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24/10/2018 | FRANCE | N°17-18753

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 24 octobre 2018, 17-18753


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme B... a été engagée à compter du 5 septembre 1978 par l'association Pour la Réadaptation des Infirmes Mentaux, aux droits de laquelle vient la Fondation des Amis de l'Atelier, en qualité d'aide médico-psychologique travaillant de nuit au sein d'un Institut Médico Educatif ; que la convention collective des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966 était applicable à la relation de travail ; qu'ayant été en arrêt de travail

d'août 2007 à février 2010, et estimant que l'employeur ne respectait pa...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme B... a été engagée à compter du 5 septembre 1978 par l'association Pour la Réadaptation des Infirmes Mentaux, aux droits de laquelle vient la Fondation des Amis de l'Atelier, en qualité d'aide médico-psychologique travaillant de nuit au sein d'un Institut Médico Educatif ; que la convention collective des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966 était applicable à la relation de travail ; qu'ayant été en arrêt de travail d'août 2007 à février 2010, et estimant que l'employeur ne respectait pas les préconisations du médecin du travail lors de la visite de reprise et dans l'avis d'aptitude avec réserve du 12 juillet 2011, la salariée a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ; qu'elle a été licenciée le 26 novembre 2014 pour inaptitude d'origine non professionnelle et impossibilité de reclassement ;

Sur le second moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le premier moyen :

Vu les articles L. 3141-3 du code du travail et 1315 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

Attendu que pour débouter la salariée de sa demande de rappel de salaire au titre des congés payés, l'arrêt retient que si la salariée ne détaille ni n'explique le fondement de sa demande, il ressort toutefois du jugement du conseil de prud'hommes et des pièces versées aux débats que cette demande est fondée sur le décompte des jours de congés acquis entre juin 2007 et août 2008 (vingt-six jours), que la salariée ne produit aucun élément à l'appui de sa demande, qu'il ressort des échanges de courrier avec l'employeur au cours de l'année 2012, que ce dernier conteste le nombre de jours de congés revendiqués par la salariée et leur report sur les années postérieures, que la salariée ne produit pas ses bulletins de salaire pour la période antérieure au 1er janvier 2010, ce qui ne permet pas à la cour de vérifier le bien fondé de ses demandes ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il appartient à l'employeur, débiteur de l'obligation du paiement de l'intégralité de l'indemnité due au titre des jours de congés payés, qui en conteste le nombre acquis, d'établir qu'il a exécuté son obligation, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute la salariée de sa demande en paiement d'un rappel de salaire au titre des congés payés, l'arrêt rendu le 22 mars 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet en conséquence, sur ce point, la cause et les parties
dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la Fondation des Amis de l'Atelier aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la Fondation des Amis de l'Atelier à payer à Mme B... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre octobre deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour Mme B....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté Mme B... de sa demande en paiement de rappel de salaire et congés payés y afférents,

AUX MOTIFS QU'

il résulte de l'article L. 3245-1 du code du travail qu'avant l'entrée en vigueur de la loi du 14 juin 2013 réformant les délais de prescription, les actions afférentes au salaire étaient soumises à un délai de prescription de cinq ans,

Par suite, l'article 2222 du code civil prévoit qu'en cas de réduction du délai de prescription, le nouveau délai court à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure,

Dès lors, au regard de ces dispositions, le nouveau délai de prescription de trois ans prévu par l'article L. 3245-l du code du travail commence à courir à compter de cette date soit le 16 juin 2013,

En l'espèce, Mme B... ayant saisi le conseil de prud'hommes le 7 février 2013, il convient de constater que seules ses demandes de rappel de salaire pour la période antérieure au 7 février 2008 sont prescrites,

IL est établi que Mme B... a bénéficié d'un arrêt de travail pour maladie non professionnelle entre août 2007 et le et le 1er février 2010,

Si la loi prévoit la prise en compte de la durée des périodes de suspension pour la détermination de tous les avantages légaux ou conventionnels liés à l'ancienneté dans l'entreprise pour les salariés victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, ces dispositions ne sont pas applicables aux salariés bénéficiant d'un arrêt de travail pour une maladie non professionnelle comme c'est le cas de Mme B...,

Dès lors, c'est à bon droit que la fondation Les Amis de l'Atelier n'a pas revalorisé son coefficient durant ses arrêts de travail pour maladie, dès lors que ni la loi ni les dispositions conventionnelles ne prévoient la prise en compte des suspensions du contrat pour maladie à ce titre,

La demande de rappel de salaire de Mme B... sera par conséquent rejetée et le jugement infirmé sur ce point,

Sur la demande de rappel de congés payés,

Mme B... sollicite la confirmation du jugement ayant fait droit à sa demande de paiement de congés,

