LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu leur connexité, joint les pourvois n° P 17-24.644 à E 17-24.682 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 juin 2017), que, dans un litige l'opposant à M. Y... et trente-huit autres salariés, la société Embraer aviation a formé une demande de renvoi pour cause de suspicion légitime du conseil de prud'hommes de Bobigny ; qu'après que le président de cette juridiction s'est opposé à cette demande, la cour d'appel de Paris a rejeté la requête en suspicion légitime ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief aux arrêts attaqués de rejeter sa requête en renvoi pour cause de suspicion légitime et de le condamner aux dépens alors, selon le moyen :
1°/ que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement par un tribunal indépendant et impartial ; que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; que nulle partie ne peut être jugée sans avoir été entendue ou appelée ; qu'en l'espèce, il ne résulte ni des arrêts, ni des pièces de la procédure, que la requérante ou son conseil aient été entendus ou appelés par la cour d'appel statuant sur la demande de renvoi pour cause de suspicion légitime, ni qu'ils aient été informés de la date de l'audience de la cour d'appel de Paris qui s'est tenue en chambre du conseil le 20 avril 2017 ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles 14, 16, 356 et 359 du code de procédure civile, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
2°/ que lorsque le ministère public, partie à l'instance, fait connaître son avis écrit, celui-ci doit être communiqué aux parties ; qu'il résulte des arrêts attaqués que le ministère public, qui était partie à l'instance, a transmis à la cour d'appel un avis écrit du 28 mars 2017 concluant à l'irrecevabilité de la demande de renvoi pour cause de suspicion légitime, avis suivi en termes quasi-identiques par la cour d'appel ; qu'il ne ressort cependant pas des mentions des arrêts que cet avis ait été communiqué à la société requérante ou à son conseil ; qu'en conséquence, la cour d'appel a violé les articles 14, 16, 356 et 359 du code de procédure civile, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
3°/ que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi ; qu'en l'espèce, la requérante faisait valoir, preuve à l'appui, qu'au sein du conseil de prud'hommes de Bobigny, juridiction saisie de la contestation relative aux licenciements collectifs pour motif économique, trois conseillers avaient eu à participer à la réorganisation litigieuse, à des niveaux parfois élevés de responsabilités, en leur qualité d'anciens salariés de l'UES Embraer ou de prestataire de services au profit de celle-ci ; que la requérante ajoutait que le bassin d'emploi où était implanté le conseil de prud'hommes avait été lourdement touché par ladite réorganisation, circonstance de nature à affaiblir la distance, le recul et l'impartialité nécessaires à la juridiction saisie du litige dans un contexte économique tendu et difficile ; qu'en jugeant que ces circonstances n'étaient pas de nature à faire peser un doute sur l'impartialité de ces trois conseillers, non appelés à connaitre du litige, ni sur celle du conseil de prud'hommes en son entier, la cour d'appel a violé les articles 14, 16, 356 et 359 du code de procédure civile, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
4°/ que tenus de motiver leur décision, les juges du fond ne peuvent procéder par voie de simple affirmation sans indiquer l'origine de leurs constatations ; qu'en affirmant, pour retenir que l'importance de la réorganisation n'était pas de nature à faire peser un doute sur l'impartialité des conseillers impliqués, ni sur celle de la juridiction, que seuls vingt-six salariés étaient concernés, sans préciser de quelle(s) pièce(s) elle déduisait ce périmètre restreint tandis que la requérante soutenait que cent trente salariés avaient vu leur contrat de travail rompu pour motif économique du fait de cette restructuration, outre qu'il était constant que trente-neuf d'entre eux avaient saisi le conseil de prud'hommes de Bobigny, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
5°/ que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi ; qu'outre la participation de trois membres du conseil de Bobigny à l'élaboration du projet de restructuration et l'importance que celui-ci pouvait revêtir, la requérante soulignait que l'un de ces conseillers avait été personnellement concerné par la réorganisation laquelle avait entrainé la suppression de son contrat de travail, qu'un autre avait saisi ladite juridiction d'une action à l'encontre de la société Embraer aviation international sur le fondement notamment d'une prétendue discrimination syndicale outre que des pressions existaient entre les sociétés de l'UES Embraer et un troisième conseiller non retenu, en sa qualité de directeur général de la société Sodesi, pour les assister dans la réorganisation entreprise ; que la requérante ajoutait que ce type de circonstances avait donné lieu à des renvois systématiques, pour cause de suspicion légitime, des litiges introduits devant le conseil de prud'hommes de Bobigny vers le conseil de prud'hommes de Paris ; qu'en jugeant que la circonstance selon laquelle trois conseillers avaient eu un rôle dans l'élaboration du projet de restructuration et le fait que ce projet revête une certaine importance ne suffisaient pas « à eux seuls » à faire peser un doute sur leur impartialité ou celle de la juridiction sans s'expliquer sur l'intégralité des éléments invoqués par la requérante afin de faire ressortir cette suspicion légitime de partialité, ni les analyser dans leur ensemble, la cour d'appel a violé les articles 14, 16, 356 et 359 du code de procédure civile, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Mais attendu, d'abord, que la procédure de renvoi pour cause de suspicion légitime, qui n'emporte pas détermination d'un droit ou d'une obligation de caractère civil, n'entre pas dans le champ d'application de l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Attendu, ensuite, que selon les articles 351 et 359 du code de procédure civile, il est statué sans qu'il soit nécessaire d'appeler les parties ; qu'il en résulte qu'en l'absence de débat et de toute disposition en ce sens, le ministère public n'a pas à communiquer ses conclusions ou à les mettre à la disposition des parties, afin qu'elles aient la possibilité d'y répondre ;
Attendu, enfin, que la cour d'appel qui a retenu, après avoir souverainement apprécié les éléments de fait qui lui étaient soumis et sans avoir à s'expliquer plus avant sur ceux qu'elle écartait, que la circonstance selon laquelle trois salariés, membres du conseil de prud'hommes ont eu un rôle dans l'élaboration du projet de restructuration de la société et le fait que ce projet revête une certaine importance ne suffisaient pas à eux seuls à faire peser un doute sur leur impartialité alors même qu'aucun d'entre eux ne faisait partie de la composition du conseil qui avait à connaître du litige opposant les salariés à la société pas plus que sur celle du conseil de prud'hommes de Bobigny quand bien même vingt-six salariés sont affectés par la réorganisation mise en oeuvre, en a exactement déduit que la demande en suspicion légitime devait être rejetée ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le second moyen des pourvois n° S 17-24.670, U 17-24.672 et C 17-24.680, ci-après annexé :
Mais attendu que la cour d'appel a retenu qu'aucun des trois salariés, membres du conseil de prud'homme n'avait à connaître du litige opposant les salariés à la société Embraer aviation international ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne la société Embraer aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq décembre deux mille dix-huit.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Embraer aviation international, demanderesse aux pourvois n° P 17-24.644 à V 17-24.673
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief aux arrêts attaqués d'avoir rejeté la requête en renvoi pour cause de suspicion légitime et d'avoir condamné la société Embraer aviation international aux dépens;
AUX MOTIFS tels que rectifiés par arrêt de la cour d'appel de Paris du 14 décembre 2017 QUE « Statuant sur la requête pour cause de suspicion légitime concernant Mme Nathalie Parent D..., M. Jospeh E... et M. Yves F..., conseillers au sein du conseil de prud'hommes de Bobigny, déposée au greffe de cette juridiction, le 05 août 2016 [sauf dans les dossier de MM. Hassane Z... (pourvoi n° S1724670) et Hamid A... (U1724672) où la requête en suspicion légitime a été déposée le 21 novembre 2016], par Maître Leila B... agissant au nom de la SAS Embraer Aviation International ;
Vu les observations formées le 25 novembre 2016 par la présidente du conseil de prud'hommes de Bobigny qui s'oppose à la requête ;
Vu la transmission le 29 novembre 2016 par le directeur du greffe du conseil de prud'hommes de Bobigny de la requête à Madame la première présidente de la cour d'appel de Paris ;
Vu les observations en date du 28 mars 2017 du ministère public qui conclut à l'irrecevabilité de la requête dès lors qu'aucun des conseillers visés dans la requête n'est appelé à trancher le litige opposant la SAS Embraer Aviation International à son ancien salarié (le salarié), qu'ils siègent dans la section commerce et non dans celle de l'encadrement dont relève le litige le concernant, et que l'ampleur de la restructuration ne saurait faire planer un doute sur l'impartialité de l'ensemble des membres de la juridiction concernée ;
SUR CE LA COUR,
Ainsi qu'en dispose l'article 344 du code de procédure civile, applicable à la procédure de suspicion légitime, aux termes de l'article 356 du même code, la demande de suspicion légitime est formée par acte remis au secrétariat de la juridiction qu'elle vise ou par déclaration qui est consignée par le secrétaire dans un procès-verbal.
