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27/06/2018 | FRANCE | N°17-15183

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 27 juin 2018, 17-15183


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Y..., engagé le 22 mars 2009, en qualité d'ambulancier par la société GF Avenir, a été licencié pour faute grave le 1er août 2011, puis désigné conseiller du salarié le 26 août 2011 ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal de l'employeur :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident

du salarié, ci-après annexé :

Attendu que, sous le couvert de griefs non fondés de violatio...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Y..., engagé le 22 mars 2009, en qualité d'ambulancier par la société GF Avenir, a été licencié pour faute grave le 1er août 2011, puis désigné conseiller du salarié le 26 août 2011 ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal de l'employeur :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident du salarié, ci-après annexé :

Attendu que, sous le couvert de griefs non fondés de violation de la loi, le moyen ne tend qu'à contester l'appréciation souveraine par la cour d'appel des éléments de fait et de preuve dont elle a, sans méconnaître les règles spécifiques de preuve et exerçant les pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 1154-1 du code du travail, déduit l'absence de faits précis permettant de présumer l'existence d'un harcèlement moral ou d'une discrimination syndicale ;

Mais sur le deuxième moyen du pourvoi principal de l'employeur :

Vu l'article 3 de l'accord-cadre du 4 mai 2000 relatif à l'aménagement et la réduction du temps de travail des personnels des entreprises de transport sanitaire, ensemble l'article L. 3121-22 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige et l'article L. 3171-4 du code du travail ;

Attendu que, pour condamner l'employeur à payer au salarié un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires, l'arrêt retient que le salarié étaye suffisamment sa demande en paiement d'heures supplémentaires en produisant ses bulletins de salaire, l'attestation d'un autre salarié sur le déroulement des temps de pause, des tableaux d'horaires collectifs et une fiche de calcul des heures supplémentaires qu'il soutient avoir effectuées, que la société ne produit, pour sa part, aucun document justifiant les horaires réels du salarié comme l'application des coefficients conventionnels applicables en fonction des différentes périodes d'activité ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans vérifier si les calculs des salariés étaient conformes aux dispositions de l'accord-cadre susvisé selon lesquelles, afin de tenir compte des périodes d'inaction, de repos, repas, coupures et de la variation de l'intensité de leur activité, le temps de travail effectif des personnels ambulanciers roulants est décompté sur la base du cumul hebdomadaire de leurs amplitudes journalières d'activité affectées d'un coefficient de minoration, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Et sur le quatrième moyen du pourvoi principal de l'employeur :

Vu les articles L. 2411-1 et L. 2411-5 du code du travail ;

Attendu que, pour condamner l'employeur à payer au salarié des sommes à titre d'indemnisation de la violation de son statut de salarié protégé, l'arrêt retient que la nullité du licenciement ouvre droit au salarié qui ne sollicite pas sa réintégration, à une indemnité pour violation du statut protecteur correspondant aux salaires qu'il aurait dû percevoir durant son mandat de trois ans, plus douze mois de protection ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le représentant du personnel dont le licenciement est annulé a droit à une indemnité pour violation du statut protecteur égale à la rémunération qu'il aurait perçue depuis son éviction jusqu'à l'expiration de la période de protection, dans la limite de trente mois, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et attendu qu'en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation sur le deuxième moyen du pourvoi principal de l'employeur emporte, par voie de conséquence, la cassation du chef de l'arrêt critiqué par le troisième moyen de ce même pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne l'employeur à payer au salarié les sommes de 1 270,42 euros à titre de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires, et 127,04 euros au titre à des congés payés afférents, 300 euros à titre de dommages-intérêts pour violation de la loyauté contractuelle, 103 764,13 euros à titre d'indemnisation de la violation de son statut de salarié protégé, l'arrêt rendu le 26 janvier 2017, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept juin deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société GF avenir, demanderesse au pourvoi principal

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société GF Avenir à payer à Monsieur Y... les sommes de 3.873,03 € à titre de rappel de salaire et prime d'ancienneté en application du principe « à travail égal, salaire égal », outre les congés payés afférents et 94,59 € au titre de la prime d'ancienneté, outre les congés payés afférents ;

