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20/06/2018 | FRANCE | N°17-17286

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 20 juin 2018, 17-17286


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société A... que sur le pourvoi incident relevé par la société Herskovits, Thome et Tobie ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a confié la construction d'un navire mytilicole à la société A... laquelle a chargé la société Herskovits, Thome et Tobie (la société HT2) d'en établir les plans ; que la recette du navire est intervenue sans réserve ; qu'invoquant plusieurs défauts, M. X... a obtenu du juge des référés la désignation

d'un expert ; que M. X... a assigné la société A... et la société HT2 en réparation ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société A... que sur le pourvoi incident relevé par la société Herskovits, Thome et Tobie ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a confié la construction d'un navire mytilicole à la société A... laquelle a chargé la société Herskovits, Thome et Tobie (la société HT2) d'en établir les plans ; que la recette du navire est intervenue sans réserve ; qu'invoquant plusieurs défauts, M. X... a obtenu du juge des référés la désignation d'un expert ; que M. X... a assigné la société A... et la société HT2 en réparation de ses préjudices ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en sa troisième branche, et le moyen unique du pourvoi incident, pris en sa troisième branche, rédigés en termes similaires, réunis :

Vu l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

Attendu que pour condamner la société A... à payer à M. X... la somme de 18 060 euros et, in solidum avec la société HT2, les sommes de 15 000 euros au titre de la reprise de la grue, 1 220 euros et 900 euros, avec intérêts légaux et capitalisation, l'arrêt retient qu'il ne peut être opposé à M. X... la réception sans réserve car le navire commandé, qui est un prototype, est assimilable à un objet complexe dont la conformité ne peut être appréciée qu'en situation d'usage et ce d'autant que les conditions maritimes influencent tant l'usage que les conditions de sécurité à l'usage ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans préciser en quoi le navire commandé était, par sa sophistication, un produit complexe, dont la recette sans réserve n'aurait pas été de nature à purger les défauts de conformité et les vices apparents, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Et vu l'article 624 du code de procédure civile ;

Attendu que la cassation prononcée, en ce qu'il en résulte un doute quant à la responsabilité du constructeur et de l'architecte navals ou à l'étendue de celle-ci entraîne, par voie de conséquence, celle de tous les chefs du dispositif relatifs aux demandes de réparation, accueillies ou rejetées, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce que, confirmant le jugement, il dit que l'action n'est pas prescrite et que l'instance n'est pas périmée, l'arrêt rendu le 10 février 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;

Dit n'y avoir lieu à mettre hors de cause la société Herskovits, Thome et Tobie, dont la présence devant la cour d'appel est nécessaire à la solution du litige ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à la société A... la somme de 3 000 euros et à la société Herskovits, Thome et Tobie la même somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt juin deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.

Moyens produits AU POURVOI PRINCIPAL par la SCP Marlange et de La Burgade, avocat aux Conseils, pour la société A... .

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné la société A... , solidairement avec la société HT2, à payer à Monsieur X... les sommes de 15.000 € HT au titre de la reprise de la grue (Poste 1.1), 1.220 € HT au titre du remboursement auprès de Monsieur X... de la rallonge qui avait été posée pour tenter de remédier aux désordres (Poste 1.1), et 900 € au titre du passage délicat de l'allonge dans la grue (Poste 1.3), ainsi que la somme de 18.060 € au titre de la mise à niveau des potences (Poste 2), avec intérêts légaux à compter du 24/12/2009 et capitalisation des intérêts par année entière ;

