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26/09/2018 | FRANCE | N°17-19840

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 septembre 2018, 17-19840


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Y... a été engagé par la société BNP Paribas le 26 juin 2007 en qualité de responsable relations institutions financières ; que le 7 juillet 2010, il a signé un contrat de travail avec la société BNP Real Estate, filiale de la société BNP Paribas au sein de laquelle il a été détaché à compter du 18 octobre 2010 ; qu'à compter du 1er janvier 2012, il a été détaché au sein d'une autre filiale de la société BNP Paris, la société BNP Real Estate Investment Se

rvices ; que son contrat de travail prévoyait notamment l'attribution de primes au...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Y... a été engagé par la société BNP Paribas le 26 juin 2007 en qualité de responsable relations institutions financières ; que le 7 juillet 2010, il a signé un contrat de travail avec la société BNP Real Estate, filiale de la société BNP Paribas au sein de laquelle il a été détaché à compter du 18 octobre 2010 ; qu'à compter du 1er janvier 2012, il a été détaché au sein d'une autre filiale de la société BNP Paris, la société BNP Real Estate Investment Services ; que son contrat de travail prévoyait notamment l'attribution de primes au titre du Long Term Incentive Plan (ci-après LTIP) et du Carried Interest (ci-après CI) libérables à échéance sous condition de présence du salarié au moment du paiement, qu'après avoir mis fin au détachement de M. Y... le 31 juillet 2013, la société BNP Paribas l'a licencié le 13 septembre 2013 ; que M. Y... a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ; que le 4 juillet 2016 M. Y... et ces trois sociétés ont signé un protocole d'accord partiel ;

Sur le troisième moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur les deux premiers moyens réunis :

Vu l'article 1178 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, applicable au litige ;

Attendu que pour débouter le salarié de ses demandes au titre du Long Term Incentive Plan et du Carried Interest, l'arrêt retient, concernant le LTIP, que dès lors que le salarié a été dûment informé, en même temps que de son éligibilité à un LTIP, de ce que l'une des conditions était la présence au sein de l'entreprise à la date effective de paiement prévue par l'échéancier, il ne peut prétendre au paiement des sommes correspondantes dès lors que lui avait été notifié son licenciement et, concernant le CI, que, pour les mêmes raisons, le salarié n'est pas fondé à en réclamer le paiement ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la condition est réputée accomplie lorsque c'est le débiteur, obligé sous cette condition, qui en a empêché l'accomplissement et alors qu'elle avait relevé que le salarié, éligible à chacune de ces primes, avait été licencié sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les trois dernières branches des deux premiers moyens réunis :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. Y... de ses demandes au titre du Long Term Incentive Plan et de la prime Carried Interest, l'arrêt rendu le 27 avril 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;

