LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 385 du code de procédure civile ;
Attendu que l'instance s'éteint à titre principal par l'effet du désistement d‘instance ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que sur des poursuites de saisie immobilière engagées par la société Banque CIC Ouest (la banque) à l'encontre de M. X... sur le fondement d'un acte de prêt notarié, un jugement d'orientation, confirmé par un arrêt du 14 novembre 2014, a constaté que M. X... avait renoncé à se prévaloir de la prescription de la créance de la banque et a ordonné la vente forcée ; que, par jugement du 9 octobre 2015, un juge de l'exécution a constaté le désistement de la banque de la procédure de saisie immobilière suite au règlement de la créance ; qu'un arrêt de la Cour de cassation (1re Civ., 4 novembre 2015, pourvoi n° 15-12.024 ) ayant cassé l'arrêt du 14 novembre 2014, M. X... a saisi la cour d'appel de renvoi ;
Attendu que pour statuer sur les contestations formées par M. X..., l'arrêt retient que le paiement intégral de la créance a été opéré par ce dernier en vertu de l'exécution provisoire attachée à l'arrêt du 14 novembre 2014, pour éviter l'adjudication de son bien immobilier, et qu'il n'avait pas l'intention de régler définitivement sa dette ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le jugement du juge de l'exécution du 9 octobre 2015 constatant le désistement de la banque avait mis fin à la procédure de saisie immobilière, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 28 mars 2017, entre les parties, par la cour d'appel d'Angers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ; le condamne à payer à la société Banque CIC Ouest la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six septembre deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP de Chaisemartin et Doumic-Seiller, avocat aux Conseils, pour la société Banque CIC Ouest
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré prescrite la créance de la Banque CIC Ouest par acquisition de la prescription biennale de l'article L. 137-2 du code de la consommation et condamné la Banque à verser à Monsieur Franck X... la somme de 182.300,65 € avec intérêts au taux légal à compter du 15 septembre 2015.
AUX MOTIFS QUE 1) Sur les effets du paiement du 16 septembre 2015, la banque CIC Ouest estime que l'action de Monsieur X... est désormais irrecevable dans la mesure où il a réglé les sommes dues au titre du prêt immobilier ce qui a eu pour effet d'éteindre la créance de la banque. Monsieur X... soutient qu'il n'a effectué le paiement de la somme de 181.252,61 euros que pour éviter l'adjudication de l'immeuble saisi que la banque poursuivait au vu de l'arrêt exécutoire de la cour d'appel de Rennes du 18 novembre 2014 parce qu'une audience d'adjudication était fixée au 18 septembre 2015. Il résulte du courrier officiel du 16 septembre 2015 de l'avocat de Monsieur X... à l'avocat de la banque CIC que : « ce règlement intervient uniquement en vertu de l'exécution provisoire attachée à l'arrêt rendu par la cour d'appel de Rennes contre lequel mon client a inscrit un pourvoi. Il ne s'agit en aucune façon d'une reconnaissance par Monsieur X... du bien-fondé de la réclamation du CIO. Dans la mesure où ce paiement éteint la créance du CIO, je vous demande de bien vouloir vous désister de la procédure d'adjudication que vous avez mise en place. Je vous remercie de me confirmer que vous ne poursuivrez pas la vente à l'audience du vendredi 18 septembre prochain. » C'est donc de manière infondée que la banque CIC Ouest considère que Monsieur X... a effectué ce paiement afin de régler les sommes qu'il devait au titre du prêt immobilier et en pleine connaissance de cause. Il est évident qu'en effectuant ce paiement, Monsieur X... n'entendait pas solder sa créance. Effectuer un versement équivalent au montant de la créance de la banque majorée des frais de saisie immobilière était le seul moyen pour lui d'éviter l'adjudication d'un bien immobilier qu'il entendait préserver. Le courrier de son avocat indique expressément que le versement est opéré en vertu de l'exécution provisoire attachée à l'arrêt rendu par la cour d'appel de Rennes. Le débat institué par le créancier sur l'identification du titre de créance est indifférent. Comme le souligne le créancier, il est exact que l'arrêt confirmant le jugement d'orientation mentionnant le montant de la créance ne condamne pas le débiteur à paiement et que le titre exécutoire de créance demeure toujours l'acte notarié de prêt immobilier à l'origine de la saisie. Ces observations ne permettent pas de considérer toutefois que Monsieur X... a voulu régler définitivement sa dette et qu'il n'y a donc plus rien à juger, comme il le soutient. En effectuant le versement par référence à l'exécution provisoire attachée à l'arrêt de la cour d'appel, l'avocat de Monsieur X... a exprimé clairement l'intention de son client d'éviter par le versement de la somme, la vente forcée du bien à la barre du tribunal. Monsieur X... manifestait ainsi son intention de ne donner qu'un caractère provisionnel à ce paiement. Il n'a pas ainsi renoncé à sa contestation relative à la prescription de la créance. 