LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Met hors de cause la société Abitbol-Rousselet ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été mis à disposition de la Société nouvelle de l'imprimerie Royer (la société) du 31 août 2010 au 1er juillet 2011 dans le cadre de contrats de travail temporaire ; que le 1er juillet 2011 cette société l'a engagé en qualité de magasinier-cariste ; qu'après avoir été déclaré inapte à son poste par le médecin du travail le 30 septembre 2013, il a été licencié pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement le 13 novembre 2013 ; que le 15 janvier 2014, sur le recours du salarié formé le 10 novembre 2013, l'inspecteur du travail a annulé l'avis d'inaptitude ; qu'après avoir été placée en redressement judiciaire par jugement du 21 mars 2017, Mme B... étant nommée mandataire judiciaire et la société Abitbol-Rousselet administrateur judiciaire, la société a été placée en liquidation judiciaire par jugement du 16 mai 2017, la C... étant désignée en qualité de liquidateur ;
Sur le second moyen, ci-après annexé :
Attendu que sous le couvert du grief de contradiction entre les motifs et le dispositif, le moyen critique une omission de statuer sur les demandes de rappel de salaire au titre des minima conventionnels et de complément d'indemnité de licenciement ; que l'omission de statuer pouvant être réparée par la procédure prévue à l'article 463 du code de procédure civile, le moyen n'est pas recevable ;
Mais sur le premier moyen :
Vu les articles L. 1226-10 et L. 4624-1 du code du travail en leur rédaction applicable en la cause ;
Attendu que pour débouter le salarié de ses demandes tendant à dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse et en paiement d'indemnités à ce titre, l'arrêt retient que l'employeur a exactement suivi la procédure concernant l'inaptitude du salarié et qu'il a pris sa décision sur le fondement d'un avis relevant l'inaptitude du salarié au poste qu'il occupait ainsi que sur un avis lui indiquant, après étude de poste, une inaptitude totale du salarié aux emplois susceptibles d'être occupés par lui, qu'il ne peut être reproché à l'employeur d'avoir pris la seule décision qui s'imposait à lui compte tenu des informations dont il disposait, qu'en effet, le salarié n'a aucunement informé son employeur de ce qu'il formait un recours à l'encontre de l'avis du 30 septembre 2013, ce que le devoir de loyauté dans l'exécution du contrat de travail commandait, communication qui aurait pu éventuellement inciter l'employeur à aménager sa décision ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que l'avis d'inaptitude avait été annulé par l'inspecteur du travail le 15 janvier 2014, ce dont elle aurait dû déduire que le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement était privé de cause, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute le salarié de ses demandes au titre de la rupture de son contrat de travail, l'arrêt rendu le 27 avril 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;
Condamne la société E... B... , ès qualités de liquidateur de la Société nouvelle de l'imprimerie Royer aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre octobre deux mille dix-huit.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me A..., avocat aux Conseils, pour M. X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, D'AVOIR débouté M. X... de sa demande tendant à voir dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi que de ses demandes, notamment indemnitaires, subséquentes ;
AUX MOTIFS QU'il ressort des dispositions de l'article L. 1226-10 du code du travail que si le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformation de poste de travail ou aménagement du temps de travail ; qu'iI ressort des pièces du dossier que : - le 16 septembre 2013, dans le cadre d'une visite de pré-reprise, le médecin du travail a indiqué qu' « une reprise au poste de magasinier cariste est envisageable dès le 16 /09 » ; - le 30 septembre 2013, le même médecin a émis un avis d' « inaptitude à la reprise au poste de magasinier ; - le 30 septembre 2013, le même médecin a émis un avis d' « inaptitude à la reprise au poste de magasinier cariste précédemment occupé ; reste apte à un poste