LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 14 mars 2017), que la société Sepropharm International, désormais la société Eqinox Healthcare France, était le prestataire de la société Astrazeneca pour la promotion de produits pharmaceutiques, par le biais de visiteurs médicaux, sur les territoires de la Réunion, la Martinique, la Guadeloupe et la Guyane ; que la société Astrazeneca, à l'issue d'un appel d'offres, a écarté la société Sepropharm international au profit de la société Preciphar à compter du 1er janvier 2016 ; qu'en décembre 2015, la société Sepropharm international, évincée, a demandé à la société Preciphar, sur le fondement des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail, de reprendre les contrats de travail de sept de ses dix-huit salariés affectés à l'activité de promotion des produits Astrazeneca, les onze autres salariés ayant d'ores et déjà intégré la société Preciphar ; que le nouveau prestataire lui a opposé un refus ; qu'elle a assigné la société Preciphar, en présence du comité central d'entreprise de la société Sepropharm international, devant le tribunal de grande instance, afin que soit constatée la violation par la société Preciphar des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail et la fraude mise en place par cette dernière, engageant sa responsabilité sur le fondement des dispositions de l'article 1382 du code civil ;
Attendu que la société Eqinox Healthcare France fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué de la débouter de sa demande tendant à ce que la société Preciphar soit condamnée à lui verser une provision à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices matériel et moral qu'elle a subis, alors, selon le moyen :
1°/ que dans les secteurs d'activité reposant essentiellement sur la main-d'oeuvre, une collectivité de travailleurs que réunit durablement une activité commune peut correspondre à une entité économique dont l'identité est maintenue par-delà son transfert quand le nouveau chef d'entreprise ne se contente pas de poursuivre l'activité en cause mais reprend également une partie essentielle, en termes de nombre et de compétence, des effectifs que son prédécesseur affectait spécialement à cette tâche ; qu'ayant fait ressortir que la promotion des ventes des produits du laboratoire Astrazeneca avait été reprise par la société Preciphar qui avait embauché onze des dix-huit salariés que la société Eqinox avait occupés à cette activité et qui disposaient de connaissances techniques spécifiques à ces produits, tout en refusant de dire qu'il s'était ainsi opéré le transfert d'une entité économique autonome soumise aux dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail, la cour d'appel a violé le texte susvisé interprété à la lumière de la directive n° 2001/23/CE du 12 mars 2001 ;
2°/ que, subsidiairement, l'article L. 1224-1 du code du travail, interprété à la lumière de la Directive n° 2001/23/CE du 12 mars 2001, s'applique en cas de transfert d'une entité économique autonome qui conserve son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise ; que constitue une entité économique autonome un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels poursuivant un objectif économique propre ; que le transfert d'une telle entité se réalise si des moyens corporels ou incorporels significatifs et nécessaires à l'exploitation de l'entité sont repris, directement ou indirectement, par un nouvel exploitant ; qu'en refusant de retenir que les connaissances spécifiques sur les produits pharmaceutiques du laboratoire Astrazeneca acquises par les visiteurs médicaux lorsqu'ils étaient attachés à l'activité de promotion de ces produits au sein de la société Eqinox constituaient des éléments d'actifs incorporels significatifs et nécessaires à l'exploitation de l'entité reprise et qu'ils avaient été transférés au moment de la reprise du marché par la société Preciphar et de l'embauche des onze visiteurs médicaux de la société Eqinox, la cour d'appel a violé l'article L. 1224-1 du code du travail, ensemble l'ancien article 1382 du code civil, devenu l'article 1240 de ce même code ;
