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27/09/2018 | FRANCE | N°17-14351;17-14352

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 27 septembre 2018, 17-14351 et suivant


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° A 17-14.351 et n° B 17-14.352 ;

Attendu, selon les arrêts attaqués, que Mmes Y... et Z..., salariées de l'association BTP CFA Picardie et occupant un emploi de formatrices, ont saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes se rapportant à l'exécution de leur contrat de travail ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé qui n'est manifestement pas de nature à en

traîner la cassation ;

Mais sur le premier moyen :

Vu l'article 455 du code civil ;
...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° A 17-14.351 et n° B 17-14.352 ;

Attendu, selon les arrêts attaqués, que Mmes Y... et Z..., salariées de l'association BTP CFA Picardie et occupant un emploi de formatrices, ont saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes se rapportant à l'exécution de leur contrat de travail ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le premier moyen :

Vu l'article 455 du code civil ;

Attendu que pour condamner l'employeur à verser certaines sommes à titre de rappel de congés payés entre 2007 et 2015 et le débouter de sa demande de répétition de l'indu, l'arrêt, après avoir rappelé les dispositions l'article 208 de l'accord professionnel du 22 mars 1982 relatif au statut du personnel des associations chargées de la gestion des CFA du bâtiment, retient qu'aux termes de ce texte, est mal fondé le raisonnement de l'employeur concluant à un trop perçu des salariées au titre des congés payés durant la période considérée, qu'il ne peut être valablement soutenu que la prime de gratification perçue pour une année entière ne devait être versée et intégrée dans l'assiette de calcul des congés payés qu'après déduction de la part correspondant à la période de congés payés, que sa demande de restitution de l'indu ne pourra prospérer, que l'employeur ne démontre pas que n'aurait eu pour but que de gonfler de manière artificielle le reliquat de congés payés sollicités, la méthode utilisée par les salariées pour le calcul des congés payés, et ayant consisté en la comparaison des sommes versées en application de la règle du maintien du salaire et celles qui auraient dues être versées sur la base du rapport 60/30ème, sans déduction des jours fériés tombant pendant les congés et après inclusion de la prime conventionnelle de fin d'année dans l'assiette de calcul, qu'en tout état de cause le décompte des salariées ne contrevient pas aux principes légaux et conventionnels posés par le présent arrêt ;

Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de l'employeur qui soutenait que la gratification annuelle était calculée de façon plus favorable que les prévisions de l'accord collectif et intégrait les périodes de congés payés, et que la méthode de calcul du maintien de la rémunération proposée par les salariées, qui incluait les samedis et jours fériés, ne permettait pas d'opérer de comparaison entre l'indemnité calculée en application de la règle du dixième et celle calculée en application de la règle du maintien de salaire, laquelle n'était pas effectuée sur la base du même nombre de jours de congés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

Et attendu qu'en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation sur le premier moyen, du chef du rappel d'indemnité de congés payés entraîne la cassation par voie de conséquence sur le troisième moyen sur les dommages-intérêts pour résistance abusive ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne l'association BTP CFA Picardie à verser à Mmes Y... et Z... certaines sommes à titre de rappel de congés payés entre 2007 et 2015, des dommages et intérêts et déboute l'association BTP CFA Picardie de sa demande de répétition de l'indu, les arrêts rendus le 10 janvier 2017, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai ;

Condamne Mmes Y... et Z... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts partiellement cassés ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept septembre deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.

