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14/06/2018 | FRANCE | N°17-21158

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 14 juin 2018, 17-21158


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que son fils, Jonathan Z..., étant décédé à la suite d'un accident de la circulation survenu le 11 août 2001, alors qu'il était passager d'un véhicule conduit par Dany A..., assurée auprès des Mutuelles du Poitou, Mme X... a déposé plainte avec constitution de partie civile le 7 septembre 2004 ; que l'information judiciaire ouverte en conséquence contre X le 16 janvier 2006 du chef d'homicide involontaire a été suivie le 20 décembre 2006 d'une ordonnance de non-l

ieu ; que l'assureur lui ayant opposé la prescription décennale lorsqu'el...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que son fils, Jonathan Z..., étant décédé à la suite d'un accident de la circulation survenu le 11 août 2001, alors qu'il était passager d'un véhicule conduit par Dany A..., assurée auprès des Mutuelles du Poitou, Mme X... a déposé plainte avec constitution de partie civile le 7 septembre 2004 ; que l'information judiciaire ouverte en conséquence contre X le 16 janvier 2006 du chef d'homicide involontaire a été suivie le 20 décembre 2006 d'une ordonnance de non-lieu ; que l'assureur lui ayant opposé la prescription décennale lorsqu'elle a sollicité une offre d'indemnisation, par lettre du 26 mars 2013, Mme X... l'a assigné par acte du 24 janvier 2014 ;

Sur le moyen unique, pris en ses deuxième et troisième branches :

Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de déclarer prescrite son action et de la débouter de ses demandes, alors, selon le moyen :

1°/ que la plainte avec constitution de partie civile, même si elle a donné lieu à une décision de non-lieu qui ne présente par nature pas le caractère d'une décision définitive, interrompt la prescription de l'action civile ; qu'en retenant que la plainte avec constitution de partie civile déposée le 7 septembre 2004 concernant l'accident intervenu le 11 août 2001 et ayant donné lieu à une ordonnance de non-lieu le 20 décembre 2006 n'avait pas interrompu la prescription décennale et déclaré en conséquence prescrite la demande introduite en justice le 24 janvier 2014, la cour d'appel a violé l'article 2226 du code civil et l'article 2244 du code civil dans sa rédaction alors en vigueur ;

2°/ que le juge d'instruction étant saisi in rem, la plainte du chef d'homicide involontaire de la victime d'un l'accident de la circulation autorise le juge d'instruction à rechercher toute qualification à l'égard de toute personne susceptible d'avoir causé le décès ; qu'une telle plainte a donc un effet interruptif sur toute action civile relative aux préjudices résultant du décès de la victime, peu important que la plainte vise particulièrement les conditions dans lesquelles la victime a été prise en charge par les services de secours ; qu'en ayant retenu, pour dénier tout effet interruptif de prescription à la plainte avec constitution de partie civile du chef d'homicide involontaire de la victime de l'accident de la circulation survenu le 11 août 2001, que cette plainte n'avait que pour but de rechercher une faute éventuelle du service de secours, la cour d'appel a violé l'article 85 du code de procédure pénale, l'article 2226 du code civil et l'article 2244 du code civil dans sa rédaction alors en vigueur ;

Mais attendu que l'arrêt relève que l'assureur n'ayant pas justifié des accusés de réception des lettres recommandées par lesquelles il prétendait avoir proposé la mise en place d'une procédure amiable d'indemnisation à Mme X..., celle-ci pouvait exercer à son encontre une action dès le 11 avril 2002, après l'expiration du délai de huit mois suivant l'accident dont dispose l'assureur, en application des dispositions de l'article L. 211-9 du code des assurances, pour formuler des offres d'indemnisation ; qu'ayant constaté que la procédure pénale concernant la conductrice qui circulait à vitesse excessive et en état d'imprégnation alcoolique avait été classée sans suite en raison du décès de celle-ci et que la plainte avec constitution de partie civile déposée par Mme X..., qui reprochait aux services de secours d'être intervenus tardivement sur les lieux de l'accident et de ne pas avoir été assez diligents, avait seulement pour but de rechercher une faute éventuelle de ces services, la cour d'appel a retenu que cette procédure pénale n'empêchait nullement la mère de la victime de préserver ses droits à l'égard de l'assureur de la conductrice décédée, faisant ainsi ressortir l'absence de lien entre l'action civile dirigée contre l'assureur du véhicule impliqué dans l'accident de la circulation litigieux et l'information ouverte contre X du chef d'homicide involontaire, et en a exactement déduit que la prescription décennale applicable, qui n'avait pas été interrompue, était acquise ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 122 du code de procédure civile ;

Attendu que le juge qui décide que la demande dont il est saisi est irrecevable, excède ses pouvoirs en statuant au fond ;

Attendu que la cour d'appel a confirmé en toutes ses dispositions le jugement qui avait déclaré prescrite l'action de Mme X... puis débouté celle-ci de ses demandes ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et violé le texte susvisé ;

Et vu l'article 627 du code de procédure civile, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, par voie de retranchement, mais seulement en ce qu'il confirme le jugement en tant qu'il a débouté Mme X... de ses demandes, l'arrêt rendu le 30 mars 2017, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Condamne la société Areas assurances aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze juin deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour Mme X....