AUX MOTIFS QUE « Attendu que M. Laurent Y... soutient, à titre principal, que l'employeur n'aurait pas respecté dans l'entreprise le principe « à travail égal salaire légal » en appliquant sans raison objective et pertinente à deux salariées recrutées comme ambulancières, Mmes Imane et Sabrina A..., un taux horaire plus élevé (10,39 €) que le sien et subsidiairement que les taux horaires appliqués au cours des années 2007 à 2009 sont inférieurs aux taux conventionnels ; que la SARL GF Avenir objecte que les rémunérations dans l'entreprise étaient supérieures à la convention collective grâce aux primes allouées et que les salariées A... ont bénéficié sur une période limitée de taux horaires supérieurs en raison de circonstances particulières : abandon de la conduite en vue d'effectuer des tâches de régulation pour l'une et participation à une formation d'agent d'escale pour l'autre ; Attendu que les bulletins de salaire et tableaux comparatifs produits par M. Laurent Y... établissent, point non formellement contesté, que les salariées Imane et Sabrina A..., recrutées en qualité d'ambulancières ont bénéficié, en 2004 pour Mme Imane A... et en 2009 pour Mme Sabrina A..., de taux horaires plus favorables que ceux des autres salariés ; que la société GF Avenir ne produit aucune pièce établissant que le travail de ces salariées ait été différent voire supérieur en charges, contraintes et responsabilités par comparaison avec celui de M. Laurent Y... ; qu'à défaut, il sera retenu un non-respect par l'employeur de la règle d'égalité des rémunérations et octroyé à M. Laurent Y..., conformément à ses décomptes (pièce 14) et en retenant le taux horaire le plus favorable, un rappel de salaire pour la période de juin 2009 à août 2011 fixé à 3 873,03 €, outre l'indemnité de congés payés afférente ainsi qu'un rappel de prime d'ancienneté conventionnelle (article 12.4 de l'accord-cadre du 4 mai 2000) qui ne figure pas sur ses bulletins de salaire, fixé à 94,59 €, outre l'indemnité de congés payés afférente » ;

1. ALORS QUE les prétentions respectives des parties fixent les limites du litige ; que, dans ses conclusions d'appel soutenues à l'audience, Monsieur Y..., qui a été embauché par la société GF Avenir en mars 2009, réclamait un rappel de salaire sur le fondement du principe « à travail égal, salaire égal » en comparant son taux de salaire horaire à celui dont bénéficiait Madame Sabrina A... en juin 2009 ; qu'il ne comparait pas son salaire à celui versé à Madame Imane A... en 2004, à une époque où il n'était pas encore salarié de l'entreprise ; qu'en affirmant cependant que Monsieur Y... comparait sa rémunération à celle versée à Madame Imane A... en 2004 et à Madame Sabrina A... en 2009, la cour d'appel a dénaturé les conclusions du salarié et méconnu les limites du litige dont elle était saisie, en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

2. ALORS QU' en vertu du principe « à travail égal, salaire égal », un salarié peut prétendre au paiement d'un salaire égal à celui perçu, sur la même période, par un autre salarié qui accomplit un travail égal ou de valeur égale, dans des conditions identiques ; qu'un salarié ne peut en revanche réclamer le paiement d'un salaire égal à celui versé à un autre salarié, sur une autre période ; qu'en l'espèce, il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que Madame Sabrina A... n'a bénéficié d'un taux de salaire horaire supérieur à celui de Monsieur Y... qu'en 2009 ; que la société GF Avenir démontrait que Madame Sabrina A... a été licenciée en juin 2009 ; qu'en décidant néanmoins d'allouer à Monsieur Y..., sur le fondement du principe « à travail égal, salaire égal », un rappel de salaire pour la période de juin 2009 à août 2011 calculé en appliquant le taux horaire le plus favorable dont bénéficiait Madame Sabrina A... en 2009, la cour d'appel a violé par fausse application le principe « à travail égal, salaire égal ».

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société GF Avenir à payer à Monsieur Y... la somme de 1.270,42 € au titre des heures supplémentaires, outre les congés payés afférents ;

AUX MOTIFS QUE « Attendu que M. Laurent Y... soutient que l'employeur a appliqué de façon erronée, avant le 12 novembre 2010, les dispositions conventionnelles applicables en matière de temps de travail, notamment l'article 3.1.a. modifié de l'accord cadre des transports sanitaires du 4 mai 2000 prévoyant l'application de coefficients, évolutifs dans le temps, aux amplitudes journalières d'activité après distinction des temps de permanence des périodes de service hors permanence, ce que conteste l'employeur qui soutient que le décompte du salarié, n'ayant pas déduit les primes exceptionnelles et d'astreinte dont il bénéficiait et donc la rémunération était globalement plus favorable que celle résultant de l'application des règles de la convention collective, est erroné ; Attendu qu'il doit être observé, à titre liminaire, que le versement de primes au salarié, quels que soient leurs montant, ne saurait affranchir l'employeur du respect des règles légales ou conventionnelles relatives au temps de travail et à sa rémunération ; que selon l'article L 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; qu'au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; Attendu que M. Laurent Y... étaye suffisamment sa demande en paiement d'heures supplémentaires en produisant ses bulletins de salaire, l'attestation du salarié Serge B... sur le déroulement des temps de pause (pièce 15), des tableaux d'horaires collectifs (pièces 16) et une fiche de calcul des heures supplémentaires qu'il soutient avoir effectuées ; que la société GF Avenir ne produit, pour sa part, aucun document justifiant les horaires réels du salarié comme l'application des coefficients conventionnels applicables en fonction des différentes périodes d'activité ; qu'en l'état de l'ensemble de ces éléments, il sera fait droit au rappel d'heures supplémentaires sollicité à hauteur de 1 270,42 € sur la base du taux de salaire le plus favorable (salariées A...), outre les congés payés afférents » ;