Moyens produits au pourvoi n° A 17-14.351 par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour l'association BTP CFA Picardie.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné l'Association BTP CFA de Picardie à verser à la salariée la somme de 4297, 95 euros à titre de rappel de congés payés entre 2007 et 2015, d'AVOIR débouté l'Association BTP CFA de Picardie de sa demande de répétition de l'indu au titre d'un trop perçu d'indemnité de congés payés entre 2007 et 2015 et de l'AVOIR condamnée au paiement d'une indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile

AUX MOTIFS QUE « selon les dispositions de l'accord collectif du 22 mars 1982 : " Pour une année de travail effectif ou assimilé réalisé au cours de la période de référence légale (du ler juin de l'année précédente au 31 mai de l'année en cours), le personnel enseignant, d'éducation et d'animation bénéficie au total de soixante-dix jours ouvrables ou non de congés.
Ces congés se composent :
-d'une part des congés légaux,
-d'autre part, de congés supplémentaires accordés à chaque membre du personnel enseignant, d'éducation et d'animation en raison de sa participation à la mission d'enseignement assumée par le CFA.
Les congés annuels du personnel enseignant, d'éducation et d'animation sont fixés comme suit :
a) Congés d'été
Les congés sont pris du 13 juillet au soir au 1 er septembre au matin.
Par convention, les congés payés légaux se situent obligatoirement à l'intérieur des congés d'été.
b) Congés d'hiver et de printemps
* à l'occasion des fêtes de fin d'année :
Deux semaines de sept jours ouvrables ou non qui seront la semaine comprenant le 25 décembre et la semaine comprenant le 1er janvier.
* à l'occasion des fêtes de Pâques :
Une semaine de sept jours ouvrables ou non qui sera fixée par l'association gestionnaire en fonction des vacances scolaires de l'Académie.
Les congés prévus aux paragraphes a et b ne pourront, par ailleurs, se cumuler avec les jours de congés supplémentaires, notamment d'ancienneté, accordés par la convention collective ni avec une éventuelle augmentation des congés légaux ou conventionnels.
Tout congé supplémentaire ou toute augmentation de congés qu'imposerait la loi ou la convention collective s'imputera donc d'abord sur les congés accordés au présent article" ;
Attendu que selon les dispositions de l'article L 3141- 22 du code du travail, lorsque la durée du congé diffère de celle qui est prévue à l'article L. 3141-3 du même code, l'indemnité de congés payés est calculée, à proportion de la durée du congé effectivement dû selon la règle du 1/10 ème de la rémunération totale perçue par le salarié au cours de la période de référence, à moins qu'elle ne s'avère moins favorable que celle qui aurait été perçue pendant la période de congés si le salarié avait continué à travailler.
Attendu que de la lecture combinée des dispositions qui précède, il résulte pour l'employeur l'obligation, afin de permettre à chaque salarié de bénéficier de l'indemnisation la plus favorable, de calculer l'indemnité de congés payés due à l'intéressé sur la base du rapport 60/30 ème, ce qui semble être admis par l'ASSOCIATION BTP CFA PICARDIE, mais cela sans qu'il y ait lieu, ainsi que le soutient cette dernière, de déduire de cette indemnité la rémunération des jours fériés inclus dans la durée des congés payés.
Attendu s'agissant de l'assiette de calcul de l'indemnité litigieuse, que selon les dispositions de l'article 208 de l'accord collectif du 22 mars 1982 :
« Chacun des membres du personnel enseignant, d'éducation et d'animation reçoit :
a) une gratification de fin d'année dont le montant est fixé à 50% du salaire brut de base servi à l'intéressé au cours du dernier mois de l'année civile et payable avec le salaire de décembre au prorata du nombre de mois de travail effectif ou assimilé assuré dans l'établissement (période de référence : 1 er janvier-31 décembre).
En cas de départ avant décembre, le salaire de référence pour le calcul au prorata sera celui du dernier mois complet de présence.
b ) une prime de vacances dont le montant est fixé à 30% du salaire brut de base servi à l'intéressé au titre du mois de juillet, au prorata du nombre de mois de travail effectif ou assimilé assuré dans l'établissement (période de référence : ler juillet-31 août).
Cette prime est payable avec le salaire de juillet.
En cas de départ avant juillet, le salaire de référence pour le calcul au prorata sera celui du dernier mois complet de présence.
c) Pour les salariés occupés successivement à temps complet et à temps partiel ou inversement au cours de la période de référence :
La gratification de fin d'année et la prime de vacances seront calculées proportionnellement aux périodes d'emploi effectuées à temps plein et à temps partiel » ;
Attendu qu'aux termes de cet article, est mal fondé le raisonnement de l'employeur concluant à un trop perçu de la salariée au titre des congés payés durant la période considérée ; qu'il ne peut en effet être valablement soutenu que la prime de gratification perçue pour une année entière ne devait être versée et intégrée dans l'assiette de calcul des congés payés qu'après déduction de la part correspondant à la période de congés payés ;
Qu'ainsi, la demande de répétition de l'indu formulée par l'ASSOCIATION BTP CFA PICARDIE ne pourra prospérer.
Attendu que l'employeur ne démontre pas que n'aurait eu pour but que de gonfler de manière artificielle le reliquat de congés payés sollicités, la méthode utilisée pour le calcul de ces derniers, et ayant consisté en la comparaison des sommes versées en application de la règle du maintien du salaire et celles qui auraient dues être versées sur la base du rapport 60/30ème, sans déduction des jours fériés tombant pendant les congés et après inclusion de la prime conventionnelle de fin d'année dans l'assiette de calcul ;
Qu'en tout état de cause, le décompte des sommes qu'elle prétend lui être dues, tel qu'il est présenté par B... Y..., ne contrevient pas aux principes légaux et conventionnels rappelés par le présent arrêt ;
Attendu en conséquence qu'il y aura lieu d'infirmer la décision du Conseil de Prud'hommes et d'accorder à la salariée le rappel de congés payés sollicité »

