LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme Y..., engagée le 1er octobre 2004 par l'association Père le Bideau, en qualité de commis en économat pour l'Institut tous vents, a été licenciée le 10 juin 2014 après avoir été déclarée inapte par le médecin du travail le 19 mai 2014 ;
Sur les premier et deuxième moyens :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens ci-après annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le troisième moyen :
Vu les articles L. 1232-6 et L. 1235-2 du code du travail, ensemble la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association ;
Attendu que pour juger non fondé le moyen tiré du défaut de qualité du signataire de la lettre de licenciement, la cour d'appel retient que la lettre de licenciement du 10 juin 2014 est signée par le directeur, qui agissait au nom de l'association et que dès lors que la lettre de licenciement mentionne un motif précis, il revient à la juridiction saisie d'apprécier le caractère réel et sérieux du motif invoqué ; que de plus, le règlement intérieur de l'association dispose que dès lors qu'un licenciement est envisagé, le directeur en informe le président et saisit la cellule juridique ; que l'ancien secrétaire général, dans une attestation qui n'est pas utilement critiquée, expose qu'il a associé le président de l'association, dès l'avis d'inaptitude du médecin du travail, à la procédure de reclassement puis de licenciement ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'en l'absence de disposition statutaire contraire attribuant cette compétence à un autre organe, il entre dans les attributions du seul président de mettre en oeuvre la procédure de licenciement d'un salarié, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et attendu qu'en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation à intervenir sur le troisième moyen entraîne la cassation par voie de conséquence du chef visé par le cinquième moyen ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le quatrième moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et au titre de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 18 mai 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;
Condamne l'association Père Le Bideau - Institut tous vents aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à Mme Y... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq décembre deux mille dix-huit.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour Mme Y...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Madame Y... R... de ses demandes d'indemnité pour licenciement nul et de dommages et intérêts pour harcèlement moral ;
AUX MOTIFS QUE «ALORS QU'en ce qui concerne les faits de harcèlement moral, l'article L. 1152-1 du code du travail dispose qu'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que concernant la charge de la preuve, l'article L. 1154-1 précise que le salarié établit les faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et, qu'au vu de ces éléments, pris dans leur ensemble, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'à l'appui de sa demande, Madame A... produit en premier lieu les courriers qu'elle a adressés à son employeur le 20/02/2013 et à l'inspection du travail le 17/04/2013 ; que ces courriers font état du comportement qu'elle reproche à Madame B..., la comptable ; qu'elle indique dans le courrier adressé à l'employeur : « dès le début, Madame B... a su dissimuler ses méfaits, évitant toujours la présence de personnes susceptibles de les répéter ou pouvant lui faire du tort, faisant bonne figure, surtout devant vous Monsieur le Directeur. Pire encore, elle tente d'inverser les rôles, me faisant passer pour l'agresseur » ; que dans le même courrier elle indique cependant, de façon parfaitement contradictoire : « Pour autant, Madame B... racontait à qui voulait bien l'entendre dans son service que j'étais une incapable, que j'avais bénéficié de faveurs en occupant le poste de son ancienne collègue et amie Madame C... aujourd'hui à la retraite
