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19/12/2018 | FRANCE | N°17-24157

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 décembre 2018, 17-24157


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 28 juin 2017), qu'un accord collectif du 23 avril 2001, relatif à l'organisation et à la réduction du temps de travail, a prévu au sein des Assedic du Sud-Ouest, une pause méridienne rémunérée en contrepartie de la journée continue ; que postérieurement à la création de Pôle emploi, une partie des anciens agents de ces Assedic ont saisi la juridiction prud'homale en indemnisation du préjudice causé par la suppression de cet avantage ;



Attendu que les salariés font grief à l'arrêt de dire que la convention col...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 28 juin 2017), qu'un accord collectif du 23 avril 2001, relatif à l'organisation et à la réduction du temps de travail, a prévu au sein des Assedic du Sud-Ouest, une pause méridienne rémunérée en contrepartie de la journée continue ; que postérieurement à la création de Pôle emploi, une partie des anciens agents de ces Assedic ont saisi la juridiction prud'homale en indemnisation du préjudice causé par la suppression de cet avantage ;

Attendu que les salariés font grief à l'arrêt de dire que la convention collective Pôle emploi du 21 novembre 2009 revêt la nature d'un accord de substitution régulièrement intervenu dans les délais et conditions de l'article L. 2261-14 du code du travail, que la rémunération de la pause méridienne inhérente à la journée continue constitue un avantage collectif et en conséquence de les débouter de leurs demandes, alors, selon le moyen :

1°/ que les salariés soutenaient que, pour que la convention ou l'accord mis en cause soit remplacé par un texte de substitution, il faut que la négociation pour l'adaptation aux dispositions conventionnelles nouvellement applicables ou pour l'élaboration de nouvelles stipulations se soit engagée dans les trois mois suivant la mise en cause, que ce délai est impératif, sans pouvoir être modifié conventionnellement, et qu'en l'espèce, aucune négociation n'avait été engagée concernant le temps de travail rémunéré dans les trois mois de la mise en cause, soit avant le 18 mars 2009 ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a privé sa décision de motifs et violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°/ que les salariés soutenaient que seul peut constituer un texte de substitution une convention ou un accord conclu au même niveau de négociation que la convention ou l'accord mis en cause, et, par suite, que ni la convention collective Pôle emploi du 21 novembre 2009 ni l'accord national du 30 septembre 2010 ne pouvaient remplacer l'accord conclu au sein des Assedic du Sud-Ouest le 23 avril 2001 ; qu'en omettant de répondre aux conclusions des intimés sur ce point, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

3°/ que seul peut se substituer à une convention ou un accord mis en cause une convention ou un accord ayant le même objet ; qu'il est constant que l'organisation et l'aménagement du temps de travail faisait partie des thèmes non traités par la convention collective Pôle emploi du 21 novembre 2009, les négociations en vue de la conclusion d'accords sur ces thèmes étant remis à plus tard ; qu'en retenant cependant que cette convention collective couvre le même objet que l'accord de 2001 mis en cause même si certains points, tels la pause méridienne, sont renvoyés à une négociation ultérieure, et qu'elle constitue l'accord de substitution prévu à l'article L. 2261-14 du code du travail, la cour d'appel a violé ce texte ;

4°/ qu' un élément de rémunération procuré par un accord collectif constitue, à l'expiration du délai de survie, un avantage individuel acquis qui est incorporé au contrat de travail des salariés à la date de la mise en cause de l'accord si elle n'a pas été suivie d'un accord de substitution dans ce délai ; que constitue un avantage individuel acquis la rémunération d'un temps de pause prévue par un accord mis en cause et non remplacé dans le délai de survie dès lors que le maintien de cet élément de rémunération au profit des seuls salariés qui faisaient partie du personnel au jour de la mise en cause de l'accord n'est pas incompatible avec la nouvelle organisation du temps de travail supprimant la journée continue ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 2261-14 du code du travail ;