AUX MOTIFS QUE « M. X... a commandé à la SARL A... , conformément à l'article II du contrat « un bateau mytilicole conforme à la réglementation en vigueur ». Le constructeur s'est engagé à « apporter toutes les modifications qui pourraient être demandées par les affaires maritimes le Bureau Veritas conformément à ces règlements » ; M. X... indique dans sa mise en demeure du 25/05/2009 que sa demande avait pour objectif la construction d'un navire du « même type de navire que celui réalisé par les chantiers GAMELIN pour quatre ostréiculteurs de l'Ile de Ré », ce qui induit non seulement le positionnement de potences mais également d'une grue destinée à soulever la filière horizontale supportant les filières verticales supportant les huîtres et devant être suffisamment longue pour pouvoir oeuvrer au-delà des potences situées sur le bord du navire ; le contrat écrit précise que le bateau à livrer comporte : « coque, aménagement, ferrement, appareils hydrauliques, grue, montage motorisation, matériel sécurité, bureau VERITAS » et ce pour le prix de 628.511,97 euros (article III du contrat) ; en conséquence, il appartient bien à la société A... d'exécuter cette prestation en tant que cocontractant de M. X... ; à ce titre, elle était donc tenue d'une obligation de résultat quant au montage du navire de telle manière qu'il puisse être utilisé conformément à l'objectif donné à savoir l'utilisation de celui-ci pour relever les filières d'huîtres en pleine mer ; l'expertise établit très clairement que la longueur de la grue et/ou son positionnement était inadapté et ne permettait pas de fonctionner dans des conditions répondant à la commande faite par M. X... (pages 112 à 114) ; les deux solutions de reprises proposées par l'expert le démontrent également ; en effet, l'expert relève notamment : - « manque de longueur suffisante de flèche de la grue pour effectuer le positionnement du navire le long de la filière », - « Le désordre constaté applicable à la grue dans le cadre de ce litige nous paraît donc être uniquement, qu'en l'état, la verticale de l'extrémité de la grue ne dépasse pas assez la potence avant », - le « modèle implanté ne convient pas à la manoeuvre d'accostage des filières, 2,5 mètres de longueur de flèche en plus étant nécessaires », - « la fourniture d'une rallonge est la conséquence de l'inadaptation de la grue, de portée insuffisante pour permettre la manoeuvre. Elle est donc bien imputable à un défaut de conception » ; ce problème de conception ne peut être imputé à M. X... qui est le client mais à la société A... qui avait contractuellement une obligation de résultat à son égard ; c'est à tort qu'il est reproché à M. X... de n'avoir pas fourni un cahier des charges plus précis, la société A... ne démontrant pas avoir émis la moindre demande sur ce point, s'étant satisfaite des plans du chantier GAMELIN lesquels pour autant ne correspondaient pas précisément à la même structure de base du navire ; si la société A... estimait ne pas être suffisamment informée des besoins de M. X..., il lui appartenait de refuser la commande faite ; dès lors qu'elle a signé le contrat, l'obligation de délivrance d'un navire conforme aux objectifs ci-dessus rappelés lui incombait ; enfin, M. X... fonde ses prétentions à la fois sur l'obligation de délivrance et sur la garantie des vices cachés ; il est de principe que lorsque le défaut invoqué relève des vices cachés, le demandeur ne peut fonder ses demandes sur l'obligation de délivrance ; en l'espèce, il est établi par l'expertise que les éléments du navire fournis n'étaient pas en eux-mêmes affectés d'un vice ; M. X... peut donc fonder sa demande sur l'obligation de délivrance due par la société A... ; le vice s'identifie à toute défectuosité qui empêche la chose de rendre, et de rendre pleinement, les services que l'on en attend ; en l'espèce, l'expertise démontre que seule la conception générale est en cause et non une défectuosité intrinsèque du navire ou d'un des éléments le composant ; l'obligation de délivrance de machines complexes n'est pleinement exécutée qu'une fois réalisée la mise au point effective de la chose vendue (Cass. com., 10 février 2015, pourvoi n° 13-24501) (Cass com., 11 juillet 2006, pourvoi n° 04-17093 ; Cass com., 26 novembre 2013, pourvoi n° 12-25.191) ; il ne peut être opposé à M. X... en l'espèce la réception sans réserve ; en effet, le navire commandé, qui est un prototype est assimilable à un objet complexe dont la conformité ne peut être appréciée qu'en situation d'usage et ce d'autant que les conditions maritimes influencent tant l'usage que les conditions de sécurité à l'usage et qu'il s'agissait d'un prototype ; il résulte donc des éléments qui précèdent [que] la société A... a manqué à son obligation de délivrance conforme du navire au vu des obligations contractuelles souscrites » (arrêt pp. 7 et 8) ;

ET AUX MOTIFS QUE « Poste 2 (*) : 18.060 € au titre de la mise à niveau des potences : l'expert a relevé que les rouleaux droits sur potences avant et arrières ne sont pas fonctionnels provoquant l'usure du cordage, la difficulté de hisser à bord la ligne poches et casiers, les cordages se coinçant dans un angle rentrant ; il a par ailleurs imputé ce désordre à un problème de conception ; il est établi que sur ce point la conception n'a pas été conforme à la demande de M. X... qui avait sollicité qu'il soit pris modèle sur des navires existants ; la société A... n'a pas satisfait à son obligation de délivrance sur ce point » (arrêt p. 11) ;

ALORS QUE 1°) le défaut de conformité réside dans la livraison d'une chose qui ne respecte pas les spécifications contractuelles ; que, pour retenir un manquement de la société A... à son obligation de délivrance conforme, la cour d'appel s'est bornée à constater, d'une part, que le contrat portait sur « un bateau mytilicole conforme à la réglementation en vigueur », comportant : « coque, aménagement, ferrement, appareils hydrauliques, grue, montage motorisation, matériel sécurité, bureau VERITAS » et, d'autre part, que Monsieur X... indiquait, « dans sa mise en demeure du 25/05/2009 », que sa demande avait pour objectif la construction d'un navire du « même type de navire que celui réalisé par les chantiers GAMELIN pour quatre ostréiculteurs de l'Ile de Ré », ce qui induisait non seulement le positionnement de potences mais également d'une grue destinée à soulever la filière horizontale supportant les filières verticales supportant les huîtres et devant être suffisamment longue pour pouvoir oeuvrer au-delà des potences situées sur le bord du navire ; qu'en statuant par de tels motifs, pour retenir un manquement de la société A... à son obligation de délivrance conforme, sans toutefois caractériser, parmi les stipulations contractuelles faisant la loi des parties, et non dans la mise en demeure de Monsieur X..., postérieure à la réalisation des travaux, les spécifications techniques que la société aurait méconnues s'agissant de l'emplacement et des caractéristiques de la grue et des potences, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016,

