articles 226-10 du code pénal et 593 du code de procédure pénale ;

Sur le moyen unique de cassation, proposé par la SCP Sevaux-Mathonnet, pris de la violation des articles 111-4, 121-3, 226-10 et 434-26 du code pénal, 41-1 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance de non-lieu ;

"aux motifs que la procédure pour viol était classée sans suite le 15 mai 2012 ; entretemps, une procédure pour dénonciation mensongère de crime était diligentée à l'encontre de Mme Y... ; le parquet lui notifiait après déferrement un rappel à la loi, le 2 novembre 2011 ; l'article 226-10 du code pénal réprime par une peine de cinq ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende la dénonciation effectuée par tout moyen et dirigée contre une personne déterminée d'un fait qui est de nature à entraîner des sanctions judiciaires, administratives ou disciplinaires et que l'on sait totalement ou partiellement inexact, lorsqu'elle est adressée soit à un officier de justice ou de police administrative ou judiciaire, soit à une autorité ayant le pouvoir d'y donner suite ou de saisir l'autorité compétente, soit aux supérieurs hiérarchiques ou à l'employeur de la personne dénoncée ; que l'infraction, pour être constituée, suppose ainsi la désignation par le dénonciateur d'une personne déterminée ; que Mme Y... n'a, à aucun moment désigné M. X... comme l'auteur du viol qu'elle disait avoir subi ; que l'identification de M. X... est le produit d'une analyse des prélèvements biologiques réalisés à l'initiative des services de police sur la personne de Mme Y... et non d'une initiative spontanée de cette jeune femme ; que de la sorte l'infraction de dénonciation calomnieuse n'est pas constituée ; que l'ordonnance de non-lieu en ce qu'elle rappelle les faits tels qu'ils ont été établis dans la procédure et particulièrement en rapportant les propos de M. X... quant à l'existence d'un accord entre lui et Mme Y... sur la réalisation d'un rapport sexuel en contrepartie d'une somme d'argent ne constitue qu'un rappel objectif d'une situation donnée ;

"et aux motifs adoptés du premier juge qu'au terme de l'instruction, il apparaît que les faits commis par Mme Y... constituaient, dans tous ses éléments, le délit de dénonciation d'un crime imaginaire pour lequel le ministère public a procédé à son égard par la voie d'une alternative aux poursuites ; que le délit de dénonciation calomnieuse ainsi poursuivi, suppose quant à lui, que cette dénonciation d'un fait inexact, soit spontanée et dirigée contre une personne déterminée ; qu'il faut encore que le dénonciateur soit de mauvaise foi, autrement dit qu'il ait eu l'intention de nuire ; que dans le cas d'espèce, si le caractère mensonger de la dénonciation est indéniable, en l'absence de désignation, sous quelque forme que ce soit d'une personne quelconque, cette même dénonciation ne comporte pas de caractère calomnieux ; qu'il convient de relever à cet égard que Mme Y... n'a jamais donné le moindre élément permettant de favoriser l'identification de M. X... ; que cette identification est intervenue malgré elle, grâce aux résultats d'examens scientifiques ; que l'élément intentionnel du délit n'est dès lors pas caractérisé ; que si M. X... a été identifié par l'analyse de traces biologiques comme l'auteur d'un rapport sexuel avec cette jeune femme, le résultat de cette analyse ne déterminait en rien son éventuelle imputabilité dans des faits pénalement répréhensibles ; que l'élément matériel du délit n'apparaît pas plus caractérisé ; que si le préjudice pour M. X... consécutif à sa mise en cause à tort est évident, le fait générateur ne semble pas constituer une infraction pénale pour laquelle Mme Y... pourrait être poursuivie ; que si celle-ci a menti en dénonçant une relation sexuelle pour laquelle elle n'était pas consentante, elle n'a cependant pas déposé plainte contre M. X... pour viol ;

"1°) alors que l'article 226-10 du code pénal exige seulement que la personne dénoncée soit identifiable ; qu'en exigeant que le dénonciateur désigne l'auteur des faits, la chambre de l'instruction a ajouté à la loi une condition qu'elle ne prévoit pas et a méconnu les articles 111-4 et 226-10 du code pénal ;

"2°) alors en tout état de cause que le délit de dénonciation calomnieuse est constitué dès lors que la dénonciation du fait qui est de nature à entraîner des sanctions judiciaires, administratives ou disciplinaires, est réalisée dans des conditions de nature à permettre l'identification de l'auteur du fait dénoncé par l'autorité ayant le pouvoir de donner suite à cette dénonciation ou de saisir l'autorité compétente ; qu'ayant constaté que la dénonciatrice avait déposé plainte auprès des services de police et que l'examen biologique réalisé sur sa personne et sur ses vêtements avait permis de trouver des traces du rapport sexuel qu'elle venait d'avoir et sur lequel elle appuyait son récit de viol, la chambre de l'instruction, en retenant que le délit ne pouvait être constitué, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a méconnu les textes précités ;

