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13/09/2018 | FRANCE | N°17-18885

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 13 septembre 2018, 17-18885


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles 53, I, et 53, IV, de la loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000 ;

Attendu, selon le premier de ces textes, que la victime d'une maladie due à une exposition à l'amiante peut obtenir la réparation intégrale de ses préjudices ; que, selon le second, l'indemnisation due par le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante doit tenir compte des prestations énumérées à l'article 29 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 et des indemnités de toute nature r

eçues ou à recevoir d'autres débiteurs du chef du même préjudice ;

Attendu, sel...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles 53, I, et 53, IV, de la loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000 ;

Attendu, selon le premier de ces textes, que la victime d'une maladie due à une exposition à l'amiante peut obtenir la réparation intégrale de ses préjudices ; que, selon le second, l'indemnisation due par le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante doit tenir compte des prestations énumérées à l'article 29 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 et des indemnités de toute nature reçues ou à recevoir d'autres débiteurs du chef du même préjudice ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... est atteint d'une maladie occasionnée par l'amiante, dont le caractère professionnel a été reconnu par une caisse primaire d'assurance maladie (la caisse), qui lui a servi des prestations au titre de son déficit fonctionnel ; que le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (le FIVA) lui ayant fait connaître le 18 avril 2016 qu'il refusait l'indemnisation de ce chef de préjudice, M. X... a formé un recours contre cette décision devant une cour d'appel ;

Attendu que, pour décider que le poste de préjudice fonctionnel est entièrement pris en charge par les sommes servies par l'organisme social de M. X..., qui se trouve rempli de ses droits, et le débouter en conséquence de toutes demandes, l'arrêt retient que M. X... conteste la méthode de calcul adoptée par le FIVA en demandant à ce que le calcul de son préjudice fonctionnel soit effectué en distinguant, d'une part, les arriérés de rente jusqu'au 30 avril 2017, d'autre part, les arrérages dus à compter du 1er mai 2017 ; que le principe de réparation intégrale qui commande que l'entier préjudice soit réparé, mais seulement le préjudice, s'oppose à ce que le calcul des indemnités puisse être effectué par périodes ; que l'arrêt retient encore que M. X... ne démontre pas que le calcul retenu par le FIVA serait erroné, et qu'il y a lieu de constater qu'il perçoit en réparation du préjudice de déficit fonctionnel une rente annuelle de son organisme de sécurité sociale qui excède celle susceptible d'être servie par le FIVA ; que M. X... ne pouvant être indemnisé deux fois du même préjudice, le FIVA n'a aucune somme complémentaire à verser au requérant qui voit son préjudice intégralement réparé ;

Qu'en statuant ainsi, par des motifs ne mettant pas la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, et alors qu'il lui appartenait, pour évaluer l'indemnisation due par le FIVA au titre du préjudice de déficit fonctionnel de M. X..., de comparer les arrérages échus de la rente servie par le FIVA jusqu'à la date à laquelle elle statuait et ceux versés par la caisse pendant la même période, puis, pour les arrérages à échoir à compter de sa décision, de calculer et comparer les capitaux représentatifs des deux rentes, sans globaliser les deux résultats obtenus, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 mars 2017, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai ;

Condamne le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize septembre deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Balat, avocat aux Conseils, pour M. X....

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé la décision de rejet émise par le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante le 18 avril 2016, jugé que le poste de préjudice fonctionnel était entièrement pris en charge par les sommes servies par l'organisme social de M. X... qui se trouvait rempli de ses droits, et débouté M. X... de toutes demandes plus amples ;

