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03/10/2018 | FRANCE | N°17-19382

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 03 octobre 2018, 17-19382


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par un acte du 1er août 2003, la société Midi carrelages (la société), représentée par ses gérants, M. et Mme Y..., a ouvert un compte courant professionnel dans les livres de la société Banque populaire du Sud (la banque) ; que par des actes du 8 septembre 2005, 23 mars et 1er juin 2006, la banque a accordé à la société plusieurs crédits ; que par des actes du 13 août 2007, M. et Mme Y... se sont rendus cautions de « tous engagements » de la société envers la

banque à concurrence d'un montant de 182 000 euros ; que la société ayant é...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par un acte du 1er août 2003, la société Midi carrelages (la société), représentée par ses gérants, M. et Mme Y..., a ouvert un compte courant professionnel dans les livres de la société Banque populaire du Sud (la banque) ; que par des actes du 8 septembre 2005, 23 mars et 1er juin 2006, la banque a accordé à la société plusieurs crédits ; que par des actes du 13 août 2007, M. et Mme Y... se sont rendus cautions de « tous engagements » de la société envers la banque à concurrence d'un montant de 182 000 euros ; que la société ayant été mise en liquidation judiciaire, la banque a assigné en paiement Mme Y..., laquelle a opposé le défaut d'information annuelle de la caution ;

Sur le premier moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le second moyen :

Vu les articles L. 313-22 du code monétaire et financier et 1315 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

Attendu que pour condamner la caution à payer une certaine somme à la banque, l'arrêt, après voir énoncé, par motifs adoptés, que l'information annuelle due par la banque à la caution, en vertu de l'article L. 313-22 du code monétaire et financier, est un fait juridique dont la preuve peut être rapportée par tout moyen, retient que le premier juge a justement relevé que, la notification de cette information n'étant soumise à aucun formalisme et l'établissement de crédit n'ayant pas à prouver que la caution a effectivement reçu l'information envoyée, la seule production des copies des lettres envoyées à la caution, dont ni l'authenticité ni la date de rédaction ne sont discutées, suffit, faute de présomptions contraires, à établir la réalité de l'information de la caution, et qu'en l'espèce, la banque produit aux débats la copie de lettres d'information adressées à Mme Y... les 14 mars 2006, 12 mars 2007, 12 février 2008, 20 février 2009 et 16 février 2010, mais qu'en revanche, elle ne justifie pas du respect de cette obligation à compter de cette date ;

Qu'en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à justifier de l'accomplissement des formalités prévues par le premier des textes susvisés, dès lors que la seule production de la copie d'une lettre ne suffit pas à justifier de son envoi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il juge qu'en application des dispositions combinées de l'article L. 313-22 du code monétaire et financier et l'article L. 341-1 du code de la consommation, la déchéance de la Banque populaire du Sud du droit aux intérêts contractuels à l'égard de la caution prend effet au 17 mars 2010, et que les sommes restant dues au titre des trois prêts porteront intérêts au taux légal à compter de l'assignation en date du 16 septembre 2010, en ce qu'il rectifie en conséquence le montant de ces trois condamnations de Mme X..., épouse Y..., au titre des trois prêts comme suit : 3 120,06 euros avec intérêts au taux légal à compter du 16 septembre 2010 au titre de l'engagement de caution du 8 septembre 2005 donné en garantie du prêt professionnel de 24 500 euros, 811,60 euros avec intérêts au taux légal à compter du 16 septembre 2010 au titre de l'engagement de caution du 23 mars 2006 donné en garantie du prêt professionnel d'un montant de 18 000 euros, 627,13 euros avec intérêts au taux légal à compter du 16 septembre 2010 au titre de l'engagement de caution du 18 février 2005 relatif à l'ouverture de crédit du compte Crédirect Pro et au bon d'utilisation de 7 000 euros, et en ce qu'il statue sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 22 février 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;

Condamne la société Banque populaire du Sud aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à Mme X..., épouse Y..., la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trois octobre deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.