1. ALORS QU' en cas de litige sur le nombre d'heures supplémentaires effectuées, le juge doit examiner les éléments produits par l'employeur pour justifier des horaires de travail effectivement accomplis par le salarié ; qu'en l'espèce, la demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires de Monsieur Y... portait uniquement sur la période antérieure au 15 novembre 2010, pendant laquelle la société GF Avenir n'avait pas tenu de feuilles de route ; que la société GF Avenir faisait valoir, pour contester cette demande, qu'elle n'avait pas modifié l'organisation de la durée du travail en novembre 2010 et que les feuilles de routes établies à partir du 15 novembre 2010 faisaient apparaître que Monsieur Y... n'accomplissait pas les heures supplémentaires qu'il invoquait ; qu'en s'abstenant d'examiner ces feuilles de route, signées par l'employeur et le salarié, qui lui permettaient de déterminer la durée de travail régulièrement accomplie par le salarié, la cour d'appel a violé l'article L. 3171-4 du code du travail ;

2. ALORS QU' en cas d'application d'un régime d'équivalence, il appartient au juge, saisi d'une demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires, de vérifier que les heures supplémentaires alléguées par le salarié tiennent compte des coefficients de minoration prévues par le régime d'équivalence ; qu'en l'espèce, à l'appui de sa demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires, Monsieur Y... soutenait que la société GF Avenir avait fait une application erronée des dispositions de l'accord du 4 mai 2000 prévoyant l'application de coefficients, évolutifs dans le temps, aux amplitudes journalières d'activité en distinguant notamment les temps de permanence des périodes de service hors permanence ; qu'en se bornant à relever que la demande de rappel de salaire de Monsieur Y... était suffisamment étayée par ses bulletins de paie, l'attestation d'un salarié sur le déroulement des temps de pause, des tableaux d'horaires collectifs et une fiche de calcul des heures supplémentaires et que la société GF Avenir ne produisait, pour sa part, aucun document justifiant des horaires réels du salarié et de l'application des coefficients conventionnels, sans vérifier si les calculs du salarié tenaient compte des coefficients de minoration applicables aux services de permanence et durées d'amplitudes tels que fixés par l'accord-cadre du 4 mai 2000 relatif à l'aménagement et la réduction du temps de travail des personnels des entreprises de transport sanitaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 2 et 3 du texte conventionnel précité et de l'article L. 3171-4 du code du travail ;

3. ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE la cour d'appel ayant calculé le rappel de salaire pour heures supplémentaires sur la base du taux horaire, plus favorable, dont bénéficiait Madame A... en juin 2009, la cassation qui ne manquera pas d'intervenir sur le premier moyen de cassation, entraînera la cassation, par voie de conséquence, du chef de l'arrêt ayant condamné la société GF Avenir au paiement d'un rappel de salaire pour heures supplémentaires, en application de l'article 624 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société GF Avenir à payer à Monsieur Y... la somme de 300 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;

AUX MOTIFS QUE « Attendu que le non-paiement par l'employeur de l'intégralité de la rémunération due au salarié l'a privé momentanément d'une source de revenus, préjudice à caractère économique que la cour indemnisera par une indemnité fixée à 300 € » ;

1. ALORS QUE la cassation qui ne manquera pas d'intervenir sur les premier et deuxième moyens de cassation entraînera la cassation, par voie de conséquence, du chef de l'arrêt ayant condamné la société GF Avenir au paiement de dommages et intérêts en réparation du préjudice économique lié au retard apporté au paiement de l'intégralité de la rémunération, en application de l'article 624 du code de procédure civile ;