Condamne les sociétés BNP Paribas, BNP Paribas Real Estate et BNP Paribas Real Estate Investment Services aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les sociétés BNP Paribas, BNP Paribas Real Estate et BNP Paribas Real Estate Investment Services à payer à M. Y... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six septembre deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. Y....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt d'AVOIR débouté M. Y... de sa demande tendant à obtenir, à titre principal, la somme de 186 667 euros à titre de paiement des primes de LTIP 2010, 2011 et 2012 et à titre subsidiaire, la somme de 171 500 euros à titre de dommages et intérêts pour perte de chance de percevoir les primes de LTIP 2010,2011, et 2012 ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE : « M. Y... sollicite à ce titre la somme de 186 667 euros au titre des LTIP 2010, 2011 et 2012 ; subsidiairement la somme de 171 500 euros à titre de perte de chance de bénéficier de ces plans. Les sociétés BNP, BNP-RS et BNP-REI font valoir que les règlements des LTIP prévoient deux conditions à la naissance du droit : le caractère positif du résultat net avant impôt du Métier Immobilier en 2013, 2014 et 2015, qui est ici acquis ; la présence du salarié à certaines dates. Ces trois plans correspondent respectivement à des sommes de 100 000 euros pour le premier, 110 000 euros pour le deuxième et 120 000 euros pour le troisième. La cour note que le règlement applicable pour le LTIP 2010 ne lui est pas soumis. En revanche, les dispositions mentionnées ci-après sont communes aux plans LTIP 2011 et LTIP 2012 et M. Y... ne conteste pas qu'elles soient applicables. Aux termes de l'article 7.1 des LTIP, « les collaborateurs ne peuvent pas revendiquer les paiements au titre de leurs allocations individuelles en cas de rupture du contrat de travail par démission ou licenciement, rupture conventionnelle ou prise d'acte, de même qu'en cas de révocation du mandat social, dès lors que la date de notification (...) du licenciement (...) est antérieure à la date effective de paiement prévue par l'échéancier». Les courriers adressés à M. Y... pour les LTIP 2010 et 2011 lui rappellent que son « éligibilité » au plan est « conditionnée au respect des dispositions prévues dans la description jointe et cesserait dès lors que vous les rempliriez plus. De plus, nous vous rappelons que cette éligibilité n'est pas constitutive d'un droit acquis et ne saurait présager d'une allocation ultérieure ». La notification du LTIP 2012 est un peu différente mais fait également référence à un courrier « précisant les modalités de mise en oeuvre de (l')allocation ». Dès lors que M. Y... a été dûment informé, en même temps que de son éligibilité à un LTIP, de ce que l'une des conditions était la présence au sein de l'entreprise à la date effective de paiement prévue par l'échéancier, il ne peut prétendre au paiement des sommes correspondantes dès lors que lui avait été notifié son licenciement et ne peut davantage prétendre à une perte de chance à ce titre, la circonstance du licenciement étant expressément prévue par le règlement, outre la remarque faite plus haut qu'une transaction est intervenue concernant l'indemnisation de ce licenciement. Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point ».

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE : « Attendu que le plan LTIP est soumis à deux conditions : - Le caractère positif du résultat net avant impôt du métier immobilier en 2014 et 2015. – La présence du salarié dans l'entreprise à une date future. Attendu que M. David Y... ne démontre pas que la première condition est remplie. Attendu qu'il ressort de la jurisprudence de la Cour d'appel de Paris que l'acquisition définitive du droit que le plan instaure est différée dans le temps et soumise à une condition de présence du bénéficiaire à des échéances préalablement définies, condition qui n'est pas remplie par M. David Y.... Il sera débouté de sa demande ».

1) ALORS QUE, en application des dispositions de l'article 1178 du code civil, dans sa rédaction alors en vigueur, la condition est réputée accomplie lorsque c'est le débiteur, obligé sous cette condition, qui en a empêché l'accomplissement ; qu'en déboutant M. Y... de sa demande relative aux primes de LTIP pour les années 2010, 2011 et 2012, motif pris qu'il était prévu par le règlement relatif au LTIP que le versement des sommes dues à ce titre était soumis à la condition de présence du bénéficiaire dans l'entreprise jusqu'à la date effective de chacun des paiements, après avoir pourtant constaté que celui-ci avait été licencié sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il résultait que la condition était réputée accomplie, a violé le texte susvisé ;

2) ALORS AU SURPLUS QUE, en retenant, pour débouter M. Y... de sa demande en paiement des sommes relatives au LTIP, que celui-ci avait été dûment informé de l'existence d'une condition de présence, la cour d'appel, qui a statué par un motif inopérant, a derechef violé les dispositions de l'article 1178 du code civil, dans sa rédaction alors en vigueur ;

3) ALORS EN OUTRE QUE en statuant par un tel motif, cependant que les sociétés défenderesses n'ont jamais, à aucun moment, soutenu que l'information préalable de M. Y... le privait de son droit de revendiquer le bénéfice des dispositions de l'article 1178 du code civil, dans sa rédaction alors en vigueur, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes du litige, a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