1/ ALORS QUE l'employeur faisait valoir que si l'article 208 de l'accord collectif du 22 mars 1982 prévoyait une gratification de fin d'année payée au prorata du nombre de mois de travail effectif ou assimilé, il avait en pratique, et par faveur, payé la gratification de fin d'année sans proratisation, pour l'année entière, sans que son montant soit affecté par la prise des congés, si bien que cette gratification ne pouvait pas entrer dans l'assiette de calcul de l'indemnité de congés payés (conclusions d'appel page 7-8) ; que la cour d'appel a validé le calcul de la salariée après avoir tout au plus rappelé la lettre de l'article 208 susvisé et relevé qu'il ne pouvait « être valablement soutenu que la prime de gratification perçue pour une année entière ne devait être versée et intégrée dans l'assiette de calcul des congés payés qu'après déduction de la part correspondant à la période de congés payés » ; qu'en admettant ainsi l'inclusion de la gratification de fin d'année dans l'assiette de calcul des congés payés sans répondre au moyen de l'employeur pris de ce que la gratification était calculée de façon plus favorable que les prévisions de l'accord collectif et intégrait les périodes de congés payés, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

2/ ALORS QU'il résulte de l'article 209 de l'accord collectif du 22 mars 1982, portant statut du personnel des associations chargées de la gestion des CFA du bâtiment, relevant du CCCA et de l'article L. 3141-22 du code du travail, que pour le calcul de l'indemnité de congés payés, la comparaison à opérer entre l'indemnité calculée en application de la règle du dixième et celle calculée en application de la règle du maintien du salaire, doit être effectuée sur la base du même nombre de jours de congés, sans exclusion de la rémunération des jours fériés et chômés compris dans la durée desdits congés payés ; qu'en l'espèce, l'employeur faisait valoir que le calcul de la salariée était erroné dès lors que pour l'application de la méthode du maintien de salaire, elle décomptait en jours ouvrés le nombre de jours de congés qu'elle avait pris en excluant samedis, dimanches et jours fériés (conclusions d'appel p 6) ; que la Cour d'appel a néanmoins validé son calcul en affirmant que le décompte des sommes qu'elle prétend lui être dues ne contrevient pas aux principes légaux et conventionnels rappelés par le présent arrêt ; qu'en statuant ainsi sans vérifier, bien qu'elle y ait été invitée, si le calcul de la salariée décomptait au titre des congés qu'elle avait pris les samedis et les jours fériés pour le calcul du maintien de salaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 209 de l'accord collectif du 22 mars 1982 et de l'article L. 3141-22 du code du travail ;

