La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/09/2018 | FRANCE | N°17-20704

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 19 septembre 2018, 17-20704


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Agen, 11 janvier 2017), que K... L... est décédée le [...] , laissant pour lui succéder son époux, Roger X..., et leur sept enfants, Jacques, Michel, A..., Bernard, Claude, Elisabeth et Didier ; que Michel X... est décédé le [...] , laissant pour lui succéder son épouse, Mme Z... et son fils Bruno ; que Roger X... est décédé le [...] ; que Bernard X... est décédé le [...] , laissant pour lui succéder son épouse, Mme B..., et leurs enfants Karine, Geoffroy, Nata

cha, Tatiana et Clothilde ; qu'un arrêt du 15 septembre 2004 a ordonné l'ou...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Agen, 11 janvier 2017), que K... L... est décédée le [...] , laissant pour lui succéder son époux, Roger X..., et leur sept enfants, Jacques, Michel, A..., Bernard, Claude, Elisabeth et Didier ; que Michel X... est décédé le [...] , laissant pour lui succéder son épouse, Mme Z... et son fils Bruno ; que Roger X... est décédé le [...] ; que Bernard X... est décédé le [...] , laissant pour lui succéder son épouse, Mme B..., et leurs enfants Karine, Geoffroy, Natacha, Tatiana et Clothilde ; qu'un arrêt du 15 septembre 2004 a ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage des successions de K... L... et de Roger X..., et désigné un notaire pour y procéder ; que Mmes A..., Karine, Natacha, Tatiana, Clothilde X..., MM. Jacques, Bruno et Geoffroy X..., Mme Z... et Mme B... (les consorts X...) ont assigné Mme Elisabeth X... et MM. Claude et Didier X... en homologation de l'état liquidatif établi par le notaire ainsi commis ;

Sur les premier, deuxième et quatrième moyens, ci-après annexés :

Attendu que ces moyens ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que M. Claude X... et Mme Elisabeth X... font grief à l'arrêt d'homologuer l'état liquidatif et de mettre à la charge de celui-ci une indemnité de réduction à la suite de la libéralité consentie par le défunt par mise à disposition gratuite d'un immeuble situé à Puteaux alors, selon le moyen, que dès lors que la libéralité résultant de la mise à disposition gratuite de l'immeuble de Puteaux avait donné lieu à un rapport, à la charge de M. Claude X..., les sommes correspondantes avaient rejoint l'actif successoral et il était dès lors exclu que ces mêmes sommes, dans un second temps, puissent donner lieu à indemnité de réduction ; qu'à ce titre, l'arrêt attaqué a été rendu en violation des articles 920 et 921 du code civil ;

Mais attendu qu'il résulte des article 864 et 868 du code civil, dans leur rédaction antérieure à la loi du 23 juin 2006, que la donation faite en avancement d'hoirie à un héritier réservataire qui accepte la succession s'impute sur sa part de réserve, subsidiairement s'il y a lieu sur la quotité disponible et que, s'il en résulte un excédent, le donataire est débiteur d'une indemnité équivalente à cet excédent ; qu'après avoir constaté que le notaire avait réuni dans une masse fictive les biens du patrimoine de Roger X... au jour de son décès et ceux dont il avait disposé entre vifs, fixé la quotité disponible, imputé les donations reçues par M. Claude X..., d'abord sur sa part dans la réserve, puis sur la quotité disponible, enfin fixé une indemnité de réduction égale au montant de l'excédent, la cour d'appel a exactement décidé d'homologuer l'état liquidatif conforme aux textes précités ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Claude X... et Mme Elisabeth X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à Mmes A..., Karine, Natacha, Tatiana et Clothilde X..., à MM. Jacques, Bruno et Geoffroy X..., et à Mmes Z... et B... la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf septembre deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour M. Claude X... et Mme Elisabeth X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU' il a, réformant le jugement, décidé que les sommes sujettes à rapport, mises à la charge de Monsieur Claude X..., devaient porter intérêts à compter du 15 septembre 2004 ;

