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05/09/2018 | FRANCE | N°17-50028

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 05 septembre 2018, 17-50028


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 9 du code de procédure civile, ensemble l'article 19, 1°, de l'accord de coopération en matière de justice entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République unie du Cameroun du 21 février 1974 ;

Attendu, selon le premier de ces textes, qu'il incombe au juge d'examiner tous les éléments de preuve légalement admissibles qui lui sont soumis par une partie au soutien de sa prétention ; que le second, qui ne détermine que

les modalités de délivrance réciproque, sans frais, des actes d'état civil déte...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 9 du code de procédure civile, ensemble l'article 19, 1°, de l'accord de coopération en matière de justice entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République unie du Cameroun du 21 février 1974 ;

Attendu, selon le premier de ces textes, qu'il incombe au juge d'examiner tous les éléments de preuve légalement admissibles qui lui sont soumis par une partie au soutien de sa prétention ; que le second, qui ne détermine que les modalités de délivrance réciproque, sans frais, des actes d'état civil détenus par chaque Etat contractant, n'a pas vocation à régir les modalités des vérifications par les autorités consulaires françaises de l'authenticité des actes d'état civil des Français dressés au Cameroun, lesquelles s'effectuent en accord avec les autorités locales, selon les prescriptions de la loi étrangère et les usages en vigueur dans le pays ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme Y... a sollicité la transcription sur les registres de l'état civil français de l'acte de naissance n° 4922/99, dressé le 9 mars 1999, par l'officier d'état civil de Nylon-Bassa, Douala (Cameroun), sur la déclaration de naissance n° 109 bis/99 du centre de santé [...], selon lequel Ismaël X... est né, le [...], d'Elisabeth Y..., née le [...] à Douala (Cameroun), sans mention d'une filiation paternelle, reconnu à Stains (93) le 8 décembre 2003 par André B..., né le [...] à Brazzaville (Congo), français pour avoir acquis la nationalité française par déclaration souscrite en application de l'article 21-2 du code civil ; que sa demande ayant été rejetée, elle a assigné le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Nantes et l'agent judiciaire de l'Etat aux fins de transcription et indemnisation de son préjudice ;

Attendu que, pour accueillir la demande, l'arrêt retient que le ministère public qui a la charge de la preuve du caractère apocryphe de l'acte de naissance ne peut faire état des vérifications effectuées par les autorités consulaires françaises auprès du centre médical [...], dès lors que l'accord franco-camerounais autorise seulement la délivrance à l'autorité consulaire française des expéditions des actes de l'état civil dressés par les autorités locales camerounaises, ce qui ne permet pas des investigations auprès des maternités, lesquelles seraient de nature à porter atteinte à la souveraineté de l'Etat camerounais ;

Qu'en statuant ainsi, en écartant des débats, sans examen de leur valeur et de leur portée, des éléments légalement admissibles, alors qu'elle ne relevait aucune opposition des autorités locales compétentes au contrôle du registre des déclarations de naissance qu'elles détenaient, qu'elles ont présenté et dont elles ont remis une photocopie du feuillet du jour de naissance considéré, ce qui excluait toute atteinte à la souveraineté de l'Etat requis, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et attendu qu'il y a lieu de mettre hors de cause, sur sa demande, l'Agent judiciaire de l'Etat dont la présence devant la cour d'appel de renvoi n'est pas nécessaire à la solution du litige ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare irrecevables les vérifications menées par les autorités consulaires au centre médical [...] au Cameroun, écarte des débats la lettre du 20 juillet 2009 du Consul général de France à Douala (Cameroun) et ordonne la transcription, dans les registres du centre d'état civil de Nylon-Bassa à Douala, de l'acte de naissance de M. Ismael X... né le [...] à Douala, condamne le Trésor public à payer à Mme Y..., ès qualités, une somme de 2 000 euros et à M. Ismaël X... la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 12 juin 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;

Met hors de cause l'Agent judiciaire de l'Etat ;