"3°) alors par ailleurs qu'en s'abstenant de rechercher si, comme le faisait valoir la partie civile (mémoire enregistré le 18 janvier 2016, p. 9), l'auteur des faits de viol dénoncés n'était pas identifiable au regard des seules dépositions de la dénonciatrice, laquelle faisait était d'un rapport sexuel non protégé, dans un lieu dont l'accès était couvert pas des caméras de vidéo surveillance, la chambre de l'instruction n'a pas légalement justifié sa décision ;

"4°) alors en outre que la dénonciation présente un caractère punissable dès lors que les faits commis par une personne déterminée que le dénonciateur sait totalement ou partiellement inexacts ont été spontanément portés à la connaissance des services de police judiciaire peu important que cette personne déterminée ait ensuite été identifiée au moyen d'investigations réalisés à la seule initiative des services de police ; qu'en se fondant sur la circonstance que l'identification de l'auteur des faits n'avait eu lieu qu'à l'initiative des services de police, au terme d'un examen biologique diligenté à la suite des déclarations spontanées de la plaignante, la chambre de l'instruction a méconnu les textes précités ;

"5°) alors encore que la mauvaise foi, élément intentionnel du délit de dénonciation calomnieuse, consiste dans la connaissance de la fausseté du fait dénoncé ou imputé à autrui et ne requiert aucune intention de nuire ; qu'en retenant, par motifs adoptés, que le délit suppose que l'auteur ait eu l'intention de nuire, la cour d'appel a méconnu les textes précités ;

"6°) alors enfin qu'ayant constaté, par motifs adoptés, que les faits caractérisaient un délit de dénonciation mensongère d'un crime ou d'un délit, la chambre de l'instruction, en prononçant un non-lieu au motif inopérant que ces faits avaient donné lieu à un rappel à la loi, mesure alternative aux poursuites dénuée du moindre effet extinctif à l'égard de l'action publique, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a méconnu l'article 434-26 du code pénal" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué, de l'ordonnance qu'il confirme et des pièces de la procédure qu'après s'être rencontrés sur un site internet, M. X... et Mme Y... sont convenus de se retrouver dans un parc à Paris pour y avoir une relation sexuelle tarifée ; qu'à l'issue de la rencontre, M. X... a remis à sa partenaire une enveloppe ne contenant que des coupures de journaux ; que Mme Y... s'est rendue le jour même auprès d'un service de police pour dénoncer un viol par pénétration, anale et vaginale, non protégée, dont elle aurait fait l'objet de la part d'un inconnu, en situant les faits, en dernier lieu, dans un bois près de son domicile [...] (Val- d'Oise) ; que les prélèvements biologiques réalisés sur sa personne et ses vêtements ont permis l'extraction d'un ADN qui, après consultation du fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG), s'est avéré celui de M. X... ; que, sur présentation d'une planche photographique exposant les portraits de plusieurs individus, dont ce dernier, Mme Y... a dit toutefois ne pas reconnaître son agresseur ; que, confrontée aux déclarations de M. X... sur les circonstances de leur rencontre, elle a finalement admis avoir faussement dénoncé un viol ; que la procédure de ce chef ayant été classée sans suite, le ministère public lui a notifié un rappel à la loi dans le cadre d'une procédure pour dénonciation mensongère d'un crime ; que M. X... a lui-même porté plainte et s'est constitué partie civile du chef de dénonciation calomnieuse contre Mme Y... ; qu'à l'issue de l'information ouverte sur les faits, le magistrat instructeur a dit n'y avoir lieu à suivre de ce chef ; que M. X... a relevé appel de la décision ;

Attendu que, pour confirmer l'ordonnance de non-lieu entreprise, en ce qu'elle a retenu que l'information n'avait pas permis de caractériser l'élément matériel du délit de dénonciation calomnieuse tenant à l'imputation des faits dénoncés à une personne déterminée, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, exemptes d'insuffisance comme de contradiction, d'où il résulte que les juges, loin de s'en tenir au fait que Mme Y... n'a pas nommément désigné M. X... comme l'auteur des faits de viol faussement dénoncés, ont dûment recherché si celui-ci était néanmoins identifiable en l'état des informations fournies par la plaignante, et qu'ils ont souverainement constaté à cet égard que cette identification n'avait pas procédé d'une volonté de cette dernière mais d'une circonstance aléatoire, tenant à la conservation au FNAEG de l'empreinte génétique du demandeur, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;

D'où il suit que tant le septième moyen du mémoire personnel que le moyen unique du mémoire ampliatif, qui est inopérant en ses deux dernières branches en ce qu'il critique des motifs de l'ordonnance confirmée, que l'arrêt attaqué n'adopte pas expressément, et, de surcroît, en sa sixième branche, est irrecevable faute d'intérêt, pour M. X..., à se prévaloir d'une violation des dispositions de l'article 434-26 du code pénal incriminant la dénonciation mensongère d'un crime ou d'un délit, doivent être écartés ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le huit janvier deux mille dix-neuf ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 16-82684
Date de la décision : 08/01/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, 09 février 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 08 jan. 2019, pourvoi n°16-82684


Composition du Tribunal
Président : M. Soulard (président)
Avocat(s) : SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin, SCP Sevaux et Mathonnet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:16.82684
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