2. ALORS QUE le dommage résultant du retard apporté au règlement d'une dette ne peut être réparé que par l'allocation d'intérêts moratoires, sous réserve d'un préjudice distinct causé par la mauvaise foi du débiteur ; qu'en affirmant que le non-paiement, par l'employeur, de l'intégralité de la rémunération due au salarié l'a privé momentanément d'une source de revenus, préjudice à caractère économique, la cour d'appel n'a caractérisé ni la mauvaise foi de la société GF Avenir, ni un préjudice distinct du retard apporté au paiement de la rémunération de Monsieur Y... ; qu'elle a en conséquence privé sa décision de base légale au regard de l'article 1153, devenu l'article 1231-6, du code civil.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement du conseil de prud'hommes de Nice en ce qu'il a annulé le licenciement de Monsieur Y... et d'AVOIR condamné la société GF Avenir à payer à Monsieur Y... les sommes de 103.764,13 euros à titre d'indemnisation de la violation de son statut de salarié protégé, 13.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul, 4.291,24 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents et 1.010,12 euros à titre d'indemnité de licenciement ;

AUX MOTIFS QUE « Attendu qu'il résulte de l'examen des pièces produites que M. Laurent Y..., licencié pour faute grave par lettre du 1er août 2011 après convocation datée du 4 juillet 2011 à un entretien préalable fixé au 18 juillet 2011, avait avisé l'employeur dès le 22 mars 2011 de se trouver « en devenir d'être conseiller du salarié » ainsi que la société GF Avenir le précise elle-même dans la lettre d'avertissement du 29 avril 2011, information à nouveau rappelée par le salarié dans une lettre recommandée adressée à la direction de l'entreprise le 15 juin 2011 puis par le syndicat FO dans une correspondance du 13 juillet 2011, la désignation étant devenue effective suivant arrêté préfectoral du 26 août 2011 ; Attendu qu'il résulte suffisamment de ces constatations que la société GF Avenir était avisée, lors de l'engagement de la procédure de licenciement, de l'imminence de l'obtention par M. Laurent Y... du statut de salarié protégé, ce qui l'obligeait, en conséquence et en application de l'article L. 1232-14 du code du travail, à solliciter une autorisation administrative de licenciement ; que le non-respect de cette formalité conduit à confirmer la décision prud'homale ayant dit le licenciement nul ; Attendu que la nullité du licenciement ouvre droit à M. Laurent Y... qui ne sollicite pas sa réintégration, à une indemnité pour violation du statut protecteur correspondant aux salaires qu'il aurait dû percevoir durant son mandat de 3 ans, plus 12 mois de protection, se cumulant avec l'indemnisation du licenciement, soit 103 764,13 € (48 mois x 2 161,75 €) ; Attendu que M. Laurent Y..., ayant plus de 2 ans d'ancienneté (28 mois) au service d'une entreprise employant plus de 11 salariés, il lui sera accordé, en application de l'article L 1235-3 du code du travail et compte tenu de son salaire mensuel brut fixé à 2 161,75 €, une indemnité de licenciement arbitrée à 13 000 €, une indemnité compensatrice de préavis de 4 291,24 € (2 mois de salaire), outre l'indemnité de congés payés afférente, ainsi qu'une indemnité de licenciement de 1010,12 €, la cour adoptant le calcul sur la base d'un taux horaire de 10,39 € figurant en page 38 des conclusions de l'appelant » ;

1. ALORS QUE la procédure spéciale de licenciement des représentants du personnel n'est applicable, lorsque le salarié n'est pas candidat aux élections ou titulaire d'un mandat lors de l'engagement de la procédure de licenciement, qu'à la condition que l'employeur ait connaissance de l'imminence de sa candidature ou de sa désignation lors de l'engagement de la procédure de licenciement ; qu'il en résulte que la candidature ou la désignation du salarié doit intervenir dans un délai très bref à compter de l'engagement de la procédure de licenciement et, en tout état de cause, au cours de la procédure de licenciement ; qu'en l'espèce, il est constant que si Monsieur Y... avait informé la société GF Avenir, dès le 22 mars 2011, de ce qu'il se trouvait « en devenir d'être conseiller du salarié » et que cette information avait été rappelée à la société GF Avenir le 15 juin 2011, l'inscription effective du salarié sur la liste des conseillers du salarié, qui dépendait d'une décision préfectorale, n'était pas encore intervenue lors de l'engagement de la procédure de licenciement, le 4 juillet 2011, ni lors du licenciement, le 1er août 2011, et que Monsieur Y... n'a été finalement inscrit sur la liste des conseillers du salarié que le 26 août 2011, soit plus d'un mois et demi après l'engagement de la procédure de licenciement et plus de six mois après l'annonce faite à l'employeur ; qu'en affirmant cependant que la société GF Avenir était avisée de l'imminence de l'obtention du statut de salarié protégé par Monsieur Y... lors de l'engagement de la procédure de licenciement, cependant qu'il résulte de ses constatations que sa désignation ne présentait pas un caractère imminent à la date de l'engagement de la procédure de licenciement, ni même à la date du licenciement, la cour d'appel a violé les articles L. 2411-1 et L. 2411-21 du code du travail ;

