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11/09/2018 | FRANCE | N°17-85030

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 11 septembre 2018, 17-85030


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

-
M. A... Y... ,

contre l'arrêt de la cour d'appel de MONTPELLIER, chambre correctionnelle, en date du 3 juillet 2017, qui, pour homicide involontaire aggravé l'a condamné à sept ans d'emprisonnement, prononcé l'annulation de son permis de conduire, ordonné des mesures de confiscations, et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 26 juin 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l

'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme B..., conseiller r...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

-
M. A... Y... ,

contre l'arrêt de la cour d'appel de MONTPELLIER, chambre correctionnelle, en date du 3 juillet 2017, qui, pour homicide involontaire aggravé l'a condamné à sept ans d'emprisonnement, prononcé l'annulation de son permis de conduire, ordonné des mesures de confiscations, et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 26 juin 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme B..., conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : M. Bétron ;

Sur le rapport de Mme le conseiller B..., les observations de Me RÉMY-CORLAY, de Me LE PRADO, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général référendaire X... ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, les articles L. 132-19, 221-6-1, 221-6 al 1er du code pénal, l'article L. 232-1 du code de la route, ensemble les articles 591 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt a déclaré M. A... Y... coupable des faits reprochés et l'a condamné à sept ans d'emprisonnement délictuel ;

"aux propres motifs que sur la culpabilité, les faits sont établis par les constatations régulières des procès-verbaux et les infractions, reconnues pour partie par le prévenu sont caractérisées en tous leurs éléments, le délit de fuite contesté résultant amplement des circonstances postérieures à l'accident ainsi que des déclarations des passagers qui déclarent avoir décidé" collectivement" de repartir par peur des conséquences ; que c'est donc par une juste appréciation des faits et circonstances de la cause, que les premiers juges ont retenu le prévenu dans les liens de la prévention et la cour confirmera le jugement sur la culpabilité ; que sur la peine c'est également par de justes motifs que la cour fait siens que les premiers juges ont relevé le caractère délibéré du comportement à haut risque du prévenu, multipliant les transgressions comme conducteur, tant sur la prise d'alcool, de stupéfiants qu'au niveau de la vitesse ; que le comportement arrogant et choquant du prévenu a été souligné tout au long de l'enquête, se targuant d'avoir passé son permis alors qu'il était sous emprise de stupéfiants de même ses mensonges quant à sa consommation de cocaïne et son refus d'assumer la responsabilité de sa conduite ; que le délit de fuite caractérisé vient dramatiquement confirmer le cynisme et l'irresponsabilité du prévenu, qui ne pouvait avoir aucun doute sur les conséquences dramatiques que sa conduite venait de causer, la victime étant venu percuter de plein fouet le pare-brise ; qu'il n'existe devant la cour aucun élément nouveau susceptible de réduire la peine infligée par les premiers juges, peine que la cour confirmera ainsi que l'annulation du permis de conduire, l'interdiction de le repasser pendant une durée de dix ans, et l'interdiction de conduire un véhicule non équipé d'un dispositif anti-démarrage par éthylotest, de même la confiscation des scellés ;

"et aux motifs adoptés que sur la peine, le maximum de la peine encourue est fixé par la loi à dix ans d'emprisonnement ; que l'extrême gravité des faits comme le cumul des fautes oblige le tribunal à s'y référer de facto ; que seul le jeune âge du prévenu, vingt ans au jour des faits, l'inconséquence et l'immaturité qui peuvent être celles de cet âge pour certains, peuvent justifier que cette peine maximum ne soit pas prononcée ; que son expertise psychiatrique qui le retient pour responsable mais constate certains troubles peut accentuer cette inflexion ; qu'en revanche, le tribunal reste sceptique su terme des débats sur l'évolution du prévenu et sur la prise de conscience qui est la sienne malgré les années passées ; qu'à la barre du tribunal M. Y... explique qu'il n'estime plus utile d'être suivi psychologiquement et s'empresse dès que la parole lui est donnée de s'appesantir sur les difficultés qui sont les siennes et le tournant qu'a été cet accident dans sa vie, sans un mot ni un geste vers les proches parents de la victime pourtant présents à deux mètres de lui... que la difficulté de sa situation à l'audience face au tribunal et en présence de ceux qu'il a par sa faute endeuillés, ne peut expliquer complètement son attitude, pas plus que son silence et à carence à dire quelque mot d'excuse ou de regrets, malgré les incitations et suggestions des parties ; qu' enfin et surtout, la prise de conscience du caractère aberrant de son comportement immédiatement après le choc tant dans les manoeuvres qu'il a faites pour dégager sa voiture de la moto que dans l'absence de toute démarche pour prévenir les secours après, n'apparaît pas vraiment acquise ; que prenant en compte tous ces éléments, le tribunal estime devoir fixer la peine d'emprisonnement prononcée à sept ans ; qu' au vu du temps écoulé depuis sa libération, des années écoulées en instruction et de la tentative de suicide que le prévenu décrit par l'expert psychiatre comme affecté d'un état limite, avait fait lors de sa première incarcération, le tribunal estime devoir écarter l'opportunité d'un mandat de dépôt sur l'audience malgré la peine prononcée afin de permettre à son avocat et ses proches de le préparer à sa future incarcération manifestement inévitable ;