5°/ que lorsque l'application d'un accord est mise en cause, cet accord continue de produire effet jusqu'à l'entrée en vigueur de celui qui lui est substitué ou, à défaut, pendant une durée d'un an à compter de l'expiration du délai de préavis prévu à l'article L. 2261-9, sauf clause prévoyant une durée supérieure et que lorsque la convention ou l'accord mis en cause n'a pas été remplacé dans le délai de survie, les salariés conservent les avantages individuels qu'ils ont acquis en application de la convention ou de l'accord ; que ne constitue pas une clause prévoyant une durée supérieure les dispositions d'une convention prévoyant que les parties conviennent d'engager des négociations en vue de la conclusion d'accords sur certains thèmes non traités dans la convention sans fixer de délai précis ; qu'en retenant cependant que les partenaires sociaux avaient valablement fixé un délai supérieur de négociation en prévoyant, dans la convention collective, que des négociations se poursuivraient pour aboutir, au plus tard en 2010, à des accords relatifs notamment à l'organisation et l'aménagement du temps de travail, la cour d'appel a violé l'article L. 2261-14 du code du travail ;

Mais attendu que constitue un accord de substitution au sens de l'article L. 2261-14 du code du travail, une convention collective conclue dans le délai prévu au premier alinéa de ce texte, dès lors qu'elle a pour objet de remplacer, en tout ou partie, les stipulations d'un accord de branche ;

Et attendu qu'ayant constaté que la convention collective conclue moins de 15 mois après le 19 décembre 2008, date de la fusion de l'Assedic et de l'ANPE mettant en cause l'accord du 23 avril 2001, portait notamment sur la durée du travail, les heures supplémentaires, les astreintes, la répartition hebdomadaire du temps de travail et la modification des horaires de travail, les parties étant convenues de poursuivre les négociations sur la pause méridienne pour parvenir à des accords au niveau national et local relatifs à l'organisation et à l'aménagement du temps de travail, notamment quant à l'instauration de mesures compensatoires, et que l'accord régional Pôle emploi Aquitaine du 19 janvier 2011, tout en maintenant la non-rémunération de la pause méridienne, avait prévu des mesures de compensation financière, la cour d'appel a pu en déduire que la convention collective Pôle emploi du 21 novembre 2009 avait en partie le même objet que l'accord mis en cause et constituait un accord de substitution ;

D'où il suit qu'abstraction faite des motifs surabondants critiqués par la quatrième branche, le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme Y... et les cent vingt et un autres demandeurs aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf décembre deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour Mme Y... et les cent vingt et un autres demandeurs

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la convention collective Pôle Emploi du 21 novembre 2009 revêt la nature d'un accord de substitution régulièrement intervenu dans les délais et conditions de l'article L. 2261-14 du code du travail, d'AVOIR dit que la rémunération de la pause méridienne inhérente à la journée continue constitue un avantage collectif et d'AVOIR en conséquence débouté les salariés de leurs demandes formées à ce titre ;