ALORS QUE 2°) en affirmant que la société A... aurait méconnu son obligation de délivrance conforme, sans rechercher, ainsi que l'y invitait cette société (conclusions, p. 9), si, compte tenu de l'absence de tout cahier des charges définissant les besoins spécifiques de l'activité de Monsieur X..., déplorée par l'expert judiciaire (rapport, p. 113), et compte tenu du fait que la grue avait été réalisée conformément au devis accepté par Monsieur X..., et que celui-ci avait reçu les plans de l'architecte naval sur son positionnement par rapport aux potences, sans émettre la moindre observation, la société A... n'avait pas, au contraire, parfaitement respecté les engagements qu'elle avait souscrits à l'égard de Monsieur X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du février 2016,

ALORS, subsidiairement, QUE 3°), les défauts de conformités contractuels apparents sont couverts par la réception sans réserve ; qu'en affirmant, pour écarter les effets de la réception du navire sans réserve, que ce dernier était assimilable à un « objet complexe dont la conformité ne peut être appréciée qu'en situation d'usage », au motif inopérant qu'il s'agissait d'un prototype, sans caractériser le fait que le navire litigieux, destiné à un usage ostréicole, présentait un degré de technicité et de sophistication tel qu'il puisse être considéré comme un « objet complexe », la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

ALORS, subsidiairement, QUE 4°) les défauts de conformités contractuels apparents sont couverts par la réception sans réserve ; qu'en affirmant, pour écarter les effets de la réception du navire sans réserve, qu'il était assimilable à un « objet complexe dont la conformité ne peut être appréciée qu'en situation d'usage », aux motifs inopérants que les conditions de navigation en mer avaient une influence sur l'usage et les conditions de sécurité à l'usage, sans indiquer les caractéristiques intrinsèques du navire litigieux qui, par leur technicité et leur sophistication, auraient permis de le considérer comme un « objet complexe », la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné la société A... à payer à Monsieur X... les sommes de 770 € au titre de l'absence de fourniture par le chantier du support de la grue en position repos (poste 1.8 du récapitulatif), 821 € au titre de la radio VHF portable (poste n° 3.7), 225 € au titre des matériels inscrits et non-inscrits (poste 5.1), 249,84 € pour l'antenne VHF (poste 7.1), 4.800 € de valeur à déduire du devis A... des prédispositions pour le propulseur d'étrave (poste 7.2), 3.950 € pour l'encastrement de pont valorisé (poste 7. 3), 150 € pour l'inverseur de marche de la ventilation moteur (poste 7.4), 1.280 € au titre du défaut de livraison de la bâche (poste 8.1), 200 € au titre du défaut de livraison d'un chauffage électrique conforme au devis (poste 8.2), et 3.474,25 € en indemnisation du surcoût de la compensation du devis et de la facture par rapport aux valeurs déclarées au titre de la yole, le tout avec intérêts légaux à compter du 24/ 12/2009 et capitalisation des intérêts par année entière ;

AUX MOTIFS QUE « l'obligation de délivrance de machines complexes n'est pleinement exécutée qu'une fois réalisée la mise au point effective de la chose vendue (Cass. com., 10 février 2015, pourvoi n° 13-24.501) (Cass com., 11 juillet 2006, pourvoi n° 04-17093 ; Cass com., 26 novembre 2013, pourvoi n° 12-25191) ; il ne peut être opposé à M. X... en l'espèce la réception sans réserve ; en effet, le navire commandé, qui est un prototype est assimilable à un objet complexe dont la conformité ne peut être appréciée qu'en situation d'usage et ce d'autant que les conditions maritimes influencent tant l'usage que les conditions de sécurité à l'usage et qu'il s'agissait d'un prototype ; il résulte donc des éléments qui précèdent [que] la société A... a manqué à son obligation de délivrance conforme du navire au vu des obligations contractuelles souscrites » (arrêt p. 8) ;