3°/ que les éléments constitutifs de l'entité économique autonome s'apprécient au regard des conditions effectives d'emploi des salariés et de l'organisation de l'activité ; qu'en affirmant que la preuve n'était pas rapportée de ce que les dix-huit salariés étaient dédiés à la promotion des produits pharmaceutiques du laboratoire Astrazeneca dès lors que leur contrat de travail ouvrait la possibilité à la société Eqinox de leur confier la promotion de produits d'autres laboratoires, quand elle aurait dû rechercher quelles étaient les conditions effectives d'emploi de ces salariés, la cour d'appel s'est déterminée par des motifs inopérants et erronés et, partant, a violé l'article L. 1224-1 du code du travail ;
4°/ que, en tout état de cause, la société Eqinox faisait valoir que l'activité était dotée de moyens matériels indispensables à l'activité de promotion des produits pharmaceutiques du laboratoire Astrazeneca tels que des supports documentaires sur les médicaments, des échantillons, du matériel informatique, des informations confidentielles, du matériel d'information scientifique, de la littérature médicale, des avis des sociétés savantes ; qu'il résultait du contrat conclu entre la société Eqinox et la société Astrazeneca ainsi que de l'appel d'offres de 2015 que les responsables de l'activité étaient dotés de l'autorité et des compétences nécessaires à sa gestion fonctionnelle autonome ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a privé sa décision de motifs en méconnaissance de l'article 455 du code de procédure civile ;
5°/ que constitue une entité économique autonome un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels poursuivant un objectif économique propre, sans qu'il soit nécessaire qu'elle dispose d'une autonomie comptable et budgétaire ; qu'en reprochant à la société Eqinox de ne pas avoir fait la preuve d'une autonomie comptable et budgétaire, la cour d'appel a ajouté à l'article L. 1224-1 du code du travail une condition qui n'y figurait pas et partant a violé ce texte ;
6°/ que constitue une entité économique autonome un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels poursuivant un objectif économique propre ; qu'en refusant de constater l'autonomie de l'activité de promotion des produits du laboratoire Astrazeneca au sein de la société Eqinox qui découlait pourtant de ce qu'une équipe de visiteurs médicaux était formée et dédiée à la promotion des produits Astrazeneca, qu'elle était dirigée par deux responsables qui étaient les interlocuteurs du laboratoire, que des rapports d'activité étaient spécifiquement élaborés pour les produits Astrazeneca et que cette activité représentait 27 à 28 % du chiffre d'affaires de la société Eqinox, la cour d'appel a tiré des conséquences erronées de ses propres constatations et partant a violé l'article L. 1224-1 du code du travail, ensemble l'ancien article 1382 du code civil, devenu l'article 1240 de ce même code ;
7°/ que subit un préjudice l'employeur qui a licencié ou continué à employer des salariés en raison du refus du repreneur de l'activité à laquelle ceux-ci étaient affectés de voir leurs contrats transférés en application de l'article L. 1224-1 du code du travail ; que la faute commise par le repreneur découlant de la seule violation de cette disposition d'ordre public doit être réparée, quand bien même il n'aurait commis aucune manoeuvre frauduleuse pour échapper à son application ; qu'en subordonnant l'indemnisation des préjudices subis par la société Eqinox du fait de la société Preciphar de la preuve à la fois d'une violation de l'article L. 1224-1 du code du travail et d'une fraude de la société Preciphar, la cour d'appel a violé l'article L. 1224-1 du code du travail, ensemble l'ancien article 1382 du code civil, devenu l'article 1240 de ce même code ;
8°/ qu'en déclarant que les lettres de démission des salariés de la société Eqinox ne faisaient mention que de leur démission et de leur volonté d'écourter leur préavis, quand Mme Z... indiquait dans sa lettre de démission que sa décision s'inscrivait dans le cadre du transfert de l'activité Astrazeneca, la cour d'appel a dénaturé cet écrit en méconnaissance de l'article 1103 du code civil ;