Critiques, brimades sont devenues mon lot quotidien « elle ne sait rien faire, elle fait toujours des conneries » toujours à me dénigrer devant Madame D... et Madame E... » ; que dans le même courrier adressé à son employeur, elle affirme que les attitudes caractérisant le harcèlement à son encontre sont clandestines, puis qu'elles sont publiques ; que dans ses conclusions, elle indique que c'est surtout à son retour que la situation a dégénéré ; que ce retour est celui après une intervention chirurgicale, le 01 octobre 2012 ; qu'elle travaillera ensuite jusqu'en février 2013 où elle sera en arrêt de travail et ne reprendra pas le travail jusqu'à son licenciement ; que dans son courrier à l'inspection du travail, elle décrit également une situation très dégradée depuis son arrivée dans l'institution : « Madame B... (la comptable) m'a prise en grippe dès le début » ; qu'elle fait également état de propos récurrents, qui la déconsidèrent en précisant « bien entendu ça se passe toujours quand il n'y a personne, elle est très maligne » ; qu'elle décrit ensuite une situation à son retour de maladie en janvier 2011 (en réalité janvier 2012) ; qu'à son retour, elle décrit une coalition contre elle (Madame B..., Madame E... et Madame D...) et même la directrice adjointe Madame F... en précisant à nouveau : « le pire dans tout ça c'est qu'on fait en sorte d'être désagréable avec moi quand il y a personne, elles sont très malignes
» ; que deux délégués du personnel, Monsieur G... et Monsieur H... ont écrit respectivement les 15 et 16 avril 2013 à l'inspection du travail en signalant, pour Monsieur H..., les doléances dont il a été saisi de la part de Madame Y... en précisant que l'état dépressif de cette dernière s'était dégradé au cours des dernières semaines ; qu'il précise avoir rencontré les conseillers de l'inspection du travail en octobre 2012 afin de connaître la procédure pour constituer un dossier de harcèlement ; qu'il précise également avoir, à plusieurs reprises, lors des réunions des délégués du personnel, interpellé la direction, sans pour cela nommer des personnes en particulier » ; que les procès-verbaux de ces réunions ne sont pas produits ; que Monsieur G... indique qu'il est interpellé par Madame Y... depuis cinq ans qui décrit les brimades et réflexions émanant notamment de deux collègues, et encore plus particulièrement de Madame B... : « Même si je n'ai jamais assisté directement à des actes ou à des paroles envers Madame Y..., le peu de temps passé dans les bureaux où elle travaille permet de se rendre compte de l'ambiance délétère dans laquelle elle évolué et le « niveau » des conversations ne m'amènerait pas moi non plus à chercher le lien avec les collègues concernés. Les réflexions et le temps employés sont aussi souvent totalement déplacés et le vivre au jour le jour doit être épuisant et déstabilisant, d'autant plus que Madame vacher a déjà alerté sa hiérarchie à plusieurs reprises, sans effet semble-t-il » ; qu'il n'indique pas quelles suites il a été données à ces doléances ; que le psychiatre qui la suit, le Docteur I... a établi, le 07/05/2014 un certificat dans lequel il relate suivre Madame Y... depuis le 16/04/2013 pour une symptomatologie dépressive survenue dans un contexte de difficultés au sein de son travail entraînant une incapacité pour laquelle une interruption de son activité professionnelle a été nécessaire : « la mise à distance de son poste a amené une légère amélioration des troubles de l'humeur mais une recrudescence réapparaît à l'évocation d'une reprise ou d'une nouvelle immersion dans le milieu professionnel. Une rechute est hautement probable dans ce contexte et il a lieu d'envisager une inaptitude totale et définitive à tout poste dans son établissement. Une reprise impliquerait une mise en danger de Madame Y... » ; qu'une infirmière a attesté que Madame Y... s'est présentée aux urgences du centre médico-psychologique du centre hospitalier spécialisé Camille Claudel les 09,16 et 23 décembre 2013 ; que les 27 décembre 2013 et 27 avril 2014, son médecin traitant a écrit deux courriers au médecin du travail d'après leur teneur aux termes desquels elle présentait « une profonde souffrance au travail avec mise en danger de sa vie » et concluant à l'urgence d'un licenciement pour inaptitude totale et définitive à son travail dans cette association ; qu'elle a effectivement été déclarée inapte dans le cadre d'une seule visite par le médecin du travail le 19 mai 2014 ; que Madame Y... produit la copie d'un courriel que Monsieur J..., ancien Directeur de l'association, du 05 janvier 2005 au 28 avril 2009 a adressé, le 18/03/2013 à l'inspection du travail qui décrit la maltraitance de Madame B... envers Madame C... qui « en a subi le harcèlement le plus terrible puisque le plus indirect » et qui précise : « je suis prêt à apporter des témoignages précis des harcèlements répétitifs de Madame B... eu égard à Madame Y... » ; qu'aucune attestation de l'intéressé n'est produite ; que Madame U... K..., ancienne éducatrice qui, en dernier lieu travaillait dans les services administratifs a établi deux attestations l'une le 04 avril 2015 et l'autre le 18 octobre 2016 ; que Madame K... a définitivement cessé de travailler pour l'association en 2011 et précise que lorsqu'elle venait à porter des documents administratifs dans le cadre de son arrêt maladie qui s'est terminé par une inaptitude : «