ET AUX MOTIFS QUE « M. X... sollicite la somme de 15.920,09 € au titre des biens non livrés et des surfacturations alléguées à l'encontre de la SARL A... ; ce montant sera analysé point par point ; - sur l'absence de fourniture par le chantier du support de la grue en position repos pour un montant de 770 € (poste 1.8 du récapitulatif) : la pose sur un support fixe de la grue en position repos est une prescription impérative du fabricant afin de la préserver de mouvements et contraintes lorsqu'elle n'est pas utilisée, - sur la radio VHF portable pour un montant de 821 € qui n'a jamais été livrée par le Chantier A... (poste n° 3.7) : devant l'expert, M A... a reconnu que cet équipement prévu au devis n'était pas installé ayant jugé que puisqu'il n'était pas exigé pour la sécurité, il n'avait pas jugé utile de la placer à bord ; une telle attitude démontre un manque sérieux de professionnalisme et de non-respect des obligations contractuelles et ce d'autant que le poste suivant démontre également que des matériels obligatoires et prévus au devis n'avaient pas non plus été fournis ; cette demande est justifiée, - sur les matériels inscrits et non-inscrits et pourtant obligatoires au devis pour un montant de 150 et 75 € soit 225 € (poste 5.1) : il résulte des motifs qui précède que cette demande est également justifiée, - sur l'antenne VHF pour un montant de 249,84 € (poste 7.1) : l'expertise caractérise page 156 le bien-fondé de cette prétention, - sur la valeur à déduire du devis A... des prédispositions pour le propulseur d'étrave évalué à 4.800 € par l'expert judiciaire (poste 7.2) : l'expert caractérise que l'équipement mentionné au devis n'était pas posé ; il souligne qu'il devait être prévu au moment même de la construction car lorsqu'il est mis en place ultérieurement, le coût en est bien supérieur ; l'estimation retenue par l'expert est justifiée et sera retenue, - sur l'encastrement de pont valorisé par l'expert judiciaire à 3.950 € (poste 7.3) : les observations concernant le poste 7.2 sont applicables au poste 7.3 ; la demande est donc justifiée, - sur l'inverseur de marche de la ventilation moteur pour un montant de 150 € (poste 7.4) : l'appareil prévu au devis n'a pas été posé ; la demande est justifiée, - sur le défaut de livraison de la bâche pour un montant de 1.280 € (poste 8.1) : l'expert a parfaitement caractérisé que le devis incluait la bâche du fait de la mention « équipée » ; la bâche a donc été comptabilisée à tort par la société A... comme une plus-value de 1.280 euros ; elle sera donc tenue au remboursement de cette somme, - sur le défaut de livraison d'un chauffage électrique conforme au devis pour un montant de 200 € (poste 8.2) : un système de chauffage par fioul a été accepté en remplacement du chauffage électrique et a été intégralement facturé sans que soit déduit le montant correspondant au chauffage électrique, - sur l'indemnisation du surcoût de la compensation du devis et de la facture par rapport aux valeurs déclarées au titre de la yole pour un montant de 3.474,25 € : l'expertise démontre parfaitement que la différence de facturation de 13.388 euros que la société A... explique par l'intégration du coût de la yole n'est pas justifiée en son montant au regard du devis (page 159/ 160) ; M. X... justifie en conséquence d'un surcoût illégitime de 3.474,25 euros » (arrêt pp. 15 et 16) ;

ALORS QUE 1°) tout jugement doit être motivé ; que la société A... faisait valoir, dans ses conclusions (p. 10), qu'en matière de construction navale, la recette, soit la réception du navire, faite sans réserve, emporte acceptation par l'armateur de toutes les caractéristiques apparentes dudit navire ; qu'elle constatait que Monsieur X... faisait état de surfacturations qui seraient nées de matériels non fournis, ce qui était apparent lors de la réception et n'avait pourtant pas été signalé (points 1.8, 3.7, 5.1, 7.1, 7.2, 7.3, 7.4, 8.1, 8.2) ; qu'elle en déduisait qu'il était réputé avoir accepté le navire en l'état et ne pouvait émettre la moindre revendication à l'égard de ce qui était apparent lors de la recette du navire ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions opérantes, pour accueillir les demandes de Monsieur X... au titre de ces différents points contestés, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS, subsidiairement, que 2°), les défauts de conformités contractuels apparents sont couverts par la réception sans réserve ; qu'en affirmant, pour écarter les effets de la réception du navire sans réserve, que ce dernier était assimilable à un « objet complexe dont la conformité ne peut être appréciée qu'en situation d'usage », au motif inopérant qu'il s'agissait d'un prototype, sans caractériser le fait que le navire litigieux, destiné à un usage ostréicole, présentait un degré de technicité et de sophistication tel qu'il puisse être considéré comme un « objet complexe », la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

ALORS, subsidiairement, QUE 3°) les défauts de conformités contractuels apparents sont couverts par la réception sans réserve ; qu'en affirmant, pour écarter les effets de la réception du navire sans réserve, qu'il était assimilable à un « objet complexe dont la conformité ne peut être appréciée qu'en situation d'usage », aux motifs inopérants que les conditions de navigation en mer avaient une influence sur l'usage et les conditions de sécurité à l'usage, sans indiquer les caractéristiques intrinsèques du navire litigieux qui, par leur technicité et leur sophistication, auraient permis de le considérer comme un « objet complexe », la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné la société A... , solidairement avec la société HT2, à payer à Monsieur X... les sommes suivantes au titre du : - Poste 1.4 : 1.200 € au titre des flexibles hydrauliques, - Poste 1.5 : 50 € au titre des capuchons de tête de vis/écrous de support de grue, - Poste 1.6 : 1.950 € au titre des joints tournants, - Poste 1.10 : 50 € au titre de la plaque de regard/graissage de la couronne de la grue, - Poste 2 : 18.060 € au titre de la mise à niveau des potences, -
Poste 3.1 : 687 € au titre des manettes de commande, - Poste 3.2 : 1.638 € au titre de l'hélice fonctionnant en position stop, - Poste 3.6 : 945 € au titre de reprise de la reprise de la menuiserie de la timonerie, - Poste 3.8 : 2.300 € au titre du remplacement du pilote automatique, - Poste 3.9 : 300 € au titre de la reprise des haut-parleurs de passerelle, - Poste 3.11 : 400 € au titre de la corrosion des portes de passerelle, - Poste 3.12 : 50 € au titre du remplacement de la corne de brume, - Poste 3.15 : 150 € au titre du jeu dans le mécanisme de la porte, - Poste 4.l : 625 € au titre des fuites dans le compartiment moteur, - Poste 4.2 : 750 € au titre de l'étanchéité des passages d'embases, - Poste 4.6 : 961 € au titre de la pompe d'eau de mer, - Poste 4.8 : 595 € au titre de la modification des positions de filtre à gazole, - Poste 4.9 : 250 € au titre de l'étanchéité de la poignée de la trappe d'accès moteur, - Poste 4.10 : 250 € au titre de la porte du caisson CO², - Poste 6.2 : 507,50 € au titre de l'orientation des réglages des commandes, - Poste 8.4 : 2.450 € au titre de la modification de remplissage des cuves à gazole, - Poste 8.5 : 1.500 € au titre de la mauvaise étanchéité du passage de la gaine électrique dans le fût de la grue, le tout avec intérêts légaux à compter du 24/12/2009 et capitalisation des intérêts par année entière ;

