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27/06/2018 | FRANCE | N°17-20522

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 27 juin 2018, 17-20522


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a assigné en responsabilité M. Y..., qui avait été désigné en qualité d'expert dans une précédente instance ;

Sur les premier et deuxième moyens et le troisième moyen, pris en ses deux premières branches, ci-après annexés :

Attendu que ces griefs ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur la troisième branche du troisième moyen :

Vu l'article 1382, devenu 1240 du code civil ;

Attendu q

ue, pour condamner Mme X... au paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive, l'arrêt retient qu'i...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a assigné en responsabilité M. Y..., qui avait été désigné en qualité d'expert dans une précédente instance ;

Sur les premier et deuxième moyens et le troisième moyen, pris en ses deux premières branches, ci-après annexés :

Attendu que ces griefs ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur la troisième branche du troisième moyen :

Vu l'article 1382, devenu 1240 du code civil ;

Attendu que, pour condamner Mme X... au paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive, l'arrêt retient qu'il ressort des termes mêmes des écritures de cette dernière qu'elle a abusé de son droit d'ester en justice en accusant l'expert judiciaire d'avoir volontairement trompé le tribunal dans le dessein d'avantager la partie adverse et qu'il en est résulté pour celui-ci un incontestable préjudice moral ;

Qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser une faute ayant fait dégénérer en abus le droit d'agir en justice, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et vu les articles L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire et 1015 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne Mme X... à payer à M. Y... la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 30 mars 2017, entre les parties, par la cour d'appel d'Agen ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Rejette la demande ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept juin deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.

Moyens produits par la SCP Zribi et Texier, avocat aux Conseils, pour Mme X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Mme X... fait grief à l'arrêt attaqué

DE L'AVOIR déboutée de ses demandes indemnitaires dirigées contre M. Y... ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « Mme X... se contente d'affirmer que l'expert judiciaire s'est trompé sur la limite séparative de son fonds mais sans en justifier ; qu'en effet, le plan de l'expert-géomètre missionné par elle (pièce n° 25), M. A..., ne saurait être à cet égard déterminant en ce qu'il a été établi à partir du cadastre, lequel a seulement valeur fiscale ; que force est de constater qu'à supposer établies les erreurs dénoncées, elles n'ont pas eu pour conséquence la perte du procès engagé par les époux X... ; qu'il ressort en effet de la lecture de l'arrêt du 13 janvier 2011 que la cour d'appel de Paris, tout en constatant, comme l'expert judiciaire, que la construction litigieuse empiétait bien sur le fonds X..., a néanmoins rejeté la demande en considérant que les époux B... revendiquaient à bon droit l'usucapion de la bande de terrain litigieuse, leur auteur ayant construit la maison selon un permis délivré le 19 août 1950 et qui apparaissait sur le plan cadastral 1968, c'est-à-dire largement plus de trente années avant que les époux X... n'estent en justice ; qu'au demeurant, comme l'a justement relevé le premier juge, il ne saurait être reproché à M. Y... d'avoir méconnu les titres de propriété en cause puisqu'il en fait état dans son rapport et qu'il a d'ailleurs répondu à un dire sur ce point des époux X... ; enfin qu'il n'est pas sans intérêt de relever que le premier moyen de cassation produit par les époux X... consistait à reprocher à la cour d'appel de Paris d'avoir considéré que leur titre était imprécis au motif que les limites des propriétés avaient été créées par destination du père de famille, c'est-à-dire très exactement ce que Mme X... reproche aujourd'hui à M. Y..., et que la Cour de cassation a dit qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « Mme X... reproche à M. Y... d'avoir indiqué que les limites de sa propriété avec celle de M. et Mme B... devaient être établies par « destination du père de famille » et ce alors qu'il aurait dû prendre en compte les deux actes de vente établis par les consorts C... le 17 Juillet 1943 et les 19 janvier-24 février 1944 à leur auteur commun Mademoiselle D... ; qu'il convient dès à présent d'écarter la notion reprise par la demanderesse dans ses conclusions à savoir une « estimation à l'oeil » qui ne correspond pas à la notion retenue par M. Y... ; qu'il ressort des pièces produites que dans son rapport, M. Y... n'a pas méconnu l'existence de ces actes et a repris les mentions indiquées dans les actes de revente aux auteurs de Mme X... et aux auteurs de M. et Mme B..., mentions totalement semblables à celles contenues dans les actes susvisés et faisant tous état d'une « contenance superficielle »totalement identique ; qu'il ne peut être reproché à M. Y... de ne pas avoir tenu compte des titres et ce alors que la durée de la mesure d'expertise n'interdisait aucunement à Mme X... de produire spécifiquement ces pièces si elle les estimait essentielles alors qu'elle a adressé de multiples documents, dires et a participé à de nombreuses réunions et qu'au surplus elle a produit ces pièces devant la cour d'appel (pièce 28) ; qu'en outre il convient de relever que dans le cadre de cette expertise, M. Y..., qui n'avait pas à prendre position sur le bien fondée de la demande de Mme X..., a constaté l'existence d'empiétements et à, de ce fait, poursuivi son expertise afin d'évaluer non seulement le montant des préjudices allégués par Mme X... mais également le coût des travaux de démolition et reconstruction de la propriété de M. et Mme B... qui avaient appelés en la cause leur vendeur les consorts E... ; que les conséquences juridiques qui ont pu être tiré de la lecture de ce rapport sont sans aucun lien avec les conditions de réalisation de celui-ci et, comme l'indique M. Y..., le préjudice allégué est sans rapport avec sa mission, Mme X... pouvant déduire des termes de ce rapport que sa propriété n'aurait aucune limite et ce alors qu'il a été opposé à sa revendication de propriété, le bénéfice au profit de M. et Mme B... de l'usucapion » ;