AUX MOTIFS QUE les taux d'incapacité de M. X... ont été fixés à 100% à compter du 19 avril 2013, 70% à compter du 19 avril 2015 et 40% à compter du 19 avril 2018 ; que cette évaluation a été acceptée par le requérant selon quittance subrogatoire en date du 25 avril 2016 ; que M. X... ne conteste pas les montants de rente tels que prévus par le barème du Fonds au 1er avril 2016 soit 18.958 € par an pour un taux de 100% et 11.176 € pour un taux de 70% ; que M. X... conteste en revanche la méthode de calcul adoptée par le Fonds en demandant à ce que le calcul de son préjudice fonctionnel soit effectué en distinguant, d'une part, les arriérés de rente jusqu'au 30 avril 2017, d'autre part, les arrérages dus à compter du 1er mai 2017 ; que l'article 53 de la loi du 23 décembre 2000 de financement de la sécurité sociale pour 2001 dispose que : « IV. Dans les six mois à compter de la réception d'une demande d'indemnisation, le fonds présente au demandeur une offre d'indemnisation. Il indique l'évaluation retenue pour chaque chef de préjudice, ainsi que le montant des indemnités qui lui reviennent compte tenu des prestations énumérées à l'article 29 de la loi nº 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation, et des indemnités de toute nature reçues ou à recevoir d'autres débiteurs du chef du même préjudice
» ; que le principe de réparation intégrale qui commande que l'entier préjudice soit réparé mais seulement le préjudice, s'oppose à ce que le calcul des indemnités puisse être effectué par périodes ; que M. X... ne démontre pas que le calcul retenu par le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante serait erroné, le calcul qu'il propose lié au moment où la juridiction est susceptible de rendre sa décision étant défavorable aux victimes ayant choisi d'accepter la proposition et poussant le requérant à retarder l'issue du procès ; qu'il y a lieu cependant de constater que M. X... perçoit en réparation du même préjudice une rente annuelle de son organisme de sécurité sociale qui excède celle susceptible d'être servie par le Fonds ; que M. X... ne pouvant être indemnisé deux fois du même préjudice, le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante n'a aucune somme complémentaire à verser au requérant lequel voit son préjudice intégralement réparé et se trouve rempli de ses droits ;

ALORS QUE le principe de réparation intégrale impose d'actualiser l'indemnité allouée à la victime au titre du déficit fonctionnel au jour où la cour d'appel statue ; qu'il appartient donc à la cour d'appel saisie d'un recours juridictionnel à l'encontre de l'offre présentée par le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, pour évaluer l'indemnisation due au titre du déficit fonctionnel subi par le demandeur, de comparer les arrérages échus dus par le Fonds jusqu'à la date de sa décision et ceux versés par l'organisme de sécurité sociale pendant la même période, puis, pour les arrérages à échoir à compter de sa décision, de calculer et comparer le capital représentatif de ceux dus par le Fonds et par l'organisme social ; qu'en procédant dès lors à une évaluation globale de l'indemnisation allouée à M. X... au titre du déficit fonctionnel, au motif erroné que « le principe de réparation intégrale qui commande que l'entier préjudice soit réparé mais seulement le préjudice, s'oppose à ce que le calcul des indemnités puisse être effectué par périodes » (arrêt attaqué, p. 3, alinéa 3), cependant qu'elle devait dans un premier temps déterminer si une indemnisation était due au titre des arriérés de rente à la date de son délibéré, puis dans un second temps déterminer si une indemnisation complémentaire devait être versée pour l'avenir, au lendemain de la date de son délibéré, la cour d'appel d'Amiens a méconnu le principe précité et violé les articles 53 I et 53 IV de la loi nº 2000-1257 du 23 décembre 2000.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 17-18885
Date de la décision : 13/09/2018
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

FONDS DE GARANTIE - Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante - Victime de l'amiante - Demande d'indemnisation - Déficit fonctionnel permanent - Evaluation - Détermination - Portée

FONDS DE GARANTIE - Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante - Victime de l'amiante - Demande d'indemnisation - Déficit fonctionnel permanent - Arrérages échus dus par le fonds et l'organisme de sécurtié sociale - Office du juge - Détermination - Portée

La victime d'une maladie due à une exposition à l'amiante peut obtenir la réparation intégrale de ses préjudices, l'indemnisation due par le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA) devant tenir compte des prestations énumérées à l'article 29 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 et des indemnités de toute nature reçues ou à recevoir d'autres débiteurs du chef du même préjudice. Il s'ensuit que pour évaluer l'indemnisation due par le FIVA au titre du préjudice de déficit fonctionnel d'une victime, le juge doit comparer les arrérages échus de la rente servie par le FIVA jusqu'à la date à laquelle il statue et ceux versés par une caisse primaire d'assurance maladie au titre de la maladie professionnelle causée par l'amiante pendant la même période, puis, pour les arrérages à échoir à compter de sa décision, calculer et comparer les capitaux représentatifs des deux rentes, sans globaliser les deux résultats obtenus


Références :

articles 53, I, et 53, IV, de la loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000.

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens, 30 mars 2017

A rapprocher :2e Civ., 26 octobre 2006, pourvoi n° 05-20777, Bull. 2006, II, n° 292 (cassation) ;2e Civ., 23 novembre 2017, pourvoi n° 16-24700, Bull. 2017, II, n° 220 (cassation partielle).


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 13 sep. 2018, pourvoi n°17-18885, Bull. civ.Bull. 2018, II, n° 174
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Bull. 2018, II, n° 174

Composition du Tribunal
Président : Mme Flise
Avocat(s) : Me Balat, Me Le Prado

Origine de la décision
Date de l'import : 05/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.18885
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