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13/12/2018 | FRANCE | N°17-27821

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 13 décembre 2018, 17-27821


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le second moyen pris en sa seconde branche :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau, 31 juillet 2017), que M. Y... a été blessé dans un accident de la circulation impliquant un véhicule conduit par Mme X..., assuré par la société Pacifica (l'assureur) ; que M. D... , en qualité de tuteur de M. Y..., ainsi que la compagne, les enfants et les parents de ce dernier (les consorts Y...) ont assigné Mme X... et la société Pacifica en indemnisation de leurs préjudices et mis en cause la Mutuelle s

ociale agricole Sud-Aquitaine, tiers payeur (la mutuelle) ;

Attendu que Mm...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le second moyen pris en sa seconde branche :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau, 31 juillet 2017), que M. Y... a été blessé dans un accident de la circulation impliquant un véhicule conduit par Mme X..., assuré par la société Pacifica (l'assureur) ; que M. D... , en qualité de tuteur de M. Y..., ainsi que la compagne, les enfants et les parents de ce dernier (les consorts Y...) ont assigné Mme X... et la société Pacifica en indemnisation de leurs préjudices et mis en cause la Mutuelle sociale agricole Sud-Aquitaine, tiers payeur (la mutuelle) ;

Attendu que Mme X... et l'assureur font grief à l'arrêt de les condamner solidairement à payer à M. D..., auquel a succédé le Service d'accompagnement et de protection aux personnes de l'Association des oeuvres girondines de protection de l'enfance, en qualité de tuteur de M. Y..., la somme de 1 517 440,51 euros, déduction faite des provisions versées, en réparation du préjudice corporel de celui-ci, hors assistance par tierce personne à compter de l'arrêt et frais de logement adapté, alors, selon le moyen, que le juge doit réparer le préjudice sans qu'il en résulte ni perte ni profit pour la victime ; que le calcul du capital représentatif de la rente versée en réparation de la perte de gains professionnels futurs doit s'effectuer selon le même barème et le même taux que celui retenu pour déterminer le capital représentatif de la créance du tiers payeur qui a indemnisé ce poste de préjudice ; qu'en l'espèce, l'assureur reprochait au tribunal de n'avoir pas tenu compte du principe d'unicité des tables de capitalisation, en déduisant le capital constitutif de la rente versée par la mutuelle calculé selon l'arrêté de 1954 avec des tables de mortalité anciennes et un taux de 4,75 %, tout en capitalisant la rente due à la victime après la date de la décision à intervenir en fonction de tables de mortalité plus récentes et avec un taux de 1,20 % ; qu'en se bornant à déduire des sommes allouées à la victime au titre de la perte de gains professionnels futurs la rente accident du travail versée par la mutuelle capitalisée à hauteur de 235 534,50 euros, et en procédant à la capitalisation de la somme revenant à M. Y... au titre de la perte de gains futurs par référence au barème publié par la Gazette du Palais en 2013, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la capitalisation de cette perte devait être effectuée selon la même table de capitalisation que celle de la rente versée par la mutuelle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 3, 29 et 31 de la loi du 5 juillet 1985, ensemble le principe de la réparation intégrale ;

Mais attendu que le moyen ne tend, sous couvert du grief non fondé de défaut de base légale, qu'à remettre en discussion devant la Cour de cassation l'appréciation souveraine de la cour d'appel qui, tenue d'assurer la réparation intégrale du dommage actuel et certain de la victime sans perte ni profit, a choisi, sans être liée par le barème de capitalisation appliqué par la mutuelle à la rente accident du travail servie à M. Y..., le barème qui lui a paru le plus adapté à assurer les modalités de cette réparation pour le futur ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen et la première branche du second moyen, annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X... et la société Pacifica aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande ; les condamne à payer au service d'accompagnement et de protection aux personnes de l'Association des oeuvres girondines de protection de l'enfance, ès qualités, à Mme Z..., à A... et Yannick Y... la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize décembre deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour la société Pacifica et Mme X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné solidairement Mme X... et la société Pacifica à payer à M. D... [auquel a succédé l'AOGPE SA2P] en qualité de tuteur de M. Jean-Luc Y..., la somme de 1 517 440,51 euros, déduction faite des provisions versées, en réparation du préjudice corporel de celui-ci, hors assistance par tierce personne à compter de l'arrêt et frais de logement adapté, et une rente annuelle viagère de 125 552 euros par an au titre des dépenses de tierce personne à compter du 1er janvier 2017 ;

