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05/12/2018 | FRANCE | N°17-22299

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 05 décembre 2018, 17-22299


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Y..., engagé le 26 octobre 1987 par la société Suforem, est investi de mandats représentatifs et syndicaux depuis 1998 ; que par avis en date du 1er mars 2013 il a été déclaré par le médecin du travail inapte à tous postes dans l'entreprise ; que la demande d'autorisation de licenciement a fait l'objet d'un refus le 17 juin 2013 ; que suite à un nouvel avis d'inaptitude le 21 août 2013, l'administration a opposé un nouveau refus d'autorisation de licencier le salarié

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Y..., engagé le 26 octobre 1987 par la société Suforem, est investi de mandats représentatifs et syndicaux depuis 1998 ; que par avis en date du 1er mars 2013 il a été déclaré par le médecin du travail inapte à tous postes dans l'entreprise ; que la demande d'autorisation de licenciement a fait l'objet d'un refus le 17 juin 2013 ; que suite à un nouvel avis d'inaptitude le 21 août 2013, l'administration a opposé un nouveau refus d'autorisation de licencier le salarié ; que l'entreprise placée en liquidation judiciaire a fait l'objet d'un plan de cession à effet du 10 février 2014 au profit de la société Maisons Suforem ; que le 11 juin 2014 l'inspecteur du travail a autorisé le licenciement du salarié pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement ; que le salarié, invoquant des agissements de harcèlement moral et à caractère discriminatoire, a saisi la juridiction prud'homale ;

Sur les premier, deuxième et cinquième moyens :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyen ci-après annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le troisième moyen :

Vu les articles L. 2141-5, L. 1132-1 et L. 1134-1 du code du travail dans leur rédaction applicable en la cause ;

Attendu que pour rejeter la demande d'indemnité au titre de la discrimination, l'arrêt retient que la discrimination n'est pas le soutien des décisions de l'inspection du travail en date des 17 juin et 2 décembre 2013 refusant d'autoriser le licenciement ;

Qu'en statuant ainsi alors qu'elle constatait que la première décision de l'inspecteur du travail était fondée sur l'évocation de tentatives, de la part du dirigeant, de déstabilisation et sur le lien entre le licenciement et les mandats syndicaux, et que la seconde en date du 2 décembre 2013 faisait état d'un lien avec le comportement discriminatoire de l'employeur, et qu'il résultait de ces éléments, soutien nécessaire de la décision administrative et s'imposant au juge judiciaire, l'existence d'éléments laissant supposer une discrimination en raison des activités syndicales, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS sans qu'il y ait lieu de statuer sur le quatrième moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de M. Y... en fixation d'une créance de dommages-intérêts au titre de la discrimination formée contre Mme Z... prise en sa qualité de mandataire à la liquidation de la société Sofurem, l'arrêt rendu le 30 mai 2017, entre les parties, par la cour d'appel d'Agen ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Pau ;

Condamne la société Maison Suforem et Mme Z..., ès qualités, aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Maison Suforem et condamne celle-ci et Mme Z..., ès qualités, à payer à M. Y... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq décembre deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour M. Y....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté le salarié de sa demande tendant à la condamnation de la société Maison Suforem SASU à lui payer des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de son licenciement pour inaptitude résultant du harcèlement moral et de la discrimination syndicale subies ;

AUX MOTIFS propres QU'en l'espèce, M. Y... réclame une indemnité de 35 000 euros en réparation du préjudice qu'il a subi du fait de son licenciement et du préjudice résultant du harcèlement moral et de la discrimination syndicale dont il soutient avoir fait l'objet ; que pour confirmer les dispositions du jugement entrepris ayant débouté M. Y... de ses demandes dirigées contre la SASU Maison Suforem il suffira de relever : - que le licenciement de M. Y..., salarié protégé, par la SASU Maison Suforem pour inaptitude médicale et impossibilité de reclassement a été autorisé par décision de l'inspection du travail en date du 11 juin 2014, non frappée de recours, et que par suite M. Y... ne peut remettre en cause devant la juridiction judiciaire le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement qui lui a été notifié, et a fortiori réclamer indemnisation du préjudice résultant d'une rupture du contrat de travail qui ne peut plus être qualifiée de fautive ou d'abusive ; - que la modification de la situation juridique de l'employeur est intervenue dans le cadre d'une procédure collective, et a été concrétisée par le jugement en date du 23 décembre 2013 du tribunal de commerce d'Agen arrêtant le plan de cession du fonds de commerce exploité par la SAS Suforem au profit de la Société Nouvelle Suforem dénommée actuellement Maison Suforem avec effet à compter du 10 février 2014 ; - qu'il résulte des écritures et des explications de M. Y... qu'il se plaint exclusivement de faits de harcèlement et de discrimination commis de septembre 2011 date de l'entrée en fonction de M. C..., à septembre 2012, date de l'arrêt de travail pour maladie du salarié ; - que cette période est antérieure de plus d'un an à la modification de la situation juridique de l'employeur, consécutive au jugement du 23 décembre 2013 précité ; - que sans même avoir besoin de rechercher si les faits évoqués sont établis, la SASU Maison Suforem ne saurait être déclarée responsable et tenue de payer des dommages et intérêts réclamés au titre d'un manquement de l'employeur aux obligations nées du contrat de travail commis antérieurement à cette modification ;