Condamne M. X... et Mme Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq septembre deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par le procureur général près la cour d'appel de Rennes.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevables les vérifications in situ menées par les autorités consulaires au centre médical [...] au Cameroun, comme étant illicites, en vertu des dispositions de l'article 19, 1°, de l'accord de coopération en matière de justice entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République unie du Cameroun en date du 21 février 1974, écarté des débats le courrier du 20 juillet 2009 du consulat général de France à Douala adressé au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Nantes, mais seulement en sa partie où il relate une entrevue qui se serait tenue au centre médical [...], après la naissance de l'intéressé, entre un agent du Poste et l'infirmière principale de l'établissement, ainsi que la pièce 4 annexée audit courrier : photocopie du registre des déclarations de naissance du centre médical [...] pour la journée du 9 février 1999, et confirmé le jugement en ce qu'il a ordonné la transcription, dans les registres de l'état civil français, de l'acte de naissance n°4922/99 dressé le 9 mars 1999 dans les registres du centre d'état civil de Nylon-Bassa, Douala (Cameroun) de M. Ismaël X..., né le [...] à Douala (Cameroun) et débouté le ministère public de ses demandes reconventionnelles tendant à voir dire que M. Ismaël X... n'est pas français et que la mention prévue par l'article 28 du code civil soit ordonnée.

AUX MOTIFS QUE :

L'article 47 du code civil dispose que tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ;

Ce texte institue une présomption de régularité de l'acte civil établi à l'étranger selon les formes usitées dans le pays où il a été dressé, sauf en cas de fraude ;

II appartient à la cour de rechercher si les actes étrangers produits font foi au sens de l'article 47 du code civil et satisfont aux conditions essentielles de validité qui y sont énoncées ;

En l'espèce, le ministère public expose que dans le cadre d'une procédure d'authentification de l'acte de naissance de l'intéressé, admise par les autorités camerounaises, les autorités consulaires françaises ont, par courrier du 16 juin 2009, demandé au centre d'état civil de Nylon-Bassa une copie du registre-souche de l'acte de naissance, ainsi que celle de la déclaration de naissance s'y rapportant, que ces pièces ont été adressées par le centre d'état civil de Nylon-Bassa, qu'un agent consulaire s'est rendu au centre médical [...] pour rencontrer l'infirmière principale de l'établissement, que les registres des déclarations de naissance de 1999, très bien tenus et en parfait état de conservation selon la note du Consulat général de France à Douala du 19 juillet 2010, ne contiennent aucune déclaration de naissance n°109 Bis pour la journée du 9 février 1999, date de naissance supposée de l'intéressé, qu'il conclut qu'il n'est pas contestable que la déclaration de naissance n°109 Bis établie le 12 février 1999, d'origine incertaine, car n'émanant pas du centre médical [...], est un faux document, communiqué à l'officier d'état civil qui a dressé, au regard des mentions y figurant, l'acte de naissance de l'intéressé, ajoutant que le seul fait que l'acte de naissance en question figure effectivement dans les registres du centre d'état civil de Nylon-Bassa, ne signifie aucunement que cet acte serait probant au sens de l'article 47 du code civil, que les mentions figurant sur l'acte de naissance découlent d'un document extérieur (déclaration de naissance) qui est un faux, au regard des vérifications effectuées par les autorités consulaires, concluant qu'en l'absence d'état civil certain, la reconnaissance de paternité effectuée par M. André, Victorien B... est sans effet, qu'Ismaël X... n'a donc pas de lien de filiation légalement établi à l'égard d'un parent français, de sorte que les conditions de l'article 18 du code civil, ne sont pas réunies et que celui-ci ne justifiant d'aucun titre à la nationalité française, son extranéité sera constatée ;

M. Ismaël X... réplique que son acte de naissance camerounais portant le numéro 4922/99 a été authentifié par le Consul général de France à Douala le 16 mars 2004, que le centre spécial d'état civil de Nylon-Bassa avait établi le 26 novembre 2003 un certificat d'authenticité dudit acte, que la cour d'appel de Rennes est territorialement incompétente pour connaître de l'action négatoire de nationalité française qui relève de la compétence exclusive du tribunal de grande instance de Paris par application de l'article 1039 du code de procédure civile, qu'il objecte que si la procédure de levée d'acte est licite au titre de la vérification d'authenticité des actes d'état civil, la vérification consulaire in situ à la maternité camerounaise où la mère a accouché, est illicite tant au regard du droit international qu'au regard des droits nationaux des deux Etats, qu'il souligne que le jugement déféré a relaté les fortes incertitudes, approximations, lacunes, zones d'ombre qui pèsent sur les vérifications opérées, que les vérifications opérées au centre médical [...] ont été faites sans que le ministère public invoque de base juridique ou une coutume internationale et en violation du secret médical et du respect de la vie privée, s'agissant d'informations personnelles, qu'il demande d'écarter du débats le courrier consulaire relatant une entrevue tenue au Centre médical [...] 10 ans après sa naissance, entre un agent du Poste et l'infirmière principale de l'établissement et les documents annexés à ce courrier, qu'il estime que le ministère public est totalement défaillant dans l'administration de la preuve qui lui incombe de ce que la déclaration de naissance (page volante non identifiable) qui a permis de dresser l'acte de naissance en question, serait un faux document ;

