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12/09/2018 | FRANCE | N°17-11240

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 septembre 2018, 17-11240


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 24 novembre 2016) que M. Z... a été engagé par la société Rousset poids lourds le 1er juin 1996 en qualité de directeur administratif et financier ; que cette société a été placée en redressement judiciaire le 22 septembre 2000, et que, dans le cadre de cette procédure, le salarié a été élu délégué du personnel le 4 décembre 2000 ; que par jugement du 18 mai 2001, le tribunal de commerce a homologué l'offre de reprise présentée pa

r la société Freins et techniques, filiale de la société Todd, et autorisé le licenci...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 24 novembre 2016) que M. Z... a été engagé par la société Rousset poids lourds le 1er juin 1996 en qualité de directeur administratif et financier ; que cette société a été placée en redressement judiciaire le 22 septembre 2000, et que, dans le cadre de cette procédure, le salarié a été élu délégué du personnel le 4 décembre 2000 ; que par jugement du 18 mai 2001, le tribunal de commerce a homologué l'offre de reprise présentée par la société Freins et techniques, filiale de la société Todd, et autorisé le licenciement du personnel non repris, notamment du directeur administratif et financier ; que le 20 juin 2001, l'inspecteur du travail a refusé le licenciement du salarié et le 26 octobre 2004, le tribunal administratif a rejeté la requête de M. Douhaire, commissaire à l'exécution du plan, aux fins d'annulation des décisions de l'inspecteur du travail et du ministre de l'emploi et de la solidarité ; que M. Douhaire ès qualités a payé au salarié ses salaires de mai 2001 à décembre 2002 ; que ce dernier a saisi le conseil de prud'hommes d'une demande pour voir prononcer la résiliation de son contrat de travail à l'encontre de la société Freins et techniques, de la société Todd et de M. Douhaire ès qualités ; que le 31 mai 2006, le salarié a déposé au greffe un acte de désistement d'instance et d'action, après avoir conclu un protocole d'accord transactionnel avec la société Todd, aux droits de la société Freins et techniques ; que l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 1er septembre 2010, déclarant recevables les demandes de M. Douhaire ès qualités fondées sur l'article L. 1224-1 du code du travail et condamnant la société Todd à payer à M. Douhaire ès qualités une somme au titre des salaires qu'il avait versés au salarié, a été cassé par la Cour de cassation par arrêt du 15 février 2012, sauf en ce qu'il a retenu la compétence de la juridiction prud'homale ; que par arrêt du 3 décembre 2013, la cour d'appel de Nîmes, cour de renvoi, a constaté le caractère parfait du désistement d'instance et d'action du salarié et déclaré irrecevable au motif de l'extinction de l'instance prud'homale, la demande en remboursement de M. Douhaire ès qualités ; que celui-ci a saisi la juridiction commerciale d'une demande à l'encontre de la société Todd, en remboursement des salaires versés au salarié ;

Attendu que M. Douhaire ès qualités fait grief à l'arrêt de le déclarer irrecevable en ses demandes, alors, selon le moyen :

1°/ que si les conseils de prud'hommes connaissent des différends qui peuvent s'élever à l'occasion du contrat de travail, ils ne sont compétents que si les litiges s'élèvent entre les employeurs ou leurs représentants et les salariés qu'ils emploient ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de l'arrêt que le présent litige oppose la SCP Douhaire-Avazeri, représentée par M. Douhaire, ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de cession de la société Rousset poids lourds, à la société Todd, cessionnaire, sans que M. Z..., salarié de cette dernière, ne soit dans la cause ; qu'en relevant, pour déclarer irrecevables l'ensemble des demandes présentées par la SCP Douhaire-Avazeri, que seul le conseil de prud'hommes était compétent pour déterminer si le contrat de travail de M. Z... avait été transféré à la société Todd et, partant, définir les obligations respectives des parties, la cour d'appel a violé l'article L. 1411-1 du code du travail ;

2°/ qu'il y a autorité de la chose jugée à l'égard de ce qui fait l'objet du jugement rendu entre les mêmes parties intervenant en la même qualité, lorsque la chose demandée est la même et qu'elle est fondée sur la même cause ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de l'arrêt que la SCP Douhaire-Avazeri a attrait en paiement la société Todd, sur le fondement de l'article 1235 du code civil, soit la théorie de l'enrichissement sans cause, sans que M. Z... ne soit dans la cause ; qu'en se fondant, pour déclarer irrecevables l'ensemble des demandes présentées par SCP Douhaire-Avazeri, sur l'autorité de chose jugée attachée à l'arrêt de la cour d'appel de Nîmes rendu le 3 décembre 2013 dans une instance ayant opposé M. Z... à son employeur, la société Todd, et M. Douhaire, commissaire à l'exécution du plan de cession, lequel fondait sa demande en paiement à l'encontre du nouvel employeur sur l'article L. 1224-1 du code du travail, la cour d'appel a violé par fausse application l'article 1351 ancien du code civil, ensemble l'article 480 du code de procédure civile ;