AUX MOTIFS adoptés QU'en l'espèce, M. Y... ne formule aucune contestation à l'encontre du licenciement pour inaptitude qui lui a été notifié le 13 juin 2014 par la SASU Maison Suforem, mais sollicite uniquement des dommages et intérêts pour des faits de harcèlement subis, selon ses propres écritures entre le mois de septembre 2012 et le mois de septembre 2013, soit une période antérieure à la reprise de l'activité de la SAS Suforem par la société Nouvelle Suforem/ SASU Maison Suforem dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire ; qu'il s'ensuit que la SASU Maison Suforem, à laquelle il n'est reproché aucun fait de harcèlement au préjudice de M. Y... depuis qu'elle est son employeur, ne peut être poursuivie en paiement de dommages et intérêts en réparation du harcèlement moral qu'aurait subi M. Y... sur une période où il était employé par la SAS Suforem ce qui conduit au rejet des demandes du requérant à l'encontre de la SASU Maison Suforem ;

ALORS QUE le nouvel employeur est tenu, à l'égard des salariés dont les contrats de travail subsistent, aux obligations qui incombaient à l'ancien employeur à la date de la modification, sauf en cas de liquidation judiciaire ; que le premier employeur rembourse les sommes acquittées par le nouvel employeur, dues à la date de la modification, sauf s'il a été tenu compte de la charge résultant de ces obligations dans la convention intervenue entre eux ; qu'il incombe donc au juge de rechercher dans la convention intervenue entre l'ancien employeur et le nouveau, l'étendue des obligations de ce dernier ; qu'en se contentant d'affirmer que la SASU Maison Suforem ne saurait être déclarée responsable et tenue de payer des dommages et intérêts réclamés au titre d'un manquement de l'employeur aux obligations nées du contrat de travail commis antérieurement à la modification de la situation juridique de l'employeur sans rechercher, comme elle y était invitée, quelle était la charge résultant des obligations mises à la charge de la SASU Maison Suforem par le plan de cession arrêté par le jugement du tribunal de commerce d'Agen du 23 décembre 2013 aux termes duquel était transféré une partie du personnel de la SAS Suforem dont faisait partie le contrat de travail de M. Y..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1224-2 du code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté le salarié de ses demandes tendant à la condamnation de la société Maison Suforem SASU à lui payer des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de son licenciement pour inaptitude résultant du harcèlement moral et de la discrimination syndicale subies et/ou à la fixation de sa créance à ce titre à l'encontre de Maître Z... en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Suforem SAS;

AUX MOTIFS propres QUE pour les motifs déjà précédemment exposés (sous I), la demande d'indemnisation du préjudice résultant du licenciement formulée par M. Y..., salarié protégé dont le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement a été autorisé par l'inspection du travail et qui d'ailleurs ne sollicite pas que son licenciement soit déclaré sans cause réelle et sérieuse, ne peut qu'être rejetée ;

AUX MOTIFS adoptés QU' en l'espèce, M. Y... ne formule aucune contestation à l'encontre du licenciement pour inaptitude qui lui a été notifié le 13 juin 2014 par la SASU Maison Suforem, mais sollicite uniquement des dommages et intérêts pour des faits de harcèlement subis, selon ses propres écritures entre le mois de septembre 2012 et le mois de septembre 2013, soit une période antérieure à la reprise de l'activité de la SAS Suforem par la société Nouvelle Sufrem/SASU Maison Suforem dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire ;

ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les conclusions des parties ; que le salarié avait démontré, aux termes de ses conclusions d'appel, que les causes de son inaptitude à tout poste étaient imputables à son employeur et qu'en conséquence, il était bien fondé à demander réparation du préjudice subi non seulement du fait de la perte de son emploi mais également sur le plan moral ; que, pour rejeter la demande d'indemnisation du préjudice résultant du licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement autorisé par l'inspection du travail, en estimant que l'intéressé ne sollicitait pas que son licenciement soit déclaré sans cause réelle et sérieuse, quand il ressortait des conclusions d'appel que celui-ci demandait la réparation du préjudice du fait de la perte de son emploi, la cour d'appel a dénaturé ses conclusions, et partant violé l'article 1134 du code civil alors applicable.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. Y... de sa demande de condamnation de la société Maison Suforem SASU à lui payer des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de son licenciement pour inaptitude résultant du harcèlement moral et de la discrimination syndicale subies et/ou à la fixation de sa créance à ce titre à l'encontre de Maître Z... en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Suforem SAS;

AUX MOTIFS QUE si l'autorisation de licenciement accordée par l'autorité administrative ne permet plus au salarié de contester la cause ou la validité de son licenciement en invoquant la discrimination ou le harcèlement, elle ne le prive pas du droit de demander réparation du préjudice qui est résulté de la discrimination ou du harcèlement moral dont il a été victime ; que par ailleurs, il convient de rappeler que si l'autorité de la chose jugée décidée par l'autorité administrative, s'attache non seulement au dispositif de la décision, mais également aux motifs qui en sont le soutien nécessaire, force est de constater que ni la discrimination, ni le harcèlement moral, tels que définis ci-après, ne sont le soutien nécessaire des décisions de l'inspection du travail ; que la première, en date du 17 juin 2013, fonde le refus d'autoriser le licenciement de M. Y... sur l'irrégularité de la procédure de licenciement, affectée de plusieurs vices, et sur le non-respect par l'employeur de son obligation de reclassement, l'évocation de tentatives de déstabilisation effectuées par le dirigeant de la société, M. C..., et d'un lien entre le licenciement et les mandats syndicaux de M. Y..., exprimés en termes généraux ne caractérisant pas une mesure discriminatoire ou un harcèlement, ce d'autant que le licenciement n'a alors pas été prononcé ; que la seconde, en date du 2 décembre 2013 fonde à nouveau le refus d'autoriser le licenciement de M. Y... sur le non-respect par l'employeur de son obligation de reclassement, le lien avec un comportement discriminatoire de l'employeur n'étant exprimé qu'à titre surabondant et en termes généraux que rien dans la décision ne vient expliciter de sorte qu'elle ne peut être considérée comme le soutien nécessaire de celle-ci ; que la dernière, en date du 11 juin 2014, a autorisé le licenciement de M. Y... en considérant cette fois que les recherches de reclassement effectuées par la société repreneuse étaient sérieuses, sans pour autant permettre le reclassement de M. Y..., et qu'aucun fait susceptible d'établir un lien entre la demande d'autorisation et l'exercice des mandats détenus par M. Y... n'était établi à l'encontre de la SAS Maison Suforem ; que c'est donc vainement que M. Y... soutient que la motivation des décisions de l'inspection du travail refusant son licenciement démontre suffisamment qu'il a été harcelé et discriminé, de sorte qu'il convient de rechercher s'il en rapporte la preuve autrement ;

1. ALORS QUE dans le cas où une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé est motivée par son inaptitude physique, il appartient à l'administration du travail de vérifier que l'inaptitude physique du salarié est réelle et justifie son licenciement ; qu'il ne lui appartient pas en revanche, dans l'exercice de ce contrôle, de rechercher la cause de cette inaptitude, y compris dans le cas où la faute invoquée résulte d'un harcèlement moral ou d'une discrimination syndicale dont l'effet, selon les dispositions combinées des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 du code du travail et L.1132-1 et L.1132-4 du même code, serait la nullité de la rupture du contrat de travail ; que l'autorisation de licenciement donnée par l'inspecteur du travail ne fait pas obstacle à ce que le salarié fasse valoir devant les juridictions judiciaires tous les droits résultant de l'origine de l'inaptitude lorsqu'il l'attribue à un manquement de l'employeur à ses obligations ; qu'en jugeant cependant que le salarié ne bénéficiait que du droit de demander réparation du préjudice qui était résulté de la discrimination ou du harcèlement moral dont il avait été l'objet sans lui reconnaître celui de faire valoir devant les juridictions judiciaires tous les droits résultant de l'origine de l'inaptitude lorsqu'il l'attribue à un manquement de l'employeur à ses obligations, la cour d'appel a violé la loi des 16-24 août 1790 et les articles L. 2421-3, L.1132-1, L.1132-4, L.1152-1 et L.1152-3 du code du travail ;

