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12/07/2018 | FRANCE | N°17-16279

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 juillet 2018, 17-16279


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à l'Agent judiciaire de l'Etat venant aux droits de M. Y... de sa reprise d'instance ;

Met hors de cause l'Association nationale pour la garantie des droits des mineurs ;

Sur le premier moyen :

Vu l'article L. 1132-1 du code du travail dans sa version applicable en la cause ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué rendu sur renvoi après cassation (Soc. 30 juin 2015 n° 13-28.201), que M. X..., engagé le 3 mai 1976 par les Houillères du bassin de Lorraine aux droits desquelles se trouv

e l'établissement public Charbonnages de France, devenu ultérieurement ingénieur, a é...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à l'Agent judiciaire de l'Etat venant aux droits de M. Y... de sa reprise d'instance ;

Met hors de cause l'Association nationale pour la garantie des droits des mineurs ;

Sur le premier moyen :

Vu l'article L. 1132-1 du code du travail dans sa version applicable en la cause ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué rendu sur renvoi après cassation (Soc. 30 juin 2015 n° 13-28.201), que M. X..., engagé le 3 mai 1976 par les Houillères du bassin de Lorraine aux droits desquelles se trouve l'établissement public Charbonnages de France, devenu ultérieurement ingénieur, a été placé en arrêt-maladie à compter du 22 février 2002 ; qu'il a été reconnu invalide le 11 janvier 2005 à compter du 1er janvier et mis à la retraite à l'âge de soixante ans le 28 février 2010 ; qu'il avait saisi la juridiction prud'homale le 20 juin 2003 de diverses demandes ;

Attendu que pour rejeter la demande de l'agent au titre d'une discrimination liée à l'âge, l'arrêt retient que sa mise à la retraite de façon anticipée correspondait à un objectif légitime, à savoir assurer son droit à la santé et au repos, la santé physique et mentale de l'intéressé étant fragile et ayant abouti à son placement en invalidité en 2005, que la poursuite d'une activité professionnelle aurait été néfaste pour sa santé physique et mentale et que les moyens utilisés pour atteindre cet objectif légitime, à savoir un départ à la retraite à soixante ans, étaient appropriés et nécessaires en ce qu'ils assuraient sa cessation d'activité professionnelle indispensable à la préservation de sa santé physique et mentale tout en lui garantissant un revenu de substitution puisqu'il avait alors accumulé suffisamment de trimestres de cotisation retraite pour bénéficier d'une pension décente ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'est discriminatoire la mise à la retraite du salarié fondée sur son état de santé, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et attendu que la cassation sur le premier moyen, entraîne, en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif critiqué par le second moyen, pris d'une cassation par voie de conséquence ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. X... de sa demande afférente à une discrimination liée à l'âge et de sa demande de dommages-intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail par l'employeur, l'arrêt rendu le 10 février 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;

Condamne l'Agent judiciaire de l'Etat, ès qualités, aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, le condamne à payer la somme de 3 000 euros à M. X... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze juillet deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour M. X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait débouté M. X... de sa demande afférente à une discrimination indirecte à l'âge et d'AVOIR en conséquence rejeté ses demandes salariales consécutives ;

AUX MOTIFS QUE « selon l'article 6, paragraphe 1, de la Directive n° 2000/78/CE du 27 novembre 2000, portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, nonobstant l'article 2, paragraphe 2 de la Directive, les États membres peuvent prévoir que des différences de traitement fondées sur l'âge ne constituent pas une discrimination lorsqu'elle sont objectivement et raisonnablement justifiées, dans le cadre du droit national, par un objectif légitime, notamment pas des objectifs de politiques de l'emploi, du marché du travail et de la formation professionnelle, et que les moyens de réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires ; qu'en l'espèce, la mise à la retraite de M. X... de façon anticipée correspondait à un objectif légitime, à savoir assurer son droit à la santé et au repos, la santé physique et mentale de ce dernier étant fragile et ayant abouti à son placement en invalidité en 2005 ; que la poursuite d'une activité professionnelle aurait être [sic] néfaste pour sa santé physique et mentale ; que les moyens utilisés pour atteindre cet objectif légitime, à savoir un départ à la retraite à 60 ans, étaient appropriés et nécessaires en ce qu'ils assuraient sa cessation d'activité professionnelle indispensable à la préservation de sa santé physique et mentale tout en lui garantissant un revenu de substitution puisqu'il avait alors accumulé suffisamment de trimestres de cotisation retraite pour bénéficier d'une pension décente ; que la différence de traitement alléguée par M. X... était justifiée et ne constitue pas une discrimination ; qu'en conséquence le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il l'a débouté de sa demande afférente à une discrimination indirecte à l'âge » ;

