LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le second moyen, ci-après annexé :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 6 avril 2017), que, le 29 janvier 2007, le GFA Thoc, propriétaire d'un local commercial, a donné congé au preneur, M. X..., avec refus de renouvellement sans offre d'une indemnité d'éviction ; que le droit du preneur à une indemnité d'éviction a été reconnue par jugement du 11 mars 2009 et l'indemnité d'éviction a été fixée par jugement du 16 juin 2011 ; que, le 28 juillet 2014, le GFA Thoc a délivré à M. X... un commandement visant la clause résolutoire pour défaut de paiement des loyers ; que, cet acte étant demeuré infructueux, il a assigné le preneur en résiliation du bail, expulsion, paiement des loyers et indemnité d'occupation ;
Attendu que le bailleur fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en résiliation du bail et expulsion ;
Mais attendu qu'ayant retenu que l'action du bailleur en fixation et paiement de l'indemnité d'occupation était prescrite depuis le 25 septembre 2013 et relevé que le preneur ne contestait pas sa dette mais y opposait la compensation avec la créance née de l'indemnité d'éviction, laquelle était certaine et exigible pour être née du jugement du 6 juin 2011, la cour d'appel, qui a, implicitement mais nécessairement, considéré que le défaut de paiement de l'indemnité d'occupation n'était pas d'une gravité suffisante pour justifier la résiliation, a légalement justifié sa décision ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen qui n'est manifestement de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne le GFA Thoc aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande du GFA Thoc et le condamne à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze juin deux mille dix-huit.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Odent et Poulet, avocat aux Conseils, pour le GFA Thoc
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
II EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il avait déclaré nul le commandement de payer visant la clause résolutoire délivré le 28 juillet 2014 ;
AUX MOTIFS QUE « sur la validité du commandement de payer visant la clause résolutoire : que par jugement du 16 juin 2011, le GFA THOC a été condamné à payer à M. X... une indemnité d'éviction d'un montant de 93 830 € que le commandement de payer délivré le 28 juillet 2014 vise la clause résolutoire et le défaut de paiement des loyers de novembre 2009, août et octobre 2011, de l'année 2013, et ceux de janvier, avril, mai, juin et juillet 2014 pour un montant de 24 638,99 € inclus le coût de commandement ; que par application de l'article L. 145-28 du code de commerce jusqu'au paiement de l'indemnité d'éviction le locataire a droit au maintien dans les lieux aux clauses et conditions du contrat de bail expiré ; il est alors redevable, non pas du loyer mais d'une indemnité d'occupation, qui est déterminée conformément aux dispositions des sections VI et VII, compte tenu de tous éléments d'appréciation ; qu'il s'évince de ces dispositions que si le locataire se maintient dans les lieux, et à défaut de paiement de l'indemnité d'éviction les parties restent réciproquement tenues par les clauses du bail expiré ; que le bailleur qui ne s'est pas acquitté de l'indemnité d'éviction ne peut se prévaloir du défaut de paiement du loyer contractuel, auquel s'est substitué l'indemnité d'occupation statutaire, pour résilier le bail par le jeu de la clause résolutoire, sauf si le bail en dispose autrement de manière expresse, tel n'est pas le cas en l'espèce ; qu'en conséquence de quoi c'est à bon droit que le premier juge a déclaré nul le commandement de payer visant les loyers et la clause résolutoire » ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « ni le jugement du 11 mars 2009 ni le jugement du 16 juin 2011 ne tranchent la question de la résiliation du contrat de bail commercial, se bornant à la fixation du principe puis du montant de l'indemnité d'éviction ; que la résiliation du contrat de bail ne peut pour autant être comprise comme implicitement prononcée dans le dispositif relatif à l'indemnité d'éviction, d'une part parce que la résiliation est indépendante de l'indemnité d'éviction en ce que les parties ont encore le choix, même en cas de fixation d'une indemnité d'éviction, de maintenir le contrat, d'autre part parce que la lecture complète de la décision du 16 juin 2011 permet de constater que la résiliation n'a même pas été demandée par les parties au litige ; qu'attendu que l'article L. 145-28 du code de commerce prévoit qu'"aucun locataire pouvant prétendre à une indemnité d'éviction ne peut être obligé de quitter les lieux avant de l'avoir reçue" et que "jusqu'au paiement de cette indemnité il a droit au maintien dans les lieux aux conditions et clauses du contrat de bail expiré" ; que cette disposition légale précise que le locataire est alors redevable d'une "indemnité d'occupation" qui est déterminée conformément aux dispositions des sections VI et VII ; qu'il en résulte qu'à défaut de paiement de l'indemnité d'éviction et de maintien dans les lieux, et pendant toute la durée du maintien, les parties restent réciproquement tenues par les clauses du bail expiré; que la clause résolutoire insérée pouffait jouer comme si ce dernier était en cours, s'il s'agissait de la violation d'une des clauses de ce bail ; mais attendu que dans le cas de non-paiement d'une indemnité d'occupation faisant suite au défaut de paiement d'une indemnité d'éviction, le bailleur ne peut se prévaloir de la clause résolutoire pour défaut de respect d'une clause contractuelle, puisque l'indemnité d'occupation n'est pas un loyer et ne fait donc pas partie des dispositions contractuelles ; que le congé doit être annulé ; qu'ainsi en cas de non-paiement d'une indemnité d'occupation le bailleur peut uniquement obtenir la résiliation judiciaire » ;