2. ALORS QUE le conseiller du salarié, licencié sans autorisation administrative et qui ne demande pas sa réintégration, a droit à une indemnité pour violation du statut protecteur égale aux salaires qu'il aurait dû percevoir entre son éviction de l'entreprise et la fin de la période de protection, dans la limite de trente mois, durée de la protection minimale légale accordée aux représentants du personnel ; qu'en affirmant que Monsieur Y... avait droit, au titre de la violation du statut protecteur, à une indemnité égale aux salaires qu'il aurait dû percevoir pendant son mandat, plus douze mois de protection, la cour d'appel a encore violé les articles L. 2411-1 et L. 2411-21 du code du travail ;

3. ALORS QUE la cour d'appel ayant déterminé le montant de l'indemnité pour violation du statut protecteur, de l'indemnité compensatrice de préavis, de l'indemnité de licenciement et des dommages et intérêts pour licenciement nul en fonction du salaire mensuel établi sur la base du taux horaire de salaire, plus favorable, de Madame A... en 2009, la cassation qui ne manquera pas d'intervenir, sur le premier moyen de cassation, entraînera la cassation, par voie de conséquence, des chefs de l'arrêt critiqués par le quatrième moyen, en application de l'article 624 du code de procédure civile. Moyen produit par la SCP Coutard et Munier-Apaire, avocat aux Conseils, pour M. Y..., demandeur au pourvoi incident

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande tendant au paiement d'une somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts pour discrimination syndicale et harcèlement moral ;

AUX MOTIFS QUE « sur le harcèlement moral et la discrimination syndicale, attendu que les éléments d'appréciation soumis à la cour, pris dans leur ensemble, n'autorisent pas à retenir, nonobstant les avertissements notifiés à M. Laurent Y..., que ce dernier, au-delà du différend l'ayant opposé à l'employeur quant à la rémunération de son temps de travail et à la conclusion d'une convention de rupture, ait été victime d'actes de harcèlements moral ou de discrimination en raison de son appartenance au syndicat Force Ouvrière dont la SARL GF AVENIR a été tardivement avisée au mois de mars 2011 (pièce 13) ; que la demande en dommages et intérêts insuffisamment justifiée, sera rejetée » ;

1°) ALORS, D'UNE PART, QUE pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail ; que, dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que le même régime de preuve s'applique en matière de discrimination syndicale ; qu'en jugeant que « les éléments d'appréciation soumis à la cour, pris dans leur ensemble, [n'autorisaient] pas à retenir, nonobstant les avertissements notifiés à M. Laurent Y..., que ce dernier, au-delà du différend l'ayant opposé à l'employeur quant à la rémunération de son temps de travail et à la conclusion d'une convention de rupture, ait été victime d'actes de harcèlements moral ou de discrimination en raison de son appartenance au syndicat Force Ouvrière » et en le déboutant en conséquence de sa demande de dommages et intérêts, quand il n'appartenait au salarié que d'apporter des éléments susceptibles de présumer l'existence d'un harcèlement moral, la cour d'appel a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié et a en conséquence violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du Code du travail ;

2°) ALORS, D'AUTRE PART, QU'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel qui n'a pas fait droit à la demande de dommages-intérêts pour discrimination syndicale a méconnu les règles de preuve en la matière et a violé les articles L. 1132-1 et L. 1134-1 du code du travail.

3°) ALORS ENCORE QUE l'insuffisance de motivation équivaut à un défaut de motif ; que le juge qui déboute le salarié de ses demandes en se bornant à se référer aux « éléments d'appréciation soumis à la Cour, pris dans leur ensemble » pour débouter le salarié de ses demandes en réparation du harcèlement moral et de la discrimination syndicale dont il avait été victime, ne justifie pas sa décision, dès lors qu'il ne vise ni n'analyse aucune des pièces soumises à son examen et interdit ainsi à la Cour de cassation d'exercer son contrôle ; que l'arrêt viole l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-15183
Date de la décision : 27/06/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 26 janvier 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 27 jui. 2018, pourvoi n°17-15183


Composition du Tribunal
Président : Mme Goasguen (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Coutard et Munier-Apaire, SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.15183
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