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28/06/2018 | FRANCE | N°17-12063

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 28 juin 2018, 17-12063


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique pris en sa quatrième branche :

Vu les articles L. 523-2, R. 523-7 et R. 524-1 du code des procédures civiles d'exécution ;

Attendu qu'il résulte de ces textes que le créancier qui obtient un titre exécutoire constatant l'existence de sa créance convertit la mesure conservatoire de créance en saisie-attribution et la mesure conservatoire des droits d'associé et des valeurs mobilières en saisie-vente ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que sur le fondement d'un ar

rêt de la cour d'appel de La Haye ayant condamné solidairement l'Etat d'Iraq et la ba...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique pris en sa quatrième branche :

Vu les articles L. 523-2, R. 523-7 et R. 524-1 du code des procédures civiles d'exécution ;

Attendu qu'il résulte de ces textes que le créancier qui obtient un titre exécutoire constatant l'existence de sa créance convertit la mesure conservatoire de créance en saisie-attribution et la mesure conservatoire des droits d'associé et des valeurs mobilières en saisie-vente ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que sur le fondement d'un arrêt de la cour d'appel de La Haye ayant condamné solidairement l'Etat d'Iraq et la banque centrale d'Iraq à lui payer une certaine somme, la société Heerema Zwijndrecht BV (la société Heerema) a fait pratiquer une saisie conservatoire de créance et une saisie conservatoire des droits d'associé et des valeurs mobilières à l'encontre de "l'Etat iraquien (...) et ses entités dont les fonds appartiennent à l'Iraq en vertu des résolutions de l'ONU, à savoir Montana management INC" (la société Montana); qu'ayant obtenu une ordonnance déclarant exécutoire en France l'arrêt de la cour d'appel de La Haye, ces saisies conservatoires ont été respectivement converties en saisie-attribution et en saisie-vente les 24 juin et 24 septembre 2014 ; que la société Montana a fait assigner la société Heerema par acte du 12 décembre 2014 devant un juge de l'exécution en contestation de ces mesures ;

Attendu que pour ordonner la mainlevée des saisies conservatoires et de la saisie attribution, l'arrêt retient que les saisies conservatoires sont caduques pour ne pas avoir été dénoncées à la société Montana, ce qui emporte la nullité subséquente de l'acte de conversion en saisie-attribution ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la caducité des mesures conservatoires ne pouvait être examinée qu'en conséquence de l'irrégularité des actes de conversion en saisie-attribution et en saisie vente, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 octobre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société Montana management INC et la société BNP Paribas securities services aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes de la société Montana management INC et de la société BNP Paribas securities services, les condamne à payer à la société Heerema Zwijndrecht BV la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit juin deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour la société Heerema Zwijndrecht BV

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR constaté la caducité des saisies-conservatoires pratiquées par la société Heerema Zwijndrecht BV le 28 juillet 2011 au préjudice de la société Montana Management entre les mains de la société BNP Paribas Securities Services et la nullité subséquente de la conversion en saisie attribution en date du 24 juin 2014 et d'avoir ordonné la mainlevée des saisies conservatoires et de la saisie attribution ;

AUX MOTIFS QUE : « sur la caducité des saisies conservatoires : il résulte de l'article R. 523-3 du code des procédures civiles d'exécution que dans un délai de huit jours à peine de caducité, la saisie conservatoire est dénoncée au débiteur par acte d'huissier de justice. Il est constant que les saisies litigieuses n'ont pas été dénoncées à la société Montana Management, mais seulement, selon des modalités contestées, à l'Etat d'Irak, que la société Heerema s'est également abstenue de notifier une copie de l'acte de conversion en saisie-attribution à Montana Management dont elle soutient qu'elle n'est pas le débiteur saisi, qualité qu'elle reconnaît au seul Etat irakien. Des pièces aux débats, il ressort que si la créance invoquée résulte de la décision de la cour d'appel de La Haye en date du 31 octobre 2000 ayant condamné l'Etat d'Irak, solidairement avec la Banque Centrale d'Irak, à payer à la société Heerema, alors dénommée Grootint, la somme de 6.808.248 florins néerlandais à majorer des intérêts et de 113.452 florins au titre des frais extrajudiciaires ainsi que les frais, débours, droits et honoraires liés à l'instance, les procès-verbaux de saisie-conservatoire en date du 28 juillet 2011 désignent comme débiteur saisi « l'Etat irakien
et ses entités dont les fonds appartiennent à l'Irak en vertu de résolutions de l'ONU à savoir Montana Management Inc ». Au regard de cette identification précise (« à savoir Montana Management Inc ») et alors que les saisies litigieuses ont effectivement été pratiquées au préjudice de la société Montana Management pour le compte de laquelle BP2S détenait les avoirs saisis, Montana Management a la qualité de débiteur au sens de l'article R. 532-2 (sic) précité. Il s'ensuit que les saisies conservatoires sont caduques pour ne pas lui avoir été dénoncées. Cette caducité emporte la nullité de l'acte de conversion de saisie conservatoire en saisie-attribution du 24 juin 2014. » ;