AUX MOTIFS QUE « Poste 1.4 : 1.200 € au titre des flexibles hydrauliques : l'expert a caractérisé le vieillissement prématuré des gaines de flexibles (page 120) et a exclu un phénomène de frottement "hautement improbable compte tenu de l'emplacement des flexibles endommagés" ; le remplacement est nécessaire et l'imputabilité incombe à la seule société A... ; Poste 1.5 : 50 € au titre des capuchons de tête de vis écrous de support de grue : l'expert relève que l'absence de capuchons de plastique de protection des écrous de fixation du socle de la grue a été corrigé de manière insatisfaisante du fait d'un mauvais collage ou calage par suite d'excès de mastic souple posé sur les têtes ; l'évaluation de finition est de 50 euros ; étant rattachée intrinsèquement au navire vendu, il sera considéré que ce poste est intégré dans la diminution du prix de vente de juillet 2012 ; il n'est pas imputable à la société HT2 ; Poste 1.6 : 1.950 € au titre des joints tournants : l'expert a constaté le dysfonctionnement du boitier de commande qui trouve son origine dans "un défaut d'étanchéité' du joint tournant électrique" ; ce défaut a entraîné la destruction interne complète dudit joint qui doit être remplacé ; l'expert indique que le remplacement n'a pu être effectué dans la mesure où le fabricant a exigé la restitution de la pièce défectueuse ce qui n'est pas légitime ; quoiqu'il en soit le navire a été vendu avec la solution provisoire mise en oeuvre décrite par l'expert préjudiciant à l'usage de la grue vendue également ; étant rattachée intrinsèquement au navire vendu, il sera considéré que ce poste est intégré dans la diminution du prix de vente de juillet 2012 ; il n'est pas imputable à la société HT2 ; [
] Poste 1.10 : 50 € au titre de la plaque de regard/graissage de la couronne de la grue : cette plaque est détériorée ; il sera procédé à son remplacement pour ce coût minime et non contesté par la société A... ; aucun élément ne permet de considérer que la dégradation résulte du problème de conception ; étant rattachée intrinsèquement au navire vendu, il sera considéré que ce poste est intégré dans la diminution du prix de vente de juillet 2012 ; il n'est pas imputable à la société HT2 ; Poste 2 : 18.060 € au titre de la mise à niveau des potences : l'expert a relevé que les rouleaux droits sur potences avant et arrières ne sont pas fonctionnels provoquant l'usure du cordage, la difficulté de hisser à bord la ligne poches et casiers, les cordages se coinçant dans un angle rentrant ; il a par ailleurs imputé ce désordre à un problème de conception ; il est établi que sur ce point la conception n'a pas été conforme à la demande de M. X... qui avait sollicité qu'il soit pris modèle sur des navires existants ; la société A... n'a pas satisfait à son obligation de délivrance sur ce point ; pour autant, aucun élément n'est produit permettant de considérer que la société HT2 soit spécifiquement intervenue dans la conception précise des potences au-delà de la conception générale du navire ; ce chef de préjudice sera donc imputé à la société A... uniquement ; Poste 3.1 : 687 € au titre des manettes de commande : il résulte de l'expertise que ce chef de préjudice est dû à la qualité du matériel fourni ; il n'est donc imputable qu'à la société A... ; Poste 3.2 : 1.638 € au titre de l'hélice fonctionnant en position stop : l'expert impute le désordre à un défaut de montage qui ne concerne pas la société HT2 ; ce chef de préjudice n'est donc imputable qu'à la société A... ; Poste 3.6 : 1.945 € au titre de reprise de la reprise de la menuiserie de la timonerie : l'expert relève que ce désordre résulte des travaux de l'ébéniste sous-traitant de la société A... ; il ne peut donc être imputé à la société HT2 ; Poste 3.8 : 2.300 € au titre du remplacement du pilote automatique : ce remplacement est selon l'expertise résulte d'un défaut de l'appareil mis en place ; le coût de remplacement est estimé à 2.300 euros ; ce chef de préjudice n'est donc imputable qu'à la société A... ; Poste 3.9 : 300 € au titre de la reprise des haut-parleurs de passerelle : l'expert relève que les haut-parleurs mis en place ne sont pas adaptés à l'usage extérieur en milieu marin et qu'ils doivent être remplacés ; ce chef de préjudice n'est donc imputable qu'à la société A... ; Poste 3.11 : 400 € au titre de la corrosion des portes de passerelle : l'expert retient un défaut d'isolation adapté ; la mesure de réparation est suffisante ce qui n'est pas contesté ; la société HT2 n'est pas concernée par ce problème ; Poste 3.12 : 50 € au titre du remplacement de la corne de brume : l'expert relève un problème de positionnement de cet équipement