LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nouméa, 16 mars 2017), rendu en référé, que M. et Mme X..., propriétaires dans un lotissement, se plaignant de ce que leur voisin, M. Y..., avait tendu une toile au-dessus de sa piscine et s'était abstenu de construire un mur de soutènement en limite de propriété, l'ont assigné pour faire cesser ces désordres ;
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu que M. et Mme X... font grief à l'arrêt de dire n'y avoir lieu à référé pour ordonner la suppression de la toile tendue au-dessus de la piscine ;
Mais attendu qu'ayant retenu, sans dénaturation, que le point de savoir si la toile tendue au-dessus de la piscine constituait une toiture au sens du règlement de lotissement excédait les pouvoirs de la juridiction des référés, la cour d'appel a pu en déduire qu'aucun trouble manifestement illicite n'était établi ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen, ci-après annexé :
Attendu que M. et Mme X... font grief à l'arrêt de dire n'y avoir lieu à référé pour condamner M. Y... à réaliser un mur de soutènement ;
Mais attendu qu'ayant relevé que l'étude géotechnique faisant état d'un mur de soutènement concernait un autre terrain que celui de M. Y..., que les talus dont la hauteur était inférieure à trois mètres étaient autorisés par le règlement de lotissement, que la hauteur du talus de M. Y... était inférieure à trois mètres, ainsi que cela résultait d'un constat dressé le 25 juillet 2016, et que l'étude produite par M. et Mme X... concernait un autre talus, la cour d'appel, qui a procédé à la recherche prétendument omise et a pu en déduire qu'il n'y avait pas lieu à référé sur la demande de M. et Mme X... tendant à la construction d'un mur de soutènement à l'endroit signalé par eux, a légalement justifié sa décision de ce chef ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. et Mme X... et les condamne à payer à M. Y... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt décembre deux mille dix-huit.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me A..., avocat aux Conseils, pour M. et Mme X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de Monsieur et Madame X... tendant à voir condamner Monsieur B... Y... à supprimer sa toiture en membranes tendues, y compris les accessoires,
AUX MOTIFS QUE « B... Y... a tendu une toile blanche au-dessus de sa piscine pour ne pas être vu du voisinage ; que les appelants invoquent une violation du règlement de lotissement et plus précisément des articles 12 relatifs à la couverture des piscines et à l'article 19.6 relatifs aux toitures, l'intimé répliquant que la toile ne constitue pas une toiture au sens du règlement de lotissement; que la cour estime que la contestation opposée par l'intimé sur la définition du mot "toiture" au sens du règlement de lotissement est sérieuse et ne permet pas de statuer en référé alors au surplus qu'aucun trouble manifestement illicite ni dommage imminent n'apparaissent établis en l'espèce au préjudice des époux X... ; Que l'ordonnance sera confirmée de ce chef » (arrêt, p. 4),
1°) ALORS QUE le juge ne saurait, sous couvert d'interprétation, conférer à un écrit clair et précis, un sens et une portée qu'il n'a manifestement pas ;
Qu'il résulte des termes clairs et précis de l'article 12 L du règlement du lotissement de [...] que « Les piscines et "spa pool" sont autorisés à l'extérieur comme à l'intérieur des villas résidentielles individuelles. La couverture éventuelle en extérieur, devra respecter les clauses et conditions relatives aux toitures définies dans le présent Règlement » ; qu'il s'en évince que ce règlement considère les couvertures de piscines extérieures comme des toitures et les soumet aux mêmes conditions ;
Qu'en décidant cependant qu'il existerait une contestation sérieuse sur le point de savoir si la couverture de la piscine de Monsieur Y... constituerait une toiture au sens du règlement du lotissement, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de l'article 12 dudit règlement et a violé l'interdiction faite au juge de dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;
2°) ALORS QUE constitue un trouble manifestement illicite, toute construction édifiée en violation du règlement d'un lotissement ;
Que l'article 19.6 du règlement du lotissement de [...] prévoit expressément que « les toitures de toutes constructions, de quelque nature qu'elles soient, seront obligatoirement réalisées avec 4 pans au minimum, [
] seront exclusivement de couleur « rouge brique » et réalisées avec les matériaux suivants : tôles ondulées pré-peintes de couleur « rouge brique », tuiles d'argile de couleur « rouge brique », fausses tuiles de couleur « rouge brique ». [
