La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/11/2018 | FRANCE | N°17-10827

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 14 novembre 2018, 17-10827


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 1221-1 du code du travail ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Y... a été engagé le 25 août 2003 par la société Sermat ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de rappel de prime de vacances ;

Attendu que pour faire droit à sa demande, l'arrêt retient que la prime de vacances ne figurant plus sur le bulletin de paie, rien ne permet d'établir qu'elle a continué d'être versée, qu'inclure le paiement d'une prime dans le salaire mens

uel brut ne signifie pas en changer les modalités de calcul et que le fait même que la...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 1221-1 du code du travail ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Y... a été engagé le 25 août 2003 par la société Sermat ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de rappel de prime de vacances ;

Attendu que pour faire droit à sa demande, l'arrêt retient que la prime de vacances ne figurant plus sur le bulletin de paie, rien ne permet d'établir qu'elle a continué d'être versée, qu'inclure le paiement d'une prime dans le salaire mensuel brut ne signifie pas en changer les modalités de calcul et que le fait même que la prime de vacances n'apparaisse plus sur le bulletin de paie établit qu'en réalité le salarié n'en bénéficiait plus ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que l'avenant du 7 juin 2004, signé par le salarié, stipulait expressément une rémunération brute incluant l'ancienne prime de vacances, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne l'employeur à payer au salarié la somme de 987,60 euros au titre de la prime de vacances pour la période de février 2015 à septembre 2016, l'arrêt rendu le 17 novembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Agen ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze novembre deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour la société Sermat

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait condamné la société Sermat à verser à M. Y... les sommes de 3 399,35 € à titre de rappel de prime de vacances du 1er mars 2009 au 31 janvier 2015 et de l'avoir également condamnée à lui verser à ce titre la somme de 987,60 € pour la période de février 2015 à septembre 2016 ainsi que la somme de 1 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE M. Y... appartient à la catégorie de salariés concernés pour lesquels la prime de vacances était stipulée à son contrat de travail, pour lui le contrat de travail signé le 25 août 2003 : « Article 6 – rémunération : en contrepartie de son travail, M. Y... recevra une rémunération mensuelle brute de 1 250 €. S'ajoute à cette rémunération : une prime dite de "vacances" ; le règlement des primes collective ou individuelle interviendra en fonction des règles définies par l'entreprise » ; qu'aux termes de l'avenant au contrat de travail signé le 7 juin 2004 par M. Y... : « Article 6 - Rémunération : en contrepartie de son travail, M. Léo Y... percevra une rémunération mensuelle brute de 1 390 € (incluant l'ancienne prime de vacances) », étant observé que M. Y... était concomitamment promu manager adjoint ventes services, niveau N III, échelon E2, coefficient 225 – son ancien coefficient était le 215 – et que l'avenant prenait effet au 1er juin 2004 ; que son salaire brut de juin 2004 s'élevait à 1 390 € et la prime de vacances ne figurant pas sur le bulletin de paie, rien ne permet d'établir qu'elle ait continué à être versée ; qu'il s'agit d'une prime calculée en pourcentage, 30 % d'un mois de salaire net et, dès lors qu'elle n'était plus versée en deux fois, en juin et en décembre, mais intégrée au salaire mensuel brut, encore faut-il pour s'en assurer que la conversion d'un pourcentage calculé sur un mois pour l'année et d'un pourcentage permettant une rémunération mensuelle identique, mais calculée sur chaque mois de salaire, soit, d'une part, indiquée pour permettre au salarié de vérifier qu'il continue bien à en bénéficier et, d'autre part, que le montant de la prime augmente parallèlement à ses augmentations de salaire : inclure le paiement d'une prime, auparavant versée bisanuellement, dans le salaire mensuel brut ne signifie pas en changer les modalités de calcul : il doit toujours s'agir, à la fin de l'année, de 30 d'un mois de salaire brut ; qu'il appartient à l'employeur d'en justifier, ce qui exige que son mode de calcul apparaisse sur le bulletin de paie, au même titre que la prime d'ancienneté dont il avait été essentiellement question lors de la réunion de la délégation unique du personnel ; qu'au regard du respect du principe « à travail égal, salaire égal », la seule circonstance que des salariés aient été engagés avant ou après l'entrée en vigueur d'un accord collectif ou d'un engagement unilatéral ne saurait suffire à justifier des différences de traitement entre eux ; quelles que soient par ailleurs les stipulations de leur contrat de travail ; qu'il appartient à l'employeur de démontrer qu'il existe des raisons objectives à la différence de traitement entre des salariés effectuant un même travail ou un travail de valeur égale dont il revient au juge de contrôler la réalité et la pertinence, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ; qu'au surplus, le fait même que la prime de vacances n'apparaisse plus sur le bulletin de paie de M. Y... établit qu'en réalité, il n'en bénéficiait plus ; qu'enfin, lorsque la différence de traitement entre des salariés placés dans une situation identique au regard de l'avantage considéré résulte des termes mêmes d'un engagement unilatéral de l'employeur à l'origine d'un usage d'entreprise, il y a lieu de faire application du principe d'égalité de traitement sans recourir nécessairement à une comparaison entre salariés de l'entreprise effectuant le même travail ou un travail de valeur égale ; que c'est en conséquence par des motifs complets et pertinents qui ne sont pas remis en cause par les débats en appel et que la cour adopte, que le premier juge a considéré que la prime était toujours due et le jugement doit être confirmé sur ce point ; que M. Y... ayant demandé à ce que la société Sermat soit condamnée à lui payer cette prime jusqu'au 1er septembre 2016, le jugement doit être complété sur ce point ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE l'intégration de la prime de vacances au salaire de base à l'égard de M. Y... contrevient au principe « à travail égal, salaire égal » ; qu'en effet, alors que l'usage d'entreprise antérieur au 1er juillet 2004 n'avait pas été utilement dénoncé par la société Sermat par défaut d'information des institutions représentatives du personnel et de chacun des salariés concernés, les collègues de M. Y... occupant le même emploi que lui pouvaient bénéficier du maintien de cet usage ; qu'or, alors que ces autres salariés pouvaient prétendre en cas d'augmentation du salaire conventionnel à une augmentation de leur salaire et à celle de la prime de vacances distincte, M. Y... pouvait lui voir son salaire stagner ; qu'alors que M. Y... invoque une violation de ce principe, la société Sermat, qui détient l'ensemble des bulletins de paie de ses salariés, ne verse aucune pièce démontrant qu'il a été traité également et que son salaire a augmenté de la même manière que les autres salariés occupant le même emploi pouvant prétendre au paiement d'une prime de vacances distincte ; qu'il convient de faire droit aux demandes de M. Y... ;