obligatoire tout en soulignant la grande vulnérabilité de ce matériel ; l'évaluation proposée sera retenue ; la société HT2 n'est pas concernée par ce problème ; Poste 3.15 : 150 € au titre du jeu dans le mécanisme de la porte : l'expert a constaté un jeu dans le mécanisme de porte et n'exclut pas une fragilité interne ; l'évaluation proposée sera retenue ; la société HT2 n'est pas concernée par ce problème ; Poste 4.1 : 625 € au titre des fuites dans le compartiment moteur : l'expert a constaté les fuites ; il exclut expressément un problème d'utilisation ; une reprise totale de la partie hydraulique est nécessaire ; l'évaluation proposée sera retenue ; la société HT2 n'est pas concernée par ce problème ; Poste 4.2 : 750 € au titre de l'étanchéité des passages d'embases : l'expert indique que la bonne étanchéité du passage est importante car, à défaut, tant l'eau de pluie que les embruns peuvent pénétrer dans le compartiment moteur ; les tentatives de reprise par des mousses ou par des capuchons caoutchouc ne sont pas révélées satisfaisantes ; la mauvaise conception du passage des flexibles est à l'origine des désordres ; l'évaluation proposée sera retenue ; la société HT2 n'est pas concernée par ce problème, dès lors qu'il n'est nullement établi par les pièces de procédure qu'elle était en charge au-delà des plans généraux de la conception précise des différents équipements ; Posté 4.6 : 961 € au titre de la pompe d'eau de mer : il s'agit de la pompe de lavage ; l'expert a retenu que le matériel n'était pas conforme au devis même s'il n'a pu déterminer la cause faute de constat ; M. X... accepte de ne retenir que la remise en état pour la somme susvisée ; aucun élément ne permet d'imputer ce point à la société HT2 ; Poste 4.7 : 20 € au titre de la vanne d'eau de mer : l'expert retient qu'il s'agit d'un désordre d'utilisation ; ce chef de préjudice sera rejeté ; Poste 4.8 : 595 € au titre de la modification des positions de filtre à gazole : l'expert retient qu'il s'agit d'un désordre de conception du positionnement des filtres, l'espace d'accès étant trop réduit et le manque de hauteur entre la gatte et les bas des filtres ne permettant pas le démontage de ces derniers ; la société HT2 n'est pas concernée par ce problème, dès lors qu'il n'est nullement établi par les pièces de procédure qu'elle était en charge au-delà des plans généraux de la conception précise des différents équipements ; Poste 4.9 : 250 € au titre de l'étanchéité de la poignée de la trappe d'accès moteur ; ce désordre est imputable à la seule société A... dès lors qu'il résulte d'un défaut de pose ; Poste 4.10 : 250 € au titre de la porte du caisson CO² : ce désordre est imputable à la seule société A... dès lors qu'il résulte d'un défaut de pose ; Poste : 507,50 € au titre de l'orientation des réglages des commandes : l'expert impute ce désordre à un défaut de réglage qui aurait dû être fait à la construction ; ce désordre est donc imputable à la seule société A... ; [
] Poste 8.4 : 2.450 € au titre de la modification de remplissage des cuves à gazole : ce désordre résulte d'un problème de conception à la construction dès lors que le niveau de sortie du dégagement d'air est plus bas que celui de l'orifice de remplissage situé sur le caisson contre l'arrière bâbord de la timonerie ; la société HT2 n'est pas concernée par ce problème, dès lors qu'il n'est nullement établi par les pièces de procédure qu'elle était en charge au-delà des plans généraux de la conception précise des différents équipements ; Poste 8.5 : 1.500 € au titre de la mauvaise étanchéité du passage de la gaine électrique dans le fût de la grue : le passage d'eau est dû à un manque d'étanchéité du passage au travers du pont du câblage électrique provenant du boîtier de commande situé sur la grue et allant au boitier de distribution situé sous le pont ; l'expert relève que l'étanchéité est défectueuse et qu'à terme " les particules ferriques mélangées à de l'eau salée pourront finir par provoquer un effet de corrosion galvanique, même faible avec l'aluminium » ; l'expert indique que le problème en l'état ne peut être réglé mais qu'il le sera par le déplacement ou le remplacement de la grue ; le préjudice correspond au coût de travail supplémentaire sur un an et demi ; l'évaluation n'est pas contestée par M. X... ; ce préjudice n'est pas imputable à la société HT2 ; la réception sans réserve ne peut permettre d'écarter les différents désordres susvisés compte tenu de leur nature, de l'aspect caché manifeste pour certains d'entre eux ou encore en raison de la nécessaire utilisation en mer pour prendre conscience des manques ou défaillances » (arrêt pp. 11 à 14).