L'article 356 du code de procédure civile dispose que la demande de renvoi pour cause de suspicion légitime est soumise aux mêmes conditions de recevabilité que la demande de récusation prévue par l'article 341 du même code qui renvoie à l'article L.111-6 du code de l'organisation judiciaire.
Selon l'article 341 du code de procédure civile, sauf dispositions particulières, la récusation d'un juge peut être demandée :
1º Si lui-même ou son conjoint a un intérêt personnel à la contestation ;
2º Si lui-même ou son conjoint est créancier, débiteur, héritier présomptif ou donataire de l'une ou l'autre des parties ;
3º Si lui-même ou son conjoint est parent ou allié de l'une des parties ou de son conjoint jusqu'au quatrième degré inclusivement ;
4º S'il y a eu ou s'il y a procès entre lui ou son conjoint et l'une des parties ou son conjoint;
5º S'il a précédemment connu de l'affaire comme juge ou comme arbitre ou s'il a conseillé l'une des parties ;
6º Si le juge ou son conjoint est chargé d'administrer les biens de l'une des parties ;
7º S'il existe un lien de subordination entre le juge ou son conjoint et l'une des parties ou son conjoint ;
8º S'il y a amitié ou inimitié notoire entre le juge et l'une des parties ;
En matière prud'homale, il doit être fait application de l'article L.1457-1 du code du travail qui dispose que le conseiller prud'homme peut être récusé :
1º Lorsqu'il a un intérêt personnel à la contestation, le seul fait d'être affilié à une organisation syndicale ne constituant pas cet intérêt personnel ;
2º Lorsqu'il est conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité, concubin, parent ou allié jusqu'au degré de cousin germain inclusivement d'une des parties ;
3º Si, dans l'année qui a présidé la récusation, il y a eu action judiciaire, criminelle ou civile entre lui et une des parties ou son conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité, concubin ou ses parents ou alliés en ligne directe ;
4º S'il a donné un avis écrit dans l'affaire ;
5º S'il est employeur ou salarié de l'une des parties en cause.
Par ailleurs, aux termes de l'article 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme, chacun a droit à voir sa cause entendue par un tribunal indépendant et impartial, cette impartialité s'appréciant objectivement, de sorte que peut être récusé un juge dont le comportement ou les propos sont de nature à faire sérieusement douter de son impartialité.
Il est précisé à l'article 342 du code de procédure civile que la partie qui veut récuser un juge doit le faire dès qu'elle a connaissance de la cause de récusation.
Maître Leila B... justifie d'un pouvoir spécial de la SAS Embraer Aviation International tel que le prévoit l'article 343 du code de procédure civile.
La requête est recevable en la forme.
L'avocat de la SAS Embraer Aviation International (EAI) fait valoir que :
1/ S'agissant de Mme Nathalie Parent D...,
- il a existé un lien de subordination entre elle et la direction de la SAS Embraer Aviation International qui se comportait comme son employeur,
- il a existé un lien de subordination entre le demandeur au fond et celle-ci dès lors qu'elle occupait les fonctions de responsable du département des ressources humaines,
- elle a tenu un rôle déterminant dans l'élaboration et la mise en oeuvre de la réorganisation ayant conduit au licenciement du demandeur au fond et à la rupture de son propre contrat de travail;
2 / S'agissant de M. Joseph E...,
- il a été employé dans une des sociétés de l'UES Embraer, la société DB Schenker au sein de laquelle a été transféré son contrat de travail après autorisation de l'inspection du travail, qu'il a contesté la décision, hors des délais légaux ce qui n'a pas permis l'examen de son recours,
- après avoir saisi le conseil de prud'hommes de Bobigny, il a, après radiation de son affaire devant cette juridiction, saisi le conseil de prud'hommes de Créteil du litige l'opposant à la société EAI,
- il existe donc un climat conflictuel avéré entre M. Jospeh E... et l'UES Embraer qui se comportait comme son employeur ;
3/ S'agissant de Monsieur Yves F...,
- il a été impliqué en sa qualité de directeur général de la société Sodesi qui a conseillé les sociétés de l'UES Embraer dans la préparation du projet de restructuration.
Force est de constater que la circonstance selon laquelle ces trois conseillers ont eu un rôle dans l'élaboration du projet de restructuration et le fait que ce projet revête une certaine importance ne suffisent pas à eux seuls à faire peser un doute sur leur impartialité alors même qu'aucun d'entre eux n'a à connaître du litige opposant (le salarié) à la SAS Embraer Aviation International pas plus que sur celle du conseil de prud'hommes de Bobigny quand bien même 26 salariés sont affectés par la réorganisation mise en oeuvre.
