La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/09/2018 | FRANCE | N°16-21825

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 26 septembre 2018, 16-21825


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que les 16 juillet 1990 et 28 février 2006, M. Robert Y... et son épouse, Mme B..., ont cédé à M. Eric Y... des parts sociales qu'ils détenaient dans le GAEC de [...] ; que le 28 février 2006, le GAEC a été transformé en EARL, M. Eric Y... en étant désigné gérant ; que par arrêt devenu irrévocable du 2 janvier 2012, une cour d'appel a prononcé l'annulation des cessions des 16 juillet 1990 et 28 février 2006 ; que le 7 mars 2012, l'assemblée générale de l'EARL de

[...] a décidé la révocation de M. Eric Y... de ses fonctions de gérant, nomm...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que les 16 juillet 1990 et 28 février 2006, M. Robert Y... et son épouse, Mme B..., ont cédé à M. Eric Y... des parts sociales qu'ils détenaient dans le GAEC de [...] ; que le 28 février 2006, le GAEC a été transformé en EARL, M. Eric Y... en étant désigné gérant ; que par arrêt devenu irrévocable du 2 janvier 2012, une cour d'appel a prononcé l'annulation des cessions des 16 juillet 1990 et 28 février 2006 ; que le 7 mars 2012, l'assemblée générale de l'EARL de [...] a décidé la révocation de M. Eric Y... de ses fonctions de gérant, nommé M. Robert Y... gérant et décidé de la transformation de la société en SCEA (la société) ; que le 8 août 2013, M. Eric Y... a assigné la société en paiement de la somme de 136 563,83 euros au titre du remboursement du solde créditeur de son compte courant d'associé, tel qu'il était établi au 31 décembre 2011 ; que par une résolution prise lors de sa réunion du 20 août 2013, l'assemblée générale de la société a décidé de débiter le compte courant de M. Eric Y... du montant des dividendes perçus en exécution des décisions des assemblées générales annuelles antérieures ; que la société ayant été placée en redressement judiciaire, un plan de redressement par continuation a été homologué, M. X... étant désigné représentant des créanciers puis commissaire à l'exécution du plan ;

Sur le premier moyen :

Vu l'article 1382, devenu 1240, du code civil ;

Attendu que pour juger que la première résolution de l'assemblée générale de la société du 20 août 2013, en ce qu'elle arrête le compte courant de M. Éric Y..., caractérise un abus de majorité et doit par conséquent être annulée, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés qu'aussitôt après l'assignation délivrée par M. Eric Y... le 8 août 2013, cette assemblée générale ordinaire a décidé de débiter le compte courant de ce dernier du montant des dividendes perçus en exécution des décisions des assemblées générales annuelles antérieures, ce qui a abouti à le priver des bénéfices distribués les années où la société était bénéficiaire, voire de ses rémunérations dès lors que le détail des sommes débitées n'a pas été justifié par la société ;

Qu'en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à établir que la décision litigieuse était contraire à l'intérêt social et avait été prise dans l'unique dessein de favoriser les associés majoritaires au détriment des associés minoritaires, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Et sur le second moyen, pris en sa sixième branche :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que pour fixer à la somme de 136 563,83 euros la créance de M. Éric Y... au passif de la société, l'arrêt retient que ce dernier produit des extraits du grand livre comptable de la société du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2011 qui établissent qu'à cette dernière date le compte courant s'élevait bien à la somme de 136 563,83 euros, somme validée lors de l'approbation des comptes par l'assemblée générale du 29 juin 2012 ;

Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la société qui soutenait que le solde du compte courant de M. Eric Y... au 19 septembre 2012, date de la dernière écriture enregistrée sur ce compte avant la prise en compte de la nouvelle répartition des résultats, s'élevait à la somme de 107 203,19 euros, la cour d'appel a méconnu les exigences du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 25 avril 2016, entre les parties, par la cour d'appel d'Agen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;

Condamne M. Eric Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer la somme globale de 3 000 euros à la SCEA de [...] et à M. X..., en sa qualité de représentant des créanciers et de commissaire à l'exécution du plan ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six septembre deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.

Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour la société de [...] et M. X..., ès qualités.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR annulé la première résolution de l'assemblée générale de la SCEA de [...] du 20 août 2013 en ce qu'elle arrête le compte courant d'Éric Y... ;

AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE, sur le montant du compte courant d'Éric Y..., en premier lieu que le 29 juin 2012, l'assemblée générale annuelle de la SCEA de [...] a approuvé les comptes de l'exercice 2011, arrêtés au 31 décembre 2011 ; que selon le grand livre général, à la clôture de cet exercice, Éric Y... disposait d'un compte courant créditeur de 136 563,83 euros ; que le quitus donné par cette assemblée générale pour les comptes de l'exercice clôturé au 31 décembre 2011 n'a pas fait obstacle à la modification du compte courant d'Éric Y... pour des faits intervenus postérieurement à cette date, c'est à dire l'annulation des cessions par l'arrêt du 2 janvier 2012, sous réserve que cette modification soit justifiée ; qu'en deuxième lieu, aux termes de l'article 1844- du code civil : « la part de chaque associé dans les bénéfices et sa contribution aux pertes se déterminent à proportion de sa part dans le capital social et la part de l'associé qui n'a apporté que son industrie est égale à celle de l'associé qui a le moins apporté, le tout sauf clause contraire » ; que les statuts du GAEC de [...] stipulaient : « Article 13 : rémunération du travail : CHAQUE associé reçoit une rémunération de son travail. Elle est fixée chaque année par décision des associés sans pouvoir excéder 6 SMIC par mois. Dans cette limite, elle constitue une charge pour le groupement. Article 19 : affectation et répartition des résultats : Chaque année les associés, par décision collective prise suivant les modalités prévues à l'article 16, procèdent à l'affectation des résultats. Les associés peuvent : [...] fixer la part de bénéfice affectée à la rémunération du capital qui ne pourra être supérieure à 95 % des bénéfices et sera répartie entre les associés au prorata des parts sociales détenues par chacun d'eux, [
] décider de l'affectation du solde bénéficiaire. Les résultats entre associés sont répartis en tenant compte des rémunérations régulièrement attribuées aux associés exerçant une activité dans le GAEC » ; que le 2 décembre 1996, une assemblée générale extraordinaire du GAEC de [...] a pris la décision suivante, à l'unanimité : « Conformément aux dispositions de l'article 19 des statuts relatifs à l'affectation et répartition des résultats, l'assemblée des associés, décide, à compter de l'exercice social ouvert le r janvier 1996, de répartir les résultats bénéficiaires par parts égales entre les associés, savoir : Mme Y... Simone : 33,33 % ; M. Y... Éric : 33,33 % ; M. Y... Jean-Louis : 33,33 % » ; que l'examen des procès-verbaux des assemblées générales ordinaires annuelles produits aux débats par le demandeur (qui ne comprennent pas toutes les années) permet de constater qu'en application de cette clause, les associés ont toujours décidé de procéder à une répartition du résultat indépendamment du nombre de parts sociales détenues par chacun d'eux (sauf pour les années où l'assemblée a décidé un report à nouveau) ; qu'une telle décision n'est ni illicite ni léonine et correspond à la volonté de l'ensemble des associés étant rappelé que pendant toutes ces années, Éric Y... se consacrait à la gestion de l'exploitation ; qu'ainsi : « 1) assemblée générale du 30 juin 1998 : Simone Y... : 3.566 parts, Éric Y... : 2.056 parts, Jean-Louis Y... : 235 parts, bénéfice : 583 068,10 F, distribution expresse par parts égales : 33,33 % pour chaque associé, fixation de la rémunération du travail : 1 SMIC brut par mois pour chaque associé ; 2) assemblée générale du 15 juin 1999 : Simone Y... : 3.566 parts, Éric Y... : 2.056 parts, Jean-Louis Y... : 235 parts, bénéfice : 325 107,91 F, distribution expresse par parts égales: 33,33 % pour chaque associé, fixation de la rémunération du travail : 1 SMIC brut par mois pour chaque associé ; 3) assemblée générale du 15 mai 2000 : Simone Y... : 3.566 parts, Éric Y... : 2.056 parts, Jean-Louis Y... : 235 parts, bénéfice : 275 168,64 F, distribution expresse par parts égales : 33,33 % pour chaque associé, fixation de la rémunération du travail : 1 SMIC brut par mois pour chaque associé ; 4) assemblée générale du 11 mai 2001 : Simone Y... : 3 566 parts, Éric Y... : 2.056 parts, Jean-Louis Y... : 235 parts, bénéfice : 182 095,32 F, affectation du résultat au compte "report à nouveau", sans distribution, fixation de la rémunération du travail : 85 690,86 F pour chaque associé ; 5) assemblée générale du 5 mai 2002 : Simone Y... : 3 566 parts, Éric Y... : 2.056 parts, Jean-Louis Y... : 235 parts, bénéfice : 87 673,01 F, affectation du résultat au compte "report à nouveau", sans distribution, fixation de la rémunération du travail : 13.698 € pour chaque associé ; 6) assemblée générale du 25 avril 2003 : Simone Y... : 3.566 parts, Éric Y... : 2 056 parts, Jean-Louis Y... : 235 parts, bénéfice 24.609,95 €, distribution expresse par parts égales : 33,33 % pour chaque associé, affectation du solde créditeur du report à nouveau par parts égales pour chaque associé, fixation de la rémunération du travail : 1 150 € par mois pour chaque associé ; 7) assemblée générale du 24 juin 2004 : Simone Y... : 3.566 parts, Éric Y... : 2.056 parts, Jean-Louis Y... : 235 parts, bénéfice : 31.205,40 €, distribution expresses par parts égales : 33,33 % pour chaque associé, fixation de la rémunération du travail 1 150 € par mois pour chaque associé ; 8) assemblée générale du 20 octobre 2005 : Simone Y... : 3.566 parts, Éric Y... : 2.056 parts, Jean-Louis Y... : 235 parts, bénéfice : 10 850,97 €, distribution expresse par parts égales : 33,33 % pour chaque associé, fixation de la rémunération du travail : 1 150 € par mois pour chaque associé ; 9) assemblée générale du 4 août 2006 : Simone Y... : 1.283 parts, Éric Y... : 3.291 parts, Robert Y... : 1.283 parts, bénéfice : 13 821,15 €, distribution expresse par parts égales : 33,33 % pour chaque associé, fixation de la rémunération du travail : 1 150 € par mois pour Éric Y... » ; que, par conséquent, l'annulation des cessions de parts sociales n'a pas eu pour effet de permettre à l'assemblée générale ordinaire, le 20 août 2013, d'ailleurs aussitôt après l'assignation, de débiter le compte courant d'Éric Y... du montant des dividendes perçus en exécution des décisions clos assemblées générales annuelles antérieures, ce qui aboutit à le priver des bénéfices distribués les années où la société était bénéficiaire, voire même de ses rémunérations dès lors que le détail des sommes débitées n'a pas été justifié par la SCEA de [...], étant constaté que malgré l'annulation des cessions, Eric Y... a toujours été propriétaire de 291 parts sociales ; que la première résolution de cette assemblée générale caractérise ainsi un abus de majorité et sera par conséquent annulée ; qu'il en résulte que la défenderesse doit être condamnée à payer le montant du compte courant effectivement créditeur réclamé, étant rappelé qu'un compte courant est, par principe, remboursable à tout moment ;