2) Sur la prescription, en l'espèce, Monsieur X... a souscrit par acte notarié du 28 avril 2006 auprès de la banque CIO devenue CIC Ouest un prêt immobilier dénommé « CIC Immo prêt modulable » portant sur une somme de 153.452 € remboursable en 180 termes successifs de 1 138,91 euros chacun, payable le 25 de chaque mois. Au terme des conditions de ce prêt, les sommes dues seront de plein droit et immédiatement exigibles notamment si l'emprunteur est en retard de plus de 30 jours dans le paiement d'une échéance et le prêteur en avertira l'emprunteur par simple courrier. Il n'est pas contesté que le prêt est soumis aux dispositions du code de la consommation et notamment à l'article L. 137-2. Il résulte d'un courrier du 24 février 2012 adressé par CIC Ouest à Monsieur X... : - que le 12 mars 2009 la banque l'avait mis en demeure de régler une somme de 168.219,29 euros comprenant notamment le prêt immobilier visé ci-dessus pour la somme de 142.969,11 euros, - que le 25 août 2009, Monsieur X... a versé à la banque une somme de 11.000 € régularisant notamment quatre échéances du prêt soit celles courant de janvier à avril 2009, - que Monsieur X... a sollicité le 31 mars 2009 vouloir reprendre le cours normal de remboursement des prêts mais qu'il n'a pas reçu de réponse et qu'il n'a rien réglé, - que la banque lui réclame le 24 février 2012 les échéances de mai 2009 à février 2012 soit la somme de 40.549,08 €. Devant le juge de l'exécution de Saint-Malo, Monsieur X... a soutenu à titre principal que la créance de la banque était prescrite. Le juge, se référant au(x) terme(s) du courriel du 27 février 2012 par lequel Monsieur X... avait déclaré : « je ne conteste pas la somme que je vous dois. Mes revenus personnels ne peuvent pas honorer seuls la totalité des échéances mensuelles. Depuis l'année 2009, je suis à la recherche d'un financement... », a considéré que M. X... reconnaissait sa créance et avait renoncé à la prescription. Il apparaît également que Monsieur X... a fait déposer par son avocat devant le juge de l'exécution de Saint-Malo le 6 décembre 2012 des conclusions dans lesquelles il ne faisait pas état de la prescription, qu'il soulevait à titre principal la non exigibilité des créances qui lui étaient réclamées au titre du prêt et à titre subsidiaire, sollicitait un report de paiement des sommes dues afin de lui permettre de vendre l'immeuble pour couvrir la créance de la banque. Au terme des dispositions de l'article 2250 du code civil : seule une prescription acquise est susceptible de renonciation. Au terme de l'article 2251 du code civil, la renonciation à la prescription est expresse ou tacite. La renonciation tacite résulte de circonstances établissant sans équivoque la volonté de ne pas se prévaloir de la prescription. Il appartient au créancier d'apporter la preuve de la volonté non équivoque du débiteur à se prévaloir de la prescription. M. X... est chef d'entreprise mais le prêt litigieux est un prêt personnel pour lequel il doit être considéré comme un consommateur. Il n'est pas justifié qu'il dispose de connaissances juridiques particulières. Il a existé pendant plusieurs années une controverse jurisprudentielle et doctrinale sur l'application de la prescription biennale aux prêts immobiliers. Ce n'est que le 28 novembre 2012, dans un arrêt largement commenté que la Cour de cassation a jugé que les crédits immobiliers consentis aux consommateurs par des organismes de crédit constituaient des services financiers fournis par des professionnels, qu'ils n'étaient pas soumis à la prescription quinquennale mais à la prescription biennale. Le courriel du 27 février 2012 de Monsieur X... est antérieur à cet arrêt. Il ne peut être considéré, dans ces conditions, que Monsieur X... ait pu renoncer implicitement et en pleine connaissance de cause à cette prescription biennale. Par ailleurs, les moyens de défense développés par Monsieur X... devant le juge de l'exécution dans ses conclusions du 6 décembre 2012 ne suffisent pas à exprimer une volonté non équivoque de renonciation à la prescription biennale puisqu'il pouvait proposer cette fin de non-recevoir en tout état de cause. La banque a mis en demeure M. X... par lettre recommandée du 20 mars 2009 d'avoir à payer la totalité des sommes restant dues échues et à échoir. M. X... ne le conteste plus. C'est à juste titre que le premier juge a considéré que la lettre du 20 mars 2009 avait entraîné déchéance du terme. Si la banque dans son courrier du 24 février 2012, faisant référence à la demande de M. X... du 31 mars 2009 de pouvoir reprendre le cours normal de remboursement des prêts à laquelle elle n'avait apporté aucune réponse, se borne à réclamer les