sans port de charges lourdes ou répétées et sans position fléchie du dos répétée » ; - le 9 octobre 2013, le médecin du travail procédait à une étude de poste ; - le 15 octobre 2013, ce médecin, répondant à un courrier de la Sas Société nouvelle de l'imprimerie Royer, indiquait à celle-ci « qu'il apparaît en effet qu'aucun poste ne soit compatible avec l'état de santé de M. X..., tous les postes observés comportant la position debout prolongée et des positions contraignantes pour le rachis (mouvements de flexion ou de rotation du torse répétés) » ; - le 28 octobre 2013, la Sas Société nouvelle de l'imprimerie Royer convoquait M. X... à un entretien préalable au licenciement devant se tenir le 7 novembre suivant ; - le 10 novembre 2013, M. X... saisissait l'Inspecteur du travail d'un recours en annulation de l'avis du médecin du travail du 30 septembre 2013 - par lettre datée du 13 novembre 2013, la SAS Société nouvelle de l'imprimerie Royer notifiait à M. X... son licenciement pour inaptitude ; - le 15 janvier 2014, l'inspecteur du travail annulait l'avis du médecin du travail du 30 septembre 2013 ; que M. X... soutient qu'en raison de l'annulation de l'avis du 30 septembre 2013, son licenciement est nécessairement sans cause réelle et sérieuse : que, cependant, il ressort du dossier que, comme l'ont relevé les premiers juges, la Société nouvelle de l'imprimerie Royer a exactement suivi la procédure concernant l'inaptitude du salarié et qu'elle a pris sa décision sur le fondement d'un avis relevant l'inaptitude du salarié au poste qu'il occupait ainsi que sur un avis lui indiquant, après étude de poste, une inaptitude totale du salarié aux emplois susceptibles d'être occupés par lui ; qu'il ne peut être reproché à la Société nouvelle de l'imprimerie Royer d'avoir pris la seule décision qui s'imposait à elle compte tenu des informations dont elle disposait ; qu'en effet, M. X... n'a aucunement informé son employeur de ce qu'il formait un recours à l'encontre de l'avis du 30 septembre 2013, ce que le devoir de loyauté dans l'exécution du contrat de travail commandait, communication qui aurait pu éventuellement inciter l'employeur à aménager sa décision ; qu'enfin, l'avis émis le 15 octobre 2013 par le médecin du travail, après les deux examens et l'étude de poste prévus par l'article R. 4624-31 du code du travail, est particulièrement clair quant à l'inaptitude de M. X... à tous les postes de l'entreprise susceptibles de lui être proposés ; que, par ailleurs, il ressort d'un courriel du 16 octobre 2013 que la Société nouvelle de l'imprimerie Royer a interrogé le responsable administratif des sociétés Filiber et Label'F, qui font partie du même groupe qu'elle sur une possibilité de reclassement de M. X... en indiquant la qualification exacte de celui-ci et les caractéristiques du poste qui pourrait lui être proposé compte tenu de l'avis du médecin du travail du 30 septembre2013 ; que ce responsable, dont il ressort des organigrammes versés au dossier qu'il a en charge la gestion du personnel, a répondu par courriel du 22 octobre 2013 qu'aucun poste n'était disponible dans ces deux sociétés, celles-ci se trouvant en sureffectif au regard des commandes enregistrées ; qu'iI ressort de ce qui précède que la Sas Société Nouvelle de l'Imprimerie Royer a respecté ses obligations ;
ALORS QU'en cas d'annulation par l'inspecteur du travail de l'avis d'inaptitude du médecin du travail, le licenciement antérieurement prononcé sur le fondement de cet avis devient privé de cause, quand bien même le salarié, qui n'en avait pas l'obligation, n'aurait pas informé l'employeur de l'exercice du recours contre l'avis d'inaptitude ; qu'en considérant, pour retenir l'existence d'une cause réelle et sérieuse de licenciement, que le salarié avait manqué à son obligation de loyauté à défaut d'avoir informé l'employeur du recours qu'il avait formé contre l'avis d'inaptitude, dont elle constatait qu'il avait abouti à une annulation de l'avis du médecin du travail sur le fondement duquel le licenciement avait été prononcé, la cour d'appel a violé l'article L. 1222-1 du code du travail, ensemble les articles L. 4624-1 et R. 4624-35 du même code dans leur rédaction applicable au litige.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté M. X... de toutes ses demandes, à l'exception de celles relatives à la requalification des contrats de mission en un contrat à durée indéterminée à compter du 31 janvier 2011 ;
