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12/12/2018 | FRANCE | N°17-11910

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 12 décembre 2018, 17-11910


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 13 octobre 2016), que, par contrat du 11 septembre 2003, la société civile de construction vente Bercam (le promoteur) a confié à la société Groupe France épargne (l'agent immobilier) la commercialisation de lots d'un programme immobilier dont elle avait entrepris la réalisation en Guyane ; que, par acte sous seing privé du 3 décembre 2003, M. et Mme X... (les acquéreurs) ont signé un contrat de réservation pour l'acquisition de

l'un des lots en l'état futur d'achèvement ; que la vente a été réitérée par...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 13 octobre 2016), que, par contrat du 11 septembre 2003, la société civile de construction vente Bercam (le promoteur) a confié à la société Groupe France épargne (l'agent immobilier) la commercialisation de lots d'un programme immobilier dont elle avait entrepris la réalisation en Guyane ; que, par acte sous seing privé du 3 décembre 2003, M. et Mme X... (les acquéreurs) ont signé un contrat de réservation pour l'acquisition de l'un des lots en l'état futur d'achèvement ; que la vente a été réitérée par acte authentique du 31 décembre 2003, reçu par M. Z..., notaire en Guyane (le notaire), les acquéreurs étant représentés par un clerc de l'étude ; que ceux-ci ont payé la somme de 112 500 euros correspondant à 90 % du prix total d'acquisition, au regard de l'état d'avancement des travaux attesté par M. C... (l'architecte) ; que le promoteur a été placé en redressement, puis liquidation judiciaire, M. A... étant désigné en qualité de mandataire liquidateur ; que les acquéreurs ont assigné, aux fins de résolution de la vente et d'indemnisation de leurs préjudices, M. A..., ès qualités, le notaire, l'architecte et l'agent immobilier, lequel a appelé en garantie son assureur, la société Generali IARD ;

Attendu que les acquéreurs font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes formées contre l'agent immobilier, alors, selon le moyen :

1°/ que l'agent immobilier qui s'entremet habituellement dans des opérations immobilières de placement doit informer et conseiller l'acquéreur éventuel sur toutes les caractéristiques de l'investissement qu'il lui propose, ainsi que sur l'opportunité des choix que cet investissement le conduira à faire ; qu'en énonçant que l'agent immobilier, laquelle s'est entremise, en France métropolitaine, dans la commercialisation de l'opération immobilière projetée à la Guyane sous le nom de [...], n'était pas tenue de se tenir personnellement au courant, en ayant au besoin recours à un correspondant local, de la pérennité du financement de cette opération et aussi de l'état d'avancement des travaux projetés, pour pouvoir informer et conseiller les acquéreurs éventuels, tels M. et Mme X..., et exécuter ainsi l'obligation d'information et de conseil dont elle était juridiquement débitrice envers eux, la cour d'appel a violé l'article 1382 ancien et 1240 nouveau du code civil ;

2°/ que c'est au débiteur de l'obligation d'information et de conseil qu'il revient de prouver qu'il s'en est acquitté ; qu'en relevant, pour débouter les acquéreurs de leur action en responsabilité, qu'ils « ne rapportent [
] pas la preuve que, au jour de la conclusion du contrat préliminaire de vente en l'état futur d'achèvement du 3 décembre 2003 et au jour de l'acte authentique du 31 décembre 2003, la société GFE a retenu des informations qui leur auraient permis d'opérer un choix éclairé sur la rentabilité, la pertinence économique et sécurité financière de l'investissement immobilier objet de son entremise », quand il appartenait à l'agent immobilier d'administrer la preuve qu'elle a fourni aux acquéreurs, avant que ceux-ci souscrivent le contrat préliminaire, toutes les informations, éclaircissements et conseils dont ils avaient besoin pour conclure ce contrat préliminaire et le contrat de vente en l'état futur qui a suivi en pleine connaissance de tous les éléments d'appréciation dont ils avaient besoin pour traiter utilement, la cour d'appel a violé les articles 6 et 9 du code de procédure civile, ensemble les articles 1315 ancien et 1353 nouveau du code civil ;

Mais attendu que l'arrêt relève que, lors de la signature du contrat de commercialisation entre le promoteur et l'agent immobilier, ce dernier s'est rendu sur place et a pu constater l'avancement des travaux, et qu'aucun élément ne permet de considérer qu'il aurait dû avoir des doutes sur la fiabilité de l'investissement immobilier et se livrer à des investigations plus poussées ; qu'il ajoute que, lors de la vente en décembre 2003, d'une part, le notaire a attesté de la garantie intrinsèque d'achèvement, d'autre part, l'architecte a témoigné de l'état d'avancement des travaux, éléments que l'agent immobilier n'était pas tenu de mettre en doute et de vérifier ; qu'il retient que les premières difficultés se sont révélées postérieurement à la signature de l'acte de vente et qu'ainsi, les préjudices sur lesquels les acquéreurs fondent leurs demandes indemnitaires résultent du retard, puis de l'arrêt du chantier, qui ne peuvent être imputés qu'au promoteur et non à l'agent immobilier chargé de commercialiser le produit ; que, de ces constatations et appréciations, la cour d'appel a pu déduire, sans inverser la charge de la preuve, que la responsabilité de l'agent immobilier n'était pas engagée ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. et Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze décembre deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Yves et Blaise Capron, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X...