La demande en suspicion légitime sera donc rejetée » ;
1) ALORS QUE toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement par un tribunal indépendant et impartial ; que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; que nulle partie ne peut être jugée sans avoir été entendue ou appelée ; qu'en l'espèce, il ne résulte ni des arrêts, ni des pièces de la procédure, que la requérante ou son conseil aient été entendus ou appelés par la cour d'appel statuant sur la demande de renvoi pour cause de suspicion légitime, ni qu'ils aient été informés de la date de l'audience de la cour d'appel de Paris qui s'est tenue en chambre du conseil le 20 avril 2017 ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles 14, 16, 356 et 359 du code de procédure civile, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
2°) ALORS QUE lorsque le ministère public, partie à l'instance, fait connaître son avis écrit, celui-ci doit être communiqué aux parties ; qu'il résulte des arrêts attaqués que le ministère public, qui était partie à l'instance, a transmis à la cour d'appel un avis écrit du 28 mars 2017 concluant à l'irrecevabilité de la demande de renvoi pour cause de suspicion légitime, avis suivi en termes quasi-identiques par la cour d'appel ; qu'il ne ressort cependant pas des mentions des arrêts que cet avis ait été communiqué à la société requérante ou à son conseil ; qu'en conséquence, la cour d'appel a violé les articles 14, 16, 356 et 359 du code de procédure civile, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
3) ALORS en outre QUE toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi ; qu'en l'espèce, la requérante faisait valoir, preuve à l'appui, qu'au sein du conseil de prud'hommes de Bobigny, juridiction saisie de la contestation relative aux licenciements collectifs pour motif économique, trois conseillers avaient eu à participer à la réorganisation litigieuse, à des niveaux parfois élevés de responsabilités, en leur qualité d'anciens salariés de l'UES Embraer ou de prestataire de services au profit de celle-ci ; que la requérante ajoutait que le bassin d'emploi où était implanté le conseil de prud'hommes avait été lourdement touché par ladite réorganisation, circonstance de nature à affaiblir la distance, le recul et l'impartialité nécessaires à la juridiction saisie du litige dans un contexte économique tendu et difficile ; qu'en jugeant que ces circonstances n'étaient pas de nature à faire peser un doute sur l'impartialité de ces trois conseillers, non appelés à connaitre du litige, ni sur celle du conseil de prud'hommes en son entier, la cour d'appel a violé les articles 14, 16, 356 et 359 du code de procédure civile, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
4) ALORS QUE tenus de motiver leur décision, les juges du fond ne peuvent procéder par voie de simple affirmation sans indiquer l'origine de leurs constatations ; qu'en affirmant, pour retenir que l'importance de la réorganisation n'était pas de nature à faire peser un doute sur l'impartialité des conseillers impliqués, ni sur celle de la juridiction, que seuls 26 salariés étaient concernés, sans préciser de quelle(s) pièce(s) elle déduisait ce périmètre restreint tandis que la requérante soutenait que 130 salariés avaient vu leur contrat de travail rompu pour motif économique du fait de cette restructuration, outre qu'il était constant que 39 d'entre eux avaient saisi le conseil de prud'hommes de Bobigny, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
5) ALORS QUE subsidiairement QUE toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi ; qu'outre la participation de trois membres du conseil de Bobigny à l'élaboration du projet de restructuration et l'importance que celui-ci pouvait revêtir, la requérante soulignait que l'un de ces conseillers avait été personnellement concerné par la réorganisation laquelle avait entrainé la suppression de son contrat de travail, qu'un autre avait saisi ladite juridiction d'une action à l'encontre de la société Embraer aviation international sur le fondement notamment d'une prétendue discrimination syndicale outre que des pressions existaient entre les sociétés de l'UES Embraer et un troisième conseiller non retenu, en sa qualité de directeur général de la société Sodesi, pour les assister dans la réorganisation entreprise ; que la requérante ajoutait que ce type de circonstances avait donné lieu à des renvois systématiques, pour cause de suspicion légitime, des litiges introduits devant le conseil de prud'hommes de Bobigny vers le conseil de prud'hommes de Paris ; qu'en jugeant que la circonstance selon laquelle trois conseillers avaient eu un rôle dans l'élaboration du projet de restructuration et le fait que ce projet revête une certaine importance ne suffisaient pas « à eux seuls » à faire peser un doute sur leur impartialité ou celle de la juridiction sans s'expliquer sur l'intégralité des éléments invoqués par la requérante afin de faire ressortir cette suspicion légitime de partialité, ni les analyser dans leur ensemble, la cour d'appel a violé les articles 14, 16, 356 et 359 du code de procédure civile, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(relatif à MM. Hassane Z... (n° S1724670) et Hamid A... (n° U1724672)
Il est fait grief aux arrêts attaqués d'avoir rejeté la requête en renvoi pour cause de suspicion légitime et d'avoir condamné la société Embraer aviation international aux dépens;
AUX MOTIFS tels que rectifiés par arrêt de la cour d'appel de Paris du 14 décembre 2017 QUE « Statuant sur la requête pour cause de suspicion légitime concernant Mme Nathalie Parent D..., M. Jospeh E... et M. Yves F..., conseillers au sein du conseil de prud'hommes de Bobigny, déposée au greffe de cette juridiction, le 21 novembre 2016, par Maître Leila B... agissant au nom de la SAS Embraer aviation international;
Vu les observations formées le 25 novembre 2016 par la présidente du conseil de prud'hommes de Bobigny qui s'oppose à la requête ;
Vu la transmission le 29 novembre 2016 par le directeur du greffe du conseil de prud'hommes de Bobigny de la requête à Madame la première présidente de la cour d'appel de Paris ;
Vu les observations en date du 28 mars 2017 du ministère public qui conclut à l'irrecevabilité de la requête dès lors qu'aucun des conseillers visés dans la requête n'est appelé à trancher le litige opposant la SAS Embraer aviation international à son ancien salarié (nom du salarié), qu'ils siègent dans la section commerce et non dans celle de l'encadrement dont relève le litige le concernant, et que l'ampleur de la restructuration ne saurait faire planer un doute sur l'impartialité de l'ensemble des membres de la juridiction concernée ;
SUR CE LA COUR,
Ainsi qu'en dispose l'article 344 du code de procédure civile, applicable à la procédure de suspicion légitime, aux termes de l'article 356 du même code, la demande de suspicion légitime est formée par acte remis au secrétariat de la juridiction qu'elle vise ou par déclaration qui est consignée par le secrétaire dans un procès-verbal.
L'article 356 du code de procédure civile dispose que la demande de renvoi pour cause de suspicion légitime est soumise aux mêmes conditions de recevabilité que la demande de récusation prévue par l'article 341 du même code qui renvoie à l'article L.111- 6 du code de l'organisation judiciaire.
Selon l'article 341 du code de procédure civile, sauf dispositions particulières, la récusation d'un juge peut être demandée :
1º Si lui-même ou son conjoint a un intérêt personnel à la contestation ;
2º Si lui-même ou son conjoint est créancier, débiteur, héritier présomptif ou donataire de l'une ou l'autre des parties ;
3º Si lui-même ou son conjoint est parent ou allié de l'une des parties ou de son conjoint jusqu'au quatrième degré inclusivement ;
4º S'il y a eu ou s'il y a procès entre lui ou son conjoint et l'une des parties ou son conjoint;
5º S'il a précédemment connu de l'affaire comme juge ou comme arbitre ou s'il a conseillé l'une des parties ;
6º Si le juge ou son conjoint est chargé d'administrer les biens de l'une des parties ;
7º S'il existe un lien de subordination entre le juge ou son conjoint et l'une des parties ou son conjoint ;
8º S'il y a amitié ou inimitié notoire entre le juge et l'une des parties ;
En matière prud'homale, il doit être fait application de l'article L.1457-1 du code du travail qui dispose que le conseiller prud'homme peut être récusé :
1º Lorsqu'il a un intérêt personnel à la contestation, le seul fait d'être affilié à une organisation syndicale ne constituant pas cet intérêt personnel ;
2º Lorsqu'il est conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité, concubin, parent ou allié jusqu'au degré de cousin germain inclusivement d'une des parties ;
3º Si, dans l'année qui a présidé la récusation, il y a eu action judiciaire, criminelle ou civile entre lui et une des parties ou son conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité, concubin ou ses parents ou alliés en ligne directe ;
4º S'il a donné un avis écrit dans l'affaire ;
5º S'il est employeur ou salarié de l'une des parties en cause.