ALORS QUE constitue un abus de majorité la décision prise contrairement à l'intérêt social et dans l'unique dessein de favoriser les membres de la majorité au détriment de la minorité ; que pour prononcer la nullité pour abus de majorité de la résolution de l'assemblée générale de la SCEA de [...] du 20 août 2013 en ce qu'elle arrête le compte courant d'Éric Y..., les juges du fond se sont bornés à contester les calculs opérés par l'assemblée générale, quand la décision sociale, dans son principe, ne faisait que tirer les conséquences de la résolution des cessions des parts sociales à Éric Y... ; qu'en statuant ainsi, sans caractériser en quoi la décision aurait été prise contrairement à l'intérêt social et dans l'unique dessein de favoriser les membres de la majorité au détriment de la minorité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR fixé la créance d'Éric Y... au passif de la SCEA de [...] à la somme de 136 563,83 euros ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE M. Éric Y... rappelle à bon droit que, selon une jurisprudence constante, un compte courant d'associé se définit comme une avance consentie par celui-ci à la société et donc remboursable à tout moment par elle à la condition que la preuve dudit compte soit rapportée par la production d'éléments comptables ; qu'en l'espèce l'intéressé produit des extraits du grand livre comptable de la société de [...] du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2011 qui établissent qu'à cette dernière date le compte courant s'élevait bien à la somme de 136 563,83 euros (pièce n° 21), somme qui sera, validée lors de l'approbation des comptes par l'assemblée générale du 29 juin 2012 (pièce n° 30) ; qu'à cet égard le grand livre général au 31 décembre 2013 que produit l'appelant est sans valeur probante en ce qu'il entérine la décision de l'assemblée générale tenue le 20 août 2013, c'est-à-dire après l'éviction d'Éric Y..., qui est précisément l'objet du litige ; que, sans contester que pour la période comprise entre 1996 et 2009 les dividendes ont été divisés en trois parts égales et donc sans tenir compte du nombre de parts détenues par chaque associé, la SCEA de [...] soutient à l'appui de son appel que tel n'était pas le cas pour la période antérieure à 1996 et pour la période postérieure à 2009 durant lesquelles tes dividendes étaient calculés au prorata des parts sociales ; que c'est en vain que l'intimé conclut à l'irrecevabilité de cette demande en ce qu'il n'est fondé à invoquer ni l'autorité de la chose jugée par la cour de céans le 2 janvier 2012 à défaut d'identité de parties avec la présente instance, ni le défaut de qualité de la SCEA à laquelle il appartient, à l'évidence, de contester, le cas échéant, la demande de paiement d'un compte courant d'associé ; que, sur le fond, la demande incidente de la SCEA sera rejetée, faute par elle de rapporter la preuve de ses affirmations quant aux modalités de paiement des dividendes pour les périodes qu'elle évoque ; sans qu'il y ait lieu d'ordonner une mesure d'instruction qui ne peut avoir pour objet de pallier la carence d'une partie dans l'administration de la preuve qui lui incombe ; qu'il ressort en outre du grand livre journal que, comme le fait valoir l'intimé., son compte courant n'était pas exclusivement approvisionné par les dividendes mais aussi notamment par sa rémunération peur son activité au sein de la société et sur laquelle la résolution des cessions de parts qui fonde la demande de cette dernière pour s'opposer au paiement est sans incidence ; qu'au surplus la SCEA ne justifie pas que ce paiement génère pour elle un préjudice, puisque, en tout état de cause, il lui incombe de régler les dividendes à ses associés, quels qu'ils soient ; qu'il convient, au vu de l'ensemble de ces éléments de confirmer le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a prononcé une condamnation au paiement à l'encontre de la SCEA, celle-ci ayant été, depuis fors placée en redressement judiciaire le 14 septembre 2014 sur déclaration de son gérant ;

ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE, sur le montant du compte courant d'Éric Y..., en premier lieu que le 29 juin 2012, l'assemblée générale annuelle de la SCEA de [...] a approuvé les comptes de l'exercice 2011, arrêtés au 31 décembre 2011 ; que selon le grand livre général, à la clôture de cet exercice, Éric Y... disposait d'un compte courant créditeur de 136 563,83 euros ; que le quitus donné par cette assemblée générale pour les comptes de l'exercice clôturé au 31 décembre 2011 n'a pas fait obstacle à la modification du compte courant d'Éric Y... pour des faits intervenus postérieurement à cette date, c'est à dire l'annulation des cessions par l'arrêt du 2 janvier 2012, sous réserve que cette modification soit justifiée ; qu'en deuxième lieu, aux termes de l'article 1844- du code civil : « la part de chaque associé dans les bénéfices et sa contribution aux pertes se déterminent à proportion de sa part dans le capital social et la part de l'associé qui n'a apporté que son industrie est égale à celle de l'associé qui a le moins apporté, le tout sauf clause contraire » ; que les statuts du GAEC de [...] stipulaient : « Article 13 : rémunération du travail : CHAQUE associé reçoit une rémunération de son travail. Elle est fixée chaque année par décision des associés sans pouvoir excéder 6 SMIC par mois. Dans cette limite, elle constitue une charge pour le groupement. Article 19 : affectation et répartition des résultats : Chaque année les associés, par décision collective prise suivant les modalités prévues à l'article 16, procèdent à l'affectation des résultats. Les associés peuvent : [...] fixer la part de bénéfice affectée à la rémunération du capital qui ne pourra être supérieure à 95 % des bénéfices et sera répartie entre les associés au prorata des parts sociales détenues par chacun d'eux, [
] décider de l'affectation du solde bénéficiaire. Les résultats entre associés sont répartis en tenant compte des rémunérations régulièrement attribuées aux associés exerçant une activité dans le GAEC » ; que le 2 décembre 1996, une assemblée générale extraordinaire du GAEC de [...] a pris la décision suivante, à l'unanimité : « Conformément aux dispositions de l'article 19 des statuts relatifs à l'affectation et répartition des résultats, l'assemblée des associés, décide, à compter de l'exercice social ouvert le r janvier 1996, de répartir les résultats bénéficiaires par parts égales entre les associés, savoir : Mme Y... Simone : 33,33 % ; M. Y... Éric : 33,33 % ; M. Y... Jean-Louis : 33,33 % » ; que l'examen des procès-verbaux des assemblées générales ordinaires annuelles produits aux débats par le demandeur (qui ne comprennent pas toutes les années) permet de constater qu'en application de cette clause, les associés ont toujours décidé de procéder à une répartition du résultat indépendamment du nombre de parts sociales détenues par chacun d'eux (sauf pour les années où l'assemblée a décidé un report à nouveau) ; qu'une telle décision n'est ni illicite ni léonine et correspond à la volonté de l'ensemble des associés étant rappelé que pendant toutes ces années, Éric Y... se consacrait à la gestion de l'exploitation ; qu'ainsi : « 1) assemblée générale du 30 juin 1998 : Simone Y... : 3.566 parts, Éric Y... : 2.056 parts, Jean-Louis Y... : 235 parts, bénéfice : 583.068,10 F, distribution expresse par parts égales : 33,33 % pour chaque associé, fixation de la rémunération du travail : 1 SMIC brut par mois