Moyens produits par Me Z..., avocat aux Conseils, pour Mme Y....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

(Sur le cautionnement du 13 août 2017)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR dit que Mme Carmen X..., épouse Y..., avait rédigé de sa main les mentions manuscrites prescrites par les articles L 341-2 et L 341-3 du code de la consommation sur l'acte de cautionnement tous engagements souscrit le 13 août 2007 afin de garantir dans la limite de 182 000 euros les engagements pris par la SARL Midi Carrelages à l'égard de la Banque Populaire du Sud, et D'AVOIR condamné Mme Y... à payer à la Banque Populaire du Sud la somme de 182 000 euros au titre de l'acte de cautionnement solidaire « tous engagements » conclu le 13 août 2007 ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE : « Pour rejeter la contestation de Mme Y..., le premier juge a procédé à la comparaison d'écritures et signatures de l'acte de cautionnement tous engagements, souscrit le 13 août 2007 avec les autres actes d'engagement de caution émanant d'elle-même ainsi qu'avec l'acte de cautionnement de son époux, pour en tirer la conclusion que la mention manuscrite a bien été rédigée par Mme Y.... L'appelante soutient que même si le juge a la possibilité, par application de l'article 288 du code de procédure civile de procéder lui-même à la vérification d'écriture, il n'en demeure pas moins qu'il ne peut, sans risque de se tromper distinguer la véritable écriture d'une écriture copiée ou déguisée. Cependant, après avoir procédé à la même vérification que le premier juge et en observant l'ensemble des pièces produites en cause d'appel, la cour aboutit à la même conclusion que la juridiction de première instance, en relevant une similitude manifeste de l'écriture et de la signature de la mention manuscrite de l'acte du 13 août 2007 avec son écriture et sa signature, telles que figurant sur les autres pièces produites. Alors que la charge de la preuve incombe à celui qui dénie son écriture ou sa signature, force est de constater qu'au soutien de sa contestation, l'appelante ne sollicite pas même subsidiairement 1 qu'une expertise graphologique soit ordonnée à ses frais avancés. Sa contestation très peu argumentée n'apparaît pas sérieuse et elle échoue à en rapporter la preuve. Le moyen de l'appelante sera donc en voie de rejet et le jugement confirmé sur ce point (
) ; que, sur la demande reconventionnelle fondée sur la prétention d'un manquement de la banque à son devoir de mise en garde : La banque ne peut se dispenser d'avoir rempli son obligation de mise en garde envers une caution qu'en démontrant que celle-ci était une caution avertie pour être suffisamment rompue aux affaires ou qu'une telle mise en garde n'était pas nécessaire en l'absence de toute disproportion de l'engagement souscrit relativement à ses revenus et son patrimoine. Lors de la signature de l'engagement de caution tous engagements du 13 août 2007, comme lors des autres engagements attachés aux prêts, si la banque n'a pas estimé être débitrice d'une obligation de mise en garde à l'égard de Mme Y..., elle ne soutient pas pour autant qu'elle la considérait comme caution avertie. En effet, la banque ne répond aucunement à ce moyen soulevé par l'appelante devant la cour. Mme Y... expose qu'elle n'avait pas d'autre qualification professionnelle que celle de secrétaire commerciale, situation qui ne lui permettait pas de comprendre les enjeux économiques et financiers de la société qu'elle n'a jamais gérée effectivement. Elle n'a exercé aucun poste dans le milieu comptable ou juridique avant d'être nommée en qualité de gérante, 7 mois seulement avant le cautionnement « tous engagements ». Âgée alors de 60 ans, elle n'avait jamais occupé de fonctions de direction durant sa vie. Elle n'a d'ailleurs jamais eu aucun pouvoir décisionnel comme en témoignent les actes de prêts produits par la banque sur lesquels, à la mention « débiteur » figure bien le cachet de la société Midi carrelages et la seule signature de M. Y... pour représenter la société débitrice. L'appelante fait valoir que la société Midi Carrelages a toujours été gérée par son époux depuis sa création en 2003. C'est uniquement sur les conseils de son expert-comptable que M. Y... l'a désignée en qualité de cogérante, aux seules fins qu'elle puisse bénéficier d'un statut social, tandis qu'elle-même était dépourvue de toute connaissance des affaires conduites par son conjoint. Contrairement à son époux, elle n'a donc jamais participé à la gestion de l'entreprise et n'était pas rompue aux affaires. Elle n'avait pas d'ailleurs conscience de la portée de son engagement puisqu'elle était convaincue de n'avoir donné son aval qu'en qualité de conjoint, au cautionnement donné par son époux : jusqu'à cette procédure, elle avait alors la croyance que le couple ne se trouvait engagé qu'à hauteur de 182 000 euros, et non pas chacun des époux à hauteur de cette somme. Ce n'est qu'à réception de l'assignation qu'elle a découvert et compris que les deux engagements de caution à hauteur de 182 000 euros, qu'elle avait signés avec son époux, étaient en réalité cumulatifs. La banque n'a jamais eu comme interlocuteur de la société Midi Carrelages que M. A... Y... : Elle ne s'y est pas trompée dans son choix procédural en assignant ce dernier en qualité de caution commerciale devant le tribunal de commerce, et en assignant parallèlement devant le tribunal de grande instance Mme Y... avec laquelle elle n'était jamais en contact et dont elle ignorait jusqu'à sa nomination en qualité de gérante. Elle a donc toutes les caractéristiques d'une caution profane, sans être aucunement contredite sur ce point En effet, on cherche vainement dans les conclusions de la banque des arguments contraires, de sorte que, manifestement, la banque ne soutient pas qu'elle serait une caution avertie. La banque était donc débitrice d'un devoir de mise en garde à son égard sur la portée de ses engagements. La banque produit, en sa pièce 10, l'acte de cautionnement tous engagements à laquelle est attachée une fiche de renseignements confidentiels concernant Mme Y... Carmen, née X..., sur laquelle les tableaux concernant la situation professionnelle et le patrimoine mobilier sont rayés d'un trait comme étant sans objet et sur laquelle est seulement mentionnée, dans la case « patrimoine immobilier », la