LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 5312-1, alinéa 1, 4°, L. 5422-13, alinéa 1, L. 5422-16, alinéa 1, et R. 5422-5 du code du travail, dans leur rédaction applicable au litige ;
Attendu, selon le premier de ces textes, que Pôle emploi a pour mission, notamment, d'assurer, pour le compte de l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage, le service de l'allocation d'assurance ; que, selon le troisième, les contributions afférentes au régime d'assurance chômage sont recouvrées et contrôlées par les URSSAF pour le compte de l'organisme gestionnaire susmentionné ; que, selon le dernier, l'employeur qui embauche pour la première fois un salarié qu'il est tenu en vertu du deuxième d'assurer contre le risque de privation d'emploi, adresse à cet effet un bordereau d'affiliation à Pôle emploi ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que si l'URSSAF peut, lors d'un contrôle, se prononcer sur l'application des règles d'assujettissement au régime d'assurance chômage aux fins de redressement des bases des contributions dues par l'employeur, elle est néanmoins liée par l'appréciation portée par Pôle emploi sur la situation du travailleur ; que la juridiction du contentieux général ne peut se prononcer sur la contestation du redressement par l'employeur qu'après avoir appelé en la cause le travailleur concerné ainsi que Pôle emploi, intéressés à la solution du litige ;
Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort, et les productions, qu'à la suite d'un contrôle portant sur l'année 2012, l'URSSAF d'Aquitaine (l'URSSAF) a notifié à la société Yaal une lettre d'observations en date du 3 avril 2014 comportant une régularisation, au titre des contributions à l'assurance chômage assises sur les rémunérations de son gérant, et un redressement, au titre de la réduction Fillon opérée sur ces mêmes rémunérations, puis une mise en demeure en date du 23 juin 2014 de payer la somme de 3 218 euros en cotisations et majorations de retard ; que la société a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;
Attendu que pour accueillir ce recours, le jugement énonce que si un dirigeant de société est exclu du régime de l'assurance chômage en sa qualité de mandataire social, il en bénéficie, en revanche, en sa qualité de salarié lorsqu'il a conclu un contrat de travail comportant des missions techniques distinctes de son mandat social ; qu'il retient que la société a conclu, le 1er mars 2012, un contrat de travail de consultant en systèmes informatiques avec M. Z... ; que celui-ci n'est devenu gérant de la société qu'à compter du 25 juin 2012, sans percevoir de rémunération à ce titre ; que pour justifier le redressement, l'URSSAF se contente de faire référence à une notification de Pôle emploi en date du 18 mars 2014 rejetant la participation du dirigeant à l'assurance chômage ; que, cependant, la preuve de l'existence d'un contrat de travail ou, s'il est apparent, de son caractère fictif, revient à celui qui s'en prévaut ; que l'URSSAF ne rapporte pas la preuve du caractère fictif du contrat de travail de M. Z... ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il constatait que l'assujettissement de M. Z... au régime d'assurance chômage avait fait l'objet d'une décision de refus de Pôle emploi, laquelle s'imposait à l'URSSAF, et sans qu'aient été appelés en la cause l'intéressé ainsi que Pôle emploi, le tribunal a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 2 février 2017, entre les parties, par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bordeaux ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Angoulème ;
Condamne la société Yaal aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze juillet deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour l'URSSAF d'Aquitaine.
Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR annulé le redressement portant sur une somme de 3.218 euros, soit 3.206 euros de cotisations et 339 euros de majorations de retard au titre de l'année 2012, d'AVOIR dit que l'URSSAF Aquitaine devra rembourser à la société Yaal la somme de 327 euros dont le paiement a été réalisé entre ses mains le 16 avril 2012 et d'AVOIR rejeté la demande d'indemnisation de l'URSSAF d'Aquitaine sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QU'à la suite d'un contrôle portant sur la société YAAL, l'URSSAF a notifié à l'entreprise une lettre d'observations, suivie d'une mise en demeure en date du 23 juin 2014 portant sur une somme de 3 218 euros, soit 3206 euros de cotisations et 339 euros de majorations de retard au titre de l'année 2012 ;
Sur le chef de redressement intitulé « assurance chômage et AGS affiliation des mandataires sociaux »
que l'article L.5422-13 du code du travail oblige tout employeur à assurer contre le risque de privation d'emploi tout salarié ; que l'article L.5422-13 du code du travail dispose que seules les personnes titulaires d'un contrat de travail participent au régime d'assurance chômage ; que les dirigeants de société sont exclus du régime d'assurance chômage en leur qualité de mandataires sociaux ; qu'ainsi, les personnes exclusivement titulaires d'un mandat ne contribuent ni au régime d'assurance chômage, ni au régime de garantie des salariés ; qu'en revanche, lorsque les conditions de cumul d'un mandat et d'un contrat de travail sont remplies, les dirigeants de ces sociétés participent à ce régime au titre de leur contrat de travail, dans les conditions de droit commun ; qu'ainsi, est considéré comme régulier le contrat de travail ayant pour objet l'exercice par le salarié de missions techniques distinctes de son mandat social ; qu'en l'espèce, le 1er mars 2012, la société YAAL a conclu un contrat de travail avec Monsieur Z... pour exercer les fonctions de consultant en systèmes informatiques, ce qui justifiait selon elle l'affiliation de celui-ci au régime d'assurance chômage ; que Monsieur Z... n'est devenu gérant de la société qu'à compter du 25 juin 2012 ; qu'il ne perçoit à ce titre aucune rémunération ; que l'URSSAF, pour justifier le redressement, se contente de faire référence à une notification de pôle emploi en date du 18 mars 2004 de rejet de la participation à l'assurance chômage, considérant que la décision de pôle emploi fait autorité en matière de réglementation de l'assurance chômage ; que cependant, en application de l'article 1353 du code civil, la preuve de l'existence du contrat de travail ou, s'il est apparent, de son caractère fictif, revient à celui qui s'en prévaut ; que par conséquent, l'URSSAF ne rapportant pas la preuve du caractère fictif du contrat de travail de Monsieur Z..., le redressement sur ce chef doit être annulé ;
ET QUE Sur le chef de redressement intitulé « réduction Fillon », en vertu de l'article L.241-13 du code de la sécurité sociale, «II. cette réduction est appliquée aux gains et rémunérations versés aux salariés au titre desquels l'employeur est soumis à l'obligation édictée par l'article L.5422-13 du code du travail-soit l'obligation d'assurance contre le risque de privation d'emploi- et aux salariés mentionnés au 3° de l'article L.5424-1 du même code -soit les salariés relevant des régimes spéciaux de la sécurité sociale des marins, des mines, des clercs et employés notaires-, à l'exception des gains et rémunérations versés par les particuliers employeurs » ; qu'il en résulte que la réduction Fillon est réservée aux salariés au titre desquels l'employeur est soumis à l'obligation d'assurance contre le risque de privation d'emploi ; qu'en l'espèce, l'URSSAF n'ayant pas rapporté la preuve du caractère fictif du contrat de travail de Monsieur Z..., la société YAAL pouvait bénéficier de la réduction Fillon ; qu'en conséquence, ce chef de redressement doit être annulé ;
1) ALORS QUE la décision de Pôle Emploi quant à l'affiliation d'un salarié au régime d'assurance chômage s'impose à l'URSSAF, chargée uniquement de recouvrer les cotisations d'assurance chômage et la contribution AGS pour le compte dudit régime ; qu'en l'espèce, Pôle Emploi a refusé l'affiliation de M. Z... à l'assurance chômage sur la base des documents fournis, dont son contrat de travail ; que l'URSSAF a donc effectué une régularisation créditrice en faveur de la société Yaal s'agissant des cotisations indûment versées au titre de l'assurance chômage ; qu'en reprochant à l'URSSAF de ne pas rapporter la preuve du caractère fictif du contrat de travail de M. Z... pour annuler le redressement et cette régularisation créditrice, le tribunal des affaires de sécurité sociale a violé les articles L 5422-13 du code du travail, ensemble l'article 1315 du code civil dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 (devenu l'article 1353 du code civil) ;
2) ALORS QUE la décision de Pôle Emploi quant à l'affiliation d'un salarié au régime d'assurance chômage s'impose à l'URSSAF, chargée uniquement de recouvrer les cotisations d'assurance chômage et la contribution AGS pour le compte dudit régime ; qu'en l'espèce, Pôle Emploi a refusé l'affiliation de M. Z... à l'assurance chômage sur la base des documents fournis, dont son contrat de travail ; que la société Yaal ne pouvait donc bénéficier de la réduction « Fillon », applicable aux seuls salariés relevant de l'assurance chômage ; qu'en reprochant à l'URSSAF de ne pas rapporter la preuve du caractère fictif du contrat de travail de M. Z... pour annuler le redressement prononcé à ce titre, le tribunal des affaires de sécurité sociale a violé les articles L 241-13 du code de la sécurité sociale, ensemble l'article 1315 du code civil dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 (devenu l'article 1353 du code civil).