"1°) alors qu'en matière correctionnelle, une peine d'emprisonnement sans sursis ne peut être prononcée qu'en dernier recours si la gravité de l'infraction et la personnalité de son auteur rendent cette peine nécessaire et si toute autre sanction est manifestement inadéquate ; que, lorsque le tribunal correctionnel prononce une peine d'emprisonnement sans sursis et ne faisant pas l'objet d'une des mesures d'aménagement, il doit spécialement motiver sa décision, au regard des faits de l'espèce et de la personnalité de leur auteur ainsi que de sa situation matérielle, familiale et sociale ; qu'en l'espèce, pour justifier la peine de prison sans sursis les juges du fond ont uniquement relevé la gravité des faits et le caractère arrogant de M. Y..., observant parallèlement que M. Y... avait 20 ans au moment des faits et qu'il avait certains troubles psychiatriques qui pouvaient expliquer son comportement arrogant, M. Y... ayant fait au surplus une tentative de suicide lors de sa première incarcération ; qu'en ne justifiant pas autrement sa décision de condamner sans sursis à une peine d'emprisonnement de sept ans sans caractériser la nécessité de ladite peine, ni l'inadéquation de toute autre sanction, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;

"2°) alors que le prévenu n'a pas le devoir de participer à sa propre incrimination ; qu'en motivant sa décision de condamnation à une peine d'emprisonnement ferme de sept ans par l'arrogance du prévenu consistant à ne pas reconnaître la gravité de son acte, la cour d'appel a derechef violé les textes susvisés" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué, du jugement qu'il confirme et des pièces de procédure que M. A... Y... a été poursuivi pour avoir, le 29 juillet 2012, sur l'autoroute A 75, percuté, avec son véhicule, la motocyclette pilotée par Bernard Z..., lequel, projeté sur le pare-brise, puis sur la voie de circulation, a été ensuite écrasé par un autre véhicule qui n'a pu l'éviter, la victime décédant sur le coup ; que le prévenu, immobilisé à contre-sens sur la bande d'arrêt d'urgence, sans se porter au secours de la victime ni prévenir les services d'urgence, a fait demi-tour, puis quitté l'autoroute par la première bretelle de sortie, avant de tomber en panne ; que l'enquête a montré que M. Y..., trouvé en possession de résine de cannabis, en avait consommé pendant le trajet, ainsi que de la vodka, avait pris de la cocaïne quelques heures avant et que la vitesse du véhicule se situait entre 150 et 160 km/h ; que M. Y... a été déclaré coupable d'homicide involontaire avec trois circonstances aggravantes, et condamné notamment à sept ans d'emprisonnement ; qu'il a interjeté appel des dispositions pénales du jugement, le procureur de la République formant un appel incident ;

Attendu que, pour confirmer le jugement en ce qu'il avait condamné le prévenu à sept ans d'emprisonnement, l'arrêt, par motifs propres et adoptés, énonce que l'extrême gravité des faits commis tant dans les conséquences qu'ils ont eues, que dans l'accumulation des comportements dangereux et répréhensibles du prévenu qui ont été à l'origine de ce drame ou l'ont suivi, nécessite qu'une lourde peine d'emprisonnement soit prononcée ; que les juges ajoutent que le tribunal ne peut être indifférent au comportement et aux propos extrêmement déplacés, choquants du prévenu qui avec les faits, avec les circonstances aggravantes retenues, colorent le dossier d'une même tonalité et plaident peu pour la clémence et que, le maximum de la peine encourue étant fixé par la loi à dix ans d'emprisonnement, l'extrême gravité des faits comme le cumul des fautes oblige les juges à s'y référer, seul le jeune âge du prévenu, vingt ans au jour des faits, l'inconséquence et l'immaturité qui peuvent être celles de cet âge pour certains, pouvant justifier que cette peine maximum ne soit pas prononcée ; qu'ils relèvent encore qu'à l'audience, M. Y... explique qu'il n'estime plus utile d'être suivi psychologiquement et s'empresse dès que la parole lui est donnée, de s'appesantir sur les difficultés qui sont les siennes et le tournant qu'a été cet accident dans sa vie, sans un mot ni un geste vers les proches parents de la victime pourtant présents à deux mètres de lui, pour en déduire que la prise de conscience du caractère aberrant de son comportement immédiatement après le choc tant dans les manoeuvres qu'il a faites pour dégager sa voiture de la moto que dans l'absence de toute démarche pour prévenir les secours, n'apparaît pas vraiment acquise ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, d'où il résulte que les juges, qui n'étaient pas tenus, en l'absence de possibilité d"aménagement de la peine ab initio, de motiver spécialement leur décision au regard de la situation matérielle, familiale et sociale du prévenu, ont nécessairement apprécié que toute autre sanction que l'emprisonnement sans sursis était inadéquate, et dès lors que l'attitude de celui-ci devant les juges pouvait être prise en compte pour adapter la sanction à sa personnalité, ainsi que l'exige l'article 132-19, alinéa 2 du code pénal, sans méconnaître le principe visé par la seconde branche du moyen, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

FIXE à 2 500 euros la somme que M. Y... devra payer à la société MMA Iard au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le onze septembre deux mille dix-huit ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 17-85030
Date de la décision : 11/09/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 03 juillet 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 11 sep. 2018, pourvoi n°17-85030


Composition du Tribunal
Président : M. Soulard (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, Me Rémy-Corlay

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.85030
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