2. ALORS QU' en application du principe de la séparation des pouvoirs, la décision de l'inspecteur du travail qui refuse d'autoriser le licenciement d'un salarié protégé pour inaptitude en raison des liens existant entre son licenciement et ses mandats syndicaux, et qui est devenue définitive en raison de l'absence de recours, ne peut être contestée par le juge judiciaire ; que, pour débouter M. Y... de ses demandes de réparation du harcèlement moral et de la discrimination syndicale subis, en affirmant que la motivation des décisions de l'inspection du travail refusant son licenciement ne démontrait pas suffisamment qu'il avait été harcelé et discriminé quand elles faisaient état de liens entre le licenciement de l'intéressé et ses mandats syndicaux, ce dont il résultait la preuve de manquements de l'employeur à ses obligations, peu important que cela soit à titre surabondant, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, et partant a violé la loi des 16-24 août 1790 et les articles L. 2421-3, L.1132-1, L.1132-4, L.1152-1 et L.1152-3 du code du travail.

QUATRIEME MOYEN SUBSIDIAIRE DE CASSATION

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. Y... de sa demande de condamnation de la société Maison Suforem SASU à lui payer des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de son licenciement pour inaptitude résultant du harcèlement moral et de la discrimination syndicale subies et/ou à la fixation de sa créance à ce titre à l'encontre de Maître Z... en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Suforem SAS;

AUX MOTIFS QUE 1.- Sur la discrimination :
que si dans ses écritures, oralement reprises à l'audience, M. Y... mentionne à diverses reprises qu'il a fait l'objet durant plusieurs mois de discrimination, force est de constater qu'il paraît s'agir d'une formulation inadaptée, qu'en effet, à aucun moment il n'a précisé quelles seraient les mesures discriminatoires, directes ou indirectes, dont il aurait été la victime ou évoqué une différence de traitement en matière de rémunération, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle par rapport à d'autres salariés de l'entreprise ; que les faits qu'il invoque dans ses écritures ne caractérisent pas une mesure discriminatoire : - le fait de solliciter communication par le secrétaire du comité d'entreprise du projet de procès-verbal de réunion du comité d'entreprise n'est pas discriminatoire, puisque ce projet doit être soumis à approbation lors de la réunion suivante du dit comité, le cas échéant après discussion et modification par le comité d'entreprise et non à la discrétion du dirigeant comme l'affirme M. Y..., et qu'il est compréhensible que le dirigeant souhaite préparer cette discussion ; - le projet d'installation de caméras de surveillance vidéo concernait l'ensemble du personnel et non le seul M. Y... ; - de même la mise en place d'un système de prime mensuelle concernait l'ensemble des salariés et non le seul M. Y... ; - qu'il en est de même du litige portant sur la mise en place de la négociation annuelle obligatoire ; que force est de constater que si M. Y... établit qu'il était en conflit avec son employeur, dans le cadre de son activité syndicale et de représentant du personnel, il ne démontre pas qu'il a fait l'objet de mesure de discrimination syndicale directe ou indirecte, c'est-à-dire d'avoir été traité de manière moins favorable qu'un autre salarié ; que dès lors qu'il ne fournit pas le moindre élément de nature à laisser supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, il ne peut sérieusement soutenir avoir subi un quelconque préjudice de ce chef ;

1. ALORS QU' en cas de litige, il appartient au salarié d'apporter des éléments de faits laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, sans toutefois qu'il lui revienne la charge de prouver l'existence d'une discrimination ; qu'il appartient à l'employeur de prouver que sa décision repose sur des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu'en faisant grief à M. Y... de n'avoir pas démontré qu'il avait fait l'objet d'une discrimination syndicale directe ou indirecte, la cour d'appel qui a fait peser la charge de la preuve de la discrimination subie sur le salarié, a violé les articles L.1132-1, L.1134-1 et L.2141-5 du code du travail ;

