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18/10/2018 | FRANCE | N°17-25678

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 18 octobre 2018, 17-25678


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 4 juillet 2017), que M. X... et la société Ambition Drôme-Ardèche, devenue la société Adag, ont signé un contrat de construction de maison individuelle et un avenant prévoyant l'accessibilité des lieux à une personne handicapée ; que M. X..., constatant l'impossibilité d'accéder au garage avec un véhicule, a refusé la réception et a, après expertise, assigné le constructeur en indemnisation ;

Att

endu que la société Adag fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à M. X... les somme...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 4 juillet 2017), que M. X... et la société Ambition Drôme-Ardèche, devenue la société Adag, ont signé un contrat de construction de maison individuelle et un avenant prévoyant l'accessibilité des lieux à une personne handicapée ; que M. X..., constatant l'impossibilité d'accéder au garage avec un véhicule, a refusé la réception et a, après expertise, assigné le constructeur en indemnisation ;

Attendu que la société Adag fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à M. X... les sommes de 59 148 euros au titre du préjudice matériel et 42 000 euros au titre du préjudice de jouissance ;

Mais attendu qu'ayant retenu, par motifs propres et adoptés, que le préjudice matériel était la conséquence directe et certaine du manquement du constructeur à son obligation de conseil dès lors que les problèmes d'accès au garage auraient pu être évités en prévoyant une autre implantation de la maison pour l'adapter à la réalité du terrain, sans frais supplémentaires, sous réserve d'un modificatif au permis de construire qui aurait été facilement obtenu, et que ces problèmes étaient d'autant plus graves que M. X... avait une fille handicapée et avait besoin de pouvoir accéder facilement à sa maison et plus particulièrement au garage, la cour d'appel, qui a procédé à la recherche prétendument omise sur l'indemnisation du préjudice de jouissance et qui n'était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante sur l'enrichissement du maître de l'ouvrage, a pu accueillir les demandes de celui-ci dans une proportion qu'elle a souverainement appréciée et a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Adag aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Adag et la condamne à payer à la SCP Delvolvé et Trichet la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit octobre deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gaschignard, avocat aux Conseils, pour la société Adag

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Ambition Drôme Ardèche à payer à M. X... les sommes de 59 148 euros au titre du préjudice matériel et 42 000 euros au titre du préjudice de jouissance,

