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31/05/2018 | FRANCE | N°16-26932

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 31 mai 2018, 16-26932


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 12 octobre 2016), que M. X... a perçu de la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône (la caisse) une pension d'invalidité à compter du 1er septembre 2007 ; qu'il a bénéficié à partir du 1er juillet 2008, soit à l'âge de 57 ans, d'une pension de vieillesse versée par anticipation ; que la caisse lui ayant réclamé le remboursement des arrérages de la pension d'invalidité servis entre le 1er juin

2009 et le 31 mars 2011, il a saisi d'un recours une juridiction de sécurité s...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 12 octobre 2016), que M. X... a perçu de la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône (la caisse) une pension d'invalidité à compter du 1er septembre 2007 ; qu'il a bénéficié à partir du 1er juillet 2008, soit à l'âge de 57 ans, d'une pension de vieillesse versée par anticipation ; que la caisse lui ayant réclamé le remboursement des arrérages de la pension d'invalidité servis entre le 1er juin 2009 et le 31 mars 2011, il a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le condamner à restituer à la caisse une certaine somme au titre des pensions d'invalidité indues pour la période allant du 1er mars 2010 au 31 mars 2011, alors, selon le moyen, que la loi ne dispose que pour l'avenir et n'a pas d'effet rétroactif ; que si la loi nouvelle, de caractère impératif, s'applique, en principe, même aux situations établies ou aux rapports juridiques formés avant sa promulgation, c'est à la condition de ne pas léser les droits acquis ; que selon l'article 67 de la loi de finances pour la sécurité sociale pour 2010, l'article L. 341-14-1 du code de la sécurité sociale qui prévoit que « Le service de la pension est suspendu lorsque l'assuré bénéficie des dispositions des articles L. 351-1-1, L. 351-1-3, L. 351-1-4, L. 634-3-2 ou L. 634-3-3 du présent code des articles L. 732-18-1, L. 732-18-2, L. 732-18-3 du code rural et de la pêche maritime ou des troisième et quatrième alinéas du II de l'article 41 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 » est entré en vigueur le 1er mars 2010 ; qu'en appliquant néanmoins l'article L. 341-14-1 du code de la sécurité sociale à M. X..., alors que sa pension a été liquidée le 1er juillet 2008, la cour d'appel qui a remis en cause les droits acquis de ce dernier, a violé l'article 2 du code civil, ensemble l'article L. 341-14-1 du code de la sécurité sociale ;

Mais attendu qu'après avoir énoncé que l'article L. 341-14-1 du code de la sécurité sociale, d'application immédiate, s'applique à tous les assurés sociaux puisqu'il ne prévoit aucune disposition qui en limiterait les effets aux seules demandes nouvelles, et rappelé que la pension d'invalidité est toujours concédée à titre temporaire comme le prévoit l'article L. 341-9 du même code, la cour d'appel a exactement décidé qu'à partir du 1er mars 2010, date d'entrée en vigueur des dispositions