La cour relève que si la salariée ne détaille ni n'explique le fondement de sa demande, il ressort toutefois du jugement du conseil de prud'hommes et des pièces versées aux débats (notamment les échanges de courriers avec l'employeur en 2012) que cette demande est fondée sur le décompte des jours de congés acquis entre juin 2007 et août 2008 (26 jours),

La cour constate que la salariée ne produit aucun élément à l'appui de sa demande. Ainsi, il ressort des échanges de courrier avec l'employeur au cours de l'année 2012, que ce dernier conteste le nombre de jours de congés revendiqués par la salariée et leur report sur les années postérieures. Or Mme B... ne produit pas ses bulletins de salaire pour la période antérieure au 1er janvier 2010, ce qui ne permet pas à la cour de vérifier le bien fondé de ses demandes,

Sa demande de paiement sera par conséquent rejetée et le jugement infirmé sur ce point,

1° ALORS QU'eu égard à la finalité qu'assigne aux congés payés annuels la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003, concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail, il appartient à l'employeur de prendre les mesures propres à assurer au salarié la possibilité d'exercer effectivement son droit à congé et, en cas de contestation, de justifier qu'il a accompli à cette fin les diligences qui lui incombent ; que nonobstant la délivrance de bulletins de paie, il appartient à l'employeur, débiteur de l'obligation de paiement de l'intégralité de l'indemnité due au titre des droits à congés payés, d'établir qu'il a exécuté son obligation ; qu'en énonçant que Mme B... ne produisait pas ses bulletins de salaire pour la période antérieure au 1er janvier 2010, ce qui ne permettait pas à la cour de vérifier le bien fondé de ses demandes, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et a violé L.3243-3 du code du travail, ensemble l'article 1315 du code civil dans sa rédaction alors applicable,

2° ALORS QU'il résulte des dispositions de l'article L. 1226-7 du code du travail que la durée des périodes de suspension du contrat de travail dues à un accident du travail ou à une maladie professionnelle est prise en compte pour la détermination de tous les avantages légaux ou conventionnels liés à l'ancienneté dans l'entreprise ; que les règles protectrices applicables aux victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle s'appliquent dès lors que l'inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée ou invoquée, a, au moins partiellement, pour origine cet accident ou cette maladie et que l'employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement ; qu'en déboutant Mme B... de sa demande en paiement de revalorisation de salaires au motif que la salariée avait bénéficié d'un arrêt de travail pour maladie non-professionnelle sans même rechercher si l'inaptitude qui avait présidé à son licenciement n'avait pas au moins partiellement une origine professionnelle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1226-7 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme B... de sa demande en paiement de dommages et intérêts au titre du harcèlement moral dont elle a été victime,

AUX MOTIFS PROPRES QUE

Sur le manquement à l'obligation de sécurité de l'employeur

Mme B... fait valoir que lors de la visite de reprise le février 2010, le médecin du travail l'a déclarée apte à travailler exclusivement au sein du bâtiment A, accueillant les enfants et adolescents polyhandicapés,

Or en juin 2011, l'employeur a entendu l'affecter sur d'autres bâtiments que ceux préconisés par la médecine du travail. Ainsi le 13 juin 2011, la salariée explique avoir été programmée pour travailler dans le service des enfants polyhandicapés mais avoir en réalité travaillé, suite à un appel téléphonique, sur le bâtiment R1 accueillant des patients difficiles,

Mme B... indique qu'elle a sollicité le médecin du travail qui a de nouveau préconisé son affectation sur les unités de polyhandicapés,

Par suite, son planning prévoyait une affectation sur un autre bâtiment pour le week-end du 22 et 23 juillet 2011. Elle a alors été placée en arrêt maladie et à son retour le 23 août 2011, elle a une fois de plus été affectée au bâtiment jaune accueillant des enfants difficiles, tel que cela résulte des plannings versés aux débats,

Elle constate qu'à quatre reprises sur une période effective de cinq semaines, elle s'est trouvée affectée sur d'autres bâtiments que celui réservé aux enfants et adolescents polyhandicapés alors que les précautions prises par l'employeur, à savoir faire appel à un collègue en cas d'effort étaient manifestement insuffisantes. Elle considère que ces mauvaises conditions de travail ont généré une aggravation substantielle de son état de santé rendant nécessaire la pose anticipée d'une prothèse cardiaque valvulaire. Mme B... ajoute que compte tenu de la gravité de ses problèmes de santé, elle est aujourd'hui incapable d'exercer une quelconque activité,

Elle précise que l'employeur ne pouvait ignorer l'inadéquation de ses conditions de travail au regard des difficultés rencontrées par les jeunes accueillis au sein de IME et constatées par l'inspecteur du travail lors d'un contrôle effectué le 28 juillet 2011,