résidence principale en indivision acquise en 1991 au prix de 100 000 euros, avec un crédit en cours de 30 000 euros, et avec une valeur estimée à 1 million. Toutefois, cette fiche de renseignements n'est pas signée par la caution, mais seulement par son conjoint. Si le contenu de cette fiche de renseignements n'était pas contesté, il importerait peu qu'elle ne soit pas signée de la caution. Toutefois en l'espèce, Mme Y... conteste l'évaluation qui y est portée du seul bien immobilier du couple à Millas, qui ne repose sur aucune estimation immobilière. Ce bien - dont elle rappelle qu'elle n'en est propriétaire que pour moitié seulement — aurait été largement surévalué pour les besoins de la cause sur ce un document dont elle n'est ni l'auteur ni la signataire. Par ailleurs, le passif du couple y est insuffisamment renseigné. La banque ne conteste d'ailleurs aucunement la valeur réelle de ce bien comme étant en toute hypothèse inférieure à 450 000 euros, et s'abstient de commenter les évaluations effectuées démontrant une valeur se situant entre 350 000 euros et 390 000 euros. Or, en n'étant propriétaire que de la moitié de ce bien, Mme Y... n'avait comme patrimoine immobilier pour couvrir ses engagements qu'au plus, à hauteur de 185 000 euros, tandis qu'en totalisant les engagements de caution qu'elle a souscrit successivement, une valeur de 265 000 euros aurait été nécessaire. Mme Y..., sans profession pendant les années où elle s'est consacrée à ses enfants, n'a qu'une maigre retraite pour l'emploi qu'elle avait occupé temporairement en qualité de secrétaire commerciale. Au regard de son âge de 60 ans au moment de son engagement de caution tous engagements, la banque - au vu de la fiche de renseignements qu'elle produit elle-même - n'ignorait pas qu'elle n'avait pas de revenus personnels et professionnels et qu'elle ne pourrait dès lors davantage compter sur des revenus significatifs au moment de sa retraite. Dès lors, son patrimoine, constitué seulement de la moitié de la valeur de la résidence principale du couple, soit au plus de 185 000 euros, ne lui permettait pas de toute évidence, de faire face à l'ensemble de ses engagements totalisés à la somme de 265 000 euros. En sollicitant un cautionnement qui excédait largement les capacités financières de la caution, la banque a manqué à son devoir de mise en garde à son égard et engage envers elle sa responsabilité contractuelle. Le préjudice, résultant de ce manquement fautif de la banque et du caractère disproportionné du cautionnement souscrit, s'analyse en une perte de chance de ne pas souscrire un tel engagement. En l'espèce, l'appelante ne démontre pas que, si elle avait été mise en garde sur la portée de son engagement, elle aurait totalement renoncé à cautionner la société créée et dirigée par son conjoint, d'autant qu'elle y avait intérêt, en ce que les ressources de la famille dépendaient du succès de l'entreprise. Elle ne démontre donc pas qu'elle aurait renoncé à se porter caution, mais seulement qu'elle aurait limité ses engagements à des montants moindres. En conséquence de ce qui précède et au regard de l'ensemble des pièces produites, la cour estime que la somme de 30 000 euros réparera justement ce préjudice. Infirmant partiellement le jugement sur ce point, il sera donc fait droit à hauteur de ce montant à la demande de dommages et intérêts de l'appelante, avec prononcé de la compensation des créances réciproques des parties » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE : « Mme Y... fait tout d'abord valoir que la Banque Populaire du Sud ne peut lui réclamer le paiement de la somme de 182.000 euros dans la mesure où la mention manuscrite figurant sur l' "Acte de cautionnement tous engagements" établi à son nom a été rédigée par son époux, elle-même ayant uniquement porté sur cet acte la mention prévue par l'article 1415 du code civil concernant uniquement l'accord de l'époux commun en biens au cautionnement donné. Il résulte en effet de l'article L. 341-2 du code de la consommation, dans sa rédaction issue de la loi n° 2003-721 du 1er août 2003 entrée en vigueur le 5 février 2004, que toute personne physique qui s'engage par acte sous seing privé en qualité de caution envers un créancier professionnel doit, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante, et uniquement de celle-ci : « En me portant caution de X..., dans la limite de la somme de... couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de..., je m'engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X... n'y satisfait pas lui-même ». Selon l'article L. 341-3 du même code, également issu de la loi du 1er août 2003, lorsque le créancier professionnel demande un cautionnement solidaire, la personne physique qui se porte caution doit, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante : « En renonçant au bénéfice de discussion défini à l'article 2298 du code civil (anciennement 2021) et en m'obligeant solidairement avec X.., je m'engage à rembourser le créancier sans pouvoir exiger qu'il poursuive préalablement X.. ». Le non-respect du formalisme édicté par ces textes, qui vise à assurer l'information complète de la personne se portant caution, est sanctionné par la nullité de l'acte, à moins qu'il ne s'agisse d'imperfections mineures, qui n'affectent ni le sens, ni la portée des mentions. Au cas particulier, il résulte de la comparaison des écritures et signatures apposées sur l'acte litigieux avec d'une part l'acte de cautionnement tous engagements" souscrit par M. A.... Y... le même jour, sur lequel figure également l'écriture et la signature de son épouse, et d'autre part les actes d'engagement de caution souscrits par la défenderesse les 18 février 2005, 08 septembre 2005, 23 mars 2006, dont la défenderesse ne conteste pas être l'auteur et la signataire, que la mention manuscrite prévue par les articles L. 341-2 et L. 341-3 du code de la consommation est bien rédigée de sa main et suivie de sa signature. Dès lors, la Banque Populaire du Sud peut parfaitement se fonder sur cet acte de cautionnement pour agir en paiement à l'encontre de Mme Carmen X..., épouse Y.... Il convient par ailleurs de constater que le quantum de la créance réclamée par la Banque Populaire du Sud sur le fondement de cet acte, soit la somme de 182 000 euros, ne fait l'objet d'aucune contestation de la part de la défenderesse » ;