AUX MOTIFS QUE, sur les demandes relatives au rappel de salaire au titre des minima conventionnels, il ressort du contrat liant les parties que la rémunération de M. X... était fixée sur la base de 9,50 euros par heure de travail pour un horaire hebdomadaire de 39 heures, travail effectué de journée, soit 1 652,41 euros mensuel brut incluant les heures majorées à 25 % de la 36ème à la 39ème heure hebdomadaire ; que, sur une base conventionnelle de 152,25 heures, la rémunération de M. X... s'établissait donc à la somme de 1 446,38 euros ; que M. X... produit un tableau récapitulatif à l'appui de sa demande à hauteur de 5 370,33 euros ; qu'il ressort de l'accord du 7 décembre 2012 relatif à la politique salariale pour les années 2012 et 2013 conclu dans le cadre de la convention collective nationale que le salaire mensuel de base pour 152,25 heures de travail de M. X... devait s'établir pour l'année 2012 à la somme de 1 460 euros, soit 9,58 euros par heure, et pour l'année 2013 à la somme de 1 482 euros, soit 9,73 euros par heure ; que, cependant, il ressort des bulletins de paie de M. X... que ces réévaluations conventionnelles n'ont pas été appliquées, ce qui représente : - pour l'année 2012, la somme de (9.58 euros - 9.50euros x 152.25 x 12) 163,44 euros ; - pour l'année 2013 la somme de (9,73 euros - 9,50euros x 152.25 x 12) 420,21 euros, soit un total de 583,65 euros ; que, par ailleurs, il apparaît que les imputations d'heures supplémentaires sont erronées en ce qu'elles intègrent pour partie, une période durant laquelle le salarié était absent pour maladie, alors qu'une autre partie de ces heures, qui relevaient du taux de majoration à 50 %, n'ont pas été ainsi valorisées, pour une somme totale de 254,13 euros ; que, compte tenu de ce qui précède, il y a lieu de constater que M. X... est créancier de la Société nouvelle de l'imprimerie Royer à hauteur de (583,65 + 254,13 euros) 837,78 euros, outre la somme de 83,78 euros au titre des congés payés ; qu'iI y a donc lieu de faire droit à la demande sur ce point, d'infirmer la décision entreprise et de condamner la Société nouvelle de l'imprimerie Royer au paiement de ces sommes ; que, sur la demande au titre de complément d'indemnité de licenciement, il ressort des dispositions de la convention collective applicable que les périodes de congés maladie doivent être comptabilisées pour le calcul de l'ancienneté; que par ailleurs il doit être également tenu compte de la requalification du contrat de travail ; que, sur ces bases, M. X... pouvait bénéficier d'une indemnité de licenciement d'un montant de 1 206,15 euros alors qu'il n'a perçu que 771,12 euros; il convient de faire droit à cette demande à hauteur de 435,03 euros ; qu'iI y a donc lieu de faire droit à la demande et d'infirmer la décision entreprise sur ce point.
ALORS, 1°), QUE la contradiction entre les motifs et le dispositif ouvre droit à cassation ; qu'en déboutant le salarié, dans le dispositif de son arrêt, de toutes ses demandes autres que celles relatives à la requalification des contrats de mission en un contrat à durée indéterminée à compter du 31 janvier 2011 après avoir pourtant, dans les motifs de sa décision, considéré que la demande de rappel de salaire au titre des minima conventionnels était fondée et devait être accueillie à hauteur de 837,78 euros, outre les congés payés afférents, la cour d'appel s'est contredite, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS, 2°), QUE la contradiction entre les motifs et le dispositif ouvre droit à cassation ; qu'en déboutant le salarié, dans le dispositif de son arrêt, de toutes ses demandes autres que celles relatives à la requalification des contrats de mission en un contrat à durée indéterminée à compter du 31 janvier 2011 après avoir pourtant, dans les motifs de sa décision, considéré que la demande de complément d'indemnité de licenciement était fondée et devait être accueillie à hauteur de 435,03 euros, la cour d'appel s'est contredite, en violation de l'article 455 du code de procédure civile.