La fondation Les Amis de l'Atelier conteste tout manquement à son obligation de sécurité. Elle fait valoir que : le 13 juin 2011, la salariée était affectée au service polyhandicapés comme en atteste le planning : la fondation conteste lui avoir demandé de travailler dans un autre service, en tout état de cause elle indique que le bâtiment R1 est un bâtiment accueillant des enfants ce qui était conforme aux préconisations du médecin du travail,

le week-end du 22 et 23 juillet 2011, la salariée a été exceptionnellement affectée au bâtiment jaune en raison de la fermeture du service polyhandicapés et des congés estivaux,

L'employeur ajoute que la salariée avait alors l'instruction de solliciter l'aide de ses collègues pour toute tâche nécessitant de gros efforts. En tout état de cause, la salariée s'est trouvée en arrêt de travail à compter du 22 juillet et jusqu'au 28 juillet suivant et n'a donc subi aucun préjudice ; la fondation explique par ailleurs que si un collègue, M. Z..., a pu bénéficier d'une récupération à ces dates, c'est qu'il en avait fait la demande antérieurement à Mme B... et qu'il avait un nombre d'heures plus important à récupérer que la salariée selon l'employeur, il n'était pas possible de privilégier systématiquement Mme B... au détriment de ses collègues,

le 23 août 2011, la salariée était bien affectée au service polyhandicapés contrairement à ce qu'elle soutient. Elle a par ailleurs bénéficié d'un nouvel arrêt de travail à compter de cette date,

La fondation Les Amis de l'Atelier ajoute qu'aucun élément ne permet de relier l'aggravation de l'état de santé de la salariée avec ses conditions de travail,

Aux termes des articles L. 4121-2 et suivants du code du travail, l'employeur est tenu à l'égard de chaque salarié d'une obligation de sécurité de résultat qui lui impose de prendre les mesures nécessaires pour assurer sa sécurité et protéger sa santé. Il doit en assurer l'effectivité,

Il ressort des pièces versées aux débats que le médecin du travail a émis les avis suivants : le 1er février 2010, apte à la reprise "à mi-temps thérapeutique sur le bâtiment A (enfants) sous réserve des vaccinations à jour",

le 3 mai 2010, apte "sur le bâtiment A (enfants) ",

le 15 juin 2011, apte "sur les unités C et D de polyhandicapés",

le 12 juillet 2011, apte "sous réserve : pas de gros efforts, apte sur les unités de polyhandicapés la nuit".

Par courrier du 18 juillet 2011, l'employeur a demandé à la salariée "afin de respecter les consignes de la médecine du travail [avis du 12 juillet de faire appel à l'aide d'un collègue, lorsque vous estimez que vous devez effectuer de gros efforts",

Il ne résulte pas des pièces versées aux débats et notamment du planning de travail, que le 13 juin 2011, Mme B... ait été affectée à un autre bâtiment que celui des polyhandicapés. Par ailleurs, la copie d'une feuille manuscrite dont aucun élément ne permet de savoir qui l'a rédigée, mentionnant "lundi 13 juin 2011 (...) 2h00 sur appel du code d'astreinte Lise part sur le bâtiment R1" ne justifie pas que la salariée ait été amenée à travailler sur un autre bâtiment que celui auquel elle était affectée. Aucun manquement ne peut donc être reproché à l'employeur,

En revanche, il résulte des plannings versés aux débats que les 22 et 23 juillet 2011, Mme B... a été affectée sur un autre bâtiment que celui des polyhandicapés (bâtiment jaune), ce qui. au demeurant, n'est pas contesté par l'employeur,

Ces mêmes plannings font apparaître que la salariée était bien affectée au bâtiment polyhandicapés le 23 août 2011 mais qu'à la suite de plusieurs modifications du planning (et notamment la dernière effectuée le 19 août 2011), elle a été réaffectée au Bâtiment jaune. Or ces affectations étaient contraires aux restrictions posées par le médecin du travail,

Par suite, même si la salariée n'a effectivement pas travaillé sur le bâtiment jaune du fait de ses arrêts de travail, la cour constate que l'employeur a choisi de l'affecter sur un poste incompatible avec ces réserves du médecin du travail, ne la mettant ainsi pas en mesure de travailler dans le respect des conditions de sécurité nécessaires à sa situation et dont l'employeur avait parfaitement connaissance,

Par ailleurs, c'est en vain que l'employeur argue de la nécessité de ne pas systématiquement privilégier la situation de Mme B... au détriment dc ses autres collègues,

En effet, il ne s'agissait aucunement de lui faire bénéficier d'un traitement de faveur mais bien de respecter les préconisations du médecin du travail qui s'imposaient à lui. De même, la fondation Les Amis de l'Atelier ne peut invoquer la fermeture exceptionnelle du bâtiment polyhandicapés ou l'absence de nombreux salariés en raison des vacances, pour justifier le fait qu'elle ait délibérément violé les réserves du médecin du travail,