3/ ALORS QU'interdiction est faite au juge de dénaturer les écrits ; que le tableau de calcul de la salariée faisait apparaître que pour l'application de la méthode du maintien de salaire, elle avait seulement pris en compte le « nombre de jours ouvrables de congés payés sans les jours fériés » pour déterminer le nombre de jours de congés qu'elle avait pris ; qu'en affirmant que la salariée avait opéré une comparaison « des sommes versées en application de la règle du maintien du salaire et celles qui auraient dues être versées sur la base du rapport 60/30ème, sans déduction des jours fériés tombant pendant les congés », la cour d'appel a dénaturé le tableau de calcul présenté par la salariée, en violation du principe susvisé ;

4/ ALORS QU'en tout état de cause, compte tenu de l'imprécision de sa motivation, qui ne permet pas de s'assurer que les calculs de la salariée, qu'elle a entérinés, avaient été correctement réalisés conformément aux règles découlant de l'article 209 de l'accord collectif du 22 mars 1982 et de l'article L. 3141-22 du code du travail, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné l'Association BTP CFA de Picardie à verser à la salariée les sommes de 3110, 58 euros à titre de rappel de salaires et 622, 11 euros de congés payés afférents, outre une indemnité en application de l'article 700 du Code de procédure civile

AUX MOTIFS QUE « l'article L. 3245-1 du Code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi du 14 juin 2013, applicable aux instances introduites avant le 17 juin 2013, y compris en appel et en cassation, dispose que la prescription des actions en paiement des salaires est de cinq ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ;
Attendu que la prescription est interrompue par la saisine du Conseil de Prud'hommes ;
Que si en principe, l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à une autre, il en va différemment lorsque les deux actions, au cours d'une même instance, concernent l'exécution du même contrat de travail ;

Attendu qu'B... Y... a saisi le Conseil des Prud'hommes le 13 juillet 2012 ; que ses demandes en rappel de primes antérieures au 12 juillet 2007 sont irrecevables comme étant prescrites ;
Que bien que ne l'ayant pas expressément précisé, la salariée a, de toute évidence, tenu compte dans sa requête des règles de prescription telles que ci-dessus ;
Que pour la période postérieure au 12 juillet 2007, c'est une somme de 3 110,58 € brut que l'employeur sera condamné à lui régler, assortie de 622,11 € de congés payés afférents »

ALORS QU'il appartient au juge de motiver sa décision ; que pour déterminer le rappel de salaire dû au titre de l'avancement conventionnel conséquence de la requalification en contrat à durée indéterminée des contrats à durée déterminée initialement conclus par les parties, l'Association BTP CFA versait aux débats un tableau aux termes duquel elle aboutissait à un rappel de salaire dans la limite de la prescription quinquennale de 2702, 54 euros et 540, 51 euros à titre de congés payés afférents (conclusions d'appel p 10) ; que de son côté, Mme Y... versait aux débats un tableau faisant état d'un manque à gagner hors prescription de 5333, 12 euros, tout en sollicitant dans ses écritures un rappel de salaires de 3 110,58 € et 622, 1l € de congés payés afférents ; qu'en faisant droit à la demande de la salariée sans cependant s'expliquer sur la divergence des sommes calculées par les deux parties, ni vérifier le montant des sommes réclamées par la salariée, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné l'association BTP CFA Picardie à verser à la salariée la somme de 300 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive, outre une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile

AUX MOTIFS QUE « si on ne peut contester à quiconque le droit d'ester en justice pour défendre ce qu'il pense être ses droits ou ses intérêts, il est incontestable, en l'espèce, que l'ASSOCIATION BTP CFA PICARDIE a tardé à s'incliner devant une jurisprudence désormais constante en ce qu'elle reconnaît les droits des salariés tels que résultant des dispositions conventionnelles régissant leur statut ;
Que le maintien de sa position par l'employeur a eu pour effet de retarder le règlement à B... Y... des sommes auxquelles elle était légitimement en droit de prétendre ;
Que ce retard a causé à l'intéressée un indéniable préjudice, lequel sera réparé par l'attribution de la somme de 300 € »
1/ ALORS QUE la cassation à intervenir sur le premier moyen entrainera par voie de conséquence la cassation de ce chef de dispositif, en application de l'article 624 du Code de procédure civile ;

2/ ALORS QUE les dommages et intérêts résultant du retard dans l'exécution d'une obligation au paiement d'une somme d'argent ne consistent jamais que dans la condamnation aux intérêts au taux légal, lesquels ne courent que du jour de la sommation de payer ; que le juge ne peut allouer au créancier des dommages et intérêts distincts des intérêts moratoires qu'à la condition de caractériser un préjudice indépendant du retard de paiement ainsi que la mauvaise foi de l'employeur ; qu'en retenant pour allouer à la salariée des dommages et intérêts pour résistance abusive que le maintien de sa position par l'employeur a retardé le règlement des sommes dues à la salariée et que ce retard lui a causé un indéniable préjudice, la cour d'appel a violé l'article 1153 du code civil devenu 1231-6 du Code civil. Moyens produits au pourvoi n° B 17-14.352 par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour l'association BTP CFA Picardie.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné l'Association BTP CFA de Picardie à verser à la salariée la somme de 4080, 27 euros à titre de rappel de congés payés entre 2007 et 2015, d'AVOIR débouté l'Association BTP CFA de Picardie de sa demande de répétition de l'indu au titre d'un trop perçu d'indemnité de congés payés entre 2007 et 2015 et de l'AVOIR condamnée au paiement d'une indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile

AUX MOTIFS QUE « selon les dispositions de l'accord collectif du 22 mars 1982: " Pour une année de travail effectif ou assimilé réalisé au cours de la période de référence légale (du ler juin de l'année précédente au 31 mai de l'année en cours), le personnel enseignant, d'éducation et d'animation bénéficie au total de soixante-dix jours ouvrables ou non de congés.
Ces congés se composent :
-d'une part des congés légaux,
-d'autre part, de congés supplémentaires accordés à chaque membre du personnel enseignant, d'éducation et d'animation en raison de sa participation à la mission d'enseignement assumée par le CFA.
Les congés annuels du personnel enseignant, d'éducation et d'animation sont fixés comme suit :
a) Congés d'été
Les congés sont pris du 13 juillet au soir au 1er septembre au matin.
Par convention, les congés payés légaux se situent obligatoirement à l'intérieur des congés d'été.
b) Congés d'hiver et de printemps
* à l'occasion des fêtes de fin d'année :
Deux semaines de sept jours ouvrables ou non qui seront la semaine comprenant le 25 décembre et la semaine comprenant le 1er janvier.
* à l'occasion des fêtes de Pâques :
Une semaine de sept jours ouvrables ou non qui sera fixée par l'association gestionnaire en fonction des vacances scolaires de l'Académie.
Les congés prévus aux paragraphes a et b ne pourront, par ailleurs, se cumuler avec les jours de congés supplémentaires, notamment d'ancienneté, accordés par la convention collective ni avec une éventuelle augmentation des congés légaux ou conventionnels.
Tout congé supplémentaire ou toute augmentation de congés qu'imposerait la loi ou la convention collective s'imputera donc d'abord sur les congés accordés au présent article" ;
Attendu que selon les dispositions de l'article L 3141- 22 du code du travail, lorsque la durée du congé diffère de celle qui est prévue à l'article L. 3141-3 du même code, l'indemnité de congés payés est calculée, à proportion de la durée du congé effectivement dû selon la règle du 1/10 ème de la rémunération totale perçue par le salarié au cours de la période de référence, à moins qu'elle ne s'avère moins favorable que celle qui aurait été perçue pendant la période de congés si le salarié avait continué à travailler.
Attendu que de la lecture combinée des dispositions qui précède, il résulte pour l'employeur l'obligation, afin de permettre à chaque salarié de bénéficier de l'indemnisation la plus favorable, de calculer l'indemnité de congés payés due à l'intéressé sur la base du rapport 60/30 ème, ce qui semble être admis par l'ASSOCIATION BTP CFA PICARDIE, mais cela sans qu'il y ait lieu, ainsi que le soutient cette dernière, de déduire de cette indemnité la rémunération des jours fériés inclus dans la durée des congés payés.
Attendu s'agissant de l'assiette de calcul de l'indemnité litigieuse, que selon les dispositions de l'article 208 de l'accord collectif du 22 mars 1982 :
« Chacun des membres du personnel enseignant, d'éducation et d'animation reçoit :
a) une gratification de fin d'année dont le montant est fixé à 50% du salaire brut de base servi à l'intéressé au cours du dernier mois de l'année civile et payable avec le salaire de décembre au prorata du nombre de mois de travail effectif ou assimilé assuré dans l'établissement (période de référence : 1er janvier-31 décembre).
En cas de départ avant décembre, le salaire de référence pour le calcul au prorata sera celui du dernier mois complet de présence.
b ) une prime de vacances dont le montant est fixé à 30% du salaire brut de base servi à l'intéressé au titre du mois de juillet, au prorata du nombre de mois de travail effectif ou assimilé assuré dans l'établissement (période de référence : 1er juillet-31 août).
Cette prime est payable avec le salaire de juillet.
En cas de départ avant juillet, le salaire de référence pour le calcul au prorata sera celui du dernier mois complet de présence.
c) Pour les salarié occupés successivement à temps complet et à temps partiel ou inversement au cours de la période de référence :
La gratification de fin d'année et la prime de vacances seront calculées proportionnellement aux périodes d'emploi effectuées à temps plein et à temps partiel » ;
Attendu qu'aux termes de cet article, est mal fondé le raisonnement de l'employeur concluant à un trop perçu de la salariée au titre des congés payés durant la période considérée ; qu'il ne peut en effet être valablement soutenu que la prime de gratification perçue pour une année entière ne devait être versée et intégrée dans l'assiette de calcul des congés payés qu'après déduction de la part correspondant à la période de congés payés ;
Qu'ainsi, la demande de répétition de l'indu formulée par l'ASSOCIATION BTP CFA PICARDIE ne pourra prospérer.
Attendu que l'employeur ne démontre pas que n'aurait eu pour but que de gonfler de manière artificielle le reliquat de congés payés sollicités, la méthode utilisée pour le calcul de ces derniers, et ayant consisté en la comparaison des sommes versées en application de la règle du maintien du salaire et celles qui auraient dues être versées sur la base du rapport 60/30ème, sans déduction des jours fériés tombant pendant les congés et après inclusion de la prime conventionnelle de fin d'année dans l'assiette de calcul ;
Qu'en tout état de cause, le décompte des sommes qu'elle prétend lui être dues, tel qu'il est présenté par Corinne Z..., ne contrevient pas aux principes légaux et conventionnels rappelés par le présent arrêt ;
Attendu en conséquence qu'il y aura lieu d'infirmer la décision du Conseil de Prud'hommes et d'accorder à la salariée le rappel de congés payés sollicité »

