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08/11/2018 | FRANCE | N°17-26784

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 08 novembre 2018, 17-26784


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 20 septembre 2017), que Roger X..., salarié entre 1968 et 1988 de la société Mobil Oil française, aux droits de laquelle vient la société Esso (l'employeur), est décédé le [...] ; que l'Etablissement national des invalides de la marine a reconnu le 17 novembre 2006 l'origine professionnelle de ce décès ; que les ayants droit de la victime, après avoir accepté le 7 juillet 2007 la proposition d'indemnisation du Fonds d'indemnisati

on des victimes de l'amiante (FIVA), ont saisi une juridiction de sécurité s...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 20 septembre 2017), que Roger X..., salarié entre 1968 et 1988 de la société Mobil Oil française, aux droits de laquelle vient la société Esso (l'employeur), est décédé le [...] ; que l'Etablissement national des invalides de la marine a reconnu le 17 novembre 2006 l'origine professionnelle de ce décès ; que les ayants droit de la victime, après avoir accepté le 7 juillet 2007 la proposition d'indemnisation du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA), ont saisi une juridiction de sécurité sociale aux fins de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur ;

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire les demandeurs recevables en leur action, selon le moyen, qu'il résulte de l'article L. 431-2 du code de la sécurité sociale que l'action en reconnaissance d'une faute inexcusable engagée par un marin à l'encontre de son employeur se prescrit par deux ans soit à compter de la date à laquelle la caisse a reconnu la nature professionnelle de la maladie, soit à compter de la date de cessation de paiement de l'indemnité journalière ; qu'au cas présent, il résultait des constatations de la cour d'appel, d'une part, que le décès de Roger X... avait été pris en charge au titre de la législation professionnelle le 17 novembre 2006 , et d'autre part, que ses ayants droit avaient saisi la caisse d'une demande en reconnaissance de la faute inexcusable le 27 décembre 2011 ; qu'en déclarant néanmoins l'action en reconnaissance de la faute inexcusable introduite par les ayants droit de Roger X... et par le FIVA recevable cependant qu'elle avait été mise en oeuvre plus de cinq ans après la reconnaissance du caractère professionnel de la pathologie, la cour d'appel a violé les articles L. 412-8, 8°, L. 413-12, 2°, L. 431-2 du code de la sécurité sociale et L. 452-3 du code de la sécurité sociale ;

Mais attendu que l'employeur ayant soutenu devant la cour d'appel que le point de départ du délai de deux ans prévu par l'article L. 431-2 du code de la sécurité sociale était le 7 mai 2011, date de la publication au Journal officiel de la décision n° 2011-127 du Conseil constitutionnel du 6 mai 2011, il n'est pas recevable à présenter, devant la Cour de cassation, un moyen contraire à ses propres écritures ; que le moyen ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Esso aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Esso et la condamne à payer à l'Etablissement national des invalides de la marine, au Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante et aux consorts X... la somme de 1 000 euros chacun ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit novembre deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Esso

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit les consorts X... recevables en leur action en recherche de faute inexcusable, et dit le FIVA recevable en son action en tant que subrogé dans les droits de Monsieur X... ;

AUX MOTIFS QUE « Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action en reconnaissance de la faute inexcusable La SA Esso SAF, concluant à la confirmation du jugement, oppose la prescription en faisant valoir que : - l'action engagée contre la société Mobil Oil Française le 18 avril 2013, soit dans le délai de prescription de deux ans de l'article L. 431-2 du code de la sécurité sociale courant de la publication, le 7 mai 2011 de la décision du Conseil constitutionnel du 6 mai 2011 reconnaissant aux marins le bénéfice d'une action en faute inexcusable, l'a été contre une société inexistante, ayant perdu sa personnalité juridique à l'occasion de sa fusion par la société Esso, réalisée par acte du 6 mai 2003 publiée le 26 mai 2003 ; - sa propre mise en cause par les consorts X... ne supplée pas ce défaut de personnalité, alors qu'elle a été mise en cause « en lieu et place » et non comme « venant aux droits » de la Mobil Oil Française ; - les consorts X... ne peuvent être admis à se contredire, en ce que, après avoir appelé en première instance la société Esso « en lieu et place » de la société Mobil Oil Française, ils concluent en appel contre la société Esso en tant que « venant aux droits de » la société Mobil Oil Française ; - l'absence d'existence juridique de la société Mobil Oil Française au jour de la saisine du tribunal des affaires de sécurité sociale est une cause de nullité de fond, non susceptible de régularisation, de sorte qu'elle n'a pu interrompre la prescription. Les consorts X... répliquent que la personnalité morale d'une société subsistant aussi longtemps que les droits et obligations à caractère social ne sont pas liquidés et l'action en reconnaissance de faute inexcusable ayant pour effet d'interrompre la prescription à l'égard de toute action procédant du même fait dommageable, ils ont pu valablement appeler en la cause, le 26 juin 2014, la société Esso, en qualité d'ayant droit de la société Mobil Oil Française, dans la procédure qu'ils avaient initiée contre la société Mobil Oil Française, dans le délai biennal courant du 7 mai 2011, par leur saisine de l'ENIM du 27 décembre 2011 et du tribunal des affaires de sécurité sociale le 18 avril 2013. Sur quoi : en application de l'article 32 du code de procédure civile, « est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d'agir ». Il est acquis, en application des dispositions de l'article 1848-8 du code civil, que la personnalité morale d'une société dissoute subsiste aussi longtemps que ses droits et obligations à caractère social ne sont pas liquidés. La société dissoute doit, dans cette hypothèse, être représentée par un mandataire ad'hoc. Dans l'hypothèse de l'espèce, celle d'une fusion, la société absorbée, dissoute, ne fait pas l'objet de liquidation, l'intégralité de ses droits et obligations étant, en application de l'article L. 236-3 du code de commerce, transmise à la société absorbante, qui devenant l'ayant cause de la société absorbée a, de plein droit, qualité pour poursuivre les instances engagées pour ou contre la société absorbée. La transmission universelle des droits et obligations a pour conséquence qu'il n'y a pas lieu de procéder à la désignation d'un mandataire ad'hoc de la société absorbée, dont la personnalité morale, prolongée pour les stricts besoins de la liquidation des obligations à caractère social, survit, dans cette mesure, clans la société absorbante. Il est en outre jugé que l'action en reconnaissance de faute inexcusable a pour effet d'interrompre la prescription à l'égard de toute action procédant du même fait dommageable. Cet effet interruptif est, notamment, reconnu à la saisine de la caisse à fin de tentative de conciliation (Soc 13 mai 1993, Bull Civ p. 97) ou à l'engagement de l'action à l'encontre d'un tiers (gérant personne physique de l'employeur personne morale : Soc 23 janvier 2003, n° 0120945).En l'espèce, les consorts X... ont interrompu la prescription biennale, une première fois, par la saisine de la caisse à fin de tentative de conciliation du 27 décembre 2011, puis par la saisine du tribunal des affaires de sécurité sociale du 18 avril 2013.La mise en cause de la SA Esso SAF, ordonnée par le président du tribunal des affaires de sécurité sociale le 27 juin 2014, a régularisé, au sens de l'article 126 alinéa 2 du code de procédure civile, la représentation de la société Mobil Oil Française, dont la SA Esso SAF ne peut utilement conclure à l'inexistence, sa personnalité survivant pour les besoins de la liquidation de ses obligations à caractère social. En considération de la particularité des fictions conjuguées résultant tant de la survie, concernant ses obligations à caractère social, de la société dissoute que de la transmission universelle de ses droits et obligations à la société absorbante, il n'y pas de contradiction, qui puisse être opposée de façon dirimante aux consorts X..., entre le fait de venir aux droits de la société absorbée ou de venir en ses lieu et place. Le jugement sera en conséquence réformé en ce qu'il a opposé la prescription à l'action en reconnaissance de la faute inexcusable formée par les consorts X... » ;

ALORS QU'il résulte de l'article L. 431-2 du Code de la sécurité sociale que l'action en reconnaissance d'une faute inexcusable engagée par un marin à l'encontre de son employeur se prescrit par deux ans soit à compter de la date à laquelle la caisse a reconnu la nature professionnelle de la maladie, soit à compter de la date de cessation de paiement de l'indemnité journalière ; qu'au cas présent, il résultait des constatations de la cour d'appel, d'une part, que le décès de Monsieur X... avait été pris en charge au titre de la législation professionnelle le 17 novembre 2006 (arrêt p. 2), et d'autre part, que ses ayants droit avaient saisi la caisse d'une demande en reconnaissance de la faute inexcusable le 27 décembre 2011 (arrêt p. 3) ; qu'en déclarant néanmoins l'action en reconnaissance de la faute inexcusable introduite par les ayants droits de Monsieur X... et par le FIVA recevable cependant qu'elle avait été mise en oeuvre plus de cinq ans après la reconnaissance du caractère professionnel de la pathologie, la cour d'appel a violé les articles L. 412-8, 8°, L. 413-12, 2°, L. 431-2 du Code de la sécurité sociale et L. 452-3 du Code de la sécurité sociale.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 17-26784
Date de la décision : 08/11/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 20 septembre 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 08 nov. 2018, pourvoi n°17-26784


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SARL Cabinet Briard, SCP Claire Leduc et Solange Vigand, SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.26784
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