Dès lors, au regard dc ces éléments, c'est par une juste appréciation de la situation que le conseil de prud'hommes de Melun a considéré que la fondation Les Amis de l'Atelier avait manqué à son obligation de sécurité,

Il ne ressort toutefois pas des éléments versés aux débats, et notamment du dossier médical de la salariée, que l'aggravation de son état de santé soit en lien avec ses conditions de travail. En effet, il n'est pas contesté que Mme B... souffre d'une malformation cardiaque sans lien avec les fonctions qu'elle exerçait au sein de la fondation Les Amis de l'Atelier. Il apparaît également que les arrêts maladie dont elle a pu bénéficier n'ont jamais été considérés comme consécutifs à une maladie professionnelle ou un accident du travail. L'inaptitude définitive de la salariée, en lien avec l'aggravation de sa pathologie cardiaque, n'a pas non plus été considérée comme ayant une origine professionnelle,

Les certificats médicaux versés aux débats faisant état d'une situation de stress au travail qui serait la cause de l'aggravation de son état de santé, sont insuffisants à établir un tel lien.

En effet, ces documents médicaux ne font que reprendre les déclarations de la salariée, sans que les médecins qui les ont rédigés aient pu eux-mêmes faire le constat de la réalité des faits dénoncés, et ce d'autant plus que le médecin du travail a, à plusieurs reprises, considéré que Madame B... était apte à la reprise et n'a jamais constaté une incompatibilité de ses conditions de travail avec son état de santé.

Il convient par conséquent de confirmer le jugement déféré ayant accordé à la salariée la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts,

Sur le harcèlement moral et la discrimination

L'employeur, tenu d'une obligation de sécurité de résultat, doit assurer la protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise et notamment prévenir les faits de harcèlement moral,

Dès lors que de tels faits sont avérés, la responsabilité dc l'employeur est engagée, ce dernier devant répondre des agissements des personnes qui exercent de fait ou de droit une autorité sur les salariés,

Selon les dispositions de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel,

L'article L. 1152-2 dispose qu'aucun salarié ne peut être licencié pour avoir subi des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés,

Enfin, l'article L. 1154-1 prévoit, qu'en cas de litige, si le salarié concerné présente des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et, au vu de ces éléments, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement,

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles,

En l'espèce, Mme B... invoque les faits suivants :

- des problèmes dans le paiement de ses salaires : elle fait valoir qu'à compter du mois de février 2010, lorsqu'elle a repris son activité dans le cadre d'un travail à mi-temps thérapeutique, elle n'a cessé d'avoir des difficultés concernant le paiement de son salaire :

- en février 2010, elle n'a perçu aucun salaire (aucune régularisation à ce jour) ;

- en mars 2010, l'employeur a procédé à une retenue sur salaire à hauteur dc 174 euros sans aucune explication (aucune régularisation à ce jour) ;

- entre novembre 2010 et août 2011, retenue sur salaire en remboursement d'un soi-disant trop perçu lié à un changement d'indice pourtant légitime ;

- en juin 2011, décompte de 10 heures sans solde alors qu'elle était présente et se trouvait même en excédent d'heures sur cette période, ces heures n'ont été régularisées qu'en juillet 2011 mais pas les congés afférents :

- importantes difficultés pour être indemnisée par la caisse primaire d'assurance maladie au cours de son arrêt maladie en raison des carences de l'employeur qui n'avait pas effectué les déclarations nécessaires ; pendant son absence, son salaire a été amputé des primes week-end et du montant des heures de nuit majorées ; elle ajoute que certains mois, la fondation Les Amis de l'Atelier ne lui a versé aucun complément de salaire ;

- refus de l'employeur de lui appliquer l'indice qui lui était dû et le salaire correspondant alors même que son collègue masculin en bénéficiait, ce qui caractérise également une discrimination syndicale ;

- durant son arrêt maladie, son relevé d'heures de récupération n disparu du décompte de la fondation.

- les conditions de travail qui lui étaient imposées en violation des prescriptions de la médecine du travail :

- affectation sur un autre bâtiment que celui des polyhandicapés ;

- ses demandes de congés lui ont été refusées (celle formée le 13 juillet 2011 pour les nuits des 22 et 23 juillet alors qu'il a été fait droit à la demande de son collègue : celle du 12 mai 2011) ;

- rajout d'une nuit supplémentaire le 16 juin 2011, lui imposant une semaine de cinq nuits consécutives en violation des dispositions de la convention collective limitant le travail à 44 heures hebdomadaires : elle a ainsi effectué 3 heures supplémentaires qui ne lui ont pas été réglées ;

- planning mentionnant une reprise de travail le 23 août 2011 alors qu'elle ne devait revenir de congés que le lendemain ;

- appels téléphoniques de l'employeur en matinée après une nuit de travail, en violation de son droit au repos ;

- minoration de son indemnité de licenciement, non-remise des documents lui permettant de faire valoir ses droits la contraignant à saisir l'inspection du travail.