1°) ALORS QU'aux termes des articles L. 1133-1 et L. 1133-2 du code du travail et 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, les différences de traitement fondées sur l'âge constituent une discrimination sauf lorsqu'elles sont objectivement et raisonnablement justifiées, dans le cadre du droit national, par un objectif légitime, notamment par des objectifs légitimes de politique de l'emploi, du marché du travail et de la formation professionnelle, et que les moyens de réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires ; qu'en retenant que la mise à la retraite de M. X... de façon anticipée correspondait à l'objectif légitime d'assurer son droit à la santé et au repos dès lors que la santé physique et mentale de M. X..., fragile, avait abouti à son placement en invalidité en 2005, tous motifs qui s'attachent à la décision individuelle de mise à la retraite de M. X... quand l'appréciation de la légitimité de l'objectif de nature à justifier objectivement et raisonnablement une différence de traitement en raison de l'âge devait s'attacher à l'examen du régime spécifique de retraite des personnels des entreprises minières et assimilées prévoyant, pour les ingénieurs, un âge limite de maintien en activité de soixante ans, la cour d'appel, qui ne s'est pas prononcée sur la légitimité de l'objectif poursuivi par la règle spécifique à la catégorie d'emploi de M. X... imposant sa cessation d'activité, a violé les articles L. 1133-1 et L. 1133-2 du code du travail et 6, paragraphe 1, de la Directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 ;

2°) ALORS QU'en toute hypothèse, aux termes des articles L. 1133-1 et L. 1133-2 du code du travail et 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, les différences de traitement fondées sur l'âge constituent une discrimination sauf lorsqu'elles sont objectivement et raisonnablement justifiées, dans le cadre du droit national, par un objectif légitime, notamment par des objectifs légitimes de politique de l'emploi, du marché du travail et de la formation professionnelle, et que les moyens de réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires ; qu'en retenant que la mise à la retraite de M. X... de façon anticipée correspondait à l'objectif légitime d'assurer son droit à la santé et au repos dès lors que la santé physique et mentale de M. X..., fragile, avait abouti à son placement en invalidité en 2005, sans étayer ces motifs par des éléments précis relatifs à la nature des tâches accomplies par le salarié de nature à justifier qu'il fasse l'objet d'une mise à la retraite anticipée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1133-1 et L. 1133-2 du code du travail et de l'article 6 paragraphe 1 de la directive européenne n° 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 du 27 novembre 2000 ;

3°) ALORS QU'est discriminatoire la mise à la retraite du salarié fondée sur son état de santé ; qu'en retenant que la mise à la retraite anticipée de M. X... était justifiée par le fait que sa santé physique et mentale était fragile et avait abouti à son placement en invalidité en 2005, la cour d'appel a violé l'article L. 1132-1 du code du travail ;

4°) ALORS QU'une motivation inintelligible équivaut à un défaut de motifs ; qu'en retenant, pour dire que les moyens utilisés étaient appropriés et nécessaires pour atteindre l'objectif de protection de la santé de M. X..., « que la poursuite d'une activité professionnelle aurait être (sic) néfaste pour sa santé », sans que ces motifs permettent de comprendre si la cour d'appel considérait établi, au sens de « aurait été », ou simplement probable, au sens de « aurait pu être », le caractère néfaste à la santé de M. X... de la poursuite de son activité professionnelle, la cour d'appel a privé sa décision de motif en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