AUX MOTIFS QUE « Selon l'article 856 alinéa 2 du Code civil les intérêts ne sont dus qu'à compter du jour où le montant du rapport est déterminé, à savoir à compter de l'arrêt du 15 septembre 2004 pour Claude X... et du 5 décembre 2006 pour Didier X... » ;

ALORS QUE si, en cas de rapport en valeur, des intérêts peuvent être dus par l'héritier tenu au rapport, lorsque le rapport prend la forme d'un paiement en numéraire, il en va autrement lorsque le rapport est en moins prenant et diminue à due concurrence les droits de l'héritier sur l'actif successoral ; qu'en s'abstenant de dire si le rapport prenait la forme d'un paiement de sommes d'argent ou d'un moins prenant, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 856 du code civil.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QUE, confirmant le jugement qui avait homologué l'état liquidatif, il a mis à la charge de Monsieur Claude X... une indemnité de réduction ;

AUX MOTIFS QUE « Selon l'article 920 du Code civil, les libéralités qui portent atteinte à la réserve d'un ou plusieurs héritiers sont réductibles à la quotité disponible lors de l'ouverture de la succession. Selon les demandeurs la réduction de libéralité n'est ni automatique, ni de droit; mais doit être demandée par les héritiers réservataires, une fois qu'ils ont accepté la succession. Ainsi, selon l'article 921 du Code civil : "la réduction des dispositions entre vifs ne pourra être demandée que par ceux au profit desquels la loi fait la réserve, par leurs héritiers ou ayants cause ; les donataires, les légataires, ni les créanciers du défunt, ne pourront demander cette réduction ni en profiter, Le délai de prescription de l'action en réduction est fixé à cinq ans à compter de l'ouverture de la succession, ou à deux ans à compter du jour où les héritiers ont eu connaissance de l'atteinte portée à leur réserve, sans jamais pouvoir excéder dix ans à compter du décès". Or, selon les appelants, les héritiers réservataires n'ont jamais formulé de demande à ce titre; qu'en tout état de cause ils n'y sont pas redevables, car elles tiendraient essentiellement aux intérêts qui leur ont été appliqués. Il convient d'observer que le projet de partage établi par Maître E... fait état d'une réduction de libéralité à raison de l'atteinte portée à la part réservataire d'un ou plusieurs héritier de sorte que la querelle autour de l'absence de demande est sans objet; elle s'évince implicitement du projet établi. En revanche, il devra être tenu compte du point de départ des intérêts tels que fixé par le présent arrêt, aussi les héritiers réservataires auxquels la libéralité continue de porter atteinte pourront obtenir une indemnisation à concurrence de la portion dépassant la réserve, ce par application de l'article 924 du Code civil » ;

ALORS QUE, premièrement, le notaire établit l'état liquidatif en considération des demandes formulées par les parties ; que l'état liquidatif ne peut prendre en compte une indemnité de réduction que si l'un des héritiers l'a demandée ; qu'en s'abstenant de rechercher si tel n'a pas été le cas en l'espèce, s'agissant de l'indemnité de réduction mise à la charge de Monsieur Claude X..., les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles 920 et 921 du code civil ;

ALORS QUE, deuxièmement, il importe peu que le notaire ait mentionné à son état liquidatif une indemnité de réduction dès lors qu'il ne peut prendre aucune initiative à cet égard en l'absence de demande de la part d'un héritier ; qu'à cet égard, l'arrêt, fondé sur un motif erroné, a été rendu en violation des articles 920 et 921 du code civil ;

ALORS QUE, troisièmement, et en tout cas, la cassation à intervenir, s'agissant du chef relatif aux intérêts, ne peut manquer d'entraîner par voie de conséquence, en application de l'article 625 du code de procédure civile, la cassation du chef relatif à l'indemnité de réduction mise à la charge de Monsieur Claude X... ;