Par ailleurs, aux termes de l'article 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme, chacun a droit à voir sa cause entendue par un tribunal indépendant et impartial, cette impartialité s'appréciant objectivement, de sorte que peut être récusé un juge dont le comportement ou les propos sont de nature à faire sérieusement douter de son impartialité.
Il est précisé à l'article 342 du code de procédure civile que la partie qui veut récuser un juge doit le faire dès qu'elle a connaissance de la cause de récusation.
Maître Leila B... justifie d'un pouvoir spécial de la SAS Embraer aviation international tel que le prévoit l'article 343 du code de procédure civile.
La requête est recevable en la forme.
L'avocat de la SAS Embraer aviation international (EAI) fait valoir que :
1/ S'agissant de Mme Nathalie Parent D...,
- il a existé un lien de subordination entre elle et la direction de la SAS Embraer Aviation International qui se comportait comme son employeur,
- il a existé un lien de subordination entre le demandeur au fond et celle-ci dès lors qu'elle occupait les fonctions de responsable du département des ressources humaines,
- elle a tenu un rôle déterminant dans l'élaboration et la mise en oeuvre de la réorganisation ayant conduit au licenciement du demandeur au fond et à la rupture de son propre contrat de travail;
2 / S'agissant de M. Jospeh E...,
- il a été employé dans une des sociétés de l'UES Embraer, la société DB Schenker au sein de laquelle a été transféré son contrat de travail après autorisation de l'inspection du travail, qu'il a contesté la décision, hors des délais légaux ce qui n'a pas permis l'examen de son recours,
- après avoir saisi le conseil de prud'hommes de Bobigny, il a, après radiation de son affaire devant cette juridiction, saisi le conseil de prud'hommes de Créteil du litige l'opposant à la société EAI,
- il existe donc un climat conflictuel avéré entre M. Jospeh E... et l'UES Embraer qui se comportait comme son employeur ;
3/ S'agissant de Monsieur Yves F...,
- il a été impliqué en sa qualité de directeur général de la société Sodesi qui a conseillé les sociétés de l'UES Embraer dans la préparation du projet de restructuration.
Force est de constater que la circonstance selon laquelle ces trois conseillers ont eu un rôle dans l'élaboration du projet de restructuration et le fait que ce projet revête une certaine importance ne suffisent pas à eux seuls à faire peser un doute sur leur impartialité alors même qu'aucun d'entre eux n'a à connaître du litige opposant (le salarié) à la SAS Embraer aviation international pas plus que sur celle du conseil de prud'hommes de Bobigny quand bien même 26 salariés sont affectés par la réorganisation mise en oeuvre.
La demande en suspicion légitime sera donc rejetée » ;
ALORS QUE les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'au soutien de sa requête en renvoi pour cause de suspicion légitime, la requérante avait produit sa convocation devant la section Commerce du bureau de conciliation et d'orientation du conseil de Bobigny, dans les litiges l'opposant à MM. Hassane Z... et Hamid A..., dont il ressortait que, contrairement à ce qu'avait retenu le ministère public, les conseillers visés par la requête, anciens salariés ou prestataire de services de l'UES Embraer ayant participé à la réorganisation contestée, étaient par ailleurs membres de la section dont relevait le litige concernant ces deux salariés ; qu'en jugeant, pour rejeter la requête en renvoi pour cause de suspicion légitime de la société Embraer aviation international à l'encontre de trois membres du conseil de prud'hommes de Bobigny, qu'aucun d'eux n'avait à connaitre du litige l'opposant aux salariés précités, sans examiner les convocations litigieuses faisant apparaitre que les conseillers en cause étaient à tout le moins membres de la section appelée à trancher l'affaire, circonstance de nature à faire peser un doute légitime sur l'impartialité de cette formation, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Embraer aviation international, demanderesse aux pourvois
n° W 17-24.674 à C 17-24.680
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief aux arrêts attaqués d'avoir rejeté la requête en renvoi pour cause de suspicion légitime et d'avoir condamné la société aux dépens;
AUX MOTIFS tels que rectifiés par arrêt de la cour d'appel de Paris du 14 décembre 2017 QUE « Statuant sur la requête pour cause de suspicion légitime concernant Mme Nathalie Parent D..., M. Jospeh E... et M. Yves F..., conseillers au sein du conseil de prud'hommes de Bobigny, déposée au greffe de cette juridiction, le 05 août 2016 [sauf dans le dossier de Mme Christine C... (pourvoi n° C1724680) où la requête en suspicion légitime a été déposée le 21 novembre 2016], par Maître Leila B... agissant au nom de la SAS Embraer aviation Europe [sauf dans le dossier de Mme Christine C... (pourvoi n° C1724680) où la requête en suspicion légitime a été déposée au nom de la société Embraer aviation international ] ;
Vu les observations formées le 25 novembre 2016 par la présidente du conseil de prud'hommes de Bobigny qui s'oppose à la requête ;
Vu la transmission le 29 novembre 2016 par le directeur du greffe du conseil de prud'hommes de Bobigny de la requête à Madame la première présidente de la cour d'appel de Paris ;
Vu les observations en date du 28 mars 2017 du ministère public qui conclut à l'irrecevabilité de la requête dès lors qu'aucun des conseillers visés dans la requête n'est appelé à trancher le litige opposant la SAS Embraer aviation Europe [sauf dans le dossier de Mme Christine C... (pourvoi n° C1724680) où la requête en suspicion légitime a été déposée au nom de la société Embraer aviation international] à son ancien salarié (nom du salarié), qu'ils siègent dans la section commerce et non dans celle de l'encadrement dont relève le litige le concernant, et que l'ampleur de la restructuration ne saurait faire planer un doute sur l'impartialité de l'ensemble des membres de la juridiction concernée ;
SUR CE LA COUR,
Ainsi qu'en dispose l'article 344 du code de procédure civile, applicable à la procédure de suspicion légitime, aux termes de l'article 356 du même code, la demande de suspicion légitime est formée par acte remis au secrétariat de la juridiction qu'elle vise ou par déclaration qui est consignée par le secrétaire dans un procès-verbal.
L'article 356 du code de procédure civile dispose que la demande de renvoi pour cause de suspicion légitime est soumise aux mêmes conditions de recevabilité que la demande de récusation prévue par l'article 341 du même code qui renvoie à l'article L.111- 6 du code de l'organisation judiciaire.