pour chaque associé ; 2) assemblée générale du 15 juin 1999 : Simone Y... : 3.566 parts, Éric Y... : 2.056 parts, Jean-Louis Y... : 235 parts, bénéfice : 325 107,91 F, distribution expresse par parts égales: 33,33 % pour chaque associé, fixation de la rémunération du travail : 1 SMIC brut par mois pour chaque associé ; 3) assemblée générale du 15 mai 2000 : Simone Y... : 3.566 parts, Éric Y... : 2.056 parts, Jean-Louis Y... : 235 parts, bénéfice : 275 168,64 F, distribution expresse par parts égales : 33,33 % pour chaque associé, fixation de la rémunération du travail : 1 SMIC brut par mois pour chaque associé ; 4) assemblée générale du 11 mai 2001 : Simone Y... : 3 566 parts, Éric Y... : 2.056 parts, Jean-Louis Y... : 235 parts, bénéfice : 182 095,32 F, affectation du résultat au compte "report à nouveau", sans distribution, fixation de la rémunération du travail : 85 690,86 F pour chaque associé ; 5) assemblée générale du 5 mai 2002 : Simone Y... : 3 566 parts, Éric Y... : 2.056 parts, Jean-Louis Y... : 235 parts, bénéfice : 87 673,01 F, affectation du résultat au compte "report à nouveau", sans distribution, fixation de la rémunération du travail : 13 698 € pour chaque associé ; 6) assemblée générale du 25 avril 2003 : Simone Y... : 3.566 parts, Éric Y... : 2 056 parts, Jean-Louis Y... : 235 parts, bénéfice 24 609,95 €, distribution expresse par parts égales : 33,33 % pour chaque associé, affectation du solde créditeur du report à nouveau par parts égales pour chaque associé, fixation de la rémunération du travail : 1 150 € par mois pour chaque associé ; 7) assemblée générale du 24 juin 2004 : Simone Y... : 3.566 parts, Éric Y... : 2.056 parts, Jean-Louis Y... : 235 parts, bénéfice : 31.205,40 €, distribution expresses par parts égales : 33,33 % pour chaque associé, fixation de la rémunération du travail 1 150 € par mois pour chaque associé ; 8) assemblée générale du 20 octobre 2005 : Simone Y... : 3.566 parts, Éric Y... : 2.056 parts, Jean-Louis Y... : 235 parts, bénéfice : 10 850,97 €, distribution expresse par parts égales : 33,33 % pour chaque associé, fixation de la rémunération du travail : 1 150 € par mois pour chaque associé ; 9) assemblée générale du 4 août 2006 : Simone Y... : 1.283 parts, Éric Y... : 3.291 parts, Robert Y... : 1.283 parts, bénéfice : 13 821,15 €, distribution expresse par parts égales : 33,33 % pour chaque associé, fixation de la rémunération du travail : 1 150 € par mois pour Éric Y... » ; que, par conséquent, l'annulation des cessions de parts sociales n'a pas eu pour effet de permettre à l'assemblée générale ordinaire, le 20 août 2013, d'ailleurs aussitôt après l'assignation, de débiter le compte courant d'Éric Y... du montant des dividendes perçus en exécution des décisions clos assemblées générales annuelles antérieures, ce qui aboutit à le priver des bénéfices distribués les années où la société était bénéficiaire, voire même de ses rémunérations dès lors que le détail des sommes débitées n'a pas été justifié par la SCEA de [...], étant constaté que malgré l'annulation des cessions, Eric Y... a toujours été propriétaire de 291 parts sociales ; que la première résolution de cette assemblée générale caractérise ainsi un abus de majorité et sera par conséquent annulée ; qu'il en résulte que la défenderesse doit être condamnée à payer le montant du compte courant effectivement créditeur réclamé, étant rappelé qu'un compte courant est, par principe, remboursable à tout moment ;