Pour étayer ses affirmations, Mme B... produit notamment :

- ses bulletins de salaire de janvier 2010 à novembre 2014,

- le courrier de l'employeur l'informant qu'il va procéder à une retenue sur salaire pour un montant total de 340,34 euros entre novembre 2010 et août 2011 en raison d'une erreur de coefficient,

- un courrier de son employeur daté du 16 juin 2011 lui confirmant la modification de ses horaires pour la nuit du 16 au 17 juin et l'annulation de la nuit du 17 au 18 juin,

- sa demande de congés déposée le 14 février 2011 pour la période comprise entre le 26 juillet et le 21 août inclus, contresignée par son chef de service,

- sa demande de congés déposée le 13 juillet 2011 pour les 22 et 23 juillet suivants, refusée par l'employeur,

- une attestation de M. Z..., collègue de travail, indiquant qu'il a demandé le 18 juillet 2011 à prendre des congés sur les nuits du 23, 23 et 24 juillet 2011,

- les échanges de courrier avec l'employeur concernant le calcul de ses indemnités journalières et la transmission de ses documents de fin de contrat,

- son dossier médical et les comptes rendus post-opératoires,

Sur le paiement des salaires,

Il ressort des pièces versées aux débats qu'en février 2010, Mme B... n'a perçu aucun salaire, des absences pour maladie lui ayant été décomptées. De même, l'employeur a effectivement procédé à une retenue sur son salaire en mars 2010 mais également entre novembre 2010 et août 2011,

Il n'est également pas contesté qu'en juin 2011, 10 heures sans solde ont été décomptées à tort du salaire de Mme B... et régularisées par l'employeur le mois suivant,

S'agissant des difficultés rencontrées par la salariée dans le calcul de ses indemnités journalières et l'absence de versement de complément de salaire par l'employeur, la cour constate que Mme B... ne justifie pas que les difficultés de paiement qu'elle allègue, et qui au demeurant ne sont pas établies, soient consécutives à une carence de l'employeur dans l'établissement des déclarations nécessaires auprès de la caisse primaire d'assurance maladie,

Par ailleurs, Mme B... fait grief à l'employeur de ne lui avoir versé "certains mois" aucun complément de salaire sans pour autant préciser sa demande et dater précisément ces manquements. Dès lors la cour n'est pas en mesure de déterminer si la réalité de ce manquement est établie, étant relevé que la salariée ne sollicite pas le remboursement des sommes qui lui seraient dues à ce titre.

S'agissant des primes de week-end et des primes de nuit qui ne lui auraient pas été versées, il ne ressort pas des dispositions de la convention collective que ces primes doivent continuer à être versées au salarié bénéficiant d'un arrêt maladie. Il ressort par ailleurs des bulletins de paie de la salariée que ces primes n'étaient pas systématiquement versées et que leur montant pouvait varier chaque mois. Il s'agit donc d'un élément de rémunération lié à l'organisation du travail,

S'agissant de l'absence de revalorisation de son coefficient au cours de ses arrêts maladie, la cour a précédemment considéré que la salariée ne pouvait revendiquer la revalorisation de son indice,

Concernant le relevé d'heures de récupération, il ressort des pièces versées aux débats et notamment d'un courrier de la fondation Les Amis de l'Atelier daté du 10 juin 2013 adressé à Mme B... que si le compteur de la salariée a effectivement été effacé en juin 2013, l'employeur a immédiatement rectifié la situation quand il en a eu connaissance (le 10 juin), ne causant ainsi aucun préjudice à la salariée.

Sur les conciliions de travail,

Il a été précédemment constaté que l'employeur avait à trois reprises affecté la salariée sur un bâtiment autre que celui des polyhandicapés en violation des préconisations du médecin du travail,

Il apparaît également que la demande de congés présentée par la salariée pour les 22 et 23 juillet 2011 lui a été refusée,

En revanche, il ne ressort pas des éléments versés aux débats que Mme B... aurait effectué des heures supplémentaires non rémunérées le 16 juin 2011, en violation des dispositions de la convention collective relatives à la durée maximum de travail. En effet, l'attestation de Mme A... qui travaillait avec elle cette nuit-là ne fait aucunement référence à l'heure de départ de Mme B...,

S'agissant de sa date de reprise à l'issue de ses congés en août 2011, il ressort de la demande de congé versée par Mme B... que cette dernière a posé des jours de congés entre le 26 juillet et le 21 août inclus. Elle n'a en revanche posé aucune journée le 23 août, permettant ainsi à l'employeur de prévoir sa présence sur le planning,

Enfin s'agissant des appels téléphoniques de son employeur pendant ses repos, la cour constate que Mme B... ne produit aucun élément probant de cette allégation,

Sur la minoration de l'indemnité de licenciement et la remise des documents de fin de contrat

La cour constate que ces faits sont postérieurs au licenciement de Mme B...