Selon l'article 341 du code de procédure civile, sauf dispositions particulières, la récusation d'un juge peut être demandée :
1º Si lui-même ou son conjoint a un intérêt personnel à la contestation ;
2º Si lui-même ou son conjoint est créancier, débiteur, héritier présomptif ou donataire de l'une ou l'autre des parties ;
3º Si lui-même ou son conjoint est parent ou allié de l'une des parties ou de son conjoint jusqu'au quatrième degré inclusivement ;
4º S'il y a eu ou s'il y a procès entre lui ou son conjoint et l'une des parties ou son conjoint;
5º S'il a précédemment connu de l'affaire comme juge ou comme arbitre ou s'il a conseillé l'une des parties ;
6º Si le juge ou son conjoint est chargé d'administrer les biens de l'une des parties ;
7º S'il existe un lien de subordination entre le juge ou son conjoint et l'une des parties ou son conjoint ;
8º S'il y a amitié ou inimitié notoire entre le juge et l'une des parties ;
En matière prud'homale, il doit être fait application de l'article L.1457-1 du code du travail qui dispose que le conseiller prud'homme peut être récusé :
1º Lorsqu'il a un intérêt personnel à la contestation, le seul fait d'être affilié à une organisation syndicale ne constituant pas cet intérêt personnel ;
2º Lorsqu'il est conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité, concubin, parent ou allié jusqu'au degré de cousin germain inclusivement d'une des parties ;
3º Si, dans l'année qui a présidé la récusation, il y a eu action judiciaire, criminelle ou civile entre lui et une des parties ou son conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité, concubin ou ses parents ou alliés en ligne directe ;
4º S'il a donné un avis écrit dans l'affaire ;
5º S'il est employeur ou salarié de l'une des parties en cause.
Par ailleurs, aux termes de l'article 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme, chacun a droit à voir sa cause entendue par un tribunal indépendant et impartial, cette impartialité s'appréciant objectivement, de sorte que peut être récusé un juge dont le comportement ou les propos sont de nature à faire sérieusement douter de son impartialité.
Il est précisé à l'article 342 du code de procédure civile que la partie qui veut récuser un juge doit le faire dès qu'elle a connaissance de la cause de récusation.
Maître Leila B... justifie d'un pouvoir spécial de la SAS Embraer aviation Europe [sauf dans le dossier de Mme Christine C... (pourvoi n° C1724680) où la requête en suspicion légitime a été déposée au nom de la société Embraer aviation international ] tel que le prévoit l'article 343 du code de procédure civile.
La requête est recevable en la forme.
L'avocat de la SAS Embraer aviation Europe (EAE) [sauf dans le dossier de Mme Christine C... (pourvoi n° C1724680) où la requête en suspicion légitime a été déposée au nom de la société Embraer aviation international ] fait valoir que :
1/ S'agissant de Mme Nathalie Parent D...,
- il a existé un lien de subordination entre elle et la direction de la SAS Embraer Aviation International qui se comportait comme son employeur,
- il a existé un lien de subordination entre le demandeur au fond et celle-ci dès lors qu'elle occupait les fonctions de responsable du département des ressources humaines,
- elle a tenu un rôle déterminant dans l'élaboration et la mise en oeuvre de la réorganisation ayant conduit au licenciement du demandeur au fond et à la rupture de son propre contrat de travail;
2 / S'agissant de M. Jospeh E...,
- il a été employé dans une des sociétés de l'UES Embraer, la société DB Schenker au sein de laquelle a été transféré son contrat de travail après autorisation de l'inspection du travail, qu'il a contesté la décision, hors des délais légaux ce qui n'a pas permis l'examen de son recours,
- après avoir saisi le conseil de prud'hommes de Bobigny, il a, après radiation de son affaire devant cette juridiction, saisi le conseil de prud'hommes de Creteil du litige l'opposant à la société EAI,
- il existe donc un climat conflictuel avéré entre M. Jospeh E... et l'UES Embraer qui se comportait comme son employeur ;
3/ S'agissant de Monsieur Yves F...,
- il a été impliqué en sa qualité de directeur général de la société Sodesi qui a conseillé les sociétés de l'UES Embraer dans la préparation du projet de restructuration.
Force est de constater que la circonstance selon laquelle ces trois conseillers ont eu un rôle dans l'élaboration du projet de restructuration et le fait que ce projet revête une certaine importance ne suffisent pas à eux seuls à faire peser un doute sur leur impartialité alors même qu'aucun d'entre eux n'a à connaître du litige opposant (le salarié) à la SAS Embraer aviation Europe [sauf dans le dossier de Mme Christine C... (pourvoi n° C1724680) où la requête en suspicion légitime a été déposée au nom de la société Embraer aviation international ] pas plus que sur celle du conseil de prud'hommes de Bobigny quand bien même 26 salariés sont affectés par la réorganisation mise en oeuvre.
La demande en suspicion légitime sera donc rejetée » ;
1) ALORS QUE toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement par un tribunal indépendant et impartial ; que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; que nulle partie ne peut être jugée sans avoir été entendue ou appelée ; qu'en l'espèce, il ne résulte ni des arrêts, ni des pièces de la procédure, que la requérante ou son conseil aient été entendus ou appelés par la cour d'appel statuant sur la demande de renvoi pour cause de suspicion légitime, ni qu'ils aient été informés de la date de l'audience de la cour d'appel de Paris qui s'est tenue en chambre du conseil le 20 avril 2017 ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles 14, 16, 356 et 359 du code de procédure civile, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
2) ALORS QUE lorsque le ministère public, partie à l'instance, fait connaître son avis écrit, celui-ci doit être communiqué aux parties ; qu'il résulte des arrêts attaqués que le ministère public, qui était partie à l'instance, a transmis à la cour d'appel un avis écrit du 28 mars 2017 concluant à l'irrecevabilité de la demande de renvoi pour cause de suspicion légitime, avis suivi en termes quasi-identiques par la cour d'appel ; qu'il ne ressort cependant pas des mentions des arrêts que cet avis ait été communiqué à la société requérante ou à son conseil ; qu'en conséquence, la cour d'appel a violé les articles 14, 16, 356 et 359 du code de procédure civile, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
3) ALORS en outre QUE toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi ; qu'en l'espèce, la requérante faisait valoir, preuve à l'appui, qu'au sein du conseil de prud'hommes de Bobigny, juridiction saisie de la contestation relative aux licenciements collectifs pour motif économique, trois conseillers avaient eu à participer à la réorganisation litigieuse, à des niveaux parfois élevés de responsabilités, en leur qualité d'anciens salariés de l'UES Embraer ou de prestataire de services au profit de celle-ci ; que la requérante ajoutait que le bassin d'emploi où était implanté le conseil de prud'hommes avait été lourdement touché par ladite réorganisation, circonstance de nature à affaiblir la distance, le recul et l'impartialité nécessaires à la juridiction saisie du litige dans un contexte économique tendu et difficile ; qu'en jugeant que ces circonstances n'étaient pas de nature à faire peser un doute sur l'impartialité de ces trois conseillers, non appelés à connaitre du litige, ni sur celle du conseil de prud'hommes en son entier, la cour d'appel a violé les articles 14, 16, 356 et 359 du code de procédure civile, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
