LA COUR DE CASSATION, siégeant en ASSEMBLÉE PLÉNIÈRE, a rendu l'arrêt suivant :
COUR DE CASSATION FB/LM
ASSEMBLÉE PLÉNIÈRE
QUESTION PRIORITAIRE
de
CONSTITUTIONNALITÉ
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Audience publique du 17 décembre 2018
NON-LIEU À RENVOI
M. LOUVEL, premier président
Arrêt n° 642 P+B+R+I
Pourvoi n° D 18-82.737
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, siégeant en ASSEMBLÉE PLÉNIÈRE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur la question prioritaire de constitutionnalité formulée par mémoire spécial, reçu le 17 septembre 2018, et présentée par le Royaume du Maroc, partie civile, à l'occasion du pourvoi formé par lui contre l'arrêt rendu le 24 janvier 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 2 - chambre 7) qui, dans la procédure suivie contre M. Y... du chef de diffamation publique envers un particulier, a déclaré irrecevable sa citation directe ;
Le premier président a, par ordonnance du 28 septembre 2018, ordonné le renvoi de l'examen du pourvoi devant l'assemblée plénière ;
La SCP Zribi et Texier s'est constituée au nom de M. Y..., bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale par décision du 12 novembre 2018 ;
Un mémoire en défense sur la question prioritaire de constitutionnalité a été déposé au greffe de la Cour de cassation par la SCP Zribi et Texier ;
Le rapport écrit de Mme Teiller, conseiller, et l'avis écrit de M. Cordier, premier avocat général, ont été mis à disposition des parties ;
Sur quoi, LA COUR, siégeant en assemblée plénière, en l'audience publique du 14 décembre 2018, où étaient présents : M. Louvel, premier président, Mmes Flise, Batut, Mouillard, MM. Chauvin, Soulard, Cathala, présidents, Mme Teiller, conseiller rapporteur, Mme Riffault-Silk, MM. Prétot, Pers, Mme Kamara, MM. Huglo, Maunand, Rémery, Mme Brouard-Gallet, M. de Larosière de Champfeu, Mme Basset, M. Jessel, conseillers, M. Cordier, premier avocat général, Mme Caratini, directeur principal des services de greffe ;
Sur le rapport de Mme Teiller, conseiller, assistée de Mmes Cottereau, Benac et Champs, auditrices au service de documentation, des études et du rapport, les observations de la SCP Spinosi et Sureau, de la SCP Zribi et Texier, l'avis de M. Cordier, premier avocat général, auquel les parties ont été invitées à répliquer, seule la SCP Spinosi et Sureau ayant usé de cette faculté, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que la question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :
"Les dispositions combinées des articles 29, alinéa 1, 30, 31, alinéa 1, 32, alinéa 1, et 48, 1°, 3° et 6°, de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, desquelles il résulte qu'à la différence de l'Etat français qui, notamment par l'intermédiaire de ses ministres, peut engager des poursuites en diffamation sur le fondement des articles 30 et 31 susvisés en cas d'atteinte portée à sa réputation résultant de propos attentatoires à l'honneur ou à la considération de ses institutions, corps constitués, administrations publiques ou représentants en raison de leurs fonctions, un Etat étranger n'est pas admis à engager une telle action en cas d'atteinte portée à sa réputation par les mêmes moyens, faute de pouvoir agir sur le fondement des articles 30 et 31 de la loi susvisée et faute de pouvoir être assimilé à un particulier au sens de son article 32, alinéa 1, instituent-elles une différence de traitement injustifiée entre l'Etat français et les Etats étrangers dans l'exercice du droit à un recours juridictionnel et méconnaissent-elles par conséquent le principe d'égalité devant la justice, tel qu'il est garanti par les articles 6 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ?"
Attendu que les dispositions critiquées sont applicables au litige et qu'elles n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;
Mais attendu que la question, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle ;
Et attendu qu'il ne résulte pas des textes invoqués une différence de traitement entre l'Etat français et les Etats étrangers, qui ne peuvent agir ni l'un ni les autres sur leur fondement ;
D'où il suit que la question posée ne présente pas un caractère sérieux ;
PAR CES MOTIFS :
DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;
RENVOIE à l'audience du 12 avril 2019 l'examen du pourvoi au fond ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, siégeant en assemblée plénière, et prononcé le dix-sept décembre deux mille dix-huit par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées.