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07/11/2018 | FRANCE | N°17-14072

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 07 novembre 2018, 17-14072


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Instant Electronique, dirigée par Jean-Claude D..., entretenait des relations commerciales avec la société Télévic , laquelle a souhaité travailler avec une structure indépendante ; que la société Sécuri Com systèmes a été créée à cet effet par M. D... et deux salariés de la société Instant électronique, MM. Z... et Y... ; qu'à la suite du décès de Jean-Claude D... en [...] , MM. Z... et Y... ont racheté ses parts ; qu'ils ont été licenciés pou

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Instant Electronique, dirigée par Jean-Claude D..., entretenait des relations commerciales avec la société Télévic , laquelle a souhaité travailler avec une structure indépendante ; que la société Sécuri Com systèmes a été créée à cet effet par M. D... et deux salariés de la société Instant électronique, MM. Z... et Y... ; qu'à la suite du décès de Jean-Claude D... en [...] , MM. Z... et Y... ont racheté ses parts ; qu'ils ont été licenciés pour faute grave par lettre du 21 janvier 2009, l'employeur leur reprochant le développement d'une activité concurrente ; qu'ils ont saisi la juridiction prud'homale le 19 juin 2009, l'employeur ayant déposé plainte pour abus de confiance; que par jugement du 4 octobre 2010, le conseil de prud'hommes a rejeté leurs demandes ; que les salariés ont relevé appel de ces jugements ; que par jugement du 26 janvier 2012, les salariés ont été condamnés par le tribunal correctionnel ; qu'ils ont relevé appel de ces condamnations ; que par arrêt du 23 mars 2012,l'affaire prud'homale a été radiée ; que par arrêt du 25 septembre 2014, la cour d'appel a relaxé les salariés ; que ceux-ci ont déposé des conclusions le 25 novembre 2014 devant la cour d'appel ; que l'employeur a soulevé la péremption de l'instance ; que le 28 juin 2016, la société Instant électronique, employeur, a cédé à la société Horelec systèmes représentée par la société Sygmatel électronique, un fonds de commerce avec deux établissements secondaires ; que la société Instant électronique est représentée par la société Dolley-Collet, liquidateur ;

Sur la recevabilité du pourvoi contestée par la société Sygmatel électronique :

Attendu qu'il ne résulte d'aucune pièce de la procédure que la cession du fonds de commerce est intervenue avant le prononcé de l'arrêt attaqué ; qu'il n'y a pas lieu de déclarer le pourvoi irrecevable ;

Sur le moyen unique pris en sa première branche :

Vu l'article R. 1452-8 du code du travail, alors en vigueur ;

Attendu que pour constater la péremption de l'instance, l'arrêt retient que le délai de deux ans fixé par l'ordonnance de radiation expirait le 23 mars 2014 et que les salariés ont déposé leurs conclusions le 25 novembre 2014, que l'existence d'une instance pénale ne fait pas obstacle à l'accomplissement de diligences dans une instance qui n'a pas donné lieu à une décision de sursis à statuer, que s'il existe un lien entre les deux instances dès lors que les appelants étaient poursuivis pour avoir détourné 66 761 euros, absence de facturation pour des prestations d'atelier, quand la société Instant électronique était cliente de la société Televic, absence de facturation diverses et minoration de facturation, qui leur avaient été remis et qu'ils avaient acceptés à charge de les rendre, de les représenter ou d'en faire un usage déterminé, tandis que les faits visées dans la lettre de licenciement étaient notamment l'existence de relations avec la société Televic au détriment de la société Instant électronique, le caractère nécessaire de ce lien entre les deux instances fait néanmoins défaut, dès lors que la lettre de licenciement énonçait d'autres griefs que celui relatif aux relations avec Televic à son détriment, étrangers aux poursuites pénales notamment l'exercice d'une activité directement concurrente ;

Qu'en statuant ainsi alors qu'il résultait de ses propres constatations que la décision de radiation du 23 mars 2012, qui se bornait à dire que « l'affaire pourra être rétablie au rôle lorsqu'elle sera en état d'être plaidée au vu des moyens des parties développés par les appelants, dans un délai de deux ans à compter de la présente décision faute de quoi la péremption pourra être constatée », n'avait pas mis de diligences expresses à la charge des parties, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

Dit n'y avoir lieu de déclarer irrecevable le pourvoi en tant que dirigé à l'encontre de la société Sygmatel électronique ;

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 janvier 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers ;

Condamne la société Instant électronique aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Instant électronique à payer à MM. Y... et Z... la somme globale de 3 000 euros et rejette les autres demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept novembre deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me B..., avocat aux Conseils, pour MM. Y... et Z....