3°/ que c'est seulement lorsque le juge a, en se prononçant sur la compétence, tranché dans le dispositif du jugement la question de fond dont dépend cette compétence que sa décision a autorité de la chose jugée sur la question de fond ; qu'en l'espèce, si en suite de l'arrêt de la Cour de cassation en date du 15 février 2012, l'exception d'incompétence du conseil de prud'hommes au profit du tribunal de commerce soulevée par la société Todd pour s'opposer à la demande en paiement dirigée à son encontre par M. Douhaire ès qualités a été définitivement rejetée, la cour d'appel de Nîmes, statuant comme cour de renvoi, par un arrêt du 3 décembre 2013, n'a pas statué au fond sur cette demande dès lors qu'elle a déclaré M. Douhaire ès qualités irrecevable en sa demande du fait du désistement d'instance du salarié ; qu'en opposant dès lors, dans la présente instance, à la demande formée par M. Douhaire à l'encontre de la société Todd, l'autorité de chose jugée prétendument attachée à l'arrêt de la cour d'appel de Nîmes en date du 3 décembre 2013, quand cette dernière n'avait pas statué au fond, la cour d'appel a violé par fausse application l'article 1351 ancien du code civil, ensemble l'article 480 du code de procédure civile.

Mais attendu qu'ayant constaté qu'il avait été définitivement jugé que la question du transfert du contrat de travail du salarié, dont dépend la solution du litige, relevait de la juridiction prud'homale et fait ainsi ressortir une identité d'objet entre les demandes, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Douhaire-Avazeri aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze septembre deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour la société Douhaire-Avazeri

Il est reproché à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir déclaré Me Douhaire, en qualité de représentant de la SCP Douhaire et Avazeri, commissaire à l'exécution du plan de la société Rousset Poids Lourds, irrecevable en l'ensemble de ses demandes, d'avoir condamné la SCP Douhaire et Avazeri à payer à la société Todd la somme de 3 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens et enfin, d'avoir débouté la SCP Douhaire et Avazeri ès-qualités de ses demandes de dommages-intérêts et au titre des frais irrépétibles ;

Aux motifs propres que la SCP Douhaire et Avazeri représentée par Me Douhaire agissant en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société RPL poursuit le remboursement par la SAS Todd des salaires qu'elle a versés à M. Z... pour le compte de qui il appartiendra du 18 mai 2011 au 31 décembre 2002 ; que statuer sur la demande de l'appelante implique de déterminer quel est le débiteur de ces salaires et donc qui était l'employeur de M. Z... durant cette période ; qu'identifier cet employeur impose de répondre à la question suivante : le contrat de travail de M. Z... a t-il été transféré à la société Todd à compter du 18 mai 2001, date à laquelle le tribunal de commerce de Salon-de-Provence lui a cédé l'entreprise Rousset Poids Lourds dont M. Z... était le directeur administratif et financier ? ; que la réponse apportée à cette question conditionne donc la solution du présent litige ; qu'or, pour rejeter l'exception d'incompétence de la juridiction prud'homale pour connaître des réclamations de la SCP Douhaire ès qualités soulevées par la société Todd au profit du tribunal de commerce de Caen, la cour d'appel d'Aix en Provence a, par arrêt du 1er septembre 2010, jugé que « les demandes de maître Douhaire ès qualités relatives à la question de savoir si le contrat de travail de M. Z... a été transféré à la société Todd à compter du 18 mai 2001 et s'il se trouve bien fondé à réclamer le remboursement des sommes réglées à l'intéressé au titre des salaires du 18 mai 2001 au 31 décembre 2002 découlent directement du contrat de travail de celui-ci ; que dès lors, s'agissant d'un litige né à l'occasion du contrat de travail de M. Z..., la juridiction prud'homale est compétente pour en connaître » ;
que ces dispositions ne sont pas atteintes par la cassation partielle prononcée le 15 février 2012 par la Cour de cassation qui a cassé et annulé l'arrêt du 1er septembre 2010 sauf en ce qu'il a rejeté l'exception d'incompétence du conseil des prud'hommes ; que par arrêt du 3 décembre 2013 dont il n'est pas soutenu qu'il aurait fait l'objet d'un pourvoi, la cour d'appel de Nîmes, cour de renvoi statuant dans les limites de la cassation, a déclaré irrecevable au motif de l'extinction de l'instance prud'homale la demande de remboursement de Me Douhaire ès qualités ; qu'ainsi, il a été définitivement jugé que la question du transfert du contrat de travail de M. Z... dont dépend la solution du présent litige, relevait de la compétence de la juridiction prud'homale et que la demande de remboursement formée par Me Douhaire ès qualités devant cette juridiction était irrecevable du fait de l'extinction de l'instance prud'homale engagée par M. Z... devant le conseil des prud'hommes de Martigues ; que par conséquent le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il a déclaré les demandes de la SCP Douhaire et Avazeri ès qualités irrecevables devant le tribunal de commerce de Caen ;