c'était au tour de Madame Y... de souffrir de harcèlement. Je voyais la situation se dégrader. Madame Y... avait perdu son sourire puis la porte de son bureau restée fermée et lorsque je frappai pour lui dire bonjour c'était pour la trouver en larmes. J'entendais une partie des conversations tenues pas ses collègues : elle ne sait pas faire, elle est nulle, c'est un poste qui coûte trop cher » ; que s'il l'on fait la synthèse de ces éléments, les faits ne reposent que sur des allégations de Madame Y..., étant relevé que le seul témoignage un peu précis, celui de Madame K..., qui n'est plus salariée de l'association, ne cite aucun nom ; que de plus, Madame Y... a émis des assertions contradictoires sur le fait que les agressions verbales qu'elle subissait aient pu être entendues et il est très surprenant que le seul témoignage direct qu'elle produise émane d'une salarié qui ne se présentait plus au siège de l'association que pour y remettre des documents dans le cadre de son arrêt pour maladie ; que de plus il ne peut qu'être relevé que les courriers échangés avec Madame A... à l'occasion de sa reprise du travail en octobre 2012 ont une tonalité chaleureuse ; qu'ainsi le 03 septembre 2012, Madame B... envoie à 9 :24 le courriel suivant à Madame Y... : « Bonjour R..., J'espère que tu vas mieux, pour nous la reprise est déjà loin, Je te passerai un coup de fil dans la semaine, car ce matin démarre sur les chapeaux de roue, Bises A +, Martine » ; que Madame Y... lui répond à 11h07 : « je vais un peu mieux, j'ai décidé de reprendre le 1er octobre car j'en ai trop marre de rester enfermée !! bon courage pour la rentrée !! bises, R... » ; que pour expliquer la tonalité de ces échanges, elle fait état de la situation se serait réellement dégradée en octobre 2012, date de son retour après huit mois et demi de congé maladie et de sa volonté de se concilier les bonnes grâces de Madame A... dont il faut observer qu'elle prenait l'initiative de prendre des nouvelles de Madame Y... sur un ton conforme à des relations de qualité normale entre collègues qui travaillent ensemble depuis 10 ans ; que les assertions à certains égards contradictoires de Madame Y..., étant relevé qu'il est difficile de déterminer la période exacte à laquelle a débuté le harcèlement moral qu'elle prétend avoir subi – dans ses conclusions elle fait état d'une première saisine de l'inspection du travail bien antérieure sans en justifier et, au plus tôt en 2011, Madame C... est frappée par la porte de son bureau fermée et le fait qu'elle ait perdu son sourire - ; que l'absence d'un témoignage direct identifiant l'auteur du harcèlement ; qu'il est beaucoup question de Madame A... mais le seul témoignage direct, trop fragile pour être retenu, est celui de Madame K... qui mentionne « les collègues » de Madame Y..., sans même citer un nom ; que les certificats médicaux qui font état d'un état dépressif sévère consécutif à des difficultés professionnelles et l'avis d'inaptitude du médecin du travail ne permettent pas d'établir à eux seuls des faits matériels de harcèlement moral ; que le jugement doit être confirmé de ce chef ;
ET AUX MOTIFS éventuellement adoptés QUE « selon l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que selon l'article L. 1152-4 du code du travail, l'employeur prend toutes les dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral ; que selon l'article L. 1152-6 du code du travail, une procédure de médiation peut être mise en place par toute personne de l'entreprise s'estimant victime de harcèlement moral ou par la personne mise en cause ; qu'en l'espèce, Madame R... Y... se plaint de harcèlement moral de la part de Madame B... ; qu'or des échanges de mails entre le 19 juin 2012 et le 22 septembre 2012 ont une teneur amicale : de Madame R... Y... à Madame B... le 19 juin « j'espère que tu vas bien !!...allez je ne te dérange pas plus bises » ; réponse : « tu ne me déranges pas
et toi comment vas-tu ?