1° ALORS QUE le locataire pouvant prétendre à une indemnité d'éviction ne peut être obligé de quitter les lieux avant de l'avoir reçue; que jusqu'au paiement de cette indemnité, il a droit au maintien dans les lieux aux conditions et clauses du contrat de bail expiré, à charge pour lui de s'acquitter de l'indemnité d'occupation légale qui s'est substituée au paiement des loyers ; que la cour d'appel a jugé que le premier juge avait à bon droit déclaré nul le commandement de payer visant les loyers et la clause résolutoire au motif que le bailleur qui ne s'est pas acquitté de l'indemnité d'éviction ne peut se prévaloir du défaut de paiement du loyer contractuel auquel s'est substituée l'indemnité d'occupation, pour résilier le bail par le jeu de la clause résolutoire sauf disposition expresse du bail ; qu'en statuant de la sorte sans rechercher si le bail était effectivement expiré, le jugement du 11 mars 2009 ayant invalidé le congé délivré par le bailleur sans résilier le bail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1184 ancien du code civil devenu l'article 1224 ;
2° ALORS QUE le locataire pouvant prétendre à une indemnité d'éviction ne peut être obligé de quitter les lieux avant de l'avoir reçue ; que jusqu'au paiement de cette indemnité, il a droit au maintien dans les lieux aux conditions et clauses du contrat de bail expiré, à charge pour lui de s'acquitter de l'indemnité d'occupation légale qui s'est substituée au paiement des loyers ; qu'en relevant que le jugement du 11 mars 2009 avait déclaré le congé non valide sans l'annuler pour juger que le congé délivré le 29 janvier 2007 n'ayant pas été annulé, il s'en déduisait que le bail avait expiré au jour dudit congé, tandis qu'un congé invalidé ne pouvait, comme un congé annulé, produire ses effets, la cour a statué par des motifs inopérants et privé sa décision de base légale au regard de l'article 1184 ancien du code civil, devenu l'article 1224.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué D'AVOIR infirmé le jugement et débouté le GFA THOC de sa demande en résiliation du bail et expulsion ;
AUX MOTIFS QUE « sur la résiliation du bail et l'expulsion : que l'article L. 145-28 du code de commerce prévoit que le locataire pouvant prétendre à une indemnité d'éviction ne peut être obligé de quitter les lieux avant de l'avoir reçue, "il a droit au maintien dans les lieux aux conditions et clause du contrat de bail expiré", il reste redevable d'une indemnité d'occupation provisoire laquelle en l'absence de fixation judiciaire est égale à l'ancien loyer, dont il est établi par les pièces de procédure et non contesté qu'il s'élevait à la somme de 1109 € ; que le jugement du 11 mars 2009 a déclaré le congé non valide, en ce qu'il n'avait pas proposé d'indemnité d'éviction, sans l'annuler ; qu'en conséquence de quoi, le débat sur l'indemnité d'éviction étant définitivement tranché et le congé délivré le 29 janvier 2007 n'ayant pas été annulé, il s'en déduit que le bail a expiré au jour dudit congé ; que néanmoins le bail résolu peut être résilié par décision judiciaire si les manquements du preneur aux obligations du bail constituent une cause grave et légitime de résiliation judiciaire du bail pendant la durée du maintien dans les lieux ; que le locataire maintenu dans les lieux aux clauses et conditions du bail expiré reste redevable d'une indemnité d'occupation provisoire laquelle en l'absence de fixation judiciaire est égale à l'ancien loyer, dont il est établi par les pièces de procédure et non contesté qu'il s'élevait à la somme de 1109 € ; que M. X... ne conteste pas l'existence d'une dette de loyer mais y oppose la compensation avec la créance née de l'indemnité d'éviction, laquelle est certaine et exigible pour être née du jugement du 6 juin 2011 et soumise à la prescription décennale des titres exécutoires ; qu'eu égard aux dettes réciproques, il y a lieu par application de l'article 131 du code de procédure civile de rouvrir les débats afin de recueillir l'accord des parties sur une éventuelle médiation »
1° ALORS QUE le défaut de paiement de l'indemnité d'occupation peut être sanctionné par la résiliation du bail et la déchéance du droit à indemnité d'éviction ; que pour rejeter la demande de résiliation et expulsion formée par le GFA THOC en raison du défaut de versement de la moindre indemnité d'occupation depuis 2011 et même après la délivrance du commandement de payer en 2014 et le jugement de première instance, la cour a jugé que le bail commercial était expiré depuis le congé délivré en 2007 et que M. X... ne contestait pas sa dette de « loyer » mais y opposait la compensation avec l'indemnité d'éviction ; qu'en statuant de la sorte tandis que le simple fait que le bail était expiré par l'effet du congé délivré en 2007 n'empêchait pas sa résiliation pour manquement grave du preneur qui avait bénéficié de son droit légal au maintien dans les lieux, la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 145-28 du code de commerce et 1184 ancien du code civil devenu l'article 1224 ;
2° ALORS QUE le défaut de paiement de l'indemnité d'occupation peut être sanctionné par la résiliation du bail et la déchéance du droit à indemnité d'éviction; qu'en rejetant la demande de résiliation formée par Le GFA THOC tandis qu'elle avait constaté que M. X... avait une dette d'indemnité d'occupation au motif qu'il avait opposé la compensation avec sa créance d'indemnité d'éviction, sans examiner si le manquement reproché au preneur n'était pas suffisamment grave pour justifier la résiliation du bail à ses torts, avec privation d'indemnité d'éviction, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 145-28 du code de commerce et 1184 ancien du code civil devenu l'article 1224.