1) ALORS QUE celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver ; que pour s'opposer à la demande en remboursement de son compte courant par Éric Y..., la société de [...] faisait valoir, dans ses écritures d'appel (pp. 11-12), qu'il n'était pas établi que le bénéfice social avait été réparti par tiers entre les associés pour les années 1990 à 1996, 2000, 2001, 2002 et depuis 2006, mais qu'il l'avait été au prorata des parts sociales, conformément à l'article 1844-1 du code civil et à l'article 19 des statuts de la société ; que, pour écarter ce moyen, la cour d'appel a retenu que la société ne rapportait pas « la preuve de ses affirmations quant aux modalités de paiement des dividendes pour les périodes qu'elle évoque » ; qu'en statuant ainsi, quand la charge de la preuve de l'exactitude du compte courant incombait à Éric Y..., dès lorsqu'il en demandait le paiement, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil ;

2) ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motif ; que, pour défendre à la demande en remboursement de son compte courant par Éric Y..., la société de [...] faisait valoir, dans ses écritures d'appel (pp. 11-12), qu'il n'était pas établi que le bénéfice social avait été réparti par tiers entre les associés pour les années 1990 à 1996, 2000, 2001, 2002 et depuis 2006, mais qu'il l'avait été au prorata des parts sociales, conformément à l'article 1844-1 du code civil et à l'article 19 des statuts de la société ; que faute d'avoir répondu à ce moyen de défense à la demande principale en paiement d'Éric Y..., la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

3) ALORS QUE celui qui est poursuivi en paiement d'une dette indue n'a pas à justifier d'un préjudice pour s'opposer à cette demande ; que pour fixer le montant dû à Éric Y... à 136 563,83 euros, la cour d'appel a retenu que « la SCEA ne justifie pas que ce paiement génère pour elle un préjudice, puisque, en tout état de cause, il lui incombe de régler les dividendes à ses associés, quels qu'ils soient » ; qu'en statuant ainsi, quand il n'est pas nécessaire de justifier d'un préjudice pour se défendre contre une demande en paiement injustifié, la cour d'appel a violé l'article 1235 du code civil ;

4) ALORS QUE le paiement fait à un tiers ne libère pas le débiteur ; que pour fixer le montant dû à Éric Y... à 136 563,83 euros, la cour d'appel a retenu que « la SCEA ne justifie pas que ce paiement génère pour elle un préjudice, puisque, en tout état de cause, il lui incombe de régler les dividendes à ses associés, quels qu'ils soient » ; qu'en statuant ainsi, quand le paiement des dividendes à un associé qui n'y avait pas droit, au détriment d'un autre associé, ne libérerait pas la société de ses obligations à l'égard de ce dernier et l'exposerait à devoir payer deux fois, la cour d'appel a violé l'article 1239 du code civil ;

5) ALORS QUE l'associé ne peut demander à la société que le remboursement du solde final de son compte courant ; que, dans ses conclusions d'appel (pp. 8 etamp; 21), la société de [...] faisait valoir que le solde du compte courant d'Éric Y... au 31 décembre 2012, dernier solde établi avant sa modification contestée par décision de l'assemblée générale du 20 août 2013, s'élevait à 107 203,09 euros, pour en déduire que, même en admettant « que la nouvelle répartition des parts [devait] reste sans effet sur l'affectation des bénéfices,
le solde du compte ne serait pas supérieur à 107.203,09 euros » et que la cour « ne pourrait fixer la créance au-delà » ; qu'en retenant néanmoins le solde du compte courant au 31 décembre 2011, à hauteur de 136 563,83 euros, la cour d'appel a violé l'article 1902 du code civil ;

6) ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motif ; que, dans ses conclusions d'appel (pp. 8 etamp; 21), la société de [...] faisait valoir que le solde du compte courant d'Éric Y... au 31 décembre 2012, dernier solde établi avant sa modification contestée par décision de l'assemblée générale du 20 août 2013, s'élevait à 107 203,09 euros, pour en déduire que, même en admettant « que la nouvelle répartition des parts [devait] rester sans effet sur l'affectation des bénéfices,
le solde du compte ne serait pas supérieur à 107 203,09 euros » et que la cour « ne pourrait fixer la créance au-delà » ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen péremptoire, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 16-21825
Date de la décision : 26/09/2018
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Agen, 25 avril 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 26 sep. 2018, pourvoi n°16-21825


Composition du Tribunal
Président : Mme Riffault-Silk (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.21825
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award