Au vu des éléments ci-dessus relevés, Mme B... établit l'existence matérielle de faits précis et concordants, qui pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral à son encontre,

S'agissant du paiement des salaires, la fondation les Amis de l'Atelier fait valoir que la mise en place d'un nouveau logiciel de gestion de paie au niveau du siège de la fondation a généré de nombreuses erreurs. Ainsi ce logiciel n'établissait pas, dans le décompte du temps de travail, de différence entre absences injustifiées et absences justifiées. Les bulletins de paie étant adressés aux salariés par le siège social, il a fallu attendre le retour des salariés lésés pour prendre connaissance de ces erreurs et les rectifier (par exemple en juin 2011 avec une rectification le mois suivant). Elle réfute toute intentionnalité,

S'agissant des retenues sur salaire effectuées entre novembre 2010 et août 2011, elle rappelle qu'en raison de son arrêt maladie, Mme B... ne pouvait prétendre à la revalorisation de son coefficient. Une erreur étant intervenue, elle a été contrainte de rectifier la situation et de récupérer les sommes trop perçues,

Concernant l'affectation de la salariée à un autre bâtiment que celui des polyhandicapés, l'employeur explique que ces changements sont restés exceptionnels et s'expliquent par une fermeture du service polyhandicapés. Il ajoute que la gestion des autres bâtiments était très difficile et que la situation médicale de Mme B... a engendré de plus lourdes charges pour ses collègues,

Il s'agit en outre d'une affectation ponctuelle et non d'actes répétés,

S'agissant de la demande de congés refusée, la fondation Les Amis de l'Atelier explique qu'un autre salarié avait également posé des heures de récupération sur les mêmes dates,

Cette demande étant antérieure à celle de Madame B... et faute de personnel disponible, elle avait été contrainte de refuser la demande de la salariée. Elle ajoute que ce salarié, M. Z..., avait un nombre d'heures plus important à récupérer et notamment des repos compensateurs,

La fondation Les Amis de l'Atelier estime par ailleurs qu'il n'existe aucun lien de causalité entre l'état de santé de la salariée et son emploi. Elle constate que les problèmes de santé de Mme B... sont apparus en 2007 et qu'à cette date, elle n'argue d'aucun fait de harcèlement,

Elle ajoute que même si les médecins de Mme B... évoquent un stress au travail, il n'est fait aucun lien entre les comportements de l'employeur et ledit stress et ce d'autant plus que le travail en IME, au regard des pathologies des résidents accueillis, est éprouvant. Elle rappelle que la médecine du travail n'a jamais dénoncé d'actes de harcèlement en lien avec l'état de santé de la salariée,

Il ressort des pièces versées aux débats et notamment du courrier de l'inspection du travail en date du 31 août 2011 que le logiciel de gestion de paie utilisé par l'employeur a entraîné de nombreuses difficultés de décompte négatif d'heures dont certaines situations "d'absences injustifiées". Ces difficultés, constatées par l'inspecteur du travail, ont affecté plusieurs salariés et pas uniquement Mme B.... Dès lors, les erreurs constatées par la salariée en février 2010 et juin 2010, si elles sont certes réelles, ne peuvent pour autant être considérées comme des faits de harcèlement moral,

S'agissant de la retenue sur salaire effectuée entre novembre 2010 et août 2011, il a été précédemment rappelé qu'en raison de ses arrêts longue maladie dont l'origine n'est pas professionnelle, Mme B... ne pouvait prétendre dans les délais qu'elle invoque à une revalorisation de son indice. Dès lors l'employeur pouvait légitimement procéder à une retenue sur salaire afin de récupérer les sommes trop perçues par la salariée,

Concernant la demande de congés pour les 22 et 23 juillet 2011, il n'est pas contesté qu'un autre salarié avait demandé à poser des journées de récupération pour les mêmes dates,

La demande de congé de M. Z... n'étant pas produite, la cour n'est pas en mesure de vérifier si cette demande était antérieure à celle de Mme B...,

Il ressort toutefois des pièces versées aux débats (échanges de courrier avec la direction et plannings) que ce salarié avait également demandé à bénéficier de journées de récupération les 27 et 28 juillet, ce qui lui a été refusé,