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'AVOIR constaté la péremption de l'instance entre les parties ;

AUX MOTIFS QUE selon l'article R 1452-8 du code du travail, l'instance n'est périmée que lorsque les parties s'abstiennent d'accomplir pendant le délai de deux ans mentionné à l'article 386 du code de procédure civile les diligences qui ont été expressément mises à leur charge par la juridiction. En l'espèce, la décision de radiation prononcée par la cour le 23 mars 2012 précisait que l'affaire pourra être rétablie au rôle lorsqu'elle sera en état d'être plaidée au vu des moyens des parties développés par les appelants, dans un délai de deux ans à compter de la présente décision faute de quoi la péremption pourra être constatée. La radiation avait été prononcée aux fins de sanctionner la carence des appelants qui n'avaient pas devoir faire connaître leurs moyens d'appel en raison d'une instance pénale en cours de sorte que l'affaire n'était pas en état d'être plaidée Le délai de deux ans ayant expiré à la date du 23 mars 2014, les appelants qui ont fait connaître leurs moyens par des écritures déposées le 25 novembre 2014, soutiennent qu'il existait entre la présente instance et l'instance pénale qui a donné lieu à un arrêt du 25 octobre 2014, un lien de dépendance direct et nécessaire et font valoir que leurs conclusions devant la chambre des appels correctionnels du 23 janvier 2014 et la communication de pièces qui les a précédées le 16 janvier ont interrompu le délai de péremption. Cependant ainsi que le fait valoir l'intimée l'existence d'une instance pénale ne fait pas obstacle à l'accomplissement de diligences dans une instance qui n'a pas donné lieu à une décision de sursis à statuer et s'il existe par ailleurs un lien entre les deux instances dès lors que les appelants étaient poursuivis pour avoir détourné 66.761€ - absence de facturation pour des prestations d'atelier, quand la SA Instant Eletronique était cliente de Televic, absence de facturation diverses et minoration de facturation, qui leur avaient été remis et qu'ils avaient acceptés à charge de les rendre de les représenter ou d'en faire un usage déterminé, tandis que les faits visées dans la lettre de licenciement étaient notamment l'existence de relations avec Televic au détriment de la SA Instant Electronique, fait néanmoins défaut en l'espèce le caractère nécessaire de ce lien entre les deux instances, dès lors que la lettre de licenciement énonçait d'autres griefs que celui relatif aux relations avec Televic à son détriment, étrangers aux poursuites pénales notamment I ' exercice d 'une activité directement concurrente. Dès lors il convient de constater la péremption de l'instance acquise depuis le 23 mars 2014. En conséquence, en application de l'article 390 du code de procédure civile, cette péremption confère au jugement du conseil de prud'hommes de Nantes en date du 4 octobre 2010 1'autorité de la chose jugée ;

1°) - ALORS QU'en matière prud'homale, l'instance n'est périmée que lorsque les parties s'abstiennent d'accomplir, pendant le délai de deux ans mentionné à l'article 386 du code de procédure civile, les diligences qui ont été expressément mises à leur charge par la juridiction ; qu'en estimant l'instance périmée, sans constater que des diligences avaient été mises à la charge de MM. Y... et Z..., et qu'ils ne les avaient pas respectées, la cour d'appel a violé l'article R 1452-8 du code du travail, applicable au présent litige ;

2°) - ALORS QUE l'arrêt de la chambre des appels correctionnels de la cour d'appel de Rennes a examiné non seulement les actes de concurrence de la société SCS et de MM. Y... et Z... ayant prétendument nui à la société Instant Electronique dans les relations avec la société Télévic, mais également l'existence d'actes de concurrence en-dehors de toute relation avec la société Télévic ; qu'en excluant l'existence d'un lien nécessaire entre l'instance dont elle avait à connaître et l'instance pénale pour la seule raison que la lettre de licenciement énonçait des griefs autres que celui relatif aux relations avec la société Télévic, et que ces faits étaient étrangers aux poursuites pénales, la cour d'appel a dénaturé l'arrêt rendu par la juridiction répressive, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

3°) – ALORS SUBSIDIAIREMENT QUE les diligences accomplies dans une instance peuvent être interruptives de péremption dans une autre, dès lors qu'il existe un lien direct et nécessaire entre les deux ; qu'en ne recherchant pas si la chambre des appels correctionnels n'avait pas connu des faits de concurrence reprochés à MM. Y... et Z..., hors de toute relation avec la société Télévic, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 386 du code de procédure civile et R 1452-8 du code du travail ;

4°) - ALORS QUE les diligences accomplies dans une instance peuvent être interruptives de péremption dans une autre, dès lors qu'il existe un lien direct et nécessaire entre les deux ; que le juge prud'homal est tenu de ne pas prendre en considération les faits invoqués à l'appui du licenciement s'ils ont été examinés par le juge répressif et ont abouti à une relaxe ; que la cour d'appel a constaté que MM. Y... et Z... avaient été poursuivis pénalement pour des faits au moins partiellement identiques à ceux ayant fondé leur licenciement ; qu'en niant l'existence d'un lien direct et nécessaire entre les deux instances au motif inopérant que la lettre de licenciement aurait également comporté d'autres griefs, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs impropres à justifier sa décision, violant ainsi les articles 386 du code de procédure civile et R 1452-8 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-14072
Date de la décision : 07/11/2018
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 06 janvier 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 07 nov. 2018, pourvoi n°17-14072


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Occhipinti, SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.14072
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