9°/ que les juges du fond ont l'obligation de se prononcer sur tous les documents régulièrement versés aux débats et soumis à leur examen ; qu'en retenant que la société Eqinox ne rapportait pas la preuve d'un débauchage et d'une fraude organisée de la société Preciphar pour échapper à l'application de l'article L. 1224-1 du code du travail, quand elle produisait le témoignage de Mme A... qui faisait explicitement état des actes de débauchage de la société Eqinox dès le 9 décembre 2015 ; qu'en s'abstenant d'examiner ce document, la cour d'appel a violé l'ancien article 1353 devenu 1382 du code civil, ensemble l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel a constaté, par une appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve soumis à son examen, qu'il n'était pas caractérisé l'existence d'une entité autonome dans la société d'origine à défaut d'éléments d'actifs corporels nécessaires et exclusivement dédiés à l'activité transférée, et faute d'un savoir-faire des salariés spécifiquement attaché à ladite activité ; qu'elle a pu en déduire, nonobstant la reprise par le nouveau prestataire d'un nombre significatif de salariés de l'ancien, que l'activité de promotion des produits Astrazeneca ne constituait pas une entité économique autonome, en sorte que les conditions d'application des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail n'étaient pas réunies ; que les trois dernières branches du moyen sont dès lors inopérantes ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Eqinox Healthcare France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept octobre deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour la société Eqinox Healthcare France
Le moyen fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté la société Eqinox de sa demande tendant à ce que la société Preciphar soit condamnée à lui verser une provision à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices matériel et moral qu'elle a subis ;
AUX MOTIFS propres QUE la société Eqinox (Sepropharm) ne sollicite plus le transfert des sept salariés au sein de la société Preciphar mais demande la condamnation de cette dernière à supporter le préjudice matériel et moral qu'aurait subi la société Eqinox du fait de la perte du marché et du non-respect des dispositions de l'article L 1224-1 du code du travail ; que les conditions d'applicabilité de l'article L. 1224-1 au cas d'espèce ; que des documents versés aux débats, il résulte que l'activité objet du marché perdu par la société Eqinox et gagné par la société Preciphar correspond à l'activité de promotion des produits pharmaceutiques de la société Astrazeneca sur la Réunion, la Martinique, la Guyane, la Guadeloupe et la Polynésie par le biais de visiteurs médicaux ; que selon les états financiers produits par la société Eqinox (Sepropharm) cette activité représentait en 2013, 28 % de son chiffre d'affaires net et 27 % en 2014 ; que son effectif salarié au 31 décembre 2014 était de 95 personnes ; que l'activité Astrazeneca mobilisait au sein de la société Eqinox (Sepropharm), en dernier lieu, 18 personnes au sein des effectifs de la société Eqinox dont 11 ont démissionné pour rejoindre le nouveau prestataire et 7 ont été licenciés ou reclassés ; que les derniers contrats de prestations de services passés entre la société Astrazeneca et la société EQINOXE, ont été signés concomitamment, le 10 janvier 2014, pour chacun des territoires et ont pour objet de réaliser un certain nombre de contacts auprès des médecins selon une répartition quantitative et géographique définie dans le contrat ; que le prestataire s'engage également à effectuer l'analyse des besoins d'Astrazeneca et à lui proposer les solutions les plus adaptées à l'optimisation de prestations en termes de secteurs, nombre de collaborateurs, cibles et d'effectuer le suivi informatique relatif à chaque secteur géographique et aux produits fabriqués par le laboratoire ; que ce contrat prévoit la fourniture par la société Astrazeneca au prestataire de la documentation associée médicaments conformément à la réglementation ; que le contrat prévoit que le prestataire désigne en début de mission un responsable du bon déroulement et de l'achèvement de celle-ci ce responsable représentant le prestataire auprès du laboratoire ; que le laboratoire doit désigner un interlocuteur permanent auprès du prestataire compétent et décisionnaire ; que le prestataire s'engage à fournir au laboratoire des rapports de visite des compte-rendu d'activité des rapports de synthèse au fil de l'exécution du contrat ; que le prestataire s'engage à mettre en place et maintenir pendant la durée du contrat tout son savoir-faire, sa compétence et tous les moyens techniques et humains nécessaires à l'accomplissement de sa mission dans le cadre d'une obligation de résultat ; que le prestataire s'engage à disposer d'une équipe suffisante en nombre et en qualification