ALORS, 1°), QU'en présence d'une dénégation d'écriture, le juge doit constater et établir que la mention dénoncée a effectivement été apposée de la main du demandeur à l'incident en recourant, fût-ce d'office et en présence du moindre doute, à une expertise graphologique ; qu'en l'espèce, Mme Y... contestait fermement avoir signé l'acte de caution du 13 août 2007 qui lui était opposé et avoir apposé de sa main la mention manuscrite exigée par l'article L 341-2 du code de la consommation, celle-ci faisant valoir que son écriture et sa signature avaient été soigneusement imitées ; qu'elle produisait à cet effet plusieurs pièces nouvelles en appel à l'effet de permettre au juge de se convaincre de l'imitation alléguée ; que pour juger que les mentions contestées avaient bien été apposées de la main de Mme Y... et que celles-ci ne procédaient pas d'une imitation, la cour d'appel a relevé qu'il existait - comme pour toute imitation - une « similitude manifeste » entre les mentions contestées et celles portées sur des documents attribués à Mme Y... et que Mme Y..., qui ne sollicitait aucune expertise graphologique, n'apportait pas la preuve de l'existence d'une imitation ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs impropres à écarter l'imitation alléguée et à établir que les mentions contestées avaient bien été apposées de la main de la caution, violant ainsi l'article 288 du code de procédure civile ;