échéances en retard de mai 2009 à février 2012, il ne peut être considéré que, par ce courrier resté sans suite, elle a renoncé à se prévaloir de cette déchéance acquise depuis près de trois années. Elle ne l'a pas considéré puisqu'elle s'est prévalue dans le commandement de saisie immobilière de la déchéance du terme de 2009 et a établi ses décomptes par référence à une déchéance acquise en 2009. Il résulte de ces éléments que suite à la mise en demeure valant déchéance du terme du 20 mars 2009 et au paiement effectué par M. X... le 25 août 2009, la prescription biennale était acquise pour l'ensemble des sommes dues lors de la délivrance du commandement de saisie immobilière du 13 août 2012. Le jugement sera infirmé en ce qu'il a écarté la prescription et validé la procédure de saisie immobilière. 3) Sur la demande de paiement de la somme de 182.300,65 €, M. X... a versé à la banque le 15 septembre 2015 la somme de 181.252,61 € et il a été saisi sur son compte bancaire le 9 décembre 2014 une somme de 1.048,04 € selon saisie attribution du 5 décembre 2014 effectuée par Me B..., huissier de justice à Saint-Malo sur instruction du conseil du CIC Ouest afin d'interrompre la prescription (pièces 21-1 et 21-2 de l'intimée). Dès lors que la créance de la banque est éteinte par prescription, M. X... qui en avait effectué le paiement en exprimant de manière précise et explicite des réserves tenant à l'issue de la procédure de contestation de la créance toujours en cours suite au pourvoi en cassation qu'il avait introduit, est fondé à obtenir restitution des sommes versées et saisies de ce chef, avec intérêts au taux légal à compter du 15 septembre 2015 comme sollicité ;
1) ALORS QUE le désistement d'instance emporte extinction de l'instance ; que dès lors, en l'espèce, en se bornant à retenir qu'en réglant les sommes dues au titre du prêt immobilier, M. Franck X... n'avait pas renoncé à sa contestation relative à la prescription de sa créance, sans rechercher, comme il lui était demandé, si le jugement rendu le 9 octobre 2015 par le juge de l'exécution, qui mentionnait qu'« à l'audience d'adjudication du 18 septembre 2015, Maître Guilloux conseil du débiteur saisi a déclaré que sa dette était réglée y compris les frais de la procédure » et constatait dans son dispositif, le désistement de la procédure de saisie immobilière par la Banque CIC Ouest , n'avait pas mis fin à la procédure de saisie immobilière, la cour de renvoi a privé sa décision de base légale au regard des articles 394 et 385, alinéa 1er, du code de procédure civile ;
2) ALORS QU'en tout état de cause, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office, aucune contestation ni aucune demande incidente ne peut, sauf dispositions contraires, être formée après l'audience d'orientation, à moins qu'elle porte sur les actes de procédure postérieurs à celle-ci ; qu'en l'espèce, il est constant que le 16 septembre 2015, soit postérieurement à l'audience d'orientation du 6 décembre 2013, M. Franck X... a réglé à la Banque CIC Ouest la somme de 182.300,65 € et qu'il a ensuite demandé que la Banque CIC Ouest soit condamnée à lui rembourser cette somme ; que cette demande, ayant été formée pour la première fois devant elle, la cour de renvoi était tenue de prononcer d'office son irrecevabilité, le paiement de la somme de 182.300,65 € ne constituant pas un acte de procédure ; qu'en faisant droit à la demande de remboursement formée par le débiteur saisi, la cour de renvoi a violé l'article R. 311-5 du code des procédures civiles d'exécution ;
3) ALORS QUE, et à titre également subsidiaire, le paiement effectué pour éteindre une dette ne peut être répété au seul motif que le délai de prescription était expiré ; qu'en l'espèce, la cour de renvoi a retenu que « comme le souligne le créancier, il est exact que l'arrêt confirmant le jugement d'orientation mentionnant le montant de la créance ne condamne pas le débiteur à paiement et que le titre exécutoire de créance demeure toujours l'acte notarié de prêt immobilier à l'origine de la saisie », ce dont il résulte que cet arrêt ne constituait pas, par lui-même, un titre exécutoire permettant d'obtenir la restitution des sommes versées et que M. Franck X... s'était volontairement acquitté de sa dette, afin d'éviter la vente forcée de son bien immobilier ; qu'en considérant pourtant que dès lors que la créance de la banque était éteinte par prescription, M. Franck X..., qui en avait effectué le paiement en exprimant de manière précise et explicite des réserves tenant à l'issue de la procédure de contestation de la créance toujours en cours suite au pourvoi en cassation qu'il avait introduit, était fondé à obtenir restitution des sommes versées et saisies de ce chef, avec intérêts au taux légal à compter du 15 septembre 2015 comme sollicité, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations au regard de l'article 2249 du code civil, violant ainsi ledit article.