4) ALORS QUE tenus de motiver leur décision, les juges du fond ne peuvent procéder par voie de simple affirmation sans indiquer l'origine de leurs constatations ; qu'en affirmant, pour retenir que l'importance de la réorganisation n'était pas de nature à faire peser un doute sur l'impartialité des conseillers impliqués, ni sur celle de la juridiction, que seuls 26 salariés étaient concernés, sans préciser de quelle(s) pièce(s) elle déduisait ce périmètre restreint tandis que la requérante soutenait que 130 salariés avaient vu leur contrat de travail rompu pour motif économique du fait de cette restructuration, outre qu'il était constant que 39 d'entre eux avaient saisi le conseil de prud'hommes de Bobigny, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
5) ALORS QUE subsidiairement QUE toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi ; qu'outre la participation de trois membres du conseil de Bobigny à l'élaboration du projet de restructuration et l'importance que celui-ci pouvait revêtir, la requérante soulignait que l'un de ces conseillers avait été personnellement concerné par la réorganisation laquelle avait entrainé la suppression de son contrat de travail, qu'un autre avait saisi ladite juridiction d'une action à l'encontre de la société Embraer aviation international sur le fondement notamment d'une prétendue discrimination syndicale outre que des pressions existaient entre les sociétés de l'UES Embraer et un troisième conseiller non retenu, en sa qualité de directeur général de la société Sodesi, pour les assister dans la réorganisation entreprise ; que la requérante ajoutait que ce type de circonstances avait donné lieu à des renvois systématiques, pour cause de suspicion légitime, des litiges introduits devant le conseil de prud'hommes de Bobigny vers le conseil de prud'hommes de Paris ; qu'en jugeant que la circonstance selon laquelle trois conseillers avaient eu un rôle dans l'élaboration du projet de restructuration et le fait que ce projet revête une certaine importance ne suffisaient pas « à eux seuls » à faire peser un doute sur leur impartialité ou celle de la juridiction sans s'expliquer sur l'intégralité des éléments invoqués par la requérante afin de faire ressortir cette suspicion légitime de partialité, ni les analyser dans leur ensemble, la cour d'appel a violé les articles 14, 16, 356 et 359 du code de procédure civile, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(relatif à Mme Christine C... : pourvoi n° C1724680)
Il est fait grief aux arrêts attaqués d'avoir rejeté la requête en renvoi pour cause de suspicion légitime et d'avoir condamné la société aux dépens;
AUX MOTIFS tels que rectifiés par arrêt de la cour d'appel de Paris du 14 décembre 2017 QUE « Statuant sur la requête pour cause de suspicion légitime concernant Mme Nathalie Parent D..., M. Jospeh E... et M. Yves F..., conseillers au sein du conseil de prud'hommes de Bobigny, déposée au greffe de cette juridiction, le 21 novembre 2016, par Maître Leila B... agissant au nom de la SAS Embraer Aviation Europe (en réalité la société Embraer aviation international);
Vu les observations formées le 25 novembre 2016 par la présidente du conseil de prud'hommes de Bobigny qui s'oppose à la requête ;
Vu la transmission le 29 novembre 2016 par le directeur du greffe du conseil de prud'hommes de Bobigny de la requête à Madame la première présidente de la cour d'appel de Paris ;
Vu les observations en date du 28 mars 2017 du ministère public qui conclut à l'irrecevabilité de la requête dès lors qu'aucun des conseillers visés dans la requête n'est appelé à trancher le litige opposant la SAS Embraer Aviation Europe (en réalité la société Embraer aviation international) à son ancien salarié Mme Christine C... qu'ils siègent dans la section commerce et non dans celle de l'encadrement dont relève le litige le concernant, et que l'ampleur de la restructuration ne saurait faire planer un doute sur l'impartialité de l'ensemble des membres de la juridiction concernée ;
SUR CE LA COUR,
Ainsi qu'en dispose l'article 344 du code de procédure civile, applicable à la procédure de suspicion légitime, aux termes de l'article 356 du même code, la demande de suspicion légitime est formée par acte remis au secrétariat de la juridiction qu'elle vise ou par déclaration qui est consignée par le secrétaire dans un procès-verbal.
L'article 356 du code de procédure civile dispose que la demande de renvoi pour cause de suspicion légitime est soumise aux mêmes conditions de recevabilité que la demande de récusation prévue par l'article 341 du même code qui renvoie à l'article L.111- 6 du code de l'organisation judiciaire.
Selon l'article 341 du code de procédure civile, sauf dispositions particulières, la récusation d'un juge peut être demandée :
1º Si lui-même ou son conjoint a un intérêt personnel à la contestation ;
2º Si lui-même ou son conjoint est créancier, débiteur, héritier présomptif ou donataire de l'une ou l'autre des parties ;
3º Si lui-même ou son conjoint est parent ou allié de l'une des parties ou de son conjoint jusqu'au quatrième degré inclusivement ;
4º S'il y a eu ou s'il y a procès entre lui ou son conjoint et l'une des parties ou son conjoint;
5º S'il a précédemment connu de l'affaire comme juge ou comme arbitre ou s'il a conseillé l'une des parties ;
6º Si le juge ou son conjoint est chargé d'administrer les biens de l'une des parties ;
7º S'il existe un lien de subordination entre le juge ou son conjoint et l'une des parties ou son conjoint ;
8º S'il y a amitié ou inimitié notoire entre le juge et l'une des parties ;
En matière prud'homale, il doit être fait application de l'article L.1457-1 du code du travail qui dispose que le conseiller prud'homme peut être récusé :
1º Lorsqu'il a un intérêt personnel à la contestation, le seul fait d'être affilié à une organisation syndicale ne constituant pas cet intérêt personnel ;
2º Lorsqu'il est conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité, concubin, parent ou allié jusqu'au degré de cousin germain inclusivement d'une des parties ;
3º Si, dans l'année qui a présidé la récusation, il y a eu action judiciaire, criminelle ou civile entre lui et une des parties ou son conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité, concubin ou ses parents ou alliés en ligne directe ;
4º S'il a donné un avis écrit dans l'affaire ;
5º S'il est employeur ou salarié de l'une des parties en cause.
Par ailleurs, aux termes de l'article 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme, chacun a droit à voir sa cause entendue par un tribunal indépendant et impartial, cette impartialité s'appréciant objectivement, de sorte que peut être récusé un juge dont le comportement ou les propos sont de nature à faire sérieusement douter de son impartialité.
Il est précisé à l'article 342 du code de procédure civile que la partie qui veut récuser un juge doit le faire dès qu'elle a connaissance de la cause de récusation.
Maître Leila B... justifie d'un pouvoir spécial de la SAS Embraer Aviation Europe (en réalité la société Embraer aviation international) tel que le prévoit l'article du code de procédure civile.
La requête est recevable en la forme.