] Tous les autres matériaux de conception et de couleur différentes sont strictement prohibés » ; que la cour d'appel a elle-même constaté que « B... Y... a tendu une toile blanche au-dessus de sa piscine pour ne pas être vu du voisinage » ;
Qu'en décidant cependant qu'aucun trouble manifestement illicite ne serait établi, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé, par refus d'application, l'article 809 alinéa 1er du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit n'y avoir lieu à référé sur la demande des époux X... tendant à voir condamner Monsieur B... Y... à faire réaliser un mur de soutènement sur la limite Ouest de son fonds dans le respect des prescriptions du lotissement [...],
AUX MOTIFS QUE « le juge des référés a rejeté la demande tendant à contraindre l'intimé à réaliser un mur de soutènement sur la limite ouest de son fonds, après avoir constaté que le rapport C... invoqué en demande n'exigeait pas la construction d'un tel ouvrage ; que les appelants affirment le contraire en se référant aux articles 10 et 16.5 du règlement de lotissement, à l'étude géotechnique à laquelle il a été procédé lors de la demande de permis de construire et au permis de construire lui-même; Que l'intimée réplique que l'étude géotechnique qui parle d'un mur de soutènement concerne le terrain D... et non le sien, que les talus dont la hauteur est inférieure à trois mètres sont autorisés par le règlement de lotissement (article 10, b), que la hauteur de son talus est bien inférieure à trois mètres ainsi que cela résulte du constat dressé le 25 juillet 2016 (page 8), que l'étude A2EP (pièce 4 X...) concerne un autre talus sur le terrain, -situé sous la cuisine, que la solidité de la construction X... n'est en aucun cas compromise, qu'au surplus les époux X... ont construit en limite de propriété un mur de plus de cinq mètres de hauteur sans redan, et ce en violation du règlement de lotissement ; que ces explications prouvent à l'évidence qu'il existe en l'espèce une contestation sérieuse sur l'obligation pour l'intimé de construire un mur de soutènement à l'endroit signalé par les époux X... ; qu'en outre, ces derniers ne démontrent pas l'existence d'un péril imminent ; Que l'ordonnance sera encore confirmée de ce chef » (arrêt, p. 8 et 9),
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « Dès lors qu'il existe une procédure au fond se rapportant à un litige entre Michèle X... et ses voisins demandeurs à la procédure sollicitant la mise en conformité en démolissant un mur de soutènement et les constructions en limite de propriété, en raison de la connexité, les mesures se heurtent à une difficulté sérieuse au fond que seul le juge du fond est en mesure de trancher. En conséquence il n'y a pas lieu à référé » (jugement, p. 2 à 5), 1°)
ALORS QUE constitue un trouble manifestement illicite, toute construction édifiée en violation du règlement d'un lotissement ;
Que Monsieur et Madame X... soulignaient la non-conformité des travaux de terrassement effectués Monsieur Y... sur sa parcelle en l'absence de « mur en béton armé en limite ouest de lot », pourtant prescrit pas son permis de construire du 20 juin 2005 et l'étude technique y annexée afin de stabiliser les talus (cf. conclusions d'appel des exposants, p. 9) ; qu'il s'en évinçait qu'il avait violé l'article 16.5 du règlement du lotissement de [...] qui imposait aux colotis de « respecter scrupuleusement les directives et prescriptions recommandées par le laboratoire lors de l'exécution des terrassements » (ibidem) ;
Qu'en décidant cependant de dire n'y avoir lieu à référé au seul motif qu'il n'y aurait pas de péril imminent (arrêt, p.5), sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si la non-conformité des travaux de terrassement au règlement du lotissement ne constituait pas un trouble manifestement illicite, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 809, alinéa 1er, du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie ;
2°) ALORS QUE le président peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ;
Que Monsieur et Madame X... faisaient valoir l'existence d'un trouble manifestement illicite résultant de la non-conformité des travaux de terrassement sur la parcelle de Monsieur Y... par rapport à l'article 16.5 du règlement du lotissement de [...] ; que la Cour d'appel a refusé de statuer en référé estimant qu'il y aurait une « contestation sérieuse » sur l'obligation de construire un mur à l'endroit signalé par les époux X... (arrêt, p. 5) ;
Qu'en statuant de la sorte lorsque l'existence d'une contestation sérieuse ne fait pas obstacle aux pouvoirs du juge des référés de prescrire les mesures propres à faire cesser un trouble manifestement illicite, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article 809, alinéa 1er, du code de procédure civile de Nouvelle Calédonie.