Dans le même temps, si la demande de Mme B... relative aux journées des 22 et 23 juillet a été refusée, elle se trouvait en revanche en congés à compter du 26 juillet et jusqu'au 21 août inclus,

Il existait donc des raisons objectives au refus opposé à la salariée, l'employeur devant répartir la charge de travail sur l'ensemble du personnel et permettre à chaque salarié de bénéficier de journées de récupération et de congés, tout en tenant compte des nécessités du service. Il n'est pas contesté qu'en juillet, plusieurs salariés étaient absents du fait des congés d'été, ce qui ne permettait pas à l'employeur de satisfaire toutes les demandes de chaque salarié,

La cour relève au surplus que Mme B... ne fait état d'aucune autre difficulté concernant ses demandes de congés et que cette difficulté n'est arrivée qu'à une reprise. Ce fait ne peut donc être considéré comme constitutif d'un harcèlement moral,

A l'examen des pièces produites et des moyens débattus, la cour retient que la fondation Les Amis de l'Atelier démontre que les faits présentés par Mme B... sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. En effet, la seule affectation à un autre bâtiment que celui des polyhandicapés en juin et juillet 2011 et les difficultés relatives au paiement du salaire en février et mars 2010 ne peuvent constituer à elles seules des faits de harcèlement, ces faits étant isolés et au surplus anciens,

Les demandes relatives au harcèlement doivent par conséquent être rejetées,

Par suite, le jugement déféré est confirmé en ce qu'il a débouté Mme B... de ses demandes à ce titre,

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE

Sur la violation de l'obligation de sécurité

Force est de constater que malgré l'existence de certificats clairs du médecin du travail l'employeur, à plusieurs reprises, a décidé de faire travailler Mme B... sur un ou des postes qui n'était pas celui précisément défini à savoir les unités de polyhandicapés la nuit,

S'agissant d'une "aptitude sous réserve", du respect évidemment absolu de cette prescription et l'employeur ne contestant pas avoir affecté Mme B... à d'autres tâches, il est patent que l'employeur a violé ses obligations dites de sécurité en ne respectant pas les prescriptions du médecin du travail,

Cette violation cause nécessairement un préjudice à la salariée et sans qu'il soit fait la preuve par celle-ci de l'aggravation de son état de santé qui en serait la conséquence, le Conseil estime qu'elle pourra être indemnisée par l'allocation d'une somme de 3 000 euros,

Sur le harcèlement moral

Les conditions définies par les articles L. 1152-1 et suivants du code du travail font état d'agissements répétés ayant pour objet ou effet une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte au droit, à la dignité du salarié ou altérer sa santé physique et mentale ou de compromettre son avenir professionnel,

L'analyse des griefs faits par la salariée à son employeur ne peut être analysée comme constitutive d'harcèlement moral,

En effet, les prétendues difficultés dans le paiement des salaires même si elles ont existé peuvent être la conséquence de difficultés à calculer les salaires en fonction des arrêts maladies subis ou des comptes d'heures voire des périodes de subrogation pour les indemnités journalières ; que la salariée ait dû échanger des correspondances avec son employeur ne démontre pas qu'il y ait de la part de ce dernier une volonté délibérée de porter atteinte au principe d'égalité entre les salariés ou qu'il y ait eu une discrimination salariale,

De même, la violation des prescriptions de la médecine du travail considérée comme fautive ne peut être automatiquement reprise dans le cadre d'un harcèlement moral sachant que ces violations certes existantes n'ont été faites que ponctuellement pour la bonne marche de l'entreprise,

L'analyse des faits relatés par la salariée ne constitue pas des agissements répétés ayant pour effet une dégradation des conditions de travail de celle-ci et ni ses droits, ni sa dignité ni sa santé n'ont pu être atteints altérés ou compromis,

Mme B... sera donc déboutée de cette demande,

Mme B... estime avoir fait l'objet d'une discrimination en raison de son engament syndical et de son état de santé, au motif qu'elle n'aurait pas bénéficié d'une revalorisation de son indice dans les mêmes conditions que son collègue,

La cour rappelle que si la loi prévoit la prise en compte de la durée des périodes de suspension pour la détermination de tous les avantages légaux ou conventionnels liés à l'ancienneté dans l'entreprise pour les salariés victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, ces dispositions ne sont pas applicables aux salariés bénéficiant d'un arrêt de travail pour une maladie non professionnelle comme c'est le cas de Mme B...,

C'est donc à bon droit que la fondation Les Amis de l'Atelier n'a pas revalorisé son coefficient durant ses arrêts de travail pour maladie,

Dès lors, la matérialité d'éléments de fait précis et concordants laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte n'est pas démontrée,