Il convient de constater au préalable que M. Ismaël X... produit aux débats le certificat de nationalité française qui lui a été délivré le 18 mars 2005 par le greffier en chef du tribunal d'instance d'Aubervilliers et qu'en conséquence, le ministère public, qui conteste la nationalité française de l'appelant, a la charge de la preuve par application de l'article 30, alinéa 2, du code civil, la cour précisant que l'acte de naissance de M. B... porte mention qu'il s'est marié à Blois le 24 juillet 1993 avec Mme Brigitte C... ;

Les premiers juges pour faire droit à la demande de transcription de l'acte de naissance établi à l'étranger, ont relevé que le seul fait qu'aucune déclaration de naissance n°109 Bis ne figure sur la page du registre de l'établissement de santé, est insuffisant à établir que la déclaration de naissance n°109 Bis soit un faux, que la vérification du registre hospitalier qui ne saurait se voir reconnaître une valeur probante particulière, dans des conditions non précisées par des personnes non identifiées en 2009, soit dix ans après l'établissement des actes, ne permet nullement de déduire de la seule copie d'une page du registre des naissances, que la déclaration de naissance, qui devrait normalement y figurer, est mensongère et ne correspond à aucune naissance, aucun élément ne permettant d'écarter l'existence d'une simple erreur de tenue du registre, que par ailleurs, l'authenticité de l'acte de naissance dressé le 9 mars 1999 sur la foi de la déclaration de naissance du 12 février 1999 a pu être vérifiée ;

Ismaël X... soutient que compte tenu des deux levées d'acte revenues positives les 16 mars 2004 et 29 juin 2009 au Consulat général de France à Douala, l'authenticité de l'acte de naissance litigieux doit être considérée établie et la transcription ordonnée, alors que l'appréciation portée par le Consulat général de France à Douala sur l'authenticité dudit acte, en l'absence de décision judiciaire irrévocable se prononçant sur l'extranéité de l'intéressé, ne fait pas obstacle à la contestation par le ministère public de sa force probante au sens de l'article 47 du code civil, s'agissant d'un acte de l'état civil étranger ;

Selon le ministère public, le registre de déclaration de naissance qui ne mentionne pas le nom de l'intéressé à la date du 9 février 1999, s'analyse en une donnée extérieure à l'acte de naissance au sens de l'article 47 du code civil, lequel est en apparence régulier en la forme, mais qui empêche d'établir la réalité factuelle de l'événement de la naissance d'Ismaël X... le 9 février 1999, issu d'Elisabeth Y..., tel que rapporté dans ledit acte, le ministère public ajoutant que l'absence de déclaration de naissance n°109 Bis pour la journée du 9 février 1999 au nom d'Ismaël X..., ne correspond à aucune erreur matérielle dans la tenue du registre de naissance, alors que ce registre suit un parfait ordre chronologique, lequel met en évidence que trois naissance ont été mentionnées sur le registre à la date du 9 février 1999 et correspondant aux mères suivantes, soit respectivement :

- n° 109 : Rose D..., 33 ans
- n° 110 : Célestine E..., 24 ans
- n° 111 :Elisabeth H..., 24 ans ;

Ismaël X... se prévaut de l'illicéité de la vérification consulaire in situ à la maternité (Centre médical [...] au Cameroun) où sa mère a accouché, donnant lieu à la consultation du registre des déclarations de naissance, sur le fondement des dispositions de l'article 19, 1°, de l'accord de coopération en matière de justice entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République unie du Cameroun en date du 21 février 1974 qui prévoient entre eux la délivrance sans frais des expéditions des actes de l'état civil dressés sur leurs territoires respectifs lorsque la demande en est faite dans un intérêt administratif dûment spécifié ou en faveur de leurs citoyens indigents ;