ALORS QUE, quatrièmement, alors que dans ses conclusions d'appel, Monsieur Claude X... élevait une contestation quant à la manière dont le notaire avait déterminé le montant de l'indemnité de réduction (conclusions du 30 octobre 20114, p. 8, in fine et p. 9, in extenso) ; qu'il soutenait notamment que le chiffre retenu par le notaire était incompréhensible et que la libéralité ne pouvait être sujette à réduction dans sa totalité ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur ce point, avant de statuer, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles 920 et 921 du code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QUE, confirmant le jugement homologuant l'état liquidatif, il a décidé qu'il y avait eu atteinte à la réserve sur la base de la libéralité résultant de la mise à disposition gratuite de l'immeuble de PUTEAUX ;

AUX MOTIFS QUE « Selon l'article 920 du Code civil, les libéralités qui portent atteinte à la réserve d'un ou plusieurs héritiers sont réductibles à la quotité disponible lors de l'ouverture de la succession. Selon les demandeurs la réduction de libéralité n'est ni automatique, ni de droit; mais doit être demandée par les héritiers réservataires, une fois qu'ils ont accepté la succession. Ainsi, selon l'article 921 du Code civil : "la réduction des dispositions entre vifs ne pourra être demandée que par ceux au profit desquels la loi fait la réserve, par leurs héritiers ou ayants cause ; les donataires, les légataires, ni les créanciers du défunt, ne pourront demander cette réduction ni en profiter, Le délai de prescription de l'action en réduction est fixé à cinq ans à compter de l'ouverture de la succession, ou à deux ans à compter du jour où les héritiers ont eu connaissance de l'atteinte portée à leur réserve, sans jamais pouvoir excéder dix ans à compter du décès". Or, selon les appelants, les héritiers réservataires n'ont jamais formulé de demande à ce titre; qu'en tout état de cause ils n'y sont pas redevables, car elles tiendraient essentiellement aux intérêts qui leur ont été appliqués. Il convient d'observer que le projet de partage établi par Maître E... fait état d'une réduction de libéralité à raison de l'atteinte portée à la part réservataire d'un ou plusieurs héritier de sorte que la querelle autour de l'absence de demande est sans objet; elle s'évince implicitement du projet établi. En revanche, il devra être tenu compte du point de départ des intérêts tels que fixé par le présent arrêt, aussi les héritiers réservataires auxquels la libéralité continue de porter atteinte pourront obtenir une indemnisation à concurrence de la portion dépassant la réserve, ce par application de l'article 924 du Code civil » ;