1°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en retenant que Mme X... se contentait d'affirmer que l'expert judiciaire s'était trompé sur la limite séparative de son fonds sans en justifier, sans expliquer en quoi les actes de vente successifs du lot 317p-320p (et leurs annexes) qu'elle produisait (pièces n°s 1, 3 et 5), et dont elle déduisait l'erreur commise par l'expert judiciaire quant à la source de la limite séparative de son fonds, ne révélaient pas que la limite séparative du fonds de Mme X... avait été créée par titre, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE l'usucapion exige de celui qui s'en prévaut une possession trentenaire continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire ; que la possession est équivoque lorsque lui sont opposés par des tiers des titres de propriété ; qu'en se bornant à énoncer qu'à supposer établies les erreurs dénoncées par Mme X..., elles n'ont pas eu pour conséquence la perte du procès engagé par les époux X... dès lors que la cour d'appel a rejeté leur demande en considérant que les époux B... revendiquaient à bon droit l'usucapion de la bande de terrain litigieuse, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si, sans la faute commise par M. Y... quant à la source de la limite séparative du fonds de Mme X..., la possession par les époux B... de la bande de terrain litigieuse ne serait pas apparue comme non équivoque, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Mme X... fait grief à l'arrêt attaqué

DE L'AVOIR déboutée de ses demandes indemnitaires dirigées contre l'agent judiciaire de l'Etat ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « seront écartés d'emblée les dénis tenant aux manquements reprochés à l'expert judiciaire, dès lors que, pour les motifs exposés plus haut, Mme X... a été déboutée de son action en responsabilité contre M. Y... ; d'autre part que l'appelante reproche au juge de la mise en état de ne pas avoir traité immédiatement sa demande de changement d'expert formée par conclusions d'incident du 26 juin 2006 (pièce n° 9), le juge ayant audiencé ledit incident au 28 septembre 2006, soit après que l'expert ait déposé son rapport le 30 juillet 2006 ; qu'il ressort des écritures mêmes des époux X... que le juge de la mise en état les avait entendus, ainsi que M. Y..., le 11 mai précédent et qu'à cette occasion la date du dépôt du rapport de celui-ci avait été fixée au 30 juillet ; que ce n'est qu'après cette réunion que les époux X... ont formé leur demande de changement d'expert, à la veille du service allégé, alors que les reproches qu'ils adressaient à M. Y... dataient, pour l'essentiel, de plusieurs mois, voire de plusieurs années, étant ici rappelé que l'expert avait été désigné par ordonnance du 11 septembre 2003 ; que Mme X... est donc particulièrement infondée à reprocher au juge de la mise en état un défaut de célérité alors qu'elle-même et son conjoint en ont singulièrement manqué en ne le saisissant qu'à la veille du dépôt du rapport d'expertise alors que leurs griefs remontaient pour certains à 2004 ; que Mme X... soutient encore qu'il a été statué sur sa demande dans un délai déraisonnable, puisque la procédure a duré du 6 janvier 2003 au 3 avril 2012, soit 9 ans, 2 mois et 28 jours, alors que, selon elle, l'affaire ne présentait aucun caractère de complexité et qu'elle a eu une attitude irréprochable, n'étant en rien responsable de ce délai anormal ; qu'elle considère tout d'abord qu'il n'y a pas lieu de prendre en compte l'incident relatif à sa demande de changement d'expert et l'instance d'appel qui s'en est suivie en ce qu'elle serait étrangère à l'issue de son action en revendication ; mais qu'il ressort de l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 15 janvier 2010 (pièce n° 15) qu'entre le 26 juin 2006 et le prononcé de cette décision, tant les époux X... que leurs adversaires, les époux B..., ont multiplié les recours auxquels l'autorité judiciaire se devait de répondre, sous peine de déni de justice que n'aurait pas manqué d'invoquer Mme X... et que l'objet même de cette procédure étant le changement d'expert elle était susceptible d'avoir une incidence sur l'action principale ; en outre que le rapport d'expertise met en évidence que la durée de la mission de M. Y... s'explique essentiellement par les multiples dires auxquels il a dû répondre, le conseil des époux X... estimant d'ailleurs trop courts les délais impartis par l'expert pour ce faire (Pièce intimé na 5 page 18), tous éléments qui laissent à penser que l'affaire n'avait peut-être pas la simplicité que revendique aujourd'hui Mme X... ; qu'étant encore observé que les voies de recours, ordinaire puis extraordinaire, exercées, en vain, par les époux X... ont nécessairement entrainé un allongement de la procédure, c'est pour des motifs légitimes que la cour adopte que le premier juge a considéré que les dénis de justice allégués n'étaient pas caractérisés au sens de l'article L. 141-1 du code de l'organisation judiciaire ou de l'article 6 CEDH » ;