et dont il détermine seule la composition ; que le prestataire s'engage également à ce que chacun des membres de son équipe affectée à la réalisation de la mission dispose d'un profil répondant aux exigences de formation requise pour exercer la profession et qu'il soit titulaire d'un diplôme de visite médicale ou équivalent, qu'il dispose des compétences spécifiques dans le domaine thérapeutique du produit commercialisé ainsi qu'une formation spécifique adaptée aux produits ; que le prestataire s'engage à ce qu'aucun membre de son équipe ne soit affecté pendant la durée du contrat à une mission du même type pour un produit concurrent du produit de la société Astrazeneca ; que celle-ci s'engage à former les salariés du prestataire à ses produits ; que les prestations attendues du soumissionnaire à l'appel d'offres du mois de juin 2015 ne sont pas différentes pour l'essentiel de celles prévues aux contrats passés entre la société Astrazeneca et la société Eqinox (Sepropharm) examinées ci-dessus et du cahier des charges communiqué en juin 2015 aux candidats ; que les contrats de travail du personnel affecté au marché Astrazeneca prévoient que le salarié a pour obligation de visiter toute personne utile au développement des ventes des produits Astrazeneca ; que toutefois, la société Eqinox (Sepropharm) s'est réservée le droit de confier au salarié la promotion de produits d'autre laboratoires ; que sur l'ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels et incorporels poursuivant une activité économique avec un objectif propre et une activité économique avec un objectif propre, l'analyse des relations contractuelles de l'appel d'offres et du cahier des charges versés au débat, conduit à considérer que l'activité reprise par la société Preciphar est similaire à celle antérieurement exercée par la société Eqinox au profit de la société Astrazeneca ; que sur les ressources humaines, des pièces communiquées, il ne peut être déduit que les 18 personnes étaient exclusivement affectées à l'activité de la promotion des produits Astrazeneca ; que la société Astrazeneca n'exigeait pas un nombre minimum de personnes pour effectuer, dans les territoires convenus, la promotion de ses produits ; que sa seule exigence étant de disposer d'un interlocuteur unique et de visiteurs médicaux professionnellement qualifiés pour assurer la promotion de ses produits ; que la société Eqinox avait prévu au contrat de travail la possibilité pour les salariés concernés de travailler pour un autre laboratoire ; que la société Eqinox reproche à l'intimée d'avoir en toute connaissance de cause violé les dispositions d'ordre public et mis en place un système frauduleux de démissions et d'embauches concomitantes ; qu'il n'est pas contesté que sur les 18 salariés que comptait l'équipe, 11 ont rejoint le nouveau prestataire ; qu'il résulte des pièces versées aux débats que le nouveau prestataire a diffusé des offres d'emploi pour recruter du personnel sans qu'il soit précisé qu'il s'agissait d'assurer la promotion des produits Aztazeneca ; que les éléments versés par la société Eqinox sont des lettres échangées entre le nouveau prestataire et des salariés de l'ancien, et des correspondances échangées entre l'appelante et ses propres salariés au mois de décembre 2015 et janvier 2016, postérieurement à la notification (2 novembre 2015) par la société Astrazeneca à la société Eqinox de la perte de son marché ; que ces lettres sont des lettres de démissions de salariés sollicitant de leur employeur, la société Eqinox (Sepropharm) d'écourter leur préavis pour leur permettre de rejoindre la société Preciphar ; que sauf pour un salarié (M. B...) la société Eqinox (Sepropharm) imposera le respect du préavis de 3 mois bien que les salariés n'aient plus beaucoup d'activité du fait de la perte du marché ; que cette attitude paradoxale de l'employeur affirmant dans ses écritures que l'article L. 1224-1 du code du travail a été édicté dans l'intérêt des salariés, conduira nombre de ces salariés à prendre acte de la rupture de leur contrat afin de rejoindre le nouvel employeur ; qu'une salariée (Madame A..., âgée de 51 ans, ayant deux enfants à charge) qui avait bénéficié d'une promesse d'embauche du nouveau prestataire à condition d'être libre de tout engagement, sera finalement licenciée ; que son employeur ayant refusé de la dispenser de son préavis, le nouvel employeur n'a pu maintenir sa