AUX MOTIFS QUE la convention ou l'accord mis en cause dans une entreprise en raison, notamment, d'une fusion, continue de produire effet jusqu'à l'entrée en vigueur de la convention ou de l'accord qui lui est substitué ou, à défaut, pendant une durée d'un an à compter de l'expiration du délai de préavis de trois mois, sauf clause prévoyant une durée supérieure ; qu'en application de l'alinéa 2 de l'article L. 2261-14 du code du travail dans sa rédaction applicable à l'espèce, lorsque la convention ou l'accord mis en cause n'a pas été remplacé par une nouvelle convention ou un nouvel accord dans les délais précités, les salariés conservent les avantages individuels qu'ils ont acquis, en application de la convention ou de l'accord, à l'expiration de ces délais ; que des négociations rendues nécessaires par la mise en cause d'un accord collectif peuvent être engagées avant mais que la signature éventuelle d'un accord de substitution ne peut intervenir qu'après la mise en cause et son entrée en vigueur, avant l'expiration du préavis ; que l'avantage dont le maintien est incompatible avec le respect par l'ensemble des salariés concernés de l'organisation collective du temps de travail qui leur est désormais applicable constitue un avantage collectif, et non un avantage individuel acquis ; que les salariés revendiquent le fait que la journée continue était incorporée à leur contrat de travail avant l'accord du 23 avril 2001 ; que la journée continue constitue un des modes d'organisation du travail prévu par l'accord relatif au temps de travail de l'Assedic Sud-Ouest du 23 avril 2001 ; que ce mode d'organisation instauré par l'accord régional s'est substitué de plein droit à tous accords et usages existants antérieurement et ayant le même objet ; que dès lors, la journée continue et la pause déjeuner rémunérée durant laquelle les salariés restent à la disposition de l'employeur sans pouvoir vaquer à leurs occupations personnelles, constituent un avantage collectif, et non un avantage individuel acquis, au jour de la création de Pôle Emploi par fusion ; que l'article 7 de la loi n° 2008-126 du 13 février 2008 prévoit que les actes collectifs antérieurs produisent leurs effets soit jusqu'à l'entrée en vigueur de la nouvelle convention collective, soit au plus tard au terme du délai de 18 mois prévu à l'accord préalable du 7 novembre 2008 ; que conformément à l'article L. 2261-14 du code du travail, les partenaires sociaux ont valablement négocié, même antérieurement à la fusion, un délai supérieur de négociation durant lequel les conventions et accords mis en cause continuent de produire effet ; que la fusion des institutions de droit privé et de droit public créant Pôle Emploi est intervenue officiellement le 19 décembre 2008 ; que dès lors, s'agissant d'une mise en cause suite à une opération de fusion de plusieurs institutions en vue de la création d'une seule entité, les actes collectifs de chaque institution continuent de produire leurs effets jusqu'à l'entrée en vigueur de la nouvelle convention collective nationale unifiant les règles régissant l'ensemble du personnel ou, à défaut, pour une période maximale de 18 mois, soit jusqu'au 18 juin 2010 ; que la convention collective nationale Pôle Emploi du 21 novembre 2009 est entrée en vigueur avant le terme des délais légal et conventionnel de survie ; qu'à compter de cette date, les salariés ne conservent les avantages individuels acquis que si l'accord collectif nouveau ne porte pas sur l'objet dont ils entendent conserver l'avantage individuel revendiqué ; que dès lors que l'accord nouveau porte sur le même objet, même partiellement, que l'accord ou l'ensemble des accords mis en cause et ce, même si les parties sont convenues de poursuivre les négociations, l'accord est qualifié d'accord de substitution, et, sauf clause plus avantageuse pour les salariés, après conclusion de ce nouvel accord, ils ne peuvent se prévaloir de droits acquis sous l'empire des dispositions antérieures ; que l'article 9 de la convention collective Pôle Emploi porte sur la durée de travail, les heures supplémentaires, les astreintes, la répartition hebdomadaire du temps de travail et la modification des horaires de travail ; que l'article 53 et l'annexe Y prévoient que des négociations se poursuivent pour aboutir, au plus tard en 2010, à des accords au niveau national et local relatifs à l'organisation et l'aménagement du temps de travail ; que l'accord national du 30 septembre 2010 et l'accord régional du 19 janvier 2011 sont le résultat de la poursuite de ces négociations ; que par ailleurs, le fait que l'accord régional de 2011, constatant que la journée continue est incompatible avec l'organisation collective du temps de travail, en prévoit la compensation financière, n'a pas pour effet de lui donner le caractère d'un avantage individuel acquis ; qu'il résulte de l'ensemble des éléments que la convention collective Pôle Emploi du 21 novembre 2009, régulièrement entrée en vigueur avant le terme du délai de survie, constitue l'accord de substitution défini à l'article L. 2261-14 du code du travail en ce qu'elle a pour objet d'adapter et de créer un cadre collectif commun à l'ensemble des salariés issus d'institutions de droit privé et de droit public, qu'elle couvre le même objet que les accords de 2001 relatifs à l'organisation et l'aménagement du temps de travail mis en cause et ce, même si certains points, tels la pause méridienne, sont renvoyés à une négociation ultérieure ; qu'en conséquence, les salariés de l'ex-Assedic ne peuvent prétendre au maintien de la rémunération de la pause méridienne inhérente à la journée continue constituant un avantage collectif mis en cause, régulièrement substitué par les nouvelles dispositions conventionnelles de Pôle Emploi et dont le maintien est incompatible avec la nouvelle organisation collective du temps de travail ;