Et AUX MOTIFS éventuellement ADOPTES QUE « concernant la durée de la procédure, il convient tout d'abord de préciser que l'assignation initiale a été délivrée le 6 janvier 2003 et que le jugement du premier degré est intervenu 1e4 décembre 2008 et que les suites de la procédure ont débuté le février 2009 pour se terminer le 3 avril 2012, cette dernière période étant d'une durée toute relative puisqu'elle comprend la procédure d'appel et l'examen du pourvoi en cassation mais également diverses procédures dont il est fait mention dans l'arrêt produit en date du 15 janvier 2010 et notamment des procédures en récusation à l'encontre des magistrats de la Cour d'appel ; que la procédure débutée devant le Tribunal de Grande Instance a donné lieu dans les 6 mois à la nomination de Monsieur Francis Y... sachant que cette demande avait été formée par les époux X... uniquement le 19 juin 2003 ; qu'en outre la lecture exhaustive du rapport d'expertise réalisée par Monsieur Francis Y... et ce tel qu'il a été produit par ce dernier et non tel que produit par Madame Françoise F... épouse X... (pages manquantes de 3 à 37 et de 44 à 71) permet de déterminer (page 10 à 38) le déroulé précis de ces opérations et notamment la date de la première réunion d'expertise qui a eu lieu le 8 décembre 2003, la seconde après récolement des pièces nécessaires le 14 mai 2004, date à laquelle Monsieur Francis Y... indiquait les « conclusions qu'il pensait apporter à sa mission compte tenu des éléments en sa possession » par la suite Monsieur Francis Y... note quatorze interventions des conseils des parties et notamment de Maître G... alors conseil de Madame Françoise F... épouse X... donnant lieu de sa part à diverses réponses et le 2 novembre 2004 une nouvelle réunion avait lieu en présence des parties portant notamment sur les travaux à effectuer pour faire cesser l'empiétement ; qu'après échange de divers courriers le conseil des époux Monsieur et Madame B... communiquait le 12 novembre 2004 une copie de l'assignation en intervention forcée délivrée contre les consorts E... ; que Maître G... adressait divers courriers à l'expert et le 26 janvier 2005, Maître I... indiquait remplacer Maître G... et communiquait à diverses reprises des dires remettant en cause notamment les conclusions antérieures ; qu'une réunion se tenait le 8 avril 2005 et divers dires étaient alors adressés par Madame Françoise F... épouse X... tendant à voir prononcer notamment l'illégalité de la construction de Monsieur et Madame B... et le 27 Avril 2005, Maître I... indiquait ne plus être le conseil des époux X... ; que le 18 mai 2005, Maître H... indiquait être le conseil de ces derniers et sollicitait le report de la réunion prévue le 20 Mai 2005 qui fut repoussé au 29 juin 2005 puis au 4 juillet 2005 et à cette date les époux X... sollicitaient des investigations complémentaires sur site la réunion étant prévue le 15 septembre 2005 ; qu'avant cette réunion de nombreuses pièces étaient encore communiquées à l'expert alors que le jour de celle-ci les époux X... n'avaient accepté la présence de l'avocat des consorts E... qu'afin d'éviter un allongement des délais, l'expertise n'étant déclaré commune que le 10 novembre 2005 ; que par la suite les parties ont continué à adresser des dires à l'expert et ce jusqu'à la prochaine réunion le 5 janvier 2006 alors que le 6 janvier 2006, Maître H... indiquait ne plus être le conseil des époux X... et ce alors qu'il était prévu une réunion aux archives départementales afin d'examiner sur place et afin de lever toute contestation ; qu'à la suite de cette réunion le Président du tribunal convoquait les parties et imposait une date de dépôt du rapport alors que le 3 juillet 2006, Maître G... indiquait être à nouveau le conseil des époux X... ; que Monsieur Francis Y... clôturait son rapport le 26 juillet 2006 ; que la simple énumération susvisée, et en réalité parcellaire, du déroulement de la mission d'expertise permet d'établir que la durée de cette expertise n'est pas excessive et ce en raison notamment des interventions multiples des époux X... par l'intermédiaire de leurs 3 conseils différents, les très nombreux points de divergences entre les parties, les multiples réunions mais également les conclusions qui ne portent pas uniquement sur l'existence d'un empiètement mais sur la réalisation détaillée de travaux ; que ces éléments suffisent à