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05/12/2018 | FRANCE | N°17-21032

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 05 décembre 2018, 17-21032


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 485 du code de procédure civile, ensemble L. 4614-13 du code du travail, alors applicable ;

Attendu que la demande en justice devant le président du tribunal de grande instance, statuant en la forme des référés, étant formée par assignation, la date de saisine du juge s'entend de celle de l'assignation;

Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue en la forme des référés, que, le 15 mars 2017, le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de trav

ail (le CHSCT) de l'établissement de Giberville de la société Eiffage énergie thermie N...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 485 du code de procédure civile, ensemble L. 4614-13 du code du travail, alors applicable ;

Attendu que la demande en justice devant le président du tribunal de grande instance, statuant en la forme des référés, étant formée par assignation, la date de saisine du juge s'entend de celle de l'assignation;

Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue en la forme des référés, que, le 15 mars 2017, le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (le CHSCT) de l'établissement de Giberville de la société Eiffage énergie thermie Normandie a voté le recours à une expertise, estimant qu'existerait un risque grave pour la santé et la sécurité du personnel ; que, le 29 mars 2017, la société a fait citer le CHSCT devant le président du tribunal de grande instance statuant en la forme des référés aux fins d'obtenir l'annulation de cette résolution ;

Attendu que pour déclarer irrecevable la contestation de l'employeur, l'ordonnance retient qu'en première instance et s'agissant d'une assignation, la saisine du juge judiciaire ne résulte pas de la seule délivrance de celle-ci mais bien de son placement au rôle de la juridiction qui s'entend comme la remise au greffe d'une copie de l'acte d'huissier de justice délivré et que la saisine du juge judiciaire statuant en la forme des référés ne peut résulter que de la remise au greffe d'une copie de l'assignation délivrée en application des dispositions de l'article 757 du code de procédure civile, qu'en l'espèce, l'assignation ayant été délivrée le 29 mars 2017 et remise au greffe le 31 mars suivant, soit au-delà du délai de quinze jours qui expirait le jeudi 30 mars 2017, la contestation est tardive ;

Qu'en statuant ainsi , alors qu'il avait constaté que l'assignation avait été délivrée dans le délai de quinze jours de la délibération du CHSCT, le président du tribunal de grande instance a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance prise en la forme des référés rendue le 27 juin 2017, entre les parties, par le président du tribunal de grande instance de Caen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ladite ordonnance et, pour être fait droit, les renvoie devant le président du tribunal de grande instance de Lisieux statuant en la forme des référés ;

Condamne la société Eiffage énergie thermie Normandie aux dépens ;

Vu l'article L. 4614-13 du code du travail, la condamne à payer la somme de 3 600 euros TTC à la SCP Lyon-Caen et Thiriez ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance cassée ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq décembre deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer, avocat aux Conseils, pour la société Eiffage énergie thermie Normandie et M. Y..., ès qualités,

IL EST FAIT GRIEF à l'ordonnance attaquée de déclarer irrecevables en leurs demandes la société Eiffage Energie Thermie Normandie et M. Jean-François Y... en sa qualité de président du CHSCT de la société Eiffage Energie Thermie Normandie établissement de Giberville ;