L'avocat de la SAS SAS Embraer Aviation Europe (en réalité la société Embraer aviation international) fait valoir que :
1/ S'agissant de Mme Nathalie Parent D...,
- il a existé un lien de subordination entre elle et la direction de la SAS Embraer Aviation International qui se comportait comme son employeur,
- il a existé un lien de subordination entre le demandeur au fond et celle-ci dès lors qu'elle occupait les fonctions de responsable du département des ressources humaines,
- elle a tenu un rôle déterminant dans l'élaboration et la mise en oeuvre de la réorganisation ayant conduit au licenciement du demandeur au fond et à la rupture de son propre contrat de travail;
2 / S'agissant de M. Jospeh E...,
- il a été employé dans une des sociétés de l'UES Embraer, la société DB Schenker au sein de laquelle a été transféré son contrat de travail après autorisation de l'inspection du travail, qu'il a contesté la décision, hors des délais légaux ce qui n'a pas permis l'examen de son recours,
- après avoir saisi le conseil de prud'hommes de Bobigny, il a, après radiation de son affaire devant cette juridiction, saisi le conseil de prud'hommes de Creteil du litige l'opposant à la société EAI,
- il existe donc un climat conflictuel avéré entre M. Jospeh E... et l'UES Embraer qui se comportait comme son employeur ;
3/ S'agissant de Monsieur Yves F...,
- il a été impliqué en sa qualité de directeur général de la société Sodesi qui a conseillé les sociétés de l'UES Embraer dans la préparation du projet de restructuration.
Force est de constater que la circonstance selon laquelle ces trois conseillers ont eu un rôle dans l'élaboration du projet de restructuration et le fait que ce projet revête une certaine importance ne suffisent pas à eux seuls à faire peser un doute sur leur impartialité alors même qu'aucun d'entre eux n'a à connaître du litige opposant Mme Christine C... à la SAS Embraer Aviation Europe (en réalité la société Embraer aviation international) pas plus que sur celle du conseil de prud'hommes de Bobigny quand bien même 26 salariés sont affectés par la réorganisation mise en oeuvre.
La demande en suspicion légitime sera donc rejetée » ;
ALORS QUE les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'au soutien de sa requête en renvoi pour cause de suspicion légitime, la requérante avait produit sa convocation devant la section Commerce du bureau de conciliation et d'orientation du conseil de Bobigny, dans le litige l'opposant à Mme Christine C..., dont il ressortait que, contrairement à ce qu'avait retenu le ministère public dans ses observations visées par l'arrêt, les conseillers visés par la requête, anciens salariés ou prestataire de services de l'UES Embraer ayant participé à la réorganisation contestée, étaient par ailleurs membres de la section dont relevait le litige concernant cette salariée ; qu'en jugeant, pour rejeter la requête en renvoi pour cause de suspicion légitime de la société à l'encontre de trois membres du conseil de prud'hommes de Bobigny, qu'aucun d'eux n'avait à connaitre du litige l'opposant à Mme C..., sans examiner la convocation litigieuse faisant apparaitre que les conseillers en cause étaient à tout le moins membres de la section appelée à trancher l'affaire, circonstance de nature à faire peser un doute légitime sur l'impartialité de cette formation, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Embraer aviation international, demanderesse aux pourvois n° D 17-24.681 à E 17-24.682
Il est fait grief aux arrêts attaqués d'avoir rejeté la requête en renvoi pour cause de suspicion légitime et d'avoir condamné la société Embraer Europe aux dépens;
AUX MOTIFS QUE « Statuant sur la requête pour cause de suspicion légitime concernant Mme Nathalie Parent D..., M. Jospeh E... et M. Yves F..., conseillers au sein du conseil de prud'hommes de Bobigny, déposée au greffe de cette juridiction, le 05 août 2016, par Maître Leila B... agissant au nom de la SAS Embraer Europe;
Vu les observations formées le 25 novembre 2016 par la présidente du conseil de prud'hommes de Bobigny qui s'oppose à la requête ;
Vu la transmission le 29 novembre 2016 par le directeur du greffe du conseil de prud'hommes de Bobigny de la requête à Madame la première présidente de la cour d'appel de Paris ;
Vu les observations en date du 28 mars 2017 du ministère public qui conclut à l'irrecevabilité de la requête dès lors qu'aucun des conseillers visés dans la requête n'est appelé à trancher le litige opposant la SAS Embraer Europe à son ancien salarié (le salarié), qu'ils siègent dans la section commerce et non dans celle de l'encadrement dont relève le litige le concernant, et que l'ampleur de la restructuration ne saurait faire planer un doute sur l'impartialité de l'ensemble des membres de la juridiction concernée ;
SUR CE LA COUR,
Ainsi qu'en dispose l'article 344 du code de procédure civile, applicable à la procédure de suspicion légitime, aux termes de l'article 356 du même code, la demande de suspicion légitime est formée par acte remis au secrétariat de la juridiction qu'elle vise ou par déclaration qui est consignée par le secrétaire dans un procès-verbal.
L'article 356 du code de procédure civile dispose que la demande de renvoi pour cause de suspicion légitime est soumise aux mêmes conditions de recevabilité que la demande de récusation prévue par l'article 341 du même code qui renvoie à l'article L.111- 6 du code de l'organisation judiciaire.
Selon l'article 341 du code de procédure civile, sauf dispositions particulières, la récusation d'un juge peut être demandée :
1º Si lui-même ou son conjoint a un intérêt personnel à la contestation ;
2º Si lui-même ou son conjoint est créancier, débiteur, héritier présomptif ou donataire de l'une ou l'autre des parties ;
3º Si lui-même ou son conjoint est parent ou allié de l'une des parties ou de son conjoint jusqu'au quatrième degré inclusivement ;
4º S'il y a eu ou s'il y a procès entre lui ou son conjoint et l'une des parties ou son conjoint;
5º S'il a précédemment connu de l'affaire comme juge ou comme arbitre ou s'il a conseillé l'une des parties ;
6º Si le juge ou son conjoint est chargé d'administrer les biens de l'une des parties ;
7º S'il existe un lien de subordination entre le juge ou son conjoint et l'une des parties ou son conjoint ;
8º S'il y a amitié ou inimitié notoire entre le juge et l'une des parties ;
En matière prud'homale, il doit être fait application de l'article L.1457-1 du code du travail qui dispose que le conseiller prud'homme peut être récusé :
1º Lorsqu'il a un intérêt personnel à la contestation, le seul fait d'être affilié à une organisation syndicale ne constituant pas cet intérêt personnel ;
2º Lorsqu'il est conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité, concubin, parent ou allié jusqu'au degré de cousin germain inclusivement d'une des parties ;
3º Si, dans l'année qui a présidé la récusation, il y a eu action judiciaire, criminelle ou civile entre lui et une des parties ou son conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité, concubin ou ses parents ou alliés en ligne directe ;
4º S'il a donné un avis écrit dans l'affaire ;
5º S'il est employeur ou salarié de l'une des parties en cause.