4) ALORS EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE, en affirmant que M. Y..., dont elle avait constaté que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse, n'était pas fondé à se prévaloir d'un préjudice tiré de la perte de chance de bénéficier des primes de LTIP dès lors que la circonstance du licenciement, en ce compris le licenciement sans cause réelle et sérieuse, était expressément prévue comme privative du bénéfice du LTIP, cependant que les Sociétés BNP PARIBAS, BNP PARIBAS REAL ESTATE et BNP PARIBAS REAL ESTATE INVESTMENT SERVICES n'ont jamais, à aucun moment, soutenu dans leurs écritures que le règlement relatif au LTIP précisait que les sommes ne seraient pas dues en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse lequel priverait le salarié de toute action, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes du litige, a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

5) ALORS SURTOUT QUE, en application des dispositions des articles 1170 et 1174 du code civil, dans leur rédaction alors en vigueur, est nulle comme potestative la condition qui fait dépendre l'exécution de la convention d'un événement qu'il est au pouvoir de l'une ou de l'autre des parties contractantes de faire arriver ou d'empêcher ; qu'en retenant, pour débouter M. Y... de sa demande relative aux primes de LTIP, que la circonstance du licenciement, en ce compris le licenciement sans cause réelle et sérieuse, était prévue par le règlement relatif au LTIP comme privant le bénéficiaire de son droit au versement des sommes correspondantes, cependant qu'une telle clause permettrait au débiteur de l'obligation de s'en libérer par un événement qu'il est seul à pouvoir faire survenir ou empêcher, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

6) ALORS ENFIN QUE, en retenant encore, pour se déterminer comme elle l'a fait, qu'une transaction était intervenue concernant les effets du licenciement, cependant que les sociétés défenderesses ne se sont jamais, à aucun moment, opposées à l'action de M. Y... relative au paiement des primes LTIP ou à la réparation du préjudice subséquent, motif pris que l'accord transactionnel aurait mis fin à tout litige sur ce point, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes du litige, a derechef violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt d'AVOIR débouté M. Y... de sa demande tendant à obtenir, à titre principal, la somme de 100 000 euros à titre de paiement intégral de la prime de « Carried Interest » et à titre subsidiaire, la somme de 100 000 euros au titre de la perte de chance de percevoir la prime de « Carried Interest » ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE : « M. Y... demande, à titre principal, le paiement de la somme de 100 000 euros à titre de « paiement intégral de la prime injustement dénommée de 'Carried Interest' » ; subsidiairement, en l'absence de communication des informations pertinentes, celle de 100 000 euros au titre de cette prime ; à titre plus subsidiaire, la somme de 85 000 euros au titre de la perte de chance de la percevoir. Les sociétés BNP et BNP-REI font valoir qu'elles ne sont pas concernées par cette demande. La société BNP-RS soutient que M. Y... n'a pas droit à la somme qu'il réclame, dès lors que la rémunération en cause est acquise à la date de chaque distribution de la super-performance ou à la date de la liquidation du fonds (en l'occurrence, le fonds 'métier Real Estate'), sous condition de présence à ces dates. Le droit de M. Y... au bénéfice du 'Carried Interest' est prévu au paragraphe V (rémunération) 3 (LTIP - Carried Interest) de son contrat de travail. Il n'est pas contesté que le plan en cause est le plan d'intéressement collectif aux résultats des fonds du 'Métier BNP Paribas Real Estate Investment Management / Plan Next Estate Income Fund' en date du 1er octobre 2011. Aux termes de l'article 6.1 de ce plan, l'égibilité « à l'intéressement défini au titre de ce plan cesse dès lors que le Collaborateur Eligible n'a pas été de manière continue depuis la date de l'allocation et jusqu'à la date effective de chacun des paiements, sous contrat de travail au sein du Groupe BNP Paribas. En conséquence, les Collaborateurs Eligibles ne peuvent En conséquence, les Collaborateurs Eligibles ne peuvent pas revendiquer les Paiements en cas de rupture du contrat de travail par démission, licenciement, rupture conventionnelle ou prise d'acte (...) » (souligné par la cour). Pour les mêmes raisons que celles mentionnées plus haut, M. Y... n'est donc pas fondé à réclamer le paiement du carried interest non plus que la perte de chance de le percevoir et le jugement entrepris sera confirmé à cet égard ».