promesse d'embauche et a procédé au recrutement d'une autre personne ; que la société Eqinox (Sepropharm) ne rapporte pas la preuve d'un débauchage et d'une fraude organisée pour échapper à l'application de l'article L. 1224-1 du code du travail ; qu'en l'espèce, la reprise par le nouveau prestataire d'une partie significative de l'équipe du précédent ne suffit pas à caractériser en soi le transfert d'une entité économique autonome ; que sur le maintien de la structure et de la direction de l'entité après le transfert, si les deux directeurs ont été repris par le nouveau prestataire, la société Eqinox (Sepropharm) ne démontre pas l'existence préalable d'une autonomie de gestion comptable ou budgétaire de cette activité, ni même une autonomie fonctionnelle permettant aux deux responsables de cette activité d'organiser ladite activité de manière autonome au sein de la société Eqinox ; que l'existence d'une telle structure dans la société d'origine ne ressort pas notamment d'explications sur le mode de fonctionnement de celle-ci ; que par conséquent il ne peut être considéré qu'une structure autonome a été maintenue ; que sur les actifs corporels ; que la société Eqinox soutient que l'activité transférée nécessitait l'utilisation d'éléments corporels comme par exemple des véhicules, des équipements téléphoniques ou informatiques permettant le suivi administratif des supports documentaires, des formulaires de formation ou d'évaluation des salariés ; que toutefois elle ne démontre pas l'existence d'éléments d'actif nécessaires et exclusivement affectés à l'activité considérée ; que sur les actifs incorporels, la société Eqinox (Sepropharm) soutient que le transfert de l'actif incorporel peut-être indirect et cite à cet égard la documentation mise à la disposition par la société Astrazeneca auprès des visiteurs médicaux salariés de la société Eqinox ; que cette mise à disposition d'éléments nécessaires mais accessoires à la promotion des produits ne peut caractériser en soi un transfert de moyens matériels au sens de l'article L. 1224-1 du code du travail ; que la société Eqinox soutient également que le savoir-faire de ses salariés affectés au marché concerné était un savoir-faire spécifique devant être considéré comme un actif incorporel nécessaire à l'activité transférée ; que ce savoir-faire est entendu par la société Eqinox comme l'expérience professionnelle acquise par les salariés à l'occasion de la promotion des produits Astrazeneca ; que le savoir-faire qui résulte de l'expérience professionnelle acquise par le visiteur médical au long de sa vie professionnelle, de l'acquisition ponctuelle de connaissances des produits Astrazeneca afin d'en assurer la promotion ; que le savoir-faire, hérité de l'expérience professionnelle, permet au visiteur médical d'assurer la promotion de produits pharmaceutiques de différents laboratoires et pas seulement des produits Astrazeneca ; qu'en l'espèce le savoir-faire du visiteur médical, constituant un actif économique incorporel de son employeur, n'est pas nécessairement et exclusivement attaché à la promotion des produits Astrazeneca ; que même si l'activité de promotion pharmaceutique repose essentiellement sur les ressources humaines, et pourrait correspondre à une entité économique susceptible de maintenir son identité par-delà son transfert, c'est d'une part, à la condition que ce personnel mette en oeuvre des connaissances techniques ou un savoir-faire qualifié spécifiquement attaché à l'activité transférée, constituant ainsi un actif économique incorporel attaché à cette activité, et d'autre part à la condition que la société Eqinox (Sepropharm) rapporte la preuve d'un transfert d'éléments corporels ou incorporels, significatifs, et nécessaires à l'exploitation de cette activité, ce qu'elle ne fait pas ; qu'ainsi les bilans, les comptes de résultat ainsi que leurs annexes de la société Eqinox (Sepropharm) correspondant aux exercices 2013 et 2014 n'isolent pas l'activité Astrazeneca qui représentait, en 2014, 27 % de son chiffre d'affaires ; qu'il résulte de ce qui précède que si la société Eqinox (Sepropharm) conformément à ses obligations contractuelles a affecté les moyens humains et matériels à la promotion des produits Astrazeneca, elle ne rapporte pas la preuve que cette activité s'accomplissait au travers d'une entité économique autonome, qui aurait fait l'objet d'un transfert au profit de la société Preciphar ; que les salariés concernés ne peuvent bénéficier des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail ;