ALORS QUE, dès lors que la libéralité résultant de la mise à disposition gratuite de l'immeuble de PUTEAUX avait donné lieu à un rapport, à la charge de Monsieur Claude X..., les sommes correspondantes avaient rejoint l'actif successoral et il était dès lors exclu que ces mêmes sommes, dans un second temps, puissent donner lieu à indemnité de réduction ; qu'à ce titre, l'arrêt attaqué a été rendu en violation des articles 920 et 921 du code civil.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QUE, confirmant le jugement, lequel avait homologué l'état liquidatif, il a maintenu à 410.000 euros la valeur de l'immeuble de PUTEAUX ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « Selon l'article 829 alinéa 1 et 2 du Code civil "les biens sont estimés à leur valeur à la date de la jouissance divise choisie par les parties dans l'acte de partage qui doit être /a date la plus proche possible du partage, en tenant compte s'il y a lieu des charges les grevant. Cette date est là plus proche possible du partage". Selon l'état liquidatif, la jouissance divise a été fixée au 1 er juin 2011, de sorte que les biens doivent être estimés à cette date, F... H..., expert près la cour d'appel de Paris, a évalué le 3 mars 2010, l'immeuble de PUTEAUX, occupé par Claude X... à 410 000 euros et attribué à Jacques X... et celui de [...] le 4 mars 2010 à 250 000 euros, attribué à A... X.... Sur l'immeuble de PUTEAUX : Les immeubles ont été évalués un an avant la date de jouissance divise, les appelants soutiennent qu'il est nécessaire de procéder à une nouvelle estimation, au motif de l'existence d'offres d'achats supérieures, celle des époux I... en date des 4 juillet 2013, 25 juin 2014 et 10 septembre 2014, lesquels ont fait une offre d'achat à M. Claude X... à hauteur de 680,000 euros sauf qu'aucun document bancaire ne vient étayer la solvabilité dés offrants et par suite entache le sérieux de l'offre qui doit être écartée. Les appelants produisent aussi une estimation de l'agence de Vailliere en date du 23 novembre 2010, pour 650 000 euros net vendeur, cependant cette estimation n'est accompagnée d'aucun descriptif de l'immeuble, une estimation de l'agence Century 21 en date du 27 novembre 2010, plus détaillée, qui évalue le bien entre 845 000 euros et 855 000 euros, sauf que ces deux estimations qui ont été faites à 4 jours d'intervalles doivent être écartées, car faites par des professionnels, elles font apparaître une différence de prix de 200 000 euros, montant qui jette un discrédit sur le sérieux des montants annoncés. Enfin, l'estimation de "meilleurs agents.COM" ne saurait être plus opportune, pour ne pas être suffisamment fiable, s'agissant d'un moteur de recherche. Aussi, aucun élément ne permet de remettre sérieusement en cause l'évaluation proposée par F... G..., particulièrement précise et documentée, elle sera pas suite retenue » ;

AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « Comme le soulignent les consorts X..., l'évaluation de l'immeuble de Puteaux retenue dans l'état liquidatif du 20 juin 2011 a été fixée, comme celle de l'immeuble de [...] et de [...], au vu des conclusions du rapport d'expertise établi à la demande du notaire et elle n'avait jamais été contestée par Mme Élisabeth X... jusqu'à ce jour. Chacun des signataires de l'état liquidatif du 20 juin 2011, dont notamment Mme Élisabeth X..., a expressément confirmé aux termes de l'acte, tenir la valorisation retenue pour valable. L'agence Century 21 évalue un « prix de mise en vente » de 845 000 à 855 000 €, sous réserve de construire un nouvel immeuble : « Si vous construisez un pavillon de 100 m2 habitables environ avec un stationnement sur la parcelle de 110m2 côté rue [...] ». Cette évaluation est donc soumise à une condition très hypothétique. L'évaluation du Site Internet « DRIMKLFR » entre 857 000 et 893 000 € a été réalisée grâce à un moteur de recherche informatique, sur la seule base de données statistique après renseignement « des caractéristiques de votre bien ». Or le cabinet H... etamp; Associés, mandaté par l'indivision représentée par le notaire, a établi un rapport très détaillé et a estimé l'immeuble le 03/03/2010 à 410 000 € en tenant compte de la vétusté de l'immeuble et d'importants travaux de rénovation nécessaires, chiffrés par l'expert à hauteur de 200 000 € constitutifs d'une moins-value (cf P9 page 23 du rapport). La valorisation de l'immeuble de Puteaux à hauteur de 410 000 € est donc suffisamment justifiée et il convient de débouter Elisabeth X... et Claude X... de leurs demandes » ;

ALORS QUE, tenu de se placer à la date de la jouissance divise, le juge doit s'assurer, positivement, que le chiffre qu'il retient correspond à la valeur du bien à cette date, sans pouvoir se contenter d'énoncer que l'héritier, qui élève une contestation, ne démontre pas que l'évaluation faite à une date antérieure ne correspond pas à l'évaluation faite à la date de référence ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l'article 829 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 17-20704
Date de la décision : 19/09/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Agen, 11 janvier 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 19 sep. 2018, pourvoi n°17-20704


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Foussard et Froger, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.20704
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award