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE : « Vu l'article 6.1 du règlement du fond « Carried Interest ». ‘'6.1 ? Départ du Groupe BNP PARIBAS ; L'éligibilité à l'Intéressement défini au titre de ce Plan cesse dès lors que le Collaborateur éligible n'a pas été de manière continue depuis la date de l'allocation et jusqu'à la date effective de chacun des paiements, sous contrat de travail au sein du Groupe BNP PARIBAS. En conséquence, les Collaborateurs Eligibles ne peuvent pas revendiquer les paiements en cas de rupture du contrat de travail par démission, licenciement, rupture conventionnelle ou prise d'acte, de même qu'en cas de révocation du mandat social dès lors que la date de notification de la démission, du licenciement, de la rupture conventionnelle, de la prise d'acte ou de la date de révocation du mandat social est antérieure à la date effective de paiement. Aucune réallocation des quote-parts ainsi perdue ne sera effectuée au bénéfice des autres participants. Attendu qu'il ressort de la rédaction de ce texte que la demande de M. David Y... n'est pas fondée. Il en sera déboutée ».

1) ALORS QUE, en application des dispositions de l'article 1178 du code civil, dans sa rédaction alors en vigueur, la condition est réputée accomplie lorsque c'est le débiteur, obligé sous cette condition, qui en a empêché l'accomplissement ; qu'en déboutant M. Y... de sa demande relative à la prime de « Carried Interest » motif pris qu'il était prévu par le règlement relatif au « Carried Interest » que le versement des sommes dues à ce titre était soumis à la condition de présence du bénéficiaire dans l'entreprise jusqu'à la date effective de chacun des paiements, après avoir pourtant constaté que celui-ci avait été licencié sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il résultait que la condition était réputée accomplie, a violé le texte susvisé ;

2) ALORS AU SURPLUS QUE, en retenant, pour débouter M. Y... de sa demande en paiement de la prime de « Carried Interest » que celui-ci avait été dûment informé de l'existence d'une condition de présence, la cour d'appel, qui a statué par un motif inopérant, a derechef violé les dispositions de l'article 1178 du code civil, dans sa rédaction alors en vigueur ;

3) ALORS EN OUTRE QUE en statuant par un tel motif, cependant que les sociétés défenderesses n'ont jamais, à aucun moment, soutenu que l'information préalable de M. Y... le privait de son droit de revendiquer le bénéfice des dispositions de l'article 1178 du code civil, dans sa rédaction alors en vigueur, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes du litige, a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

4) ALORS EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE, en affirmant que M. Y..., dont elle avait constaté que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse, n'était pas fondé à se prévaloir d'un préjudice tiré de la perte de chance de percevoir la prime de « Carried Interest » dès lors que la circonstance du licenciement, en ce compris le licenciement sans cause réelle et sérieuse, était expressément prévue comme privative du bénéfice du « Carried Interest », cependant que les Sociétés BNP PARIBAS, BNP PARIBAS REAL ESTATE et BNP PARIBAS REAL ESTATE INVESTMENT SERVICES n'ont jamais, à aucun moment, soutenu dans leurs écritures que le règlement relatif au « Carried Interest » précisait que les sommes ne seraient pas dues en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse lequel priverait le salarié de toute, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes du litige, a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

5) ALORS SURTOUT QUE, en application des dispositions des articles 1170 et 1174 du code civil, dans leur rédaction alors en vigueur, est nulle comme potestative la condition qui fait dépendre l'exécution de la convention d'un événement qu'il est au pouvoir de l'une ou de l'autre des parties contractantes de faire arriver ou d'empêcher ; qu'en retenant, pour débouter M. Y... de sa demande au titre de la perte de chance de percevoir la prime de « Carried Interest », que la circonstance du licenciement, en ce compris le licenciement sans cause réelle et sérieuse, était prévue par le règlement relatif au « Carried Interest » comme privant le bénéficiaire de son droit au versement des sommes correspondantes, cependant qu'une telle clause permet au débiteur de l'obligation de s'en libérer par un événement qu'il est seul à pouvoir faire survenir ou empêcher, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