Et aux motifs adoptés que l'arrêt de la cour d'appel de Nîmes porte uniquement sur le caractère parfait du désistement de M. Z... ; que, sur le fond, le litige porte sur des paiements de salaires et charges payés par Me Douhaire, ès-qualités, à M. Z... et sur un transfert de contrat de travail ; que l'article L.1224-1 du code du travail dispose que « lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise » ; que seul le conseil de prud'hommes est compétent en la matière pour déterminer si un contrat de travail a été transféré et quelles sont les obligations respectives des parties ; que l'arrêt de la Cour de cassation du 15 février 2012 a confirmé la compétence prud'homale édictée par l'arrêt du 1er septembre 2014 en ce qu'il a été exposé clairement que la question du transfert du contrat de travail est un litige dont la matière est de la compétence de la juridiction prud'homale ; que le litige a été jugé définitivement par la cour d'appel de Nîmes qui n'a fait l'objet d'aucun pourvoi ; qu'il résulte de toutes ces constatations que le tribunal déclarera Me Douhaire, ès-qualités, irrecevable en l'ensemble de ses demandes ;

Alors 1°) que si les conseils de prud'hommes connaissent des différends qui peuvent s'élever à l'occasion du contrat de travail, ils ne sont compétents que si les litiges s'élèvent entre les employeurs ou leurs représentants et les salariés qu'ils emploient ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de l'arrêt que le présent litige oppose la SCP Douhaire-Avazeri, représentée par Me Douhaire, ès-qualité de commissaire à l'exécution du plan de cession de la société Rousset Poids Lourds, à la société Todd, cessionnaire, sans que M. Z..., salarié de cette dernière, ne soit dans la cause ; qu'en relevant, pour déclarer irrecevables l'ensemble des demandes présentées par l'exposante, que seul le conseil de prud'hommes était compétent pour déterminer si le contrat de travail de M. Z... avait été transféré à la société Todd et, partant, définir les obligations respectives des parties, la cour d'appel a violé l'article L. 1411-1 du code du travail ;

Alors 2°) qu'il y a autorité de la chose jugée à l'égard de ce qui fait l'objet du jugement rendu entre les mêmes parties intervenant en la même qualité, lorsque la chose demandée est la même et qu'elle est fondée sur la même cause ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de l'arrêt que la SCP Douhaire-Avazeri a attrait en paiement la société Todd, sur le fondement de l'article 1235 du code civil, soit la théorie de l'enrichissement sans cause, sans que M. Z... ne soit dans la cause ; qu'en se fondant, pour déclarer irrecevables l'ensemble des demandes présentées par l'exposante, sur l'autorité de chose jugée attachée à l'arrêt de la cour d'appel de Nîmes rendu le 3 décembre 2013 dans une instance ayant opposé M. Z... à son employeur, la société Todd, et Me Douhaire, commissaire à l'exécution du plan de cession, lequel fondait sa demande en paiement à l'encontre du nouvel employeur sur l'article L.1224-1 du code du travail, la cour d'appel a violé par fausse application l'article 1351 ancien du code civil, ensemble l'article 480 du code de procédure civile ;

Alors 3°) que c'est seulement lorsque le juge a, en se prononçant sur la compétence, tranché dans le dispositif du jugement la question de fond dont dépend cette compétence que sa décision a autorité de la chose jugée sur la question de fond ; qu'en l'espèce, si en suite de l'arrêt de la Cour de cassation en date du 15 février 2012, l'exception d'incompétence du conseil de prud'hommes au profit du tribunal de commerce soulevée par la société Todd pour s'opposer à la demande en paiement dirigée à son encontre par Me Douhaire es-qualités a été définitivement rejetée, la cour d'appel de Nîmes, statuant comme cour de renvoi, par un arrêt du 3 décembre 2013, n'a pas statué au fond sur cette demande dès lors qu'elle a déclaré Me Douhaire ès-qualités irrecevable en sa demande du fait du désistement d'instance du salarié ; qu'en opposant dès lors, dans la présente instance, à la demande formée par Me Douhaire à l'encontre de la société Todd, l'autorité de chose jugée prétendument attachée à l'arrêt de la cour d'appel de Nîmes en date du 3 décembre 2013, quand cette dernière n'avait pas statué au fond, la cour d'appel a violé par fausse application l'article 1351 ancien du code civil, ensemble l'article 480 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-11240
Date de la décision : 12/09/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen, 24 novembre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 12 sep. 2018, pourvoi n°17-11240


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Foussard et Froger, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.11240
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