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé en toutes ses dispositions le jugement de première instance ayant déclaré prescrite l'action de Mme X... et l'ayant débouté de ses demandes ;

Aux motifs qu'à la suite de l'accident survenu le 11 août 2001 ayant entraîné le décès du fils de l'appelante, l'assurance mutuelle du Poitou aux droits de laquelle vient aujourd'hui la société Aréas Assurances soutient avoir adressé à Mme X... trois courriers en date des 29 octobre 2001, 26 novembre 2001 et 2 janvier 2002 lui proposant la mise en place d'une procédure amiable d'indemnisation ; Qu'elle ajoute qu'aucune suite n'a été donné à ces courriers et la société Aréas, une fois la prescription décennale acquise, a procédé à l'archivage de son dossier ; que cependant faute de production des accusés de réception de ces courriers et dans la mesure où l'assureur en application de l'article L. 211-9 du code des assurances dispose de 8 mois à compter de l'accident pour formuler des offres d'indemnisation, Mme X... était en mesure d'exercer son action dès le 11 avril 2002 ; que Mme X..., qui ne conteste pas que l'action en responsabilité extra contractuelle se prescrive par 10 ans, n'a cependant exercé une action en justice que par acte du 24 janvier 2014 soit après l'expiration du délai décennal ; que pour échapper à la prescription, Mme X... fait valoir qu'elle avait déposé plainte avec constitution de partie civile le 7 septembre 2004 et qu'elle attendait l'issue de cette procédure pénale, l'ordonnance de non-lieu ayant été rendue le 20 décembre 2006 ; mais que la procédure pénale engagée par Mme X... ne constituait nullement un obstacle insurmontable et n'empêchait nullement celle-ci, ne fut-ce qu'à titre conservatoire, de préserver ses droits à l'égard de l'assureur de la conductrice décédée, la procédure pénale ayant d'ailleurs seulement pour but de rechercher une faute éventuelle des services de secours ; que cette procédure pénale parallèle n'a nullement interrompu, ni même suspendu le délai de prescription qu'oppose la société Aréas Assurances à l'appelante ; (
) que le point de départ du délai de prescription ne saurait donc être retardé et que la prescription était bien acquise à compter du 12 avril 2012 ;

Alors que 1°) commet un excès de pouvoir le juge qui déclare une demande irrecevable tout en se prononçant sur son bien-fondé ; qu'en confirmant le jugement de première instance en toutes ses dispositions, qui avaient déclaré prescrite l'action de Mme X... et l'avait déboutée de ses demandes, c'est-à-dire en déclarant la demande à la fois irrecevable et mal fondée, la cour d'appel a violé l'article 562 du code de procédure civile, ensemble les principes régissant l'excès de pouvoir ;

Alors que 2°) la plainte avec constitution de partie civile, même si elle a donné lieu à une décision de non-lieu qui ne présente par nature pas le caractère d'une décision définitive, interrompt la prescription de l'action civile ; qu'en retenant que la plainte avec constitution de partie civile déposée le 7 septembre 2004 concernant l'accident intervenu le 11 août 2001 et ayant donné lieu à une ordonnance de non-lieu le 20 décembre 2006 n'avait pas interrompu la prescription décennale et déclaré en conséquence prescrite la demande introduite en justice le 24 janvier 2014, la cour d'appel a violé l'article 2226 du code civil et l'article 2244 du code civil dans sa rédaction alors en vigueur ;

Alors que 3°) le juge d'instruction étant saisi in rem, la plainte du chef d'homicide involontaire de la victime d'un l'accident de la circulation autorise le juge d'instruction à rechercher toute qualification à l'égard de toute personne susceptible d'avoir causé le décès ; qu'une telle plainte a donc un effet interruptif sur toute action civile relative aux préjudices résultant du décès de la victime, peu important que la plainte vise particulièrement les conditions dans lesquelles de la victime a été prise en charge par les services de secours ; qu'en ayant retenu, pour dénier tout effet interruptif de prescription à la plainte avec constitution de partie civile du chef d'homicide involontaire de la victime de l'accident de la circulation survenu le 11 août 2001, que cette plainte n'avait que pour but de rechercher une faute éventuelle du service de secours, la cour d'appel a violé l'article 85 du code de procédure pénale, l'article 2226 du code civil et l'article 2244 du code civil dans sa rédaction alors en vigueur.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 17-21158
Date de la décision : 14/06/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens, 30 mars 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 14 jui. 2018, pourvoi n°17-21158


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.21158
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