Bises A + » ; de Madame R... Y... à Madame B... le 2 août : « j'espère que tu vas bien
bon je te laisse et bon courage !! Bises » ; de Madame B... à Madame R... Y... le 3 septembre : « j'espère que tu vas mieux
je te passerai un coup de fil dans la semaine
Bises A + », réponse de Madame R... Y... à Madame B... : « bon courage pour la rentrée !! bises » ; que sans la preuve d'un désaccord essentiel entre Madame Y... et Madame B... jusqu'en septembre 2012 et au vu des échanges de mails, il ne parait pas y avoir de harcèlement de la part de Madame B... à l'encontre de Madame R... Y... ; que cependant, Madame R... Y... ressent un malaise ; qu'un témoignage de 2013 de l'ancien directeur Monsieur J..., licencié en avril 2008 et parrain de sa fille, témoignage pouvant cependant être empreint de partialité (arrêt de la cour d'appel de Toulouse du 23 août 2007 n° 05/00507) mais rapportant un malaise de Madame R... Y... ; qu'ainsi en témoigne Monsieur H... Bernard, délégué du personnel : je peux signaler que l'état dépressif de cette salariée s'est dégradée depuis plusieurs semaines ; que Monsieur François G..., délégué syndical, en témoigne aussi : « voilà plusieurs années que Madame R... Y... m'interpelle sur la situation qu'elle vit à son poste et sur les souffrances qu'elle y endure quotidiennement
même si je n'ai jamais assisté directement à des actes ou à des paroles envers Madame R... Y... », ainsi que Madame K... sur sa souffrance et rapporte des bribes de paroles sans nommer leur auteur ; qu'aucun fait précis et daté n'émane de ces témoignages ; que cependant ils soulignent la souffrance de Madame R... Y... ; que le 12 novembre 2012, le directeur reçoit Madame R... Y... en entretien ; qu'elle lui fait part de ses difficultés avec Mesdames B..., D... et E... ; qu'elle confirme ses reproches par lettre le 20 février 2013 où elle se dit victime de harcèlement moral, lettre en copie à Monsieur Q..., secrétaire général de l'association Père le Bideau, aux délégués du personnel, au docteur L..., Médecin du travail, à Monsieur M..., inspecteur du travail, et aux délégués du CHSCT ; que lors de cette réunion, le directeur propose des rencontres avec Madame R... Y... et ses collègues afin d'améliorer les relations et de définir les étapes du travail en commun ; que Madame Y... refuse l'intervention de Monsieur N... face à ses collègues ; que le 25 mars 2013, lors d'une réunion du CHSCT, le directeur propose une rencontre hebdomadaire avec Madame R... Y... pour la rassurer, lui expliquer précisément son travail et ses missions, avec une éventuelle formation ; que le médecin du travail propose de faire une visite de pré-reprise ; que Madame O... apporte une proposition avec un médiateur extérieur ; que le directeur rappelle à chacun son rôle dans l'association ; que le 27 mars 2013, Monsieur N... répond à la lettre du 20 février 2013, en proposant plusieurs solutions conformément à ce qui avait été décidé lors de la réunion du CHSCT ; qu'il n'y a aucune réponse de la part de Madame R... Y... ; que l'inspection du travail, suite à une enquête au sein de la société, ne donnera pas de suite pénale aux accusations de Madame R... Y... de harcèlement moral ; qu'aucune pièce n'apporte la preuve que Madame R... Y... était obligée de porter des charges lourdes malgré son handicap ; que Madame R... Y... a réellement été en état de souffrance mais aucun élément probant ne vient soutenir la thèse du harcèlement moral ; que le directeur a respecté ses obligations vis-à-vis de Madame R... Y..., cette dernière refusant les aides qu'il voulait lui apporter ; qu'en conséquence, Madame R... Y... n'était pas fondée à solliciter la condamnation de l'association Père Le Bideau pour harcèlement moral, ni pour non-respect de l'obligation de sécurité » ;
1°) ALORS QU' il appartient seulement au salarié qui se prévaut d'un harcèlement moral d'établir des faits qui permettent de présumer son existence, à charge pour l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement ; qu'en l'espèce, Mme Y... faisait état de brimades et humiliations de la part de ses collègues ; qu'elle établissait aussi une dégradation de son état de santé mental en lien avec ses conditions de travail ; que ces éléments étaient de nature à faire présumer un harcèlement moral, à charge dès lors pour l'employeur de justifier son attitude ; qu'en rejetant les demandes de Mme Y... au titre d'un harcèlement moral, au motif que celle-ci n'établissait pas la matérialité du harcèlement (arrêt attaqué p. 8 alinéa 2), la cour d'appel a fait peser sur la salariée la charge de la preuve de ce harcèlement et a ainsi violé l'article L 1154-1 du code du travail ;
