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20/09/2018 | FRANCE | N°17-22750

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 20 septembre 2018, 17-22750


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la caisse primaire d'assurance maladie de la Meuse du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. Tom Z..., agissant en son nom personnel et en sa qualité d'ayant cause de Y... Z... ;

Met hors de cause, sur leur demande, le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, Mme Z... et MM. Olivier et Franck Z..., ce dernier agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentant légal de son fils Tom ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'ayant été sa

larié, à compter du 14 octobre 1954, de la société Unimétal, aux droits de laq...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la caisse primaire d'assurance maladie de la Meuse du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. Tom Z..., agissant en son nom personnel et en sa qualité d'ayant cause de Y... Z... ;

Met hors de cause, sur leur demande, le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, Mme Z... et MM. Olivier et Franck Z..., ce dernier agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentant légal de son fils Tom ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'ayant été salarié, à compter du 14 octobre 1954, de la société Unimétal, aux droits de laquelle sont venues successivement la société Sogepass et la société ArcelorMittal France (l'employeur), Y... Z... a été admis au bénéfice de la cessation anticipée d'activité le 16 janvier 1990 ; qu'après son décès, survenu le [...] , Mme Z..., sa veuve, a adressé à la caisse primaire d'assurance maladie de la Meuse (la caisse), pour le compte de son mari, une déclaration de maladie professionnelle accompagnée d'un certificat médical du 4 mars 2010 faisant état d'un néoplasme bronchique de type carcinome à petites cellules ; que la caisse a informé Mme Z..., par courrier du 29 juin 2011, qu'elle prenait en charge cette affection au titre du tableau n° 30 C des maladies professionnelles, puis, par courrier du 19 juillet 2011, qu'elle prenait en charge le décès de Y... Z... au titre de la législation professionnelle ; que Mme Z... et ses deux fils, MM. Olivier et Franck Z..., ce dernier agissant tant en son nom personnel qu'en qualité de représentant légal de son fils mineur Tom, ont saisi une juridiction de sécurité sociale d'une action en reconnaissance de la faute inexcusable commise par l'employeur ;

Sur le premier moyen :

Vu les articles R. 142-2, R. 142-18 et R. 441-14 du code de la sécurité sociale, ce dernier dans sa rédaction issue du décret n° 2009-938 du 29 juillet 2009 ;

Attendu qu'il résulte des deux premiers textes que la décision de prise en charge de l'accident du travail, de la maladie professionnelle ou de la rechute, motivée et notifiée dans les conditions prévues par le troisième, revêt à l'égard de l'employeur, en l'absence de recours dans le délai imparti, un caractère définitif ;

Attendu que, pour déclarer les décisions de prise charge inopposables à l'employeur, l'arrêt retient qu'il ne résulte pas des pièces produites par la caisse que celle-ci ait transmis à ce dernier un double de la déclaration de la maladie professionnelle et qu'il est constant qu'elle ne l'a pas informé du changement de qualification de la maladie auquel elle a procédé ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si, comme le soutenait la caisse, les décisions litigieuses n'avaient pas acquis, en l'absence de recours, un caractère définitif à l'égard de l'employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

Et sur le second moyen :

Vu les articles L. 452-2, L. 452-3 et R. 441-14 du code de la sécurité sociale, ce dernier dans sa rédaction issue du décret n° 2009-938 du 29 juillet 2009 ;

Attendu que l'irrégularité de la procédure suivie en application du dernier de ces textes, ayant conduit à la prise en charge, par la caisse, au titre de la législation professionnelle, d'un accident, d'une maladie ou d'une rechute, étant sans incidence sur l'action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, ne prive pas la caisse du droit qu'elle tient des deux premiers de récupérer sur l'employeur, après reconnaissance de cette faute, les compléments de rente et indemnités versés par elle ;

Attendu que pour dire que la caisse ne disposerait pas d'une action récursoire à l'encontre des sociétés Sogepass et ArcelorMittal, l'arrêt énonce que l'inopposabilité des décisions de prise en charge de la maladie et du décès de Y... Z... prive la caisse de la possibilité de bénéficier d'une telle action ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit inopposable aux sociétés Sogepass et ArcelorMittal France la décision de prise en charge de la maladie développée par Y... Z... et de son décès, et en ce qu'il dit que la caisse primaire d'assurance maladie de la Meuse ne dispose pas d'une action récursoire à l'encontre des sociétés Sogepass et ArcelorMittal France, l'arrêt rendu le 31 mai 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;

Condamne la société ArcelorMittal France aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société ArcelorMittal France à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de la Meuse la somme de 3 000 euros et rejette les autres demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, signé par M. Prétot, conseiller doyen, conformément aux dispositions des articles 456 et 1021 du code de procédure civile, en remplacement du conseiller rapporteur empêché et prononcé par le président en son audience publique du vingt septembre deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.

Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la caisse primaire d'assurance maladie de la Meuse.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU' il a, infirmant le jugement, dit inopposable aux sociétés SOGEPASS et ARCELOR MITTAL FRANCE les décisions de prise en charge par la Caisse de la maladie développée par Monsieur Y... Z... et de son décès au titre de la législation professionnelle, puis dit que la Caisse ne dispose pas d'une action récursoire à l'encontre des sociétés SOGEPASS et ARCELOR MITTAL FRANCE ;