Le pourvoi fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR débouté M. et Mme Dominique X... Y... de l'action en responsabilité contractuelle qu'ils formaient contre la société Groupe France épargne ;

AUX MOTIFS QU'« en sa qualité d'agent immobilier la société Gfe était tenue d'un devoir d'information et de conseil notamment pré-contractuel consistant à fournir aux époux X... les informations neutres et objectives leur permettant d'opérer un choix éclairé sur la rentabilité, la pertinence économique et la sécurité financière de l'investissement immobilier objet de son entremise et de leur délivrer les informations juridiques nécessaires pour assurer l'efficacité de l'acte de réservation signé par elle en sa qualité de mandataire de la sccv [le promoteur] venderesse maître de l'ouvrage » (cf. arrêt attaqué, p. 14, 2e alinéa) ; qu'« il convient de se placer au mois de décembre 2003, c'est-à-dire à l'époque des engagements contractuels des époux X..., pour déterminer l'existence des fautes éventuelles de la société Gfe » (cf. arrêt attaqué, p. 14, 4e alinéa) ; que « rien ne prouve que, en décembre 2003, les travaux du programme immobilier, objet de l'investissement des époux X... étaient ralentis ou arrêtés et que la société Gfe avait connaissance de ces difficultés [; qu']aucune pièce ne permet de contester l'affirmation de la société Gfe selon laquelle, en septembre 2003, à l'époque de la signature du contrat de commercialisation, elle avait elle-même pu constater sur place "l'avancement des travaux qui allaient bon train" » (cf. arrêt attaqué, p. 14, 5e alinéa) ; qu'« au début de la commercialisation du programme immobilier, au dernier trimestre 2003, rien ne permet d'affirmer que la société Gfe aurait dû avoir des doutes sur la fiabilité de l'investissement immobilier proposé aux époux X... et aurait dû se livrer à des investigations plus poussées, notamment sur la véracité des documents et allégations du promoteur maître de l'ouvrage » (cf. arrêt attaqué, p.14, 6e alinéa) ; que « les époux X... ne rapportent donc pas la preuve que, au jour de la conclusion du contrat préliminaire de vente en l'état futur d'achèvement du 3 décembre 2003 et au jour de l'acte authentique du 31 décembre 2003, la société Gfe a retenu des informations qui leur auraient permis d'opérer un choix éclairé sur la rentabilité, la pertinence économique et sécurité financière de l'investissement immobilier objet de son entremise » (cf. arrêt attaqué, p. 14, 7e alinéa, lequel s'achève p. 15) ; que « rien ne prouve que, en décembre 2003, la société Gfe savait que la sccv Bercam ne possédait pas la surface financière indispensable à la réalisation du vaste programme immobilier [...], dont le notaire attestait par ailleurs la garantie intrinsèque d'achèvement » (cf. arrêt attaqué, p. 15, 2e alinéa) ; que « les époux X... se limitent à affirmer sans en rapporter la preuve que la société Gfe a été complice du dol de la sccv Bercam qui a été la cause déterminante de leur achat de l'appartement 29 d en l'état futur d'achèvement » (cf. arrêt attaqué, p. 15, 4e alinéa) ; que, « bien que se vantant d'une "gestion sur site", la société Gfe, agent immobilier chargé de la commercialisation du programme en France à l'exclusion du territoire de la Guyane française, et dont le siège est à Nantes, n'était tenue, en dehors de tout élément alarmant, après un premier déplacement sur site à l'époque de la signature du contrat de commercialisation en septembre 2003, ni d'une présence constante sur le chantier, ni de mettre en doute et de vérifier l'exactitude de l'attestation de M. C... délivrée trois mois après en vue de l'acte de vefa des époux X... » (cf. arrêt attaqué, p. 15, 6e alinéa) ;

1. ALORS QUE l'agent immobilier qui s'entremet habituellement dans des opérations immobilières de placement doit informer et conseiller l'acquéreur éventuel sur toutes les caractéristiques de l'investissement qu'il lui propose, ainsi que sur l'opportunité des choix que cet investissement le conduira à faire ; qu'en énonçant que la société Groupe français épargne, laquelle s'est entremise, en France métropolitaine, dans la commercialisation de l'opération immobilière projetée à la Guyane sous le nom de [...], n'était pas tenue de se tenir personnellement au courant, en ayant au besoin recours à un correspondant local, de la pérennité du financement de cette opération et aussi de l'état d'avancement des travaux projetés, pour pouvoir informer et conseiller les acquéreurs éventuels, tels M. et Mme Dominique X... Y..., et exécuter ainsi l'obligation d'information et de conseil dont elle était juridiquement débitrice envers eux, la cour d'appel a violé l'article 1382 ancien et 1240 nouveau du code civil ;

2. ALORS QUE c'est au débiteur de l'obligation d'information et de conseil qu'il revient de prouver qu'il s'en est acquitté ; qu'en relevant, pour débouter M. et Mme Emmanuel X... Y... de leur action en responsabilité, qu'ils « ne rapportent [
] pas la preuve que, au jour de la conclusion du contrat préliminaire de vente en l'état futur d'achèvement du 3 décembre 2003 et au jour de l'acte authentique du 31 décembre 2003, la société Gfe a retenu des informations qui leur auraient permis d'opérer un choix éclairé sur la rentabilité, la pertinence économique et sécurité financière de l'investissement immobilier objet de son entremise », quand il appartenait à la société Groupe français épargne d'administrer la preuve qu'elle a fourni à M. et Mme Dominique X... Y..., avant que ceux-ci souscrivent le contrat préliminaire, toutes les informations, éclaircissements et conseils dont ils avaient besoin pour conclure ce contrat préliminaire et le contrat de vente en l'état futur qui a suivi en pleine connaissance de tous les éléments d'appréciation dont ils avaient besoin pour traiter utilement, la cour d'appel a violé les articles 6 et 9 du code de procédure civile, ensemble les articles 1315 ancien et 1353 nouveau du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 17-11910
Date de la décision : 12/12/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 13 octobre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 12 déc. 2018, pourvoi n°17-11910


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Didier et Pinet, SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Yves et Blaise Capron

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.11910
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