Aux motifs que sur l'Assistance par tierce personne, que les arrérages échus jusqu'à ce jour : Du 20 novembre 2007 au 31 décembre 2011, M. Jean-Luc Y... a alterné les séjours au domicile et en hospitalisation de jour ; qu'il a eu besoin durant cette période, selon les calculs détaillés qui figurent dans les écritures de son conseil, de 7,2 heures par jour de présence active et de 14,5 heures par jour de présence de proximité ; qu'à partir de 2012 jusqu'en 2017, M. Jean-Luc Y... est resté à domicile. Il a donc eu besoin de 8 heures par jour de présence active, et de 16 heures par jour de présence de proximité ; que sur la base du taux horaire retenu pour la tierce personne temporaire, et en prenant en compte 413 jours pour une année, le montant de la tierce personne au titre de cette période peut être calculé de la façon suivante : - au titre de la première période (du 20 novembre 2007 au 31 décembre 2011) : Coût annuel : (16 x 7,2 x 413) + (11 x 14,5 x 413) = 113 451,10 euros, Coût sur 4 années : 453 804,40 euros, - au titre de la deuxième période (de 2012 à 2017) : Coût annuel : (16 x 8 x 413) + (11 x 16 x 413) = 125 552 euros, Coût sur 5 années : 627 760 euros ; qu'il est donc dû au total à la victime au titre des arrérages échus de tierce personne la somme de 1 081 564,40 euros, soit, après déduction de la majoration pour tierce personne allouée par la MSA SUD AQUITAINE à hauteur de 159 023,52 euros, un montant de 922 540,88 euros ; que sur la tierce personne future : A compter du 1er janvier 2017, il sera versé à la victime une rente annuelle viagère de 125 552 euros par an, qui sera versée mensuellement (10 462,66 euros par mois), et qui sera suspendue au-delà de 45 jours d'hospitalisation consécutifs » (arrêt, p. 11 et 12 § 1 et 2) ;

Alors que le juge doit réparer le préjudice sans qu'il en résulte ni perte ni profit pour la victime ; qu'il doit se placer à la date à laquelle il statue pour évaluer tant le dommage subi par la victime que la mesure dans laquelle ce dommage se trouve réparé par des prestations sociales ; que, lorsque ces prestations se traduisent par le versement d'une rente dont l'octroi à la victime est définitif, le juge doit déduire de la somme revenant à cette dernière au titre du préjudice concerné, d'une part, les arrérages échus à la date où il statue, d'autre part, le capital représentatif des arrérages à échoir pour la période postérieure ; qu'en l'espèce, la société Pacifica faisait valoir, s'agissant du besoin d'assistance par une tierce personne après consolidation (concl., p. 11 et s.), que les arrérages échus au titre de la majoration pour tierce personne de la rente versée par la MSA, arrêtés à la fin de l'année 2015, s'élevaient à 91 943,52 euros, et proposait une capitalisation à hauteur de 80 203,03 euros pour la période postérieure au 1er janvier 2016 (concl., p. 13) ; que la cour d'appel a pourtant déduit des sommes dues au titre de l'assistance par une tierce personne après consolidation la seule somme de 159.023,52 euros, correspondant à la capitalisation viagère de la majoration de la rente versée à M. Y... à compter de la date de son premier versement le 1er novembre 2008 (arrêt, p. 11 in fine) ; qu'en se prononçant ainsi, sans déduire les arrérages échus jusqu'à la date du prononcé de l'arrêt, puis les arrérages à échoir capitalisés pour la période postérieure, la cour d'appel a violé les articles 3, 29 et 31 de la loi du 5 juillet 1985, ensemble le principe de la réparation intégrale.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné solidairement Mme X... et la société Pacifica à payer à M. D... [auquel a succédé l'AOGPE SA2P] en qualité de tuteur de M. Jean-Luc Y..., la somme de 1.517.440,51 euros, déduction faite des provisions versées, en réparation du préjudice corporel de celui-ci, hors assistance par tierce personne à compter de l'arrêt et frais de logement adapté ;