L'article 20 2° de l'accord précité prévoit que les demandes faites par les autorités françaises sont transmises aux autorités locales camerounaises par le représentant de l'Etat de la France ou son délégué territorialement compétent.
La demande spécifiera sommairement le motif invoqué ;

En l'espèce, le ministère public produit le dossier consulaire constitué de six feuillets, en particulier le feuillet n°2 de la pièce 1, qui est un courrier daté du 16 juin 2009 émanant du Consulat général de France à Douala (en la personne de l'adjoint administratif principal de chancellerie, chargé de l'état civil) adressé à Monsieur l'officier d'état civil, Centre d'état civil spécial de Nylon-Bassa, arrondissement de Douala III, département de Wouri, région du Littoral sollicitant au titre d'un acte de naissance, pour un usage administratif, une photocopie du registre-souche (et non une copie manuscrite) de l'acte de naissance suivant: n°4922/99 dressé le 9 mars 1999 en votre centre ainsi que la déclaration de naissance s'y rapportant en ajoutant, dans l'hypothèse où vous ne disposeriez pas, dans vos archives, de l'acte ci-dessus référencé, je vous serais reconnaissante de bien vouloir m'en informer par écrit ;

le Consul général de France à Douala a adressé au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Nantes un courrier en date du 20 juillet 2009 (feuillet n°1) en joignant 4 pièce annexes (en particulier, 3 et 3' : la réponse du centre spécial d'état civil de Nylon-Bassa parvenue au Poste le 29 juin 2009, copie de l'acte de naissance n°4922/99 déclaration de naissance n°109 bis/99, et 4: la photocopie du registre des déclarations de naissance du centre médical [...] pour la journée du 9 février 1999), relatant la demande faite par courrier du 16 juin 2009, en précisant : la numérotation de l'acte - 4922 - semble extrêmement élevée pour un acte dressé début mars, ajoutant : le 29 juin 2009, le centre spécial de Nylon-Bassa a fait parvenir au Poste les deux pièces demandées. La déclaration de naissance jointe à la souche porte le n°109 bis/99. Le 19 juin 2009, un agent du Poste s 'est rendu au centre médical [...] et a été reçu par l'infirmière principale de l'établissement. Les registres des déclarations de naissance de 1999, très bien tenus et en parfait état de conservation, ne laissent apparaître aucune déclaration de naissance n°109 bis pour la journée du 9 février 1999. L'infirmière principale a, par ailleurs, fait savoir que cette numérotation "bis" est plutôt utilisée dans le cas de naissance de "jumeaux", ce qui n'est pas le cas dans le présent dossier. Pour information, la déclaration de naissance n°109/99 correspond à la naissance d'un enfant au centre médical [...] dont la mère s'appelle Rose D..., âgée de 33 ans au moment de la naissance ;

Il en résulte qu'en violation de l'accord précité du 21 février 1974, autorisant la délivrance auprès de l'autorité consulaire française, des expéditions des actes de l'état civil dressés par les autorités locales camerounaises, tels qu'un acte de naissance, l'officier de l'état civil consulaire à Douala a accepté de se faire remettre une photocopie du registre des déclarations de naissance du centre médical [...] pour la journée du 9 février 1999, qui relate l'accouchement de trois autres femmes, document médical qui ne peut recevoir la qualification d'acte de l'état civil ;

Si dans le cadre de la procédure de vérification de l'authenticité d'un acte de l'état civil établi à l'étranger, l'officier de l'état civil consulaire français, peut procéder à une levée d'acte ou à une vérification in situ, ces mesures d'investigation doivent se limiter aux services d'état civil et ne sauraient s'étendre aux maternités ;