6) ALORS ENFIN QUE, en retenant encore, pour se déterminer comme elle l'a fait, qu'une transaction était intervenue concernant les effets du licenciement, cependant que les sociétés défenderesses ne se sont jamais, à aucun moment, opposées à l'action de M. Y... au titre de la perte de chance de percevoir la prime de « Carried Interest » motif pris que l'accord transactionnel aurait mis fin à tout litige sur ce point, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes du litige, a derechef violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt d'AVOIR refusé la mise en cause des Sociétés BNP PARIBAS REAL ESTATE et BNP PARIBAS REAL ESTATE INVESTMENT SERVICES ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE : « Les sociétés BNP, BNP-RS et BNP-REI contestent devoir être condamnées solidairement au paiement des sommes allouées à M. Y..., comme celui-ci le revendique. Plusieurs observations doivent être faites dans cette perspective. Aux termes du protocole d'accord partiel déjà mentionné, il est acquis que restaient « exclusivement en litige les demandes (de M. Y... discutées ci-dessus) (...) à l'encontre de BNP Paribas, BNP Paribas Real Estate et BNP Paribas Real Estate Investment Services ». Rien dans le protocole ne fait la distinction entre l'une ou l'autre de ces sociétés. Il n'est toutefois pas possible de tirer de cette seule formulation un argument déterminant pour établir la solidarité entre les trois entreprises. Plus significatif est le mélange auquel les sociétés se livrent, que ce soit dans la rédaction des contrats, l'attribution des plans et autres, ou la rédaction du protocole ou des conclusions. M. Y... n'a pas signé de contrat de détachement avec la société BNP, son employeur initial (le contrat initial, daté 26 juin 2007, est à en-tête « BNP PARIBAS » d'ailleurs, et seule une mention en petits caractères en bas de page mentionne « BNP PARIBAS SA »). Une lettre, en date du 25 octobre 2010, lui a été adressée, par BNP Paribas (mêmes remarques), confirmant à M. Y... son détachement au sein de BNP-RS, pour une durée initiale, au-delà duquel il pouvait y être mis fin soit « d'un commun accord entre BNP Paribas SA et BNP Paribas Real Estate », soit à l'initiative du salarié. La lettre précise également que « les modalités de rupture (du) contrat de travail (...) demeureront celles en vigueur au sein de BNP Paribas SA ». En revanche, il a signé un contrat avec la société BNP Paribas Real Estate (BNP RS), le 07 juillet 2010. Puis, le 30 décembre 2011, M. Y... a signé un contrat avec la société BNP Paribas Real Estate Investment Services (BNP-REI), dans « le cadre de la mobilité au sein de la société BNP PARIBAS REAL ESTATE ». Ce contrat prévoit expressément le transfert du contrat de travail avec BNP-RS à BNP-REI à compter du 1er janvier 2012. C'est d'ailleurs la société BNP-REI qui continuera de le rémunérer jusqu'à la date de cessation du travail de M. Y... au sein du 'groupe BNP'. En fait, il est permis de considérer que la confusion est délibérément entretenue entre le 'Groupe Paribas', auquel appartiennent les trois sociétés, la société BNP Paribas SA, employeur initial de M. Y..., la société BNP Paribas Real Estate et la société BNP Paribas Real Estate Investment Services au sein desquelles il a été détaché. Il est révélateur que le protocole d'accord partiel ait été signé par les trois sociétés concernées, étant ici souligné que BNP-RS et BNP-REI étaient représentés par la même personne physique. La formulation même du protocole est éclairante : « BNP Paribas SA et ses filiales BNP Paribas Real Estate et BNP Paribas Real Estate Investment Services reconnaissent (...) l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement de M. Y... ». Il est tout aussi symptomatique que les trois sociétés se soient présentées devant la cour représentées par un seul avocat, ce qui est certes leur droit, mais en présentant un jeu de conclusions unique alors même qu'elles entendaient s'opposer à la solidarité entre elles demandée par M. Y.... Il est cependant constant que M. Y... a été embauché initialement puis licencié par la société BNP Paribas SA. Il est également acquis que, s'il a pu être invoqué par M. Y..., - à juste titre vu la formulation du protocole qui vient d'être rappelé - que telle ou telle société du groupe BNP pouvait être responsable du licenciement dont il s'estimait injustement victime, le protocole d'accord partiel intervenu a réglé la question du licenciement et prévu l'indemnisation de M. Y.... Il résulte par ailleurs des considérations qui précèdent cette discussion, que les réclamations de M. Y... concernant le plan LTTP et le 'carried interest', qui concernaient directement la société BNP Paribas Real Estate Investment (BNP-REI) pour le premier et la société Real Estate (BNP-RS) pour le second, ont été rejetées. La cour considère que dès lors, quel que soit le flou entretenu par le 'groupe BNP' dans la rédaction des contrats, du protocole transactionnel ou des conclusions soumises à la cour, M. Y... n'est pas fondé à invoquer la solidarité entre les trois sociétés BNP, BNP-RS et BNP-REI. Il sera débouté de sa demande à cet égard et les condamnations décidées plus haut seront prononcées exclusivement à l'encontre de la BNP ».