Par ailleurs, aux termes de l'article 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme, chacun a droit à voir sa cause entendue par un tribunal indépendant et impartial, cette impartialité s'appréciant objectivement, de sorte que peut être récusé un juge dont le comportement ou les propos sont de nature à faire sérieusement douter de son impartialité.
Il est précisé à l'article 342 du code de procédure civile que la partie qui veut récuser un juge doit le faire dès qu'elle a connaissance de la cause de récusation.
Maître Leila B... justifie d'un pouvoir spécial de la SAS Embraer Europe tel que le prévoit l'article 343 du code de procédure civile.
La requête est recevable en la forme.
L'avocat de la SAS Embraer Europe (EESA) fait valoir que :
1/ S'agissant de Mme Nathalie Parent D...,
- il a existé un lien de subordination entre elle et la direction de la SAS Embraer Aviation International qui se comportait comme son employeur,
- il a existé un lien de subordination entre le demandeur au fond et celle-ci dès lors qu'elle occupait les fonctions de responsable du département des ressources humaines,
- elle a tenu un rôle déterminant dans l'élaboration et la mise en oeuvre de la réorganisation ayant conduit au licenciement du demandeur au fond et à la rupture de son propre contrat de travail;
2 / S'agissant de M. Jospeh E...,
- il a été employé dans une des sociétés de l'UES Embraer, la société DB Schenker au sein de laquelle a été transféré son contrat de travail après autorisation de l'inspection du travail, qu'il a contesté la décision, hors des délais légaux ce qui n'a pas permis l'examen de son recours,
- après avoir saisi le conseil de prud'hommes de Bobigny, il a, après radiation de son affaire devant cette juridiction, saisi le conseil de prud'hommes de Creteil du litige l'opposant à la société EAI,
- il existe donc un climat conflictuel avéré entre M. Jospeh E... et l'UES EMBRAER qui se comportait comme son employeur ;
3/ S'agissant de Monsieur Yves F...,
- il a été impliqué en sa qualité de directeur général de la société Sodesi qui a conseillé les sociétés de l'UES Embraer dans la préparation du projet de restructuration.
Force est de constater que la circonstance selon laquelle ces trois conseillers ont eu un rôle dans l'élaboration du projet de restructuration et le fait que ce projet revête une certaine importance ne suffisent pas à eux seuls à faire peser un doute sur leur impartialité alors même qu'aucun d'entre eux n'a à connaître du litige opposant (le salarié) à la SAS Embraer Europe pas plus que sur celle du conseil de prud'hommes de Bobigny quand bien même 26 salariés sont affectés par la réorganisation mise en oeuvre.
La demande en suspicion légitime sera donc rejetée » ;
1) ALORS QUE toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement par un tribunal indépendant et impartial ; que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; que nulle partie ne peut être jugée sans avoir été entendue ou appelée ; qu'en l'espèce, il ne résulte ni des arrêts, ni des pièces de la procédure, que la requérante ou son conseil aient été entendus ou appelés par la cour d'appel statuant sur la demande de renvoi pour cause de suspicion légitime, ni qu'ils aient été informés de la date de l'audience de la cour d'appel de Paris qui s'est tenue en chambre du conseil le 20 avril 2017 ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles 14, 16, 356 et 359 du code de procédure civile, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
2) ALORS QUE lorsque le ministère public, partie à l'instance, fait connaître son avis écrit, celui-ci doit être communiqué aux parties ; qu'il résulte des arrêts attaqués que le ministère public, qui était partie à l'instance, a transmis à la cour d'appel un avis écrit du 28 mars 2017 concluant à l'irrecevabilité de la demande de renvoi pour cause de suspicion légitime, avis suivi en termes quasi-identiques par la cour d'appel ; qu'il ne ressort cependant pas des mentions des arrêts que cet avis ait été communiqué à la société requérante ou à son conseil ; qu'en conséquence, la cour d'appel a violé les articles 14, 16, 356 et 359 du code de procédure civile, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
3) ALORS en outre QUE toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi ; qu'en l'espèce, la requérante faisait valoir, preuve à l'appui, qu'au sein du conseil de prud'hommes de Bobigny, juridiction saisie de la contestation relative aux licenciements collectifs pour motif économique, trois conseillers avaient eu à participer à la réorganisation litigieuse, à des niveaux parfois élevés de responsabilités, en leur qualité d'anciens salariés de l'UES Embraer ou de prestataire de services au profit de celle-ci ; que la requérante ajoutait que le bassin d'emploi où était implanté le conseil de prud'hommes avait été lourdement touché par ladite réorganisation, circonstance de nature à affaiblir la distance, le recul et l'impartialité nécessaires à la juridiction saisie du litige dans un contexte économique tendu et difficile ; qu'en jugeant que ces circonstances n'étaient pas de nature à faire peser un doute sur l'impartialité de ces trois conseillers, non appelés à connaitre du litige, ni sur celle du conseil de prud'hommes en son entier, la cour d'appel a violé les articles 14, 16, 356 et 359 du code de procédure civile, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
4) ALORS QUE tenus de motiver leur décision, les juges du fond ne peuvent procéder par voie de simple affirmation sans indiquer l'origine de leurs constatations ; qu'en affirmant, pour retenir que l'importance de la réorganisation n'était pas de nature à faire peser un doute sur l'impartialité des conseillers impliqués, ni sur celle de la juridiction, que seuls 26 salariés étaient concernés, sans préciser de quelle(s) pièce(s) elle déduisait ce périmètre restreint tandis que la requérante soutenait que 130 salariés avaient vu leur contrat de travail rompu pour motif économique du fait de cette restructuration, outre qu'il était constant que 39 d'entre eux avaient saisi le conseil de prud'hommes de Bobigny, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
5) ALORS QUE subsidiairement QUE toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi ; qu'outre la participation de trois membres du conseil de Bobigny à l'élaboration du projet de restructuration et l'importance que celui-ci pouvait revêtir, la requérante soulignait que l'un de ces conseillers avait été personnellement concerné par la réorganisation laquelle avait entrainé la suppression de son contrat de travail, qu'un autre avait saisi ladite juridiction d'une action à l'encontre de la société Embraer aviation international sur le fondement notamment d'une prétendue discrimination syndicale outre que des pressions existaient entre les sociétés de l'UES Embraer et un troisième conseiller non retenu, en sa qualité de directeur général de la société Sodesi, pour les assister dans la réorganisation entreprise ; que la requérante ajoutait que ce type de circonstances avait donné lieu à des renvois systématiques, pour cause de suspicion légitime, des litiges introduits devant le conseil de prud'hommes de Bobigny vers le conseil de prud'hommes de Paris ; qu'en jugeant que la circonstance selon laquelle trois conseillers avaient eu un rôle dans l'élaboration du projet de restructuration et le fait que ce projet revête une certaine importance ne suffisaient pas « à eux seuls » à faire peser un doute sur leur impartialité ou celle de la juridiction sans s'expliquer sur l'intégralité des éléments invoqués par la requérante afin de faire ressortir cette suspicion légitime de partialité, ni les analyser dans leur ensemble, la cour d'appel a violé les articles 14, 16, 356 et 359 du code de procédure civile, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.