En l'espèce, les services consulaires qui avaient sollicité auprès de l'état civil camerounais la copie du registre-souche de l'acte de naissance n°4922/99 et la déclaration de naissance n°109 bis/99 eu égard à une suspicion de fraude (la numérotation de l'acte- 4922- semble extrêmement élevée pour un acte dressé début mars), ont procédé à des déductions à partir de la photocopie du registre des déclarations de naissance du centre médical [...] pour la journée du 9 février 1999, non sollicité, mais qui leur a été adressé en supplément, alors que les vérifications utiles visées à l'article 47 du code civil permettant de disposer d'autres actes ou pièces détenus, de données extérieures ou d'éléments tirés de l'acte lui- même, doivent s'exercer dans le respect des engagements internationaux de la France, en l'espèce envers le Cameroun qui est un Etat souverain sur son territoire ;

En conséquence, il convient, comme le sollicite M. X..., de déclarer irrecevables les prétendues vérifications in situ menées par les autorités consulaires au sein du centre médical [...] , comme étant illicites et d'écarter des débats le courrier consulaire en date du 20 juillet 2009, mais seulement dans sa partie où il relate une entrevue qui se serait tenue au Centre médical [...], 10 ans après la naissance de l'intéressé, entre un agent du Poste et l'infirmière principale de l'établissement et la pièce 4 annexée: la photocopie du registre des déclarations de naissance du centre médical [...] pour la journée du 9 février 1999, à l'exclusion des trois autres pièces transmises :

1 - demande de transcription d'acte de naissance de la part de Mme Elisabeth Y..., domiciliée [...] datée de novembre 2007,
2 - demande du Poste du 16/6/2009 de photocopies de registre-souche et de déclaration de naissance adressée au centre spécial de Nylon-Bassa,
3 - et 3' - réponse du centre spécial d'état civil de Nylon-Bassa parvenue au Poste le 29/06/2009 (copie de l'acte de naissance n°4922/99 + déclaration de naissance n°109 bis/99) ;

L'acte de naissance produit en original par M. X... portant le n°4922/99 établi par le centre d'état civil de Nylan-Bassa au Cameroun, mentionne la naissance de Ismaël X... le 9 février 1999 à Douala (Cameroun), dont la mère est Elisabeth Y..., née à Douala le [...] , acte dressé le [...] sur la déclaration de naissance n°109 bis 99 du C.M.A [...] ;

Cette déclaration de naissance qui s'analyse en une donnée extérieure ou un élément tiré de l'acte lui-même au sens de l'article 47 du code civil, n'est pas de nature à remettre en cause l'authenticité et la validité de l'acte de naissance litigieux, dès lors que le ministère public ne démontre pas que l'attribution d'une numérotation "bis" à cette déclaration de naissance résulterait d'un ajout irrégulier ou d'une fraude, ou que celle-ci doive être qualifiée de "fausse déclaration" ou de mensongère, l'acte de naissance camerounais portant le numéro 4922/99 ayant par ailleurs été authentifié par le Consul général de France à Douala par courrier du 16 mars 2004 avec la mention suivante (transmise au tribunal d'instance d'Aubervilliers lors de la demande d'authentification de l'acte de naissance d'Ismaël X... à l'occasion de l'instruction de la demande de certificat de nationalité française de M. André B...) : cet acte a été vérifié par un agent de ce poste et est authentique ;

Le ministère public échoue à démontrer que la déclaration de naissance n°109 bis 99 du C.M.A [...] serait un faux matériel ou intellectuel ;

Faute par le ministère public d'établir que l'acte de naissance litigieux serait un acte irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a dit que c'est sur la foi d'éléments insuffisants que le ministère public entend contester la régularité de l'acte de naissance d'Ismaël X..., qui sera jugé probant au sens de l'article 47 du code civil ;

Le jugement déféré sera également confirmé en ce qu'il a dit que la filiation de l'intéressé à l'égard d'un ressortissant français est établie suivant acte de reconnaissance dressé à Stains (93) le 8 décembre 2003, que c'est à bon droit que Mme Y... sollicite es qualités de représentante légale de son fils, alors mineur, la transcription de son acte de naissance sur les registres de l'état civil et fait droit à la demande de transcription, sans qu'il apparaisse justifié de prononcer une astreinte, déclaré prescrites les demandes indemnitaires de Mme Y... es qualités, la prescription étant acquise depuis le 31 décembre 2012, eu égard au refus opposé par le parquet de Nantes le 10 septembre 2012, dès lors qu'il est admis que la déchéance quadriennale des créances sur l'Etat prévue par la loi du 31 décembre 1968, commence à courir le premier jour de l'année au cours de laquelle s'est produit le fait générateur du dommage allégué ;