ALORS, D'UNE PART, QU'en affirmant, pour accorder au salarié un rappel de prime de vacances, que le fait qu'elle n'apparaisse plus sur son bulletin de paie aurait établi qu'il n'en bénéficiait plus, quand ladite prime n'avait pas été supprimée, mais qu'il avait été convenu, par accord des parties formalisé par la signature du contrat du 3 mars 2004, qu'elle serait intégrée au salaire de base qui s'en trouvait augmenté, la cour d'appel a violé l'article L. 1221-1 du code du travail ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE la signature par un salarié du contrat de travail vaut acceptation claire et non équivoque des clauses qu'il contient ; qu'à défaut d'invoquer un vice ayant altéré son consentement, il ne peut prétendre ne pas y avoir valablement consenti ; que par avenant du 7 juin 2004, M. Y... avait accepté le principe d'une rémunération globale de 1 390 € incluant la prime de vacances ; qu'en affirmant néanmoins, pour faire droit à la demande du salarié, que la prime était toujours due quand elle avait été, par la volonté des parties, intégrée au salaire de base et dument versée sous cette forme tous les mois, la cour d'appel a violé l'article L. 1221-1 du code du travail ;

ALORS ENSUITE, (et subsidiairement), QUE la cour d'appel a retenu, par motifs adoptés des premiers juges, l'existence d'une inégalité de traitement résultant de ce que les salariés dont la prime de vacances n'aurait pas été contractualisée et qui en bénéficiaient en vertu d'un usage non dénoncé dans les formes requises pouvaient prétendre en cas d'augmentation du salaire conventionnel à une augmentation de leur salaire et de la prime, tandis que M. Y... « pouvait voir son salaire stagner » ; qu'en statuant ainsi sans constater que sa rémunération n'aurait pas augmenté en proportion, la cour d'appel a statué par des motifs hypothétiques et a privé en conséquence sa décision de base légale au regard de l'article L. 3221-2 du code du travail ;

ET ALORS ENFIN, (et subsidiairement), QU'il incombe au salarié qui invoque une atteinte au principe « à travail égal, salaire égal » de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération ; qu'en condamnant la société Sermat à verser à M. Y... un rappel de primes de vacances au motif qu'elle ne démontrerait pas qu'il aurait été traité également et que son salaire aurait augmenté de la même manière que les autres salariés pouvant prétendre au paiement d'une prime de vacances distincte, quand c'est au salarié qu'il incombait d'établir la différence de traitement dont il aurait été victime en établissant que le salaire perçu aurait été moindre que celui de ses collègues, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-10827
Date de la décision : 14/11/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 17 novembre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 14 nov. 2018, pourvoi n°17-10827


Composition du Tribunal
Président : Mme Goasguen (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.10827
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award