AUX MOTIFS adoptés QUE suite à l'appel d'offres qu'elle a émis en juin 2015 la société Astrazeneca a choisi de confier à la société Preciphar la promotion de ses produits pharmaceutiques dans les DROM-COM à compter du 1er janvier 2016, prestation qui était auparavant réalisée par la société Sepropharm et ce depuis plusieurs années ainsi qu'en attestent les dates d'embauche de ses salariés affectés à l'activité Astrazeneca ; que les contrats de travail conclus par la société Sepropharm avec les 18 salariés concernés permettent de constater que ceux-ci ont été embauchés pour visiter, sur le secteur qui leur était imparti, "tous les professionnels de santé ciblés par les laboratoires Astrazeneca afin de leur présenter les produits dont Sepropharm s'est vue confier la promotion » ; qu'il est toutefois précisé qu'à tout moment, Sepropharm se réserve le droit de demander au salarié la promotion de laboratoires autres qu'Astrazeneca ; que par ailleurs, alors que la société Sepropharm affirme que la prestation réalisée en son sein pour la promotion des produits Astrazeneca faisait l'objet d'une organisation autonome avec des moyens matériels et immatériels propres, il ressort des éléments qu'elle produit que cette activité était indéniablement à l'origine d'une partie de son chiffre d'affaire sans démontrer que des moyens particuliers et distincts des autres activités exercées par l'entreprise avaient été mis à disposition des salariés attachés à l'activité Astrazeneca ; qu'il apparait donc que dans le cadre de contrats successifs et à durée déterminée, la société Sepropharm a organisé la promotion des produits pharmaceutiques de la société Astrazeneca en affectant à cette activité des moyens humains et matériels dont il n'est qu'imparfaitement démontré qu'ils étaient lui étaient exclusivement consacrés, indépendamment des moyens fournis aux autres activités de l'entreprise, cette dernière étant prestataire d'autres laboratoires pharmaceutiques ; que par ailleurs, en cas d'exécution d'un marché de service, le seul transfert du marché à un nouveau prestataire ne suffit pas à caractériser un transfert légal ; que selon la jurisprudence de la cour de cassation, le transfert d'un entité économique ayant conservé son identité et dont l'activité est poursuivie et reprise ne s'opère que si des moyens corporels ou incorporels significatifs et nécessaires à l'exploitation de l'entité sont repris, directement ou indirectement ; que s'il est exact que sur les 18 salariés affectés précédemment à l'activité au sein de la société Sepropham, 11 d'entre eux ont été réembauchés par la société Preciphar, il ressort des éléments versés au débat que suite à la conclusion du contrat de prestation avec la société Astrazeneca, la société Preciphar a diffusé des offres d'emploi pour recruter du personnel s'adressant à tout type de candidats parmi lesquels les salariés de la société Sepropharm ; qu'elle justifie en effet d'une offre d'emploi pour le recrutement de directeur régional pour les Antilles et la Réunion s'adressant à tout candidat ayant le profil adéquat sans qu'il soit fait référence au produits Astrezeneca ; qu'aucun des éléments produits au débat ne permet d'établir que le nouveau prestataire aurait frauduleusement débauché les salariés de l'ancien prestataire afin d'organiser en amont leur recrutement ; qu'au contraire, il apparait à la lecture des courriers et témoignages de plusieurs salariés versés par la société Sepropham que c'est après avoir appris la perte du marché Astrazeneca par leur employeur que ces salariés ont spontanément postulé auprès du nouveau prestataire et que ceux qui ont été recrutés par la société Preciphar ont volontairement démissionné de leur ancien emploi et accepté de conclure un nouveau contrat de travail sans invoquer de transfert de leur ancien contrat de travail ; que compte-tenu de ces éléments, la reprise par le nouveau prestataire d'une partie des effectifs de la société Sepropham affectés à l'activité Astrazeneca, même si elle porte sur plus de la moitié de ces effectifs, ne peut suffire à caractériser le transfert d'une entité économique autonome ; qu'en outre, la reprise de l'activité par la société Preciphar ne s'est accompagnée d'aucun transfert des moyens matériels et immatériels mis à la disposition