ALORS QU'en affirmant que « la réception sans réserve ne peut permettre d'écarter les différents désordres susvisés compte tenu de leur nature, de l'aspect caché manifeste pour certains d'entre eux ou encore en raison de la nécessaire utilisation en mer pour prendre conscience des manques ou défaillances » (arrêt p. 14), sans préciser pour quel désordre, parmi les nombreux qu'elle visait, la réception sans réserve ne pouvait faire obstacle à l'indemnisation de Monsieur X..., à raison soit de sa nature, soit de son aspect caché, soit de la nécessaire utilisation préalable du navire en mer, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016. Moyen produit AU POURVOI INCIDENT par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour la société Herskovits, Thome et Tobie.

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la société HT2, solidairement avec la société A... , à payer à M. X..., pour le poste 1.1, les sommes de 15.000 € HT au titre de la reprise de la grue et de 1.220 € HT au titre du remboursement de la rallonge qui avait été posée pour tenter de remédier aux désordres, et, pour le poste 1.3, la somme de 900 € au titre du passage délicat de l'allonge dans la grue, avec intérêts légaux à compter du 24 décembre 2009 et capitalisation des intérêts par année entière ;

AUX MOTIFS QUE M. X... a commandé à la société A... , conformément à l'article II du contrat, « un bateau mytilicole conforme à la réglementation en vigueur » ; que le constructeur s'est engagé à « apporter toutes les modifications qui pourraient être demandées par les affaires maritimes et le Bureau Veritas conformément à ces règlements » ; que M. X... indique dans sa mise en demeure du 25 mai 2009 que sa demande avait pour objectif la construction d'un navire du « même type de navire que celui réalisé par les chantiers Gamelin pour quatre ostréiculteurs de l'Ile de Ré », ce qui induit non seulement le positionnement de potences, mais également d'une grue destinée à soulever la filière horizontale supportant les filières verticales supportant les huîtres et devant être suffisamment longue pour pouvoir oeuvrer au-delà des potences situées sur le bord du navire ; que le contrat précise que le bateau à livrer comporte : « coque, aménagement, ferrement, appareils hydrauliques, grue, montage motorisation, matériel sécurité, Bureau Véritas », pour le prix de 628.511,97 € (article III du contrat) ; qu'en conséquence, il appartient à la société A... d'exécuter cette prestation en tant que cocontractant de M. X... ; qu'à ce titre, elle était tenue d'une obligation de résultat quant au montage du navire de telle manière qu'il puisse être utilisé conformément à l'objectif donné, à savoir l'utilisation de celui-ci pour relever les filières d'huîtres en pleine mer ; que l'expertise établit très clairement que la longueur de la grue et/ou son positionnement était inadapté et ne permettait pas de fonctionner dans des conditions répondant à la commande faite par M. X... (p. 112 à 114) ; (
) que le vice s'identifie à toute défectuosité qui empêche la chose de rendre, et de rendre pleinement, les services que l'on en attend ; qu'en l'espèce, l'expertise démontre que seule la conception générale est en cause et non une défectuosité intrinsèque du navire ou d'un des éléments le composant ; que l'obligation de délivrance de machines complexes n'est pleinement exécutée qu'une fois réalisée la mise au point effective de la chose vendue (Cass. com., 10 février 2015, nº 13-24.501 ; 11 juillet 2006, nº 04-17.093 ; 26 novembre 2013, nº 12-25.191) ; qu'il ne peut être opposé à M. X... la réception sans réserve ; qu'en effet, le navire commandé, qui est un prototype, est assimilable à un objet complexe dont la conformité ne peut être appréciée qu'en situation d'usage, d'autant que les conditions maritimes influencent tant l'usage que les conditions de sécurité à l'usage ; qu'il résulte des éléments qui précèdent la société A... a manqué à son obligation de délivrance conforme du navire au vu des obligations contractuelles souscrites ;

ET AUX MOTIFS QUE M. X... n'a aucun lien contractuel avec la société HT2 ; qu'il ne peut agir à son encontre que sur le fondement délictuel, en démontrant que celle-ci a commis une faute dans l'exécution de ses obligations contractuelles à l'égard de la société A... et que cette faute a contribué à la réalisation de l'entier dommage ; que la société A... n'a pas appelé en garantie la société HT2 et n'a donc pas fondé de demandes sur le fondement de leurs relations contractuelles ; que la société HT2, qui ne conteste pas avoir une activité d'architecture navale, a été sollicitée par la société A... pour participer à la réalisation du bateau ; qu'elle a établi les plans et les a transmis (courriel de M. Max B... du cabinet HT2 du 05 juin 2008) ; que ces plans d'ensemble du bateau comportent le positionnement des potences et de la grue ; qu'il n'est produit aux débats aucune justification de ce qu'un cahier des charges plus précis ait été fourni par la société A... à la société HT2, ni aucun document contractuel liant ces deux sociétés ; que dans un courrier du 13 mars 2009 adressé à M X..., la société HT2 réfute le reproche qui lui est fait d'une « erreur de l'architecte quant au positionnement de la grue » ; qu'elle faisait valoir que la conception s'est faite par comparaison avec le projet construit sur le chantier Gamelin « Médiculture » et que le plan d'ensemble avec la position des principaux matériels a été fourni avant la construction du navire afin de permettre de donner un avis ; que ces contestations, renouvelées dans les conclusions devant la cour d'appel, sont inopérantes ; qu'en effet, il est constant que :
- la société A... a recherché la compétence technique d'un architecte naval, en la personne de la société HT2, dont c'est l'activité ;
- la société HT2 a répondu à cette demande de prestation de services ;
- elle a fourni les plans ;
- elle ne démontre nullement que ces plans n'aient pas été correctement suivis par la société A... ;
- l'expert ne relève pas plus un non-respect des plans par le constructeur naval ;
- elle démontre qu'elle connaissait la destination donnée au navire Oyster puisqu'elle fait elle-même référence au navire Médiculture et aux navires construits par le chantier Gamelin et compare son plan avec celui élaboré par Gamelin pour des navires comportant également potences et grue ;
qu'elle ne peut donc arguer de manière générale n'avoir pas eu un cahier des charges suffisant pour connaître la mission qui lui était confiée par la société A... ; que ces éléments permettent de retenir une faute de la société HT2 ayant contribué à la réalisation de l'entier dommage ; que M. X... ne peut se voir opposer une faute de n'avoir pas pris des précautions élémentaires au moment même de la livraison et de n'avoir pas immédiatement effectué une sortie en mer, en présence de techniciens ; qu'à la supposer établie, ce fait ne peut être exonératoire de la responsabilité contractuelle résultant de l'obligation de délivrance et de la responsabilité délictuelle de la société HT2 ;