5°) ALORS QU'aux termes des articles L. 1133-1 et L. 1133-2 du code du travail et 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, les différences de traitement fondées sur l'âge constituent une discrimination sauf lorsqu'elles sont objectivement et raisonnablement justifiées, dans le cadre du droit national, par un objectif légitime, notamment par des objectifs légitimes de politique de l'emploi, du marché du travail et de la formation professionnelle, et que les moyens de réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires ; qu'en retenant que le départ à la retraite à soixante ans était nécessaire en ce qu'il assurait la cessation d'activité professionnelle de M. X... « indispensable à la préservation de sa santé physique et mentale » sans rechercher, ainsi qu'elle y était expressément invitée par les conclusions d'appel soutenues oralement à l'audience (p. 42, pén. §) si une mise à la retraite anticipée permettant d'assurer le droit à la santé et au repos du salarié constituait un moyen nécessaire à protéger la santé de M. X..., bénéficiant certes du statut du mineur, mais qui avait fait toute sa carrière dans les bureaux « au jour » et jamais « au fond » et, en particulier au titre des trois dernières années, avait bénéficié d'un « placard doré », de sorte qu'une mise à la retraite anticipée n'était pas adaptée à sa situation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1133-1 et L. 1133-2 du code du travail et de l'article 6 paragraphe 1 de la directive européenne n° 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 du 27 novembre 2000 ;

6°) ALORS QU'aux termes des articles L. 1133-1 et L. 1133-2 du code du travail et 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, les différences de traitement fondées sur l'âge constituent une discrimination sauf lorsqu'elles sont objectivement et raisonnablement justifiées, dans le cadre du droit national, par un objectif légitime, notamment par des objectifs légitimes de politique de l'emploi, du marché du travail et de la formation professionnelle, et que les moyens de réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires ; qu'en retenant que le départ à la retraite à soixante ans était approprié en garantissant un revenu de substitution puisque M. X... avait alors accumulé suffisamment de trimestres de cotisation retraite pour bénéficier d'une pension décente quand le montant de la pension de retraite était impropre à établir que la mise à la retraite anticipée constitue un moyen approprié pour atteindre l'objectif de protection de la santé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1133-1 et L. 1133-2 du code du travail et de l'article 6 paragraphe 1 de la directive européenne n° 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 du 27 novembre 2000.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. X... de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « la bonne foi de l'employeur est présumée et le salarié ne renverse pas cette présomption si bien qu'il doit être débouté de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail par l'établissement public Charbonnages de France » ;

1°) ALORS QUE la cassation qui ne manquera pas d'intervenir du chef du premier moyen relatif à la discrimination aura pour conséquence nécessaire la censure du chef de dispositif ayant rejeté la demande de réparation au titre de la mauvaise foi de l'employeur dans l'exécution du contrat de travail sur le fondement de l'article 624 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QU'en toute hypothèse, le contrat de travail est exécuté de bonne foi ; qu'en se bornant, pour rejeter les demandes de M. X... fondées sur l'exécution de mauvaise foi du contrat de travail par l'établissement public Charbonnages de France, à retenir que le salarié ne renversait pas la présomption de bonne foi sans rechercher, ainsi qu'elle y été expressément invitée par les conclusions d'appel soutenues oralement à l'audience (p. 104, § 2, 8 et dernier) si le procédé ayant consisté, pour l'employeur, à orienter M. X... vers une mise à la retraite anticipée sans tirer les conséquences de l'inaboutissement de la procédure de constat médical de l'inaptitude, en reprenant le paiement des salaires ou en le licenciant en l'absence de possibilité de reclassement, ne caractérisait pas la mauvaise foi de l'établissement public Charbonnages de France dans l'exécution du contrat de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-16279
Date de la décision : 12/07/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 10 février 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 12 jui. 2018, pourvoi n°17-16279


Composition du Tribunal
Président : Mme Farthouat-Danon (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.16279
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