AUX MOTIFS QUE sans être contredit dans ses constatations, l'expert a relevé que la maison était implantée à 3,30 mètres du bord d'un talus, ce qui rend le garage inaccessible en voiture du fait de l'étroitesse du passage et de la nécessité de tourner à angle droit dès l'entrée du terrain ; que s'il ressort du contrat de construction signé le 6 janvier 2011 que l'évacuation des terres excédentaires, le remblaiement, le nivellement autour de la maison et l'apport de terres ne figuraient pas parmi les prestations à la charge du constructeur, la société Ambition Drôme Ardèche était tenue en sa qualité de professionnel d'attirer l'attention de M. X..., maître d'ouvrage profane, sur l'impossibilité d'accéder au garage en raison de l'implantation de la maison ; que la société Ambition Drôme Ardèche soutient que M. X... connaissait la difficulté et avait conclu un accord avec son vendeur pour que ce dernier prenne la charge des travaux de comblement du talus ; que toutefois, l'expert n'est pas utilement critiqué quand il affirme que lorsque M. X... a visité le terrain, il a pu se méprendre sur la situation exacte des limites séparatives, les bornes étant alors peu visibles ; que ce n'est pas davantage à la lecture des plans que M. X... a pu percevoir la difficulté tenant à la proximité du talus par rapport à l'implantation envisagée puisque, toujours selon l'expert, aucun talus ne figure sur le plan de masse, le plan en coupe dessine quant à lui un terrain horizontal et la vue après travaux dans le dossier de permis de construire est située de l'autre côté de la maison ; qu'il n'est pas plus démontré par la société Ambition Drôme Ardèche que lorsque M. X... a signé les plans du permis de construire, un accord était alors conclu prévoyant que le vendeur prenne à sa charge les travaux d'aménagement ; que s'il ressort en effet d'un courrier de M. X... du 1er mai 2012 que M. Z..., avant de décéder, s'était engagé à remblayer le terrain, rien n'indique à quelle date cet engagement a été pris puisque ce prétendu accord n'a jamais été formalisé ; que l'attestation établie par M. A..., géomètre-expert, n'est guère éclairante sur cette question puisqu'il témoigne uniquement que lors du bornage M. Z... l'avait « informé qu'il réglerait le problème de l'emprunt réalisé par son voisin et qu'il était parfaitement au courant de cette situation » mais sans indiquer à quelle date a eu lieu ce bornage, si M. X... était alors présent sachant qu'il n'était pas encore propriétaire, et quelle était la consistance et la nature de cet "emprunt' dont le cadre juridique apparaît pour le moins incertain ; que par conséquent, la société Ambition Drôme Ardèche ne rapportant pas la preuve que M. X... avait une parfaite connaissance des limites séparatives, qu'il était informé de toutes les conséquences attachées à l'implantation de la maison et qu'un engagement contractuel précis, ferme et définitif avait été pris par le vendeur du terrain pour réaliser et financer les travaux d'aménagement nécessaires avant que M. X... ne signe les plans du permis de construire, il y a lieu de considérer qu'elle a manqué à son obligation de conseil envers le maître d'ouvrage, ce qui engage sa responsabilité contractuelle sur le fondement de l'article 1147 du code civil comme l'a retenu à bon droit le premier juge ; (...) que, sur le préjudice matériel, l'expert a considéré qu'un mur de soutènement devait être édifié pour élargir l'accès au garage, après la réalisation d'une étude géotechnique et d'une étude béton armé ; que dans la mesure où il n'est pas valablement contesté que le talus est de très mauvaise qualité et instable puisqu'il est composé d'un enrochement irrégulier et de gravats, la nécessité de réaliser ces deux études préalablement aux travaux est parfaitement justifiée ; que l'expert a estimé le coût des travaux et des études préalables à un total de 49 290 euros HT, soit, avec le taux normal de TVA désormais en vigueur, 59 148 euros TTC ; que contrairement à ce que soutient la société Ambition Drôme Ardèche, ce préjudice est la conséquence directe et certaine de son manquement à son obligation de conseil car, sans être utilement contredit, l'expert explique que les problèmes d'accès au garage auraient pu être évités en prévoyant une autre implantation de la maison pour l'adapter à la réalité du terrain, sans aucun frais supplémentaire, sous réserve d'un modificatif au permis de construire qui aurait été facilement obtenu ; qu'ainsi, sans la faute de la société Ambition Drôme Ardèche, l'édification d'un mur de soutènement pour permettre l'accès au garage n'aurait pas été nécessaire ; qu'elle sera par conséquent condamnée à payer à M. X... le coût de ces travaux, y compris celui des études préalables, soit la somme de 59 148 euros TTC, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, le jugement entrepris étant infirmé en ce qu'il a retenu la somme de 49.250 euros au titre du préjudice matériel ; que, sur le préjudice de jouissance, l'expert n'est pas contredit quand il indique que M. X... et sa famille pouvaient espérer entrer dans les lieux le 22 mai 2012 ; que le garage de la maison étant inaccessible en voiture, l'ouvrage n'est pas en l'état d'être reçu tant que le mur de soutènement n'est pas réalisé ; qu'il s'ensuit que la société Ambition Drôme Ardèche doit être déboutée de sa demande de réception judiciaire et qu'il y a lieu de retenir que M. X... et sa famille subissent un préjudice de jouissance, exclusivement imputable à la faute du constructeur, depuis le 22 mai 2012 ; que M. B... a estimé le montant mensuel de ce préjudice à 700 euros, qui correspond au loyer d'une maison identique ; que cette évaluation constitue une juste appréciation du préjudice de sorte que le jugement sera confirmé en ce qu'il l'a liquidé à la somme de 25.900 euros pour la période de 37 mois qui sépare la date prévue d'entrée dans les lieux de la date de prononcé du jugement ; que M. X... et sa famille ayant continué à subir le même préjudice durant la présente procédure, la société Ambition Drôme Ardèche sera condamnée à leur verser une indemnité complémentaire de 16.100 euros pour la période du 16 juillet 2015, date du jugement, au 04 juillet 2017, date du prononcé de cet arrêt ;

1°- ALORS QUE les conséquences d'un manquement à un devoir de conseil ne peuvent s'analyser qu'en une perte de chance d'éviter le préjudice ; qu'en condamnant la société Ambition Drôme Ardèche, à raison de son manquement au devoir de conseil, à verser à M. X... la somme de 59.148 euros correspondant au coût des travaux de remblaiement du talus, après avoir constaté que les travaux de cette nature étaient contractuellement à la charge du maître d'ouvrage, sans rechercher comme elle y était invitée, si le préjudice de celui-ci ne consistait pas seulement en une perte de chance de renoncer à la construction de sa maison à son emplacement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction applicable au litige ;

2°- ALORS QUE la société Ambition Drôme Ardèche faisait valoir que M. X..., à supposer qu'il n'eût pas eu conscience de la nécessité absolue de remblayer le talus pour bénéficier d'un accès convenable au garage, n'en avait pas moins prévu d'exécuter ces travaux, la seule question étant de savoir s'ils seraient à sa charge ou à la charge du vendeur ; qu'en condamnant la société Ambition Drôme Ardèche à prendre en charge le coût de ces travaux sans rechercher si ceux-ci ne procuraient pas un enrichissement à M. X..., en lui permettant de bénéficier de travaux qui devaient en toute hypothèse été réalisés, soit par le vendeur soit par l'acquéreur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil dans sa rédaction applicable au litige ;

3°- ALORS QUE la réparation du dommage ne peut excéder le montant du préjudice ; qu'en évaluant le préjudice de jouissance de Monsieur X... à hauteur de la valeur locative de la maison au motif que le garage de la maison est inaccessible en voiture, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la maison elle-même n'était pas accessible et parfaitement habitable, M. X... pouvant garer sa voiture à l'extérieur le long de la maison, de sorte que le préjudice de jouissance s'entendait exclusivement de la privation de la jouissance du garage, et non de celle la maison tout entière, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 17-25678
Date de la décision : 18/10/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 04 juillet 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 18 oct. 2018, pourvoi n°17-25678


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Delvolvé et Trichet, SCP Gaschignard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.25678
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