1°) ALORS QUE le défaut de conformité n'engage la responsabilité du vendeur que lorsque la chose vendue est impropre à l'usage auquel elle était destinée ; qu'il résulte de l'arrêt attaqué que M. X... a, par contrat du 8 octobre 2007, commandé à la société A... « un bateau mytilicole conforme à la réglementation en vigueur », pour lequel la société A... a ensuite chargé la société HT2 d'établir les plans ; que pour juger que le bateau livré n'était pas conforme à sa destination, la cour d'appel a considéré que M. X... indiquait, dans une mise en demeure du 25 mai 2009, que sa demande avait pour objectif la construction d'un navire ostréicole et que le positionnement de la grue et des potences ne permettait pas de l'utiliser pour une telle activité ; qu'en se fondant ainsi sur une mise en demeure postérieure au contrat, dont elle a pourtant relevé qu'il avait pour objet la construction d'un navire mytilicole, c'est-à-dire destiné à la culture des moules, pour juger qu'il devait pouvoir être utilisé pour relever des filières d'huîtres en pleine mer et en déduire qu'il n'était pas conforme à cette destination, la cour d'appel a violé les articles 1147, 1165 et 1382 du code civil, en leur rédaction applicable en l'espèce ;

2°) ALORS QU' en affirmant que la société A... avait méconnu son obligation de délivrance conforme sans rechercher si, compte tenu de l'absence de tout cahier des charges définissant les besoins spécifiques de l'activité de M. X..., et compte tenu de ce que la grue avait été réalisée conformément au devis accepté par ce dernier, qui avait reçu les plans de la société HT2, indiquant le positionnement de la grue par rapport aux potences, sans émettre la moindre observation, la société A... avait, au contraire, parfaitement respecté les engagements qu'elle avait souscrits à l'égard de M. X..., ce qui excluait que la société HT2 ait engagé sa responsabilité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147, 1165 et 1382 du code civil, en leur rédaction applicable en l'espèce ;

3°) ALORS QUE, subsidiairement, les défauts de conformité contractuels apparents sont, comme les vices de construction apparents, couverts par la réception sans réserve ; qu'il n'en va autrement que lorsque la chose vendue présente un caractère complexe, nécessitant la réalisation d'une mise au point ; que pour juger que la recette sans réserve du navire par M. X... ne pouvait être opposée à ce dernier, la cour d'appel a affirmé que le navire commandé, qui était un prototype, était assimilable à un objet complexe dont la conformité ne pouvait être appréciée qu'en situation d'usage ; qu'en statuant ainsi, sans relever les caractéristiques techniques de nature à rendre le navire complexe, tandis qu'elle estimait que le défaut portait uniquement sur la position de la grue implantée sur le pont, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147, 1165 et 1382 du code civil, en leur rédaction applicable en l'espèce ;

4°) ALORS QUE l'architecte naval qui n'a pas contracté avec l'armateur n'est responsable, à l'égard de ce dernier, que s'il a commis une faute contractuelle envers le chantier naval qui lui a confié la réalisation des plans du navire ; que la cour d'appel a constaté que M. X... avait commandé un bateau mytilicole, c'est-à-dire destiné à la culture des moules, à la société A... et que la société HT2 n'avait pas contracté avec M. X... ;
qu'il résulte de l'arrêt attaqué qu'aucun document contractuel liant la société HT2 à la société A... n'était produit aux débats ; que pour juger néanmoins que la société HT2 avait commis une faute à l'égard de la société A... , et engagé sa responsabilité à l'égard de M. X..., la cour d'appel a estimé que la société HT2 connaissait la destination donnée au navire ; qu'en statuant par de tels motifs, impropres, en l'absence de stipulation contractuelle précise, à établir la faute contractuelle de la société HT2 à l'égard de la société A... et à engager sa responsabilité délictuelle à l'égard de M. X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147, 1165 et 1382 du code civil, en leur rédaction applicable en l'espèce.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 17-17286
Date de la décision : 20/06/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 10 février 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 20 jui. 2018, pourvoi n°17-17286


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : Me Rémy-Corlay, SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Marlange et de La Burgade

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.17286
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