établir que le litige occupant les parties ne peut être présenté comme une « affaire ne présentant aucune difficulté » ; qu'en outre la durée de cette procédure d'expertise, dont rien ne permet d'établir qu'elle est imputable à l'expert ni au tribunal, ne constitue qu'une partie de la procédure et dont les seuls éléments produits établissent à travers les mentions reprises dans le jugement en date du 4 décembre 2008 que les dernières conclusions des consorts E... datent du 31 janvier 2007 (soit 6 mois après le dépôt du rapport et alors qu'elles ont dû être précédées de conclusions des demandeurs à la procédure les époux X...) celles de Madame Françoise F... épouse X... du 4 Août 2008 et celles de Monsieur et Madame B... en date du 5 Août 2008 ; qu'un audiencement pour le 6 novembre 2008 paraissant en outre un délai très raisonnable tout comme la date de délibéré ; qu'en définitive, l'examen du déroulement de la procédure même limitée aux seules pièces produites ne suffit pas à établir un déni de justice que ce soit au sens de l'article L 141-1 du code de l'Organisation judiciaire que de l'article 6 de la CEDH ; qu'est constitutive d'une faute lourde « toute déficience caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant l'inaptitude du service public de la justice à remplir la mission dont il est investi » ; que la faute lourde alléguée repose quant à elle sur deux séries de manquements qui d'une part concerne plus spécifiquement le fonctionnement des juridictions et d'autre part les conditions d'appréciation du litige ; que ces derniers points ne pourront être que écartés en ce qu'ils constituent en réalité des critiques des conditions d'appréciation ou d'examen des pièces produites par les différentes juridictions tout spécialement par la Cour d'appel (y compris en ce qui concerne les outrages, diffamations et injures allégués) mais également la Cour de cassation en ce qu'elle aurait « refusé de contrôler la qualification des faits incriminés », cette appréciation ne constituant pas «un fait » au sens de la faute lourde susvisée mais uniquement un détournement de procédure afin de remettre en cause indirectement les diverses décisions rendues et ce comme en l'espèce la lecture du dispositif des conclusions de la demanderesse en témoigne puisqu'elle demande en réalité de voir rejugé comme elle l'entend le conflit qui l'a opposé à ses voisins en demandant la publication de divers actes et ce alors qu'elle a utilisé l'ensemble des voies de recours à sa disposition ; que de même les manquements imputés tant au juge de la mise en état qu'à la Cour d'appel ne pourront pas plus être retenus ; qu'en ce qui concerne la prise en compte des conclusions de remplacement de l'expert judiciaire en date du 26 juin 2006 par le Juge de la mise en état, il convient de relever d'une part que le dépôt de ce rapport avait été expressément fixé au 31 juillet 2006 alors que cette expertise durait depuis près de trois ans (ce que Madame Françoise F... épouse X... ne manque pas d'invoquer comme constituant un déni de justice) qu'au surplus le nouvel avocat de Madame Françoise F... épouse X... à l'époque Maître G... a ultérieurement délivré de nouvelles conclusions le 18 septembre 2006 de désistement de cet incident ; que ce désistement formalisé suffit à écarter toute faute dans la gestion de cette procédure alors que le dépôt du rapport d'expertise n'avait pas pour conséquence d'interdire à Madame Françoise F... épouse X... de formaliser de nouvelles conclusions pour, comme elle le souhaitait voir ordonner une nouvelle expertise ou même annuler la précédente compte tenu des arguments développés dans ses conclusions ; qu'enfin l'annulation du Jugement rendu en première instance par le Tribunal de Grande Instance de Bobigny, la juridiction de jugement n'étant pas valablement composée, ne saurait constituer une faute lourde en ce que Madame Françoise F... épouse X... a pu valablement exercer la voie de recours prévue contre cette décision et qu'au surplus cette cour d'appel a pu à bon droit faire application des articles 561 et 562 du code de procédure civile qui prévoient notamment l'effet dévolutif de l'appel en cas d'annulation du jugement,
situation abondamment illustrée dans la jurisprudence ; qu'il apparaît ainsi que Madame Françoise F... épouse X... ne justifie d'aucun point permettant de mettre en oeuvre la responsabilité de l'Etat » ;