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE : « Attendu que M. David Y... a été embauché et licencié par la société BNP PARIBAS et que les contrats du 18 octobre 2010 et du 1èr janvier 2012 avec BNP PARIBAS REAL ESTATE et BNP PARIBAS REAL ESTATE INVESTMENT SERVICES sont des contrats de détachement qui suspendent le premier contrat de travail mais ne le remplacent pas. II sera jugé que l'employeur est BNP PARIBAS S.A. En conséquence, les sociétés BNP PARIBAS REAL ESTATE et BNP PARIBAS REAL INVESTMENT devront être mises hors de cause ».

1) ALORS, QUE, par application des dispositions de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation à intervenir du chef du premier et du deuxième moyen, ou l'un seul d'entre eux, emportera par voie de conséquence, la censure de l'arrêt en ce qu'il aurait mis hors de cause les Sociétés BNP PARIBAS REAL ESTATE et BNP PARIBAS REAL ESTATE INVESTMENT SERVICES ;

2) ALORS EN OUTRE QUE l'existence d'une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité, sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; qu'en l'espèce, M. Y... avait soutenu et démontré, pièces à l'appui, et tel que la cour d'appel l'a relevé, que les Sociétés BNP PARIS REAL ESTATE et BNP PARIBAS REAL ESTATE INVESTMENT SERVICES devaient nécessairement être mises en cause dès lors qu'elles avaient pleinement exercé toutes les prérogatives d'un employeur, qu'elles avaient directement participé à son licenciement, en exerçant directement leur pouvoir disciplinaire ce qui était confirmé par la circonstance qu'elles avaient co-signé, avec la Société BNP PARIBAS, l'accord transactionnel relatif au licenciement mais encore qu'il ne pouvait être mis fin au détachement qu'avec l'accord exprès de l'une ou l'autre Société ; qu'en se bornant à affirmer, pour refuser de mettre en cause les Sociétés BNP PARIS REAL ESTATE et BNP PARIBAS REAL ESTATE INVESTMENT SERVICES, que seule la Société BNP PARIBAS avait engagé et licencié M. Y..., sans rechercher, ainsi cependant qu'elle y était invitée, si les Sociétés BNP PARIS REAL ESTATE et BNP PARIBAS REAL ESTATE INVESTMENT SERVICES n'étaient pas co-employeurs de M. Y..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article L. 1221-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-19840
Date de la décision : 26/09/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 27 avril 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 sep. 2018, pourvoi n°17-19840


Composition du Tribunal
Président : Mme Goasguen (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Marc Lévis

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.19840
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