de ses salariés par la société Sepropharm, tels notamment que les locaux, les véhicules, le matériel informatique et téléphonique ou les suivis administratifs et des supports d'informations ; que les éléments d'information fournis par la société Astrazeneca au nouveau prestataire et la formation des salariés sur les produits pharmaceutiques ne constituent pas un indice en faveur d'un transfert même indirect de moyens entre les prestataires mais représentent les outils de base, nécessaires à la promotion des produits, qui doivent être mis à la disposition du nouveau prestataire par la société Astrazeneca ; qu'aux termes des contrats conclus entre les sociétés Astrazeneca et Sepropharm, il est spécifié que les documents ou éléments transmis par Astrazeneca à son prestataire pour les besoins de la réalisation de la mission restent la propriété de celle-ci et que leur mise à disposition dans le cadre de l'exécution du contrat ne peut être assimilée à une cession, une licence ou un droit d'usage autre que celui nécessaire à l'exécution du contrat ; que la reprise de l'activité de promotion des produits Astrazeneca par la société Preciphar ne réalise pas le transfert d'une entité économique autonome ayant conservé son identité et que les conditions du transfert automatique des contrats de travail entre la société Sepropharm et la société Preciphar, en application de l'article L. 1224-1 du code du travail, ne sont pas remplies ;
1/ ALORS QUE dans les secteurs d'activité reposant essentiellement sur la main-d'oeuvre, une collectivité de travailleurs que réunit durablement une activité commune peut correspondre à une entité économique dont l'identité est maintenue par-delà son transfert quand le nouveau chef d'entreprise ne se contente pas de poursuivre l'activité en cause mais reprend également une partie essentielle, en termes de nombre et de compétence, des effectifs que son prédécesseur affectait spécialement à cette tâche ; qu'ayant fait ressortir que la promotion des ventes des produits du laboratoire Astrazeneca avait été reprise par la société Preciphar qui avait embauché 11 des 18 salariés que la société Eqinox avait occupés à cette activité et qui disposaient de connaissances techniques spécifiques à ces produits, tout en refusant de dire qu'il s'était ainsi opéré le transfert d'une entité économique autonome soumise aux dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail, la cour d'appel a violé le texte susvisé interprété à la lumière de la directive n° 2001/23/CE du 12 mars 2001 ;
2/ ALORS QUE, subsidiairement, l'article L. 1224-1 du code du travail, interprété à la lumière de la Directive n° 2001/23/CE du 12 mars 2001, s'applique en cas de transfert d'une entité économique autonome qui conserve son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise ; que constitue une entité économique autonome un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels poursuivant un objectif économique propre ; que le transfert d'une telle entité se réalise si des moyens corporels ou incorporels significatifs et nécessaires à l'exploitation de l'entité sont repris, directement ou indirectement, par un nouvel exploitant ; qu'en refusant de retenir que les connaissances spécifiques sur les produits pharmaceutiques du laboratoire Astrazeneca acquises par les visiteurs médicaux lorsqu'ils étaient attachés à l'activité de promotion de ces produits au sein de la société Eqinox constituaient des éléments d'actifs incorporels significatifs et nécessaires à l'exploitation de l'entité reprise et qu'ils avaient été transférés au moment de la reprise du marché par la société Preciphar et de l'embauche des onze visiteurs médicaux de la société Eqinox, la cour d'appel a violé l'article L. 1224-1 du code du travail, ensemble l'ancien article 1382 du code civil, devenu l'article 1240 de ce même code ;
3/ ALORS QUE les éléments constitutifs de l'entité économique autonome s'apprécient au regard des conditions effectives d'emploi des salariés et de l'organisation de l'activité ; qu'en affirmant que la preuve n'était pas rapportée de ce que les dix-huit salariés étaient dédiés à la promotion des produits pharmaceutiques du laboratoire Astrazeneca dès lors que leur contrat de travail ouvrait la possibilité à la société Eqinox de leur confier la promotion de produits d'autres laboratoires, quand elle aurait dû rechercher quelles étaient les conditions effectives d'emploi de ces salariés, la cour d'appel s'est déterminée par des motifs inopérants et erronés et partant a violé l'article L. 1224-1 du code du travail