1/ ALORS QUE l'employeur faisait valoir que si l'article 208 de l'accord collectif du 22 mars 1982 prévoyait une gratification de fin d'année payée au prorata du nombre de mois de travail effectif ou assimilé, il avait en pratique, et par faveur, payé la gratification de fin d'année sans proratisation, pour l'année entière, sans que son montant soit affecté par la prise des congés, si bien que cette gratification ne pouvait pas entrer dans l'assiette de calcul de l'indemnité de congés payés (conclusions d'appel page 7-8) ; que la cour d'appel a validé le calcul de la salariée après avoir tout au plus rappelé la lettre de l'article 208 susvisé et relevé qu'il ne pouvait « être valablement soutenu que la prime de gratification perçue pour une année entière ne devait être versée et intégrée dans l'assiette de calcul des congés payés qu'après déduction de la part correspondant à la période de congés payés » ; qu'en admettant ainsi l'inclusion de la gratification de fin d'année dans l'assiette de calcul des congés payés sans répondre au moyen de l'employeur pris de ce que la gratification était calculée de façon plus favorable que les prévisions de l'accord collectif et intégrait les périodes de congés payés, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

2/ ALORS QU'il résulte de l'article 209 de l'accord collectif du 22 mars 1982, portant statut du personnel des associations chargées de la gestion des CFA du bâtiment, relevant du CCCA et de l'article L. 3141-22 du code du travail, que pour le calcul de l'indemnité de congés payés, la comparaison à opérer entre l'indemnité calculée en application de la règle du dixième et celle calculée en application de la règle du maintien du salaire, doit être effectuée sur la base du même nombre de jours de congés, sans exclusion de la rémunération des jours fériés et chômés compris dans la durée desdits congés payés ; qu'en l'espèce, l'employeur faisait valoir que le calcul de la salariée était erroné dès lors que pour l'application de la méthode du maintien de salaire, elle décomptait en jours ouvrés le nombre de jours de congés qu'elle avait pris en excluant samedis, dimanches et jours fériés (conclusions d'appel p 6); que la Cour d'appel a néanmoins validé son calcul en affirmant que le décompte des sommes qu'elle prétend lui être dues ne contrevient pas aux principes légaux et conventionnels rappelés par le présent arrêt ; qu'en statuant ainsi sans vérifier, bien qu'elle y ait été invitée, si le calcul de la salariée décomptait au titre des congés qu'elle avait pris les samedis et les jours fériés pour le calcul du maintien de salaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 209 de l'accord collectif du 22 mars 1982 et de l'article L. 3141-22 du code du travail ;

3/ ALORS QU'interdiction est faite au juge de dénaturer les écrits ; que le tableau de calcul de la salariée faisait apparaître que pour l'application de la méthode du maintien de salaire, elle avait seulement pris en compte le « nombre de jours ouvrables de congés payés sans les jours fériés » pour déterminer le nombre de jours de congés qu'elle avait pris; qu'en affirmant que la salariée avait opéré une comparaison « des sommes versées en application de la règle du maintien du salaire et celles qui auraient dues être versées sur la base du rapport 60/30ème, sans déduction des jours fériés tombant pendant les congés », la cour d'appel a dénaturé le tableau de calcul présenté par la salariée, en violation du principe susvisé ;

4/ ALORS QU'en tout état de cause, compte tenu de l'imprécision de sa motivation, qui ne permet pas de s'assurer que les calculs de la salariée, qu'elle a entérinés, avaient été correctement réalisés conformément aux règles découlant de l'article 209 de l'accord collectif du 22 mars 1982 et de l'article L. 3141-22 du code du travail, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné l'Association BTP CFA de Picardie à verser à la salariée les sommes de 2527, 34 euros à titre de rappel de salaires et 505, 47 euros de congés payés afférents, outre une indemnité en application de l'article 700 du Code de procédure civile