2°) ALORS QUE le salarié n'est tenu que d'apporter des éléments qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement ; que Madame Y... indiquait à plusieurs reprises dans ses écritures d'appel que les pratiques harcelantes de ses collègues avaient provoqué une dégradation de son état de santé, notamment mental ; qu'en décidant que la salariée n'établissait pas de faits de nature à laisser présumer un harcèlement moral, sans rechercher, comme elle y était invitée, si Mme Y... démontrait une altération de sa santé mentale provoquée par des agissements professionnels, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L 1152-1, L 1152-2, L 1152-3 et L 1154-1 du code du travail ;
3°) ET ALORS QUE la preuve est libre en matière prud'homale ; qu'au cas présent, la cour d'appel, pour dire que Madame Y... n'établissait pas de harcèlement moral à son encontre, a reproché à la cour d'appel de ne pas produire diverses attestations et preuve des démarches entreprises par les représentants du personnel ; qu'en statuant ainsi, en prescrivant un mode de preuve à la salariée, la cour d'appel a violé le principe de la liberté de la preuve.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté de Madame R... Y... de sa demande de dommages-intérêts au titre de la violation de l'article L. 1152-4 du Code du travail ;
AUX MOTIFS QU' « en ce qui concerne l'absence de mise en place d'une politique de prévention du harcèlement moral de la part de l'employeur aux termes de l'article L. 1152-4 du code du travail l'employeur prend toutes les dispositions nécessaires en vue de prévenir des agissements de harcèlement moral ; qu'il n'est justifié de l'existence d'aucune mesure de prévention de cet ordre , la seule qui, au vu des pièces produites, pourrait s'en rapprocher est celle de la mise en place, dans le cadre du CHSCT, en 2013, d'un travail sur les risques psycho-sociaux à partir du questionnaire Karasek qui est un instrument de mesure du stress au travail ; que cette mise en place est trop tardive dans le cadre du présent litige et ne peut se confondre avec la mise en place d'une politique de prévention spécifique du harcèlement moral ; qu'en revanche, Madame Y..., qui n'établit pas qu'elle a souffert de harcèlement moral, ne justifie pas du préjudice qui en résulte pour elle et, en conséquence, le jugement qui l'a déboutée de ce chef doit être confirmé » ;
ET AUX MOTIFS éventuellement adoptés QUE « selon l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que selon l'article L. 1152-4 du code du travail, l'employeur prend toutes les dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral ; que selon l'article L. 1152-6 du code du travail, une procédure de médiation peut être mise en place par toute personne de l'entreprise s'estimant victime de harcèlement moral ou par la personne mise en cause ; qu'en l'espèce, Madame R... Y... se plaint de harcèlement moral de la part de Madame B... ; qu'or des échanges de mails entre le 19 juin 2012 et le 22 septembre 2012 ont une teneur amicale : de Madame R... Y... à Madame B... le 19 juin « j'espère que tu vas bien !!...allez je ne te dérange pas plus bises » ; réponse : « tu ne me déranges pas
et toi comment vas-tu ?
Bises A + » ; de Madame R... Y... à Madame B... le 2 août : « j'espère que tu vas bien
bon je te laisse et bon courage !! Bises » ; de Madame B... à Madame R... Y... le 3 septembre : « j'espère que tu vas mieux
je te passerai un coup de fil dans la semaine
Bises A + », réponse de Madame R... Y... à Madame B... : « bon courage pour la rentrée !! bises » ; que sans la preuve d'un désaccord essentiel entre Madame Y... et Madame B... jusqu'en septembre 2012 et au vu des échanges de mails, il ne parait pas y avoir de harcèlement de la part de Madame B... à l'encontre de Madame R... Y... ; que cependant, Madame R... Y... ressent un malaise ; qu'un témoignage de 2013 de l'ancien directeur Monsieur J..., licencié en avril 2008 et parrain de sa fille, témoignage pouvant cependant être empreint de partialité (arrêt de la cour d'appel de Toulouse du 23 août 2007 n° 05/00507) mais rapportant un malaise de Madame R... Y... ; qu'ainsi en témoigne Monsieur H... Bernard, délégué du personnel : je peux signaler que l'état dépressif de cette salariée s'est dégradée depuis plusieurs semaines ; que Monsieur François G..., délégué syndical, en témoigne aussi : « voilà plusieurs années que Madame R... Y... m'interpelle sur la situation qu'elle vit à son poste et sur les souffrances qu'elle y endure quotidiennement