ALORS 1°) QUE pour identifier le débiteur auquel les saisies conservatoires devaient être dénoncées, la cour d'appel s'est fondée sur les énonciations des actes de saisie conservatoire ; qu'en statuant ainsi, après avoir constaté que la créance pour le recouvrement de laquelle ont été pratiquées ces saisies résulte de la décision de la cour d'appel de La Haye du 31 octobre 2000 ayant condamné l'Etat d'Irak à payer à la société Heerema la somme de 6.808.248 florins, outres intérêts et frais, ce dont il résultait que l'Etat d'Irak avait la qualité de débiteur saisi et que lui seul devait se voir dénoncer les saisies conservatoires, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les articles R. 523-3 et R.524-2 du code des procédures civiles d'exécution ;

ALORS 2°) QUE les procès-verbaux de saisie conservatoire de créance et de valeurs mobilières et droits d'associés du 28 juillet 2011 mentionnaient expressément qu'il était procédé à la saisie conservatoire de toutes créances dont la société BP2S était tenue envers : « - Etat irakien, cabinet du président [...], Irak, - et ses entités, dont les fonds appartiennent à l'Irak en vertu de résolutions de l'ONU, à savoir : Montana Management INC, C/O Morgan et Morgan Attorneys, [...] » et à la saisie conservatoire de droits d'associés et valeurs mobilières appartenant à « - Etat irakien, cabinet du président [...], Irak, - et ses entités, dont les fonds appartiennent à l'Irak en vertu de résolutions de l'ONU, à savoir : Montana Management INC, C/O Morgan et Morgan Attorneys, [...] » ; qu'en considérant que les procès-verbaux de saisie conservatoire du 28 juillet 2011 n'auraient identifié que la société Montana Management, de sorte que celle-ci aurait la qualité de débiteur, quand ces actes désignaient expressément et sans équivoque l'Etat Irakien, la cour d'appel les a dénaturés en violation de l'interdiction faite aux juges de dénaturer les éléments de la cause et de l'article 4 du code de procédure civile ;

ALORS 3°) QUE par son arrêt du 31 octobre 2000 en vertu duquel la saisie a été pratiquée, revêtu de la force exécutoire par ordonnance du président du tribunal de grande instance de Paris du 31 août 2011, la cour d'appel de La Haye a « condamné solidairement, (
) l'Etat d'Irak et la Central Bank of Irak au paiement d'un montant de 6.808.248 fl (
), à majorer des intérêts au taux légal à calculer sur ce montant à compter du 10 octobre 1998 jusqu'au jour du parfait et intégral paiement et de surcroit à majorer d'un montant de 113.452 fl au titre des frais extrajudiciaires » ; qu'en considérant que la société Montana Management aurait été précisément identifiée et aurait la qualité de débiteur au sens de l'article R. 523-3 du code des procédure civile d'exécution, la cour d'appel a dénaturé l'arrêt de la cour d'appel de La Haye du 31 octobre 2000, revêtu de la force exécutoire par ordonnance du président du tribunal de grande instance de Paris du 31 août 2011, en violation de l'interdiction faite au juge de dénaturer les éléments de la cause et de l'article 4 du code de procédure civile ;

ALORS 4°) QUE la conversion d'une saisie conservatoire de créance en saisie attribution et la conversion d'une saisie de valeurs mobilières en saisie vente font obstacle à toute contestation de la saisie conservatoire ; qu'en l'espèce, il est constant que les saisies conservatoires avaient été converties, le 24 juin 2014 pour la première et le 22 septembre suivant pour la seconde ; qu'en accueillant toutefois la demande présentée aux termes d'une assignation délivrée le 12 décembre 2014 par la société Montana, tendant à faire constater la caducité des saisies conservatoires de créance et de valeurs mobilières qui avaient déjà été converties, la cour d'appel a violé les articles L. 523-2, R. 523-7 et R. 524-4 du code des procédures civiles d'exécution.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 17-12063
Date de la décision : 28/06/2018
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

PROCEDURES CIVILES D'EXECUTION - Mesures conservatoires - Saisie conservatoire - Conversion en saisie-attribution - Acte de conversion - Moyen tiré de la caducité de la mesure conservatoire - Recevabilité - Conditions - Détermination

PROCEDURES CIVILES D'EXECUTION - Mesures conservatoires - Saisie conservatoire de droits d'associé et de valeurs mobilières - Conversion en saisie-vente - Acte de conversion - Moyen tiré de la caducité de la mesure conservatoire - Recevabilité - Conditions - Détermination

La caducité d'une mesure conservatoire de créance ou de droits d'associé et de valeurs mobilières ne peut être examinée qu'en conséquence de l'irrégularité des actes de conversion en saisie-attribution et en saisie-vente. Doit donc être cassé l'arrêt qui, pour accueillir une demande de mainlevée de saisies conservatoires et d'une saisie-attribution, retient que la caducité des saisies conservatoires emporte la nullité subséquente de l'acte de conversion en saisie-attribution


Références :

articles L. 523-2, R. 523-7 et R. 524-1 du code des procédures civiles d'exécution.

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 06 octobre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 28 jui. 2018, pourvoi n°17-12063, Bull. civ.Bull. 2018, II, n° 140
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Bull. 2018, II, n° 140

Composition du Tribunal
Président : Mme Flise
Avocat(s) : SCP Thouin-Palat et Boucard, SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 23/02/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.12063
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