1° ALORS QUE les salariés soutenaient que, pour que la convention ou l'accord mis en cause soit remplacé par un texte de substitution, il faut que la négociation pour l'adaptation aux dispositions conventionnelles nouvellement applicables ou pour l'élaboration de nouvelles stipulations se soit engagée dans les trois mois suivant la mise en cause, que ce délai est impératif, sans pouvoir être modifié conventionnellement, et qu'en l'espèce, aucune négociation n'avait été engagée concernant le temps de travail rémunéré dans les trois mois de la mise en cause, soit avant le 18 mars 2009 ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a privé sa décision de motifs et violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2° ALORS QUE les salariés soutenaient que seul peut constituer un texte de substitution une convention ou un accord conclu au même niveau de négociation que la convention ou l'accord mis en cause, et, par suite, que ni la convention collective Pôle Emploi du 21 novembre 2009 ni l'accord national du 30 septembre 2010 ne pouvaient remplacer l'accord conclu au sein des Assedic du Sud-Ouest le 23 avril 2001 ; qu'en omettant de répondre aux conclusions des intimés sur ce point, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

3° ALORS QUE seul peut se substituer à une convention ou un accord mis en cause une convention ou un accord ayant le même objet ; qu'il est constant que l'organisation et l'aménagement du temps de travail faisait partie des thèmes non traités par la convention collective Pôle Emploi du 21 novembre 2009, les négociations en vue de la conclusion d'accords sur ces thèmes étant remis à plus tard ; qu'en retenant cependant que cette convention collective couvre le même objet que l'accord de 2001 mis en cause même si certains points, tels la pause méridienne, sont renvoyés à une négociation ultérieure, et qu'elle constitue l'accord de substitution prévu à l'article L. 2261-14 du code du travail, la cour d'appel a violé ce texte ;

4° ALORS QUE un élément de rémunération procuré par un accord collectif constitue, à l'expiration du délai de survie, un avantage individuel acquis qui est incorporé au contrat de travail des salariés à la date de la mise en cause de l'accord si elle n'a pas été suivie d'un accord de substitution dans ce délai ; que constitue un avantage individuel acquis la rémunération d'un temps de pause prévue par un accord mis en cause et non remplacé dans le délai de survie dès lors que le maintien de cet élément de rémunération au profit des seuls salariés qui faisaient partie du personnel au jour de la mise en cause de l'accord n'est pas incompatible avec la nouvelle organisation du temps de travail supprimant la journée continue ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 2261-14 du code du travail ;

5° ALORS QUE lorsque l'application d'un accord est mise en cause, cet accord continue de produire effet jusqu'à l'entrée en vigueur de celui qui lui est substitué ou, à défaut, pendant une durée d'un an à compter de l'expiration du délai de préavis prévu à l'article L. 2261-9, sauf clause prévoyant une durée supérieure et que lorsque la convention ou l'accord mis en cause n'a pas été remplacé dans le délai de survie, les salariés conservent les avantages individuels qu'ils ont acquis en application de la convention ou de l'accord ; que ne constitue pas une clause prévoyant une durée supérieure les dispositions d'une convention prévoyant que les parties conviennent d'engager des négociations en vue de la conclusion d'accords sur certains thèmes non traités dans la convention sans fixer de délai précis ; qu'en retenant cependant que les partenaires sociaux avaient valablement fixé un délai supérieur de négociation en prévoyant, dans la convention collective, que des négociations se poursuivraient pour aboutir, au plus tard en 2010, à des accords relatifs notamment à l'organisation et l'aménagement du temps de travail, la cour d'appel a violé l'article L. 2261-14 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-24157
Date de la décision : 19/12/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 28 juin 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 déc. 2018, pourvoi n°17-24157


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 29/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.24157
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