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté le Procureur de la République de ses demandes reconventionnelles tendant à annuler le certificat de nationalité française délivré à M. Ismaël X... le 18 mars 2005 par le greffier en chef du tribunal d'instance d'Aubervilliers et à dire qu'il n'est pas français ;

ALORS QUE l'accord de coopération en matière de justice du 21 février 1974 entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République unie du Cameroun a pour objet de simplifier les relations entre ces Etats dans le domaine judiciaire et de l'état civil, en prévoyant notamment, en son article 19 1°, la faculté pour chaque Etat de délivrer sans frais des expéditions des actes de l'état civil dressés sur leurs territoires respectifs lorsque la demande en est faite dans un intérêt administratif dûment spécifié ou en faveur de leurs citoyens indigents ; qu'en revanche, cet accord n'a pas vocation à régir les modalités selon lesquelles les autorités consulaires françaises effectuent, en accord avec les autorités locales, des vérifications de l'authenticité des actes d'état civil des Français dressés au Cameroun, ces vérifications s'effectuant conformément à la loi locale et aux pratiques admises par les autorités camerounaises ; que, par conséquent, des vérifications effectuées par des autorités consulaires françaises au Cameroun ne peuvent, en aucun cas, être déclarées illicites sur le fondement de l'accord de coopération franco-camerounais du 21 février 1974 ; qu'aussi, en déclarant irrecevables comme illicites, sur le fondement de l'article 19, 1° de cet accord, les vérifications in situ menées par les autorités consulaires françaises au centre médical [...], et en écartant des débats le courrier du 20 juillet 2009 du consul général de France à Douala au procureur de la République du tribunal de grande instance de Nantes dans sa partie où il relate une entrevue entre un agent du poste et l'infirmière principale du centre médical [...], ainsi que la photocopie du registre des déclarations de naissance dudit centre médical pour la journée du 9 février 1999, la cour d'appel a fait une mauvaise application de l'accord de coopération en matière de justice entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République unie du Cameroun du 21 février 1974, et violé l'article 9 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 17-50028
Date de la décision : 05/09/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

CONVENTIONS INTERNATIONALES - Accords et conventions divers - Accord de coopération en matière de justice du 21 février 1974 entre la France et le Cameroun - Article 19, 1° - Délivrance des actes d'état civil sans frais - Domaine d'application - Exclusion - Cas - Modalité de vérification de l'authenticité des actes d'état civil

ETAT CIVIL - Acte de l'état civil - Acte dressé à l'étranger - Transcription - Refus - Cas - Acte irrégulier ou falsifié - Vérification par les autorités consulaires françaises - Conditions - Détermination - Portée

L'article 19, 1°, de l'accord de coopération en matière de justice entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République unie du Cameroun du 21 février 1974 ne détermine que les modalités de délivrance réciproque, sans frais, des actes d'état civil détenus par chaque Etat contractant, et n'a pas vocation à régir les modalités des vérifications par les autorités consulaires françaises de l'authenticité des actes d'état civil des Français dressés au Cameroun, lesquelles s'effectuent en accord avec les autorités locales, selon les prescriptions de la loi camerounaise et les usages en vigueur dans le pays. Viole ce texte et l'article 9 du code de procédure civile l'arrêt qui, pour accueillir une demande de transcription sur les registres de l'état civil français d'un acte de naissance camerounais, écarte, sans examen de leur valeur et de leur portée, les vérifications effectuées par les autorités consulaires françaises auprès d'une maternité camerounaise versées aux débats par le ministère public, alors qu'il résultait de ses propres constatations que ces pièces, recueillies dans des conditions excluant toute atteinte à la souveraineté de l'Etat requis, étaient légalement admissibles


Références :

article 19, 1°, de l'accord de coopération en matière de justice entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République unie du Cameroun du 21 février 1974

article 9 du code de procédure civile.

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 12 juin 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 05 sep. 2018, pourvoi n°17-50028, Bull. civ.Bull. 2018, I, n° 142.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Bull. 2018, I, n° 142.

Composition du Tribunal
Président : Mme Batut
Avocat(s) : SCP Foussard et Froger, SCP Sevaux et Mathonnet

Origine de la décision
Date de l'import : 12/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.50028
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