ALORS, 2°) et en tout état de cause, QU'un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus ; qu'en condamnant Mme Y... à exécuter l'engagement de caution du 13 août 2007 sans répondre aux conclusions (pp. 10 et 11) par lesquelles celle-ci faisait valoir qu'à raison du caractère manifestement disproportionné de cet engagement, la banque était en tout état de cause dans l'impossibilité de s'en prévaloir, la cour d'appel, qui constatait elle-même que la banque avait sollicité un cautionnement qui « excédait largement les capacités financières de Mme Y... », a violé l'article 455 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

(Sur la déchéance du droits aux intérêts)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR jugé qu'en application des dispositions combinées de l'article L. 313-22 du code monétaire et financier et l'article L. 341-1 du code de la consommation, la déchéance de la Banque Populaire du Sud du droit aux intérêts contractuels et pénalités à l'égard de la caution prenait effet au 17 mars 2010, et que les sommes restant dues au titre des trois prêts porteront intérêts au taux légal à compter de l'assignation en date du 16 septembre 2010, et D'AVOIR en conséquence rectifié le montant des trois condamnations de Mme Carmen X..., épouse Y... au titre des trois prêts comme suit : 3 120,06 euros avec intérêts au taux légal à compter du 16 septembre 2010, au titre de l'engagement de caution du 8 septembre 2005 donné en garantie du prêt professionnel de 24 500 euros, 811,60 euros avec intérêts au taux légal à compter du 16 septembre 2010, au titre de l'engagement de caution du 23 mars 2006 donné en garantie du prêt professionnel d'un montant de 18 000 euros, 627,13 euros avec intérêts au taux légal à compter du 16 septembre 2010, au titre de l'engagement de caution du 18 février 2005 relatif à l'ouverture de crédit du compte Crédirect Pro, et au bon d'utilisation de 7 000 euros ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE : « L'appelante prétend, au visa de l'article 47 de la loi du 11 février 1994 - dont la cour relève que ce texte est codifié à l'article L. 341-1 du code de la consommation - que la banque devrait être également déchue du droit aux intérêts et paiement des pénalités, soit l'indemnité de 8 % afférente à chacun des prêts, dans la mesure où elle n'a pas informé la caution de la défaillance du débiteur principal dès le premier incident de paiement non régularisé dans le mois de l'exigibilité de ce paiement. Or, selon ce texte qu'elle cite, la caution ne saurait être tenue au paiement des pénalités ou intérêts de retard échus entre la date de ce premier incident et celle à laquelle elle en a été informée. L'appelante se contente d'alléguer dans ses écritures que « les premiers incidents seraient intervenus au mois de février 2010 » sans commenter sur ce point ni ses propres pièces, ni les pièces adverses. Ainsi que l'a retenu le premier juge au vu des pièces produites, aucun paiement n'a été effectué par le débiteur principal à compter du 16 février 2010 et la mise en demeure du 27 mai 2010 a été réceptionnée le 2 juin 2010. Si la banque justifie par sa pièce 12 d'avoir informé la caution de la défaillance du débiteur principal par cette lettre recommandée du 27 mai 2010, elle ne fournit pas pour autant le décompte détaillé censé y être joint, lequel figure bien en revanche en pièce jointe à sa déclaration de créance du même jour produite en pièce » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE : « Il résulte en effet de l'article L. 313-22 du code monétaire et financier que les établissements de crédit ayant accordé un concours financier à une entreprise, sous la condition du cautionnement par une personne physique ou une personne morale, sont tenus au plus tard avant le 31 mars de chaque année de faire connaître à la caution le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation bénéficiant de la caution, ainsi que le terme de cet engagement. Si l'engagement est à durée indéterminée, ils rappellent la faculté de révocation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci est exercée. Le défaut d'accomplissement de la formalité prévue à l'alinéa précédent emporte, dans les rapports entre la caution et l'établissement tenu à cette formalité, déchéance des intérêts échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information. Les paiements effectués par le débiteur principal sont réputés, dans les rapports entre la caution et l'établissement, affectés prioritairement au règlement du principal de la dette. L'information annuelle due par la banque à la caution, en vertu de l'article L. 313-22 du code monétaire et financier, est un fait juridique dont la preuve peut être rapportée par tout moyen, la notification de cette information n'étant soumise à aucun formalisme et l'établissement de crédit n'ayant pas à prouver que la caution a effectivement reçu l'information envoyée. Dès lors, la seule production des copies des lettres envoyées à la caution, dont ni l'authenticité ni la date de rédaction ne sont discutées suffit, faute de présomptions contraires, à établir la réalité de l'information de la caution. En l'espèce, la Banque Populaire du Sud produit aux débats la copie des lettres d'information adressées à Mme Carmen X... les 14 mars 2006, 12 mars 2007, 12 février 2008, 20 février 2009, et 16 février 2010 ; en revanche, elle ne justifie pas du respect de cette obligation à compter de cette date, étant rappelé que l'obligation d'information incombant au banquier à l'égard de la caution est due jusqu'à l'extinction de la dette, nonobstant la procédure en cours. Il convient donc de prononcer la déchéance des intérêts conventionnels à compter du 16 février 2010, étant précisé qu'au vu des pièces produites aux débats aucun paiement n'a été effectué par le débiteur principal à compter de cette date. Conformément aux dispositions de l'article 1153 du code civil, Mme X..., épouse Y... reste toutefois tenue au paiement des intérêts au taux légal à compter du 02 juin 2010, date de sa mise en demeure. Au final, Mme Carmen X..., épouse Y... est débitrice des sommes suivantes : 182 000 euros au titre de l'acte de cautionnement solidaire conclu le 13 août 2007, étant précisé que cette somme constitue la limite de son engagement de caution, 3 369,66 euros [3 120,06 euros correspondant au capital restant dû à la date du 5 mars 2010 + indemnité contractuelle de 8 %] avec intérêts au taux légal à compter du 2 juin 2010, en vertu de son engagement de caution du 8 septembre 2005 donné en garantie d'un prêt professionnel d'un montant de 24 500 euros, 876,52 euros [811,60 euros correspondant au capital restant dû à la date du 5 mars 2010 + indemnité contractuelle de 8 %] avec intérêts au taux légal à compter du 2 juin 2010, en vertu de son engagement de caution du 23 mars 2006 donné en garantie d'un prêt professionnel d'un montant de 18 000 euros 677,30 euros [627,13 euros correspondant au capital restant dû à la date du 5 mars 2010 + indemnité contractuelle de 8 %] avec intérêts au taux légal à compter du 2 juin 2010, en vertu de son engagement de caution du 18 février 2005 » ;