1° ALORS QU'il appartient au juge, saisi d'un litige relatif à l'existence d'un harcèlement moral de tenir compte de l'ensemble des faits invoqués par le salarié et de les apprécier globalement ; qu'en énonçant que Mme B... ne justifiait pas que les difficultés de paiement qu'elle alléguait auraient été consécutives à une carence de l'employeur dans l'établissement des déclarations nécessaires auprès de la caisse primaire d'assurance maladie, sans même examiner les pièces versées aux débats par la salariée établissant que l'employeur avait attendu le 3 mai 2013 pour adresser à la prévoyance les documents concernant l'arrêt de travail du 20 mars 2013, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail,

2° ALORS QU'il appartient aux juges du fond de se prononcer sur chaque fait allégué par le salarié, pris isolément, et de rechercher si ces faits, pris dans leur ensemble, ne permettent pas de présumer l'existence d'un harcèlement moral, et, dans l'affirmative, si l'employeur prouve que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que Mme B... faisait valoir que pour le planning de juin 2011, l'employeur n'avait pas hésité à ajouter à la charge de Mme Laïla B... une "nuit volante", soit le 16 juin, et que lorsque l'intéressée avait rappelé à sa chef de service que cet ajout lui imposerait une semaine de cinq nuits de dix heures chacune consécutives, soit de 47 heures en violation avec les dispositions de la convention collective applicable limitant le travail de nuit à 44 heures hebdomadaires du dimanche 00h au samedi 24h, et demandé qu'on lui retire cette nuit supplémentaire du 16 juin, il lui avait été demandé en parallèle de partir à 4h15 la nuit précédente alors pourtant qu'une nuit normale de travail débutait à 21h15 pour s'achever à 7h15, de telle sorte que de facto, Mme B... s'était retrouvé contrainte de rentrer chez elle en plein milieu de la nuit (4h15) ou de poursuivre son activité jusqu'à 7h15 du matin ; qu'en ne s'expliquant pas sur ce fait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail,

3° ALORS QUE les documents médicaux versés aux débats par le salarié participent des éléments essentiels permettant de retenir l'existence d'un harcèlement moral ; que le juge doit impérativement les examiner ; qu'en se dispensant d'un tel examen, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail,

4° ALORS QU'il appartient aux juges du fond de se prononcer sur chaque fait allégué par le salarié, pris isolément, et de rechercher si ces faits, pris dans leur ensemble, ne permettent pas de présumer l'existence d'un harcèlement moral, et, dans l'affirmative, si l'employeur prouve que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en énonçant que la demande de congé de M. Z... n'étant pas produite, la cour n'était pas en mesure de vérifier si cette demande était antérieure à celle de Mme B..., quand il ressortait d'une attestation de M. Z... qu'il indiquait être très étonné que sa demande de congés ait été faite antérieurement à celle de Mme B..., soit avant le 13 juillet 2011 dans la mesure où il certifiait avoir demandé à bénéficier d'un congé le 18 juillet 2011, la cour d'appel a privé sa décision de de base légale au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail,

5° ALORS QUE le harcèlement moral est constitué, indépendamment de l'intention de son auteur, dès lors que sont caractérisés des agissements répétés ayant pour effet une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé ou de compromettre son avenir professionnel ; que l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise, doit en assurer l'effectivité en prenant en considération les propositions de mesures individuelles telles que transformations de postes, justifiées par des considérations relatives notamment à l'âge, à la résistance physique ou à l'état de santé physique ou mentale des travailleurs que le médecin du travail est habilité à faire en application de l'article L. 4624-1 du code du travail ; que l'employeur qui impose au salarié d'occuper un poste incompatible avec les préconisations du médecin du travail commet un agissement constitutif d'un harcèlement moral ; qu'en déboutant Mme B... de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour harcèlement moral, quand elle avait pourtant admis que l'employeur avait, sans en justifier objectivement les raisons, sciemment placé Mme B... sur un poste ne correspondant pas aux prescriptions du médecin du travail, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, et a violé les articles L. 1152-1, L. 1154-1 et L. 4121-1 du code du travail,

6° ALORS QU'aucun salarié ne peut faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, en matière d'affectation, de qualification, de mutation, en raison de son état de santé ; qu'une différence de traitement injustifiée entre deux salariés dans des situations identiques peut qu'en estimant que l'employeur pouvait justifier le retard de carrière et d'avancement du coefficient par les absences pour maladie de la salariée, la cour d'appel, qui a méconnu qu'une telle justification caractérisait une discrimination en raison de l'état de santé de la salariée, a violé les articles L. 1132-1, L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-18753
Date de la décision : 24/10/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 22 mars 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 24 oct. 2018, pourvoi n°17-18753


Composition du Tribunal
Président : Mme Goasguen (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.18753
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