même si je n'ai jamais assisté directement à des actes ou à des paroles envers Madame R... Y... », ainsi que Madame K... sur sa souffrance et rapporte des bribes de paroles sans nommer leur auteur ; qu'aucun fait précis et daté n'émane de ces témoignages ; que cependant ils soulignent la souffrance de Madame R... Y... ; que le 12 novembre 2012, le directeur reçoit Madame R... Y... en entretien ; qu'elle lui fait part de ses difficultés avec Mesdames B..., D... et E... ; qu'elle confirme ses reproches par lettre le 20 février 2013 où elle se dit victime de harcèlement moral, lettre en copie à Monsieur Q..., secrétaire général de l'association Père le Bideau, aux délégués du personnel, au docteur L..., Médecin du travail, à Monsieur M..., inspecteur du travail, et aux délégués du CHSCT ; que lors de cette réunion, le directeur propose des rencontres avec Madame R... Y... et ses collègues afin d'améliorer les relations et de définir les étapes du travail en commun ; que Madame Y... refuse l'intervention de Monsieur N... face à ses collègues ; que le 25 mars 2013, lors d'une réunion du CHSCT, le directeur propose une rencontre hebdomadaire avec Madame R... Y... pour la rassurer, lui expliquer précisément son travail et ses missions, avec une éventuelle formation ; que le médecin du travail propose de faire une visite de pré-reprise ; que Madame O... apporte une proposition avec un médiateur extérieur ; que le directeur rappelle à chacun son rôle dans l'association ; que le 27 mars 2013, Monsieur N... répond à la lettre du 20 février 2013, en proposant plusieurs solutions conformément à ce qui avait été décidé lors de la réunion du CHSCT ; qu'il n'y a aucune réponse de la part de Madame R... Y... ; que l'inspection du travail, suite à une enquête au sein de la société, ne donnera pas de suite pénale aux accusations de Madame R... Y... de harcèlement moral ; qu'aucune pièce n'apporte la preuve que Madame R... Y... était obligée de porter des charges lourdes malgré son handicap ; que Madame R... Y... a réellement été en état de souffrance mais aucun élément probant ne vient soutenir la thèse du harcèlement moral ; que le directeur a respecté ses obligations vis-à-vis de Madame R... Y..., cette dernière refusant les aides qu'il voulait lui apporter ; qu'en conséquence, Madame R... Y... n'était pas fondée à solliciter la condamnation de l'association Père Le Bideau pour harcèlement moral, ni pour non-respect de l'obligation de sécurité » ;
ALORS QUE la cassation de l'arrêt sur le fondement du premier moyen en ce qu'il a jugé que le harcèlement moral n'était pas établi entraînera en application des articles 624 et 625 du code de procédure civile la cassation de l'arrêt en ce qu'il a débouté Madame Y... de ses demandes de dommages et intérêts au titre de la violation de son obligation de sécurité de résultat.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la salariée de ses demandes au titre de l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement ;
AUX MOTIFS QUE « la lettre de licenciement du 10 juin 2014 est signée par le directeur, Monsieur Emmanuel N... qui agissait au nom de l'association et dès lors que la lettre mentionnait un motif précis, il revient à la juridiction saisie d'apprécier le caractère réel et sérieux du motif invoqué ; que de plus le règlement intérieur de l'association dispose que dès lors qu'un licenciement est envisagé, le directeur en informe le Président et saisit la cellule juridique ; que l'ancien secrétaire général, dans une attestation du 08/02/2017 – étant relevé que le moyen tiré du défaut de pouvoir du président n'a été soulevée par le conseil de Madame Y... que dans ses dernières conclusions devant la cour d'appel – qui n'est pas utilement critiquée, qu'il avait associé le Président de l'association, dès l'avis d'inaptitude du médecin du travail, à la procédure de reclassement puis de licenciement »
ALORS QUE l'absence de qualité à agir du signataire d'une lettre de licenciement rend le licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'au cas présent, les statuts de l'association Père le Bideau habilitaient le président du conseil d'administration à prendre toute décision relative aux salariés ; que le règlement général de l'association obligeait le directeur à saisir le président de l'association et la cellule juridique de l'association de tout licenciement envisagé ; que la cour d'appel, pour dire que le directeur pouvait régulièrement signer la lettre de licenciement de Madame Y..., a retenu qu'il ressortait de l'attestation du secrétaire général de l'association que le président avait été associé à la procédure de licenciement ; qu'en statuant ainsi, quand le président de l'association était seul habilité à décider le licenciement et à signer la lettre le notifiant, la cour d'appel a violé l'article 1232-6 du Code du travail, ensemble les statuts de l'association Père le Bideau.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la salariée de ses demandes au titre de l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement ;