ALORS QUE c'est au banquier qu'il appartient de justifier avoir exécuté l'obligation annuelle d'information qui s'impose à lui en vertu de l'article L. 313-2 du code monétaire et financier ; qu'il ne peut le faire par la seule production d'un courrier simple qu'il alléguerait avoir adressé à la caution (Com., 9 février 2016, n° 14-22.179) ; qu'en jugeant, à l'image des premiers juges, que la banque justifiait avoir exécuté son obligation d'information annuelle pour les années 2006 à 2010, cependant que pour ce faire la banque s'appuyait sur de simples courriers qu'elle prétendait avoir adressés à Mme Y..., ce que critiquait précisément cette dernière, qui contestait avoir reçu une information conforme aux dispositions susvisées, la cour d'appel a violé l'article 1315, devenu 1353, du code civil, ensemble l'article L. 313-2 du code monétaire et financier.


Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 22 février 2017


Publications
Proposition de citation: Cass. Com., 03 oct. 2018, pourvoi n°17-19382

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Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot

Origine de la décision
Formation : Chambre commerciale
Date de la décision : 03/10/2018
Date de l'import : 15/09/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 17-19382
Numéro NOR : JURITEXT000037495502 ?
Numéro d'affaire : 17-19382
Numéro de décision : 41800759
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.cassation;arret;2018-10-03;17.19382 ?
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