4/ ALORS QUE, en tout état de cause, la société Eqinox faisait valoir que l'activité était dotée de moyens matériels indispensables à l'activité de promotion des produits pharmaceutiques du laboratoire Astrazeneca tels que des supports documentaires sur les médicaments, des échantillons, du matériel informatique, des informations confidentielles, du matériel d'information scientifique, de la littérature médicale, des avis des sociétés savantes (v. conclusions de la société Eqinox, p. 16) ; qu'il résultait du contrat conclu entre la société Eqinox et la société Astrazeneca ainsi que de l'appel d'offres de 2015 que les responsables de l'activité étaient dotés de l'autorité et des compétences nécessaires à sa gestion fonctionnelle autonome (v. conclusions de la société Eqinox, p. 15) ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a privé sa décision de motifs en méconnaissance de l'article 455 du code de procédure civile ;
5/ ALORS QUE constitue une entité économique autonome un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels poursuivant un objectif économique propre, sans qu'il soit nécessaire qu'elle dispose d'une autonomie comptable et budgétaire ; qu'en reprochant à la société Eqinox de ne pas avoir fait la preuve d'une autonomie comptable et budgétaire, la cour d'appel a ajouté à l'article L. 1224-1 du code du travail une condition qui n'y figurait pas et partant a violé ce texte ;
6/ ALORS QUE constitue une entité économique autonome un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels poursuivant un objectif économique propre ; qu'en refusant de constater l'autonomie de l'activité de promotion des produits du laboratoire Astrazeneca au sein de la société Eqinox qui découlait pourtant de ce qu'une équipe de visiteurs médicaux était formée et dédiée à la promotion des produits Astrazeneca, qu'elle était dirigée par deux responsables qui étaient les interlocuteurs du laboratoire, que des rapports d'activité étaient spécifiquement élaborés pour les produits Astrazeneca et que cette activité représentait 27 à 28 % du chiffre d'affaires de la société Eqinox, la cour d'appel a tiré des conséquences erronées de ses propres constatations et partant a violé l'article L. 1224-1 du code du travail, ensemble l'ancien article 1382 du code civil, devenu l'article 1240 de ce même code ;
7/ ALORS QUE subit un préjudice l'employeur qui a licencié ou continué à employer des salariés en raison du refus du repreneur de l'activité à laquelle ceux-ci étaient affectés de voir leurs contrats transférés en application de l'article L. 1224-1 du code du travail ; que la faute commise par le repreneur découlant de la seule violation de cette disposition d'ordre public doit être réparée, quand bien même il n'aurait commis aucune manoeuvre frauduleuse pour échapper à son application ; qu'en subordonnant l'indemnisation des préjudices subis par la société Eqinox du fait de la société Preciphar de la preuve à la fois d'une violation de l'article L. 1224-1 du code du travail et d'une fraude de la société Preciphar, la cour d'appel a violé l'article L. 1224-1 du code du travail, ensemble l'ancien article 1382 du code civil, devenu l'article 1240 de ce même code ;
8/ ALORS QUE qu'en déclarant que les lettres de démission des salariés de la société Eqinox ne faisaient mention que de leur démission et de leur volonté d'écourter leur préavis, quand Mme Z... indiquait dans sa lettre de démission que sa décision s'inscrivait dans le cadre du transfert de l'activité Astrazeneca, la cour d'appel a dénaturé cet écrit en méconnaissance de l'article 1103 du code civil ;
9/ ALORS QUE les juges du fond ont l'obligation de se prononcer sur tous les documents régulièrement versés aux débats et soumis à leur examen ; qu'en retenant que la société Eqinox ne rapportait pas la preuve d'un débauchage et d'une fraude organisée de la société Preciphar pour échapper à l'application de l'article L. 1224-1 du code du travail, quand elle produisait le témoignage de Mme A... qui faisait explicitement état des actes de débauchage de la société Eqinox dès le 9 décembre 2015 ; qu'en s'abstenant d'examiner ce document, la cour d'appel a violé l'ancien article 1353 devenu 1382 du code civil, ensemble l'article 455 du code de procédure civile.