AUX MOTIFS QU' « Aux termes des dispositions de l'article R 441-11 du code de la sécurité sociale, un double de la déclaration de maladie professionnelle, adressée par la victime, doit être transmis par la Caisse à l'employeur, à qui la décision est susceptible de faire grief par tout moyen permettant de déterminer sa date de réception. En l'espèce, il ne ressort d'aucune des pièces produites aux débats par la Caisse que celle-ci a satisfait aux prescriptions des dispositions ci-dessus rappelées. Le respect ultérieur, par la Caisse, du principe du contradictoire, ne saurait suppléer sa carence initiale. De plus, il est constant que la Caisse qui instruit une demande de prise en charge d'une maladie professionnelle doit informer l'employeur d'un changement de qualification de la maladie ; à défaut, la prise en charge de la maladie au titre de la législation professionnelle est inopposable à l'employeur. En l'espèce, la demande de reconnaissance de maladie professionnelle formulée par Nicole X..., épouse Z... fait état d'un "carcinome à petites cellules", pathologie qui relève du tableau 30 bis des maladies professionnelles. Le colloque médico-administratif établi par le Médecin Conseil de la Caisse mentionne aussi un cancer bronchopulmonaire primitif. Or, la décision de prise en charge de la maladie professionnelle par la Caisse en date du 10 juin 2011 se réfère à la maladie "dégénérescence maligne bronchopulmonaire compliquant des lésions bénignes". La caisse a donc établi une nouvelle qualification de la maladie professionnelle, sans que soit démontré qu'elle en ait averti la société Sogepass auquel succède désormais la société ArcelorMittal France. La décision déférée sera donc infirmée, en ce qu'elle a dit opposable à ArcelorMittal France la décision de prise en charge, par la CPAM de la Meuse, de la pathologie, puis du décès de Y... Z... au titre de la législation professionnelle. Au contraire, ces prises en charge seront déclarées inopposables à l'employeur, privant, compte tenu de la date à laquelle celles-ci sont intervenues, la Caisse de la possibilité de bénéficier d'une action récursoire à l'encontre de l'employeur. » ;

ALORS QUE les décisions des organismes de sécurité sociale acquièrent un caractère définitif, dès lors que, comportant indication des délais et voies de recours, elles n'ont pas été contestées dans lesdits délais ; qu'en s'abstenant de se prononcer, quand elle y était pourtant invitée par la Caisse (conclusions, p. 4, in fine et p. 5, § 1-2), sur le caractère définitif, à l'égard de l'employeur, des décisions de prise en charge de la maladie et du décès de Monsieur Z..., faute pour l'employeur de les avoir contestées dans les délais légaux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles R. 142-1, R. 142-18 et R. 441-14 du code de la sécurité sociale, le dernier dans sa rédaction issue du décret n° 2009-938 du 29 juillet 2009, ensemble du principe suivant lequel les décisions des organismes de sécurité sociale sont revêtues de l'autorité de chose décidée.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU' il a, infirmant le jugement, et après avoir dit inopposable aux sociétés SOGEPASS et ARCELOR MITTAL FRANCE les décisions de prise en charge par la Caisse de la maladie développée par Monsieur Y... Z... et de son décès au titre de la législation professionnelle, dit que la Caisse ne dispose pas d'une action récursoire à l'encontre des sociétés SOGEPASS et ARCELOR MITTAL FRANCE ;

AUX MOTIFS QU' « Aux termes des dispositions de l'article R 441-11 du code de la sécurité sociale, un double de la déclaration de maladie professionnelle, adressée par la victime, doit être transmis par la Caisse à l'employeur, à qui la décision est susceptible de faire grief par tout moyen permettant de déterminer sa date de réception. En l'espèce, il ne ressort d'aucune des pièces produites aux débats par la Caisse que celle-ci a satisfait aux prescriptions des dispositions ci-dessus rappelées. Le respect ultérieur, par la Caisse, du principe du contradictoire, ne saurait suppléer sa carence initiale. De plus, il est constant que la Caisse qui instruit une demande de prise en charge d'une maladie professionnelle doit informer l'employeur d'un changement de qualification de la maladie ; à défaut, la prise en charge de la maladie au titre de la législation professionnelle est inopposable à l'employeur. En l'espèce, la demande de reconnaissance de maladie professionnelle formulée par Nicole X..., épouse Z... fait état d'un "carcinome à petites cellules", pathologie qui relève du tableau 30 bis des maladies professionnelles. Le colloque médico-administratif établi par le Médecin Conseil de la Caisse mentionne aussi un cancer bronchopulmonaire primitif. Or, la décision de prise en charge de la maladie professionnelle par la Caisse en date du 10 juin 2011 se réfère à la maladie "dégénérescence maligne bronchopulmonaire compliquant des lésions bénignes". La caisse a donc établi une nouvelle qualification de la maladie professionnelle, sans que soit démontré qu'elle en ait averti la société Sogepass auquel succède désormais la société AreelorMittal France. La décision déférée sera donc infirmée, en ce qu'elle a dit opposable à ArcelorMittal France la décision de prise en charge, par la CPAM de la Meuse, de la pathologie, puis du décès de Y... Z... au titre de la législation professionnelle. Au contraire, ces prises en charge seront déclarées inopposables à l'employeur, privant, compte tenu de la date à laquelle celles-ci sont intervenues, la Caisse de la possibilité de bénéficier d'une action récursoire à l'encontre de l'employeur. » ;

ALORS QUE l'irrégularité de la procédure ayant conduit à la prise en charge, par la Caisse, au titre de la législation professionnelle, d'une maladie, ne prive pas la Caisse du droit de récupérer sur l'employeur, après reconnaissance de cette faute, les compléments de rente et indemnités versés par elle ; qu'en décidant le contraire, pour débouter la Caisse de son action récursoire à l'encontre des sociétés SOGEPASS et ARCELOR MITTAL FRANCE, la cour d'appel a violé les articles L. 452-2 et L. 452-3 du code de la sécurité sociale.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 17-22750
Date de la décision : 20/09/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 31 mai 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 20 sep. 2018, pourvoi n°17-22750


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Claire Leduc et Solange Vigand, SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Foussard et Froger

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.22750
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