Aux motifs que sur la perte de gains professionnels futurs, il n'est pas contesté que du fait de son accident, M. Jean-Luc Y... est inapte à toute activité professionnelle ; qu'avant son accident, il percevait un salaire annuel moyen de 16 920 euros (en 2003) ; qu'il convient de déterminer la perte de gains professionnels de la date de consolidation jusqu'en 2016, soit durant 9 ans. Pour tenir compte de l'augmentation des salaires depuis 2003, il y a lieu de revaloriser de 10% le salaire annuel de M. Jean-Luc Y... ; que la perte de salaires passée de M. Jean-Luc Y... s'élève donc à la somme totale de 167 508 euros (18 612 x 9) ; qu'après capitalisation suivant le barème de 2013, sa perte de salaire future s'élève à la somme de 363 548,19 euros (18.612 x 19,533) ; que le montant total de la perte de gains représente donc la somme de 531 056,19 euros ; qu'après déduction des indemnités journalières perçues durant la même période (12.617,76 euros) et de la rente accident du travail (235534,50 euros), il reste dû à la victime la somme de 282 903,93 euros (531 056,19 – 235 534,50 - 12 617,76) au titre de ce poste de préjudice » (arrêt, p. 12).

Alors 1°) que le juge doit réparer le préjudice sans qu'il en résulte ni perte ni profit pour la victime ; qu'il doit se placer à la date à laquelle il statue pour évaluer tant le dommage subi par la victime que la mesure dans laquelle ce dommage se trouve réparé par des prestations sociales ; que, lorsque ces prestations se traduisent par le versement d'une rente dont l'octroi à la victime est définitif, le juge doit déduire de la somme revenant à cette dernière au titre du préjudice concerné, d'une part, les arrérages échus à la date où il statue, d'autre part, le capital représentatif des arrérages à échoir pour la période postérieure ; qu'en l'espèce, la société Pacifica faisait valoir, s'agissant de la perte de gains professionnels futurs (concl., p. 11 et s.), que les arrérages échus au titre de la rente versée par la MSA, arrêtés à la fin de l'année 2015, étaient de 136.180,47 euros, et proposait une capitalisation à hauteur de 347.354 euros pour la période postérieure au 1er janvier 2016 (concl., p. 15 et 16) ; que la cour d'appel a pourtant déduit des sommes dues au titre de la perte de gains professionnels futurs la seule somme de 235.534,50 euros, correspondant à la capitalisation viagère de la rente versée à M. Y... à compter de la date de son premier versement le 1er novembre 2008 (arrêt, p. 12) ; qu'en se prononçant ainsi, sans déduire les arrérages échus jusqu'à la date du prononcé de l'arrêt, puis les arrérages à échoir capitalisés pour la période postérieure, la cour d'appel a violé les articles 3, 29 et 31 de la loi du 5 juillet 1985, ensemble le principe de la réparation intégrale ;

Alors 2°) que le juge doit réparer le préjudice sans qu'il en résulte ni perte ni profit pour la victime ; que le calcul du capital représentatif de la rente versée en réparation de la perte de gains professionnels futurs doit s'effectuer selon le même barème et le même taux que celui retenu pour déterminer le capital représentatif de la créance du tiers payeur qui a indemnisé ce poste de préjudice ; qu'en l'espèce, la société Pacifica reprochait au tribunal de n'avoir pas tenu compte du principe d'unicité des tables de capitalisation, en déduisant le capital constitutif de la rente versée par la MSA calculé selon l'arrêté de 1954 avec des tables de mortalité anciennes et un taux de 4,75 %, tout en capitalisant la rente due à la victime après la date de la décision à intervenir en fonction de tables de mortalité plus récentes et avec un taux de 1,20 % (concl., p. 15 § 1) ; qu'en se bornant à déduire des sommes allouées à la victime au titre de la perte de gains professionnels futurs la rente accident du travail versée par la MSA capitalisée à hauteur de 235.534,50 euros (arrêt, p. 12 § 10), et en procédant à la capitalisation de la somme revenant à M. Y... au titre de la perte de gains futurs par référence au barème publié par la Gazette du Palais en 2013 (arrêt, p. 12 § 8), sans rechercher, comme elle y était invitée, si la capitalisation de cette perte devait être effectuée selon la même table de capitalisation que celle de la rente versée par la MSA, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 3, 29 et 31 de la loi du 5 juillet 1985, ensemble le principe de la réparation intégrale.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 17-27821
Date de la décision : 13/12/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Pau, 31 juillet 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 13 déc. 2018, pourvoi n°17-27821


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.27821
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