AUX MOTIFS QUE l'article L. 4614-13 organise la contestation par l'employeur de la nécessité de l'expertise votée par le CHSCT en application des dispositions de l'article L. 4614-12 du code du travail ; que cette contestation de la nécessité de l'expertise s'effectue par la saisine du juge judiciaire par l'employeur dans un délai de quinze jours à compter de la délibération du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ; qu'en première instance et s'agissant d'une assignation, la saisine du juge judiciaire ne résulte pas de la seule délivrance de celle-ci mais bien de son « placement » au rôle de la juridiction qui s'entend comme la remise au greffe d'une copie de l'acte d'huissier délivré avec mention des conditions de sa remise au défendeur assigné à comparaître, afin d'enrôlement de l'affaire ; que la délivrance seule de l'assignation informe le défendeur de l'intention du requérant, mais celui-ci peut s'il le souhaite ne pas donner suite à l'acte en ne saisissant pas la juridiction ce qui aurait en l'espèce des conséquences directes puisque selon les dispositions de l'article L. 4614-12 du code du travail, la saisine du juge judiciaire « suspend l'exécution de la décision du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ou de l'instance de coordination mentionnée à l'article L. 4616-1, ainsi que les délais dans lesquels ils sont consultés en application de l'article L. 4612-8, jusqu'à la notification du jugement. Lorsque le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ou l'instance de coordination mentionnée au même article L. 4616-1 ainsi que le comité d'entreprise sont consultés sur un même projet, cette saisine suspend également jusqu'à la notification du jugement, les délais dans lesquels le comité d'entreprise est consulté en application de l'article L. 2323-3 » ; qu'aussi, la saisine du juge judiciaire statuant en la forme des référés ne peut résulter que de la remise au greffe d'une copie de l'assignation délivrée en application des dispositions de l'article 757 du code de procédure civile ; qu'en l'espèce, la délibération qui décide du recours à l'expertise et dont l'annulation est demandée a été votée par le CHSCT le 15 mars 2017 ; que l'assignation a été délivrée le 29 mars à 16h20 mais elle n'a été remise au greffe que le 31 mars 2017, le cachet du dateur faisant foi, soit au-delà du délai de 15 jours qui expirait le jeudi 30 mars 2017 ; que dans ces conditions, il convient de relever l'irrecevabilité de la contestation pour tardiveté et il n'y a pas lieu d'examiner les moyens de fond ; que la Sas Eiffage Energie Thermie Normandie supportera la charge des dépens et des frais irrépétibles que le CHSCT de la Sas Eiffage Energie Thermie Normandie, établissement de Giberville a dû engager et qu'il convient de fixer à la somme de 8 353,40 euros justifiée par les notes d'honoraires produites et les frais de déplacement ;

1°) ALORS QUE l'article 757 du code de procédure civile est relatif aux procédures ordinaires devant le tribunal de grande instance ; qu'en en faisant application à une procédure de référé pour juger irrecevable le recours de la société Eiffage et du président du CHSCT, le juge des référés a violé, par fausse application, le texte précité ;

2°) ALORS QUE le tribunal est réputé saisi dès la date de la délivrance de l'assignation, dès lors que celle-ci a été remise au greffe sous réserve du placement de son assignation ; qu'ayant constaté que l'assignation avait été délivrée au CHSCT le 29 mars 2017, moins de quinze jours après la délibération du comité, et que cette assignation avait été remise au greffe du tribunal deux jours plus tard, ce qui faisait reporter rétroactivement la saisine du juge à la date de l'assignation, le juge des référés ne pouvait qu'en déduire que les demandes de la société Eiffage et du président du CHSCT étaient recevables ; qu'en jugeant le contraire, le juge des référés, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'inféraient de ses constatations, a violé les articles L. 4614-13 du code du travail et du code de procédure civile ;

3°) ALORS QUE l'employeur qui entend contester la délibération du CHSCT organisant une expertise en application de l'article L. 4614-12 du code du travail saisit le juge judiciaire dans un délai de quinze jours à compter de la délibération du comité pour qu'il statue en la forme des référés ; que la demande étant portée par voie d'assignation précisant la date de l'audience fixée par le greffe, l'article L. 4614-13 du code du travail doit être interprété comme prévoyant que l'assignation doit être délivrée dans le délai imparti et remise au greffe avant sa caducité, à peine d'irrecevabilité ; qu'en jugeant au contraire que c'était le dépôt au greffe de l'assignation qui devait intervenir dans le délai de quinze jours imparti, le juge des référés a violé les articles L. 4614-13 du code du travail et 485 du code de procédure civile ;

4°) ALORS QUE la demande initiale est formée par assignation ; que la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de forclusion ; que l'assignation ayant été délivrée, selon ses constatations, le 29 mars 2017, soit moins de quinze jours après la délibération du CHSCT, le juge des référés a violé les articles L. 4614-13 du code du travail et 2241 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-21032
Date de la décision : 05/12/2018
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Caen, 27 juin 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 05 déc. 2018, pourvoi n°17-21032


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.21032
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