AUX MOTIFS QUE « l'article L.3245-1 du Code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi du 14 juin 2013, applicable aux instances introduites avant le 17 juin 2013, y compris en appel et en cassation, dispose que la prescription des actions en paiement des salaires est de cinq ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ;
Attendu que la prescription est interrompue par la saisine du Conseil de Prud'hommes ;
Que si en principe, l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à une autre, il en va différemment lorsque les deux actions, au cours d'une même instance, concernent l'exécution du même contrat de travail ;
Attendu que Corinne Z... a saisi le Conseil des Prud'hommes le 13 juillet 2012 ; que ses demandes en rappel de primes antérieures au 12 juillet 2007 sont irrecevables comme étant prescrites ;
Que bien que ne l'ayant pas expressément précisé, la salariée a, de toute évidence, tenu compte dans sa requête des règles de prescription telles que ci-dessus ;
Que pour la période postérieure au 12 juillet 2007, c'est une somme de 2527, 34 € brut que l'employeur sera condamné à lui régler, assortie de 505, 47 € de congés payés afférents »

ALORS QU'il appartient au juge de motiver sa décision ; que pour déterminer le rappel de salaire dû au titre de l'avancement conventionnel conséquence de la requalification en contrat à durée indéterminée des contrats à durée déterminée initialement conclus par les parties, l'Association BTP CFA versait aux débats un tableau aux termes duquel elle aboutissait à un rappel de salaire dans la limite de la prescription quinquennale de 1927, 05 euros et 385, 41 euros à titre de congés payés afférents (conclusions d'appel p 10) ; que de son côté, Mme Z... versait aux débats un tableau faisant état d'un manque à gagner hors prescription de 6310, 97 euros, tout en sollicitant dans ses écritures un rappel de salaires de 2527, 34 euros et 505, 47 euros de congés payés afférents; qu'en faisant droit à la demande de la salariée sans cependant s'expliquer sur la divergence des sommes calculées par les deux parties, ni vérifier le montant des sommes réclamées par la salariée, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné l'association BTP CFA Picardie à verser à la salariée la somme de 300 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive, outre une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile

AUX MOTIFS QUE « si on ne peut contester à quiconque le droit d'ester en justice pour défendre ce qu'il pense être ses droits ou ses intérêts, il est incontestable, en l' espèce, que l' ASSOCIATIONBTP CFA PICARDIE a tardé à s'incliner devant une jurisprudence désormais constante en ce qu'elle reconnaît les droits des salariés tels que résultant des dispositions conventionnelles régissant leur statut ;
Que le maintien de sa position par l'employeur a eu pour effet de retarder le règlement à Corinne Z... des sommes auxquelles elle était légitimement en droit de prétendre ;
Que ce retard a causé à l'intéressée un indéniable préjudice, lequel sera réparé par l'attribution de la somme de 300 € »

1/ ALORS QUE la cassation à intervenir sur le premier moyen entrainera par voie de conséquence la cassation de ce chef de dispositif, en application de l'article 624 du Code de procédure civile ;

2/ ALORS QUE les dommages et intérêts résultant du retard dans l'exécution d'une obligation au paiement d'une somme d'argent ne consistent jamais que dans la condamnation aux intérêts au taux légal, lesquels ne courent que du jour de la sommation de payer ; que le juge ne peut allouer au créancier des dommages et intérêts distincts des intérêts moratoires qu'à la condition de caractériser un préjudice indépendant du retard de paiement ainsi que la mauvaise foi de l'employeur ; qu'en retenant pour allouer à la salariée des dommages et intérêts pour résistance abusive que le maintien de sa position par l'employeur a retardé le règlement des sommes dues à la salariée et que ce retard lui a causé un indéniable préjudice, la cour d'appel a violé l'article 1153 du code civil devenu 1231-6 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-14351;17-14352
Date de la décision : 27/09/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens, 10 janvier 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 27 sep. 2018, pourvoi n°17-14351;17-14352


Composition du Tribunal
Président : Mme Goasguen (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.14351
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