1°) ALORS QUE l'État est tenu de réparer le dommage causé par le fonctionnement défectueux du service de la justice lorsqu'il résulte d'un déni de justice ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si l'Etat n'était pas tenu de réparer le dommage causé à Mme X... par le déni de justice résultant de la méconnaissance par le juge de son office pour la manifestation de la vérité dans le cadre de l'instance ayant opposé les époux X... aux époux B..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 141-1 du code de l'organisation judiciaire ;

2°) ALORS QUE tout manquement de l'Etat à son devoir de protection juridictionnelle de l'individu, comprenant le droit pour tout justiciable de voir statuer en temps utile sur ses prétentions, constitue un déni de justice engageant la responsabilité de l'Etat ; qu'en retenant que le déni de justice résultant du refus du juge de la mise en état de statuer sur la demande de M. et Mme X... en remplacement d'expert judiciaire avant le dépôt du rapport d'expertise n'était pas caractérisé, sans rechercher si le juge de la mise en état avait été empêché de statuer sur cette demande en temps utile, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 141-1 du code de l'organisation judiciaire ;

3°) ALORS QU'en retenant que le déni de justice résultant du refus du juge de la mise en état de statuer sur la demande de M. et Mme X... en remplacement d'expert judiciaire avant le dépôt du rapport d'expertise n'était pas caractérisé au motif inopérant que M. et Mme X... avaient eux-mêmes singulièrement manqué de célérité en ne saisissant le juge de la mise en état que le 26 juin 2006, pour un dépôt du rapport d'expertise prévu le 30 juillet 2006, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 141-1 du code de l'organisation judiciaire ;