2. ALORS QUE l'existence d'une discrimination n'implique pas nécessairement une comparaison avec la situation d'autres salariés ; qu'en jugeant le contraire en faisant reproche à M. Y... de n'avoir pas démontré qu'il avait été traité de manière moins favorable qu'un autre salarié, la cour d'appel a violé les articles L.1132-1, L.1134-1 et L.2141-5 du code du travail ;

3. ALORS QUE le juge ne saurait dénaturer les conclusions des parties ; que M. Y... avait soulevé dans ses conclusions d'appel qu'il avait subi différentes tentatives de déstabilisation de la part de l'employeur, des pressions pendant des mois de la part de la direction qui avait fait en sorte de liguer une partie du personnel contre lui et de le harceler et le discriminer « simplement parce qu'il dérangeait en exerçant ses responsabilités (syndicales) », lui proposant de partir dans les trois mois de son retour de congés, M. C... lui disant que sinon, c'est lui qui démissionnerait, et lui remettant un projet de transaction lui donnant jusqu'à la fin de la semaine pour réfléchir, ce dont il se déduit un comportement discriminatoire de l'employeur à l'égard de l'intéressé ; que, pour débouter M. Y... de sa demande, en estimant qu'il ne fournissait pas le moindre élément de nature à laisser supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, la cour d'appel a dénaturé les conclusions d'appel de M. Y..., et partant a violé l'article 1134 du code civil.

CINQUIEME MOYEN SUBSIDIAIRE DE CASSATION

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. Y... de sa demande de condamnation de la société Maison Suforem SASU à lui payer des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de son licenciement pour inaptitude résultant du harcèlement moral et de la discrimination syndicale subies et/ou à la fixation de sa créance à ce titre à l'encontre de Maître Z... en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Suforem SAS;

AUX MOTIFS QUE 2.- Sur le harcèlement moral :
qu'en l'espèce, M. Y... fonde également sa demande sur le harcèlement moral dont il aurait fait l'objet entre septembre 2011 et septembre 2012 ; que pour écarter le harcèlement moral et débouter l'appelant de sa demande dirigée contre la SAS Suforem représentée par son mandataire liquidateur et les AGS, il suffira de relever : - que M. Y... ne produit pas le moindre élément permettant de corroborer l'allégation de harcèlement moral de la part de son employeur ; - que les seuls faits invoqués sont précisément ceux évoqués précédemment sous II-B-1, qui traduisent un désaccord et un conflit avec son employeur sur la mise en place au sein de l'entreprise de caméras de surveillance, l'instauration d'une prime mensuelle et la fixation de la date de la négociation annuelle obligatoire, mesures qui concernaient l'ensemble du personnel, et ne constituaient nullement des agissements répétés ayant pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité de M. Y... ou une altération de sa santé physique ou mentale ; - qu'il ne produit notamment aucun témoignage faisant état de tels agissements de la part de son employeur ; - que le harcèlement moral allégué n'est donc en rien démontré ;

1. ALORS QU' en application de l'article L.1154-1, s'il appartient au salarié d'établir des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement, il incombe à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en reprochant à M. Y... de n'avoir pas produit le moindre élément permettant de corroborer l'allégation de harcèlement moral de la part de l'employeur et seulement invoqué des mesures qui concernaient l'ensemble du personnel et ne constituaient nullement des agissements répétés ayant pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité de M. Y... ou une altération de sa santé physique ou mentale, quand il ressortait de ses constatations que les arrêts de travail de l'intéressé du 26 septembre 2012 prolongés jusqu'au 28 février 2013 concernaient une anxiété réactionnelle à des problèmes professionnels et qu'il avait été déclaré inapte lors de la visite de reprise, ce dont il se déduisait une atteinte de la santé physique ou mentale de l'intéressé du fait des agissements de l'employeur ; la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, et partant a violé les articles L. 1152-1, L.1154-1 du code du travail ;

2. ALORS QUE peuvent caractériser un harcèlement moral les méthodes de gestion mises en oeuvre par un supérieur hiérarchique dès lors qu'elles se manifestent pour un salarié déterminé par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet d'entraîner une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'en écartant tout fait de harcèlement moral invoqué par l'intéressé sans rechercher, comme elle y était invitée, si la mise en oeuvre des différentes mesures qui concernaient l'ensemble du personnel ne se manifestaient pas pour l'intéressé par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet d'entraîner une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1, L.1154-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-22299
Date de la décision : 05/12/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Agen, 30 mai 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 05 déc. 2018, pourvoi n°17-22299


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.22299
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