AUX MOTIFS QU' « en ce qui concerne la rapidité avec laquelle ont été reçues les réponses négatives quant au reclassement, s'agissant d'une structure départementale qui regroupe des établissements éducatifs sur un poste d'un commis en économat, elle n'appelle pas plus de critique ; que chaque directeur d'une telle structure est immédiatement en mesure de savoir s'il dispose ou non d'un tel poste ; que l'appelante a fait observer qu'un commis en économat avait été recruté en juin 2014 ; que c'était précisément sur son poste et le fait qu'une mutation soit intervenue quelques semaines plus tard est indifférent, sauf à prouver la fraude ce qui n'est pas allégué » ;
ET AUX MOTIFS éventuellement ADOPTES QUE « l'article L. 1226-2 du code du travail stipule « lorsqu'à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise » ; qu'en l'espèce, l'association Père le Bideau a bien effectué une recherche de reclassement : réponse négative par mail de C31 le 20 mai 2014, de APLB 24 par mail le 19 mai, de APP Ruffec par mail le 19 mai, de M2S par mail le 19 mai, Maison Jean Baptiste par mail le 19 mai, de APLB St Savinien par mail le 19 mai, du siège APLB Angoulême par mail du 19 mai et de APLB Tous Vents par mail le 19 mai ; qu'il est reproché à l'association Père le Bideau un laps de temps très court qui n'aurait pas permis une recherche effective, loyale et sérieuse de reclassement ; qu'or on ne peut reprocher à l'association Père le Bideau le temps mis par les associations à répondre, d'autant plus qu'elles doivent connaitre à tout instant leur disponibilité de poste ; qu'en conséquence, Madame R... Y... n'était pas fondée à demander à titre subsidiaire une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse » ;
1°) ALORS QU' aux termes de l'article L. 1226-2 du code du travail, l'employeur est tenu dans le cadre de l'exécution de son obligation de reclassement de proposer au salarié inapte un emploi aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagements du temps de travail ; qu'au cas présent, la salariée faisait valoir qu'un adjoint en économat avait été muté sur le siège dans les semaines suivant son licenciement pour inaptitude ; qu'en se contenant de relever, pour dire le licenciement justifié, que l'adjoint en économat avait été recruté sur le poste de Madame Y... puis muté sur le siège, sans rechercher s'il existait un poste disponible d'adjoint en économat au sein du siège au moment de son licenciement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1226-2 du code du travail ;
2°) ET ALORS QUE la recherche de reclassement doit être sérieuse et loyale ; que la brièveté du délai écoulé entre l'avis d'inaptitude et la convocation à l'entretien préalable démontre à elle seule qu'il n'y a eu aucune tentative sérieuse de reclassement de la part de l'employeur ; qu'au cas présent, la cour d'appel a constaté que l'inaptitude avait été constatée le 19 mai et que la salariée s'était vue convoquée à l'entretien préalable au licenciement le 22 mai ; qu'en retenant néanmoins à l'appui de sa décision que l'association Père le Bideau avait régulièrement exécuté son obligation de reclassement, quand le temps écoulé entre le constat de l'inaptitude et l'engagement de la procédure de licenciement démontrait qu'il n'y avait eu de la part de l'employeur aucune recherche sérieuse de reclassement, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article L. 1226-2 du code du travail.
CINQUIEME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné Madame Y... R... à verser à l'association Père le Bideau la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut au défaut de motifs ; que Madame Y... indiquait précisément dans ses écritures (page) qu'au regard des incidences du licenciement sur l'état de santé, notamment psychique, de la salariée, et sa situation économique que l'équité commandait de ne pas prononcer à son encontre de condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; qu'en condamnant, sans répondre à ce chef pertinent des conclusions de l'exposante, Madame Y... à verser à l'association Père le Bideau la somme de 1.500 euros à ce titre, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.