4°) ALORS QU'en retenant que le déni de justice résultant du refus du juge de la mise en état de statuer sur la demande de M. et Mme X... en remplacement d'expert judiciaire avant le dépôt du rapport d'expertise n'était pas caractérisé au motif inopérant que M. et Mme X... s'étaient désistés de leur demande le 18 septembre 2006, soit près de trois mois après le dépôt du rapport d'expertise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 141-1 du code de l'organisation judiciaire ;

5°) ALORS QU'en retenant que le déni de justice résultant de la durée excessive de la procédure qui a opposé les époux X... aux époux B... n'était pas caractérisé quand elle constatait que cette procédure en revendication immobilière avait duré 9 ans, 2 mois et 28 jours, ce qui caractérisait une série de faits traduisant l'inaptitude du service public de la justice à remplir la mission dont il est investi, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article L. 141-1 du code de l'organisation judiciaire ;

6°) ALORS QUE tout manquement de l'Etat à son devoir de protection juridictionnelle de l'individu, comprenant le droit pour tout justiciable de voir statuer sur ses prétentions dans un délai raisonnable, constitue un déni de justice engageant la responsabilité de l'Etat ; que l'existence d'un tel déni de justice s'apprécie en prenant en considération la nature de l'affaire, sa complexité, le comportement de la partie qui se plaint de la durée de la procédure mais aussi les mesures mises en oeuvre par les autorités compétentes ; qu'en retenant que le déni de justice résultant de la durée excessive de la procédure qui a opposé les époux X... aux époux B... n'était pas caractérisé, sans rechercher, comme elle y avait été invitée, si les juges qui s'étaient succédés pour en connaître avaient mis en oeuvre les mesures dont ils disposaient pour en limiter la durée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 141-1 du code de l'organisation judiciaire.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Mme X... fait grief à l'arrêt attaqué

DE L'AVOIR condamnée à payer à M. Y... la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « la demande de dommages intérêts pour procédure abusive formée par M. Y... sera accueillie, en ce qu'il ressort des termes mêmes des écritures de Mme X... que celle-ci a abusé de son droit d'ester en justice en accusant l'expert judiciaire d'avoir volontairement trompé le tribunal dans le dessin d'avantager la partie adverse et qu'il en est résulté pour celui-ci un incontestable préjudice moral distinct de celui réparé par ailleurs sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile » ;

Et AUX MOTIFS ADOPTES QU'« il résulte de l'ensemble de la procédure diligentée à l'encontre de M. Y... que ce dernier a subi, du fait de la remise en cause de sa qualité de professionnel tel que cela résulte des nombreuses pièces produites aux débats et plus spécifiquement dans le cadre de la présente procédure où il est demandé « de déclarer faux le rapport d'expertise de M. Y... », un incontestable préjudice moral » ;

1°) ALORS QUE faute de préciser le fondement juridique de sa décision de condamnation, quand M. Y... réclamait l'application de l'article 1382 du code civil que Mme X... contestait à la faveur de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, la cour d'appel a violé l'article 12 du code de procédure civile ;

2°) ALORS, à tout le moins, QUE les abus de la liberté d'expression prévus et réprimés par la loi du 29 juillet 1881 ne peuvent être réparés sur le fondement de l'article 1382 du code civil ; qu'en accueillant la demande de dommages-intérêts formée par M. Y... au titre du droit commun de la responsabilité et motivée par l'atteinte causée à sa réputation, quand les faits, tels que dénoncés par M. Y..., ne pouvaient relever que des dispositions de la loi du 29 juillet 1881, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil, par fausse application ;

3°) ALORS, en toute hypothèse, QUE l'exercice d'une action en justice est un droit et ne dégénère en abus qu'en cas de faute de celui qui l'exerce ; qu'en retenant que Mme X... a abusé de son droit d'ester en justice en accusant l'expert judiciaire d'avoir volontairement trompé le tribunal dans le dessin d'avantager la partie adverse et que M. Y... a subi un incontestable préjudice du fait de cette remise en cause de sa qualité de professionnel, la cour d'appel, qui a statué par des motifs qui ne suffisent pas à caractériser une faute faisant dégénérer en abus le droit d'agir en justice, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 17-20522
Date de la décision : 27/06/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Agen, 30 mars 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 27 jui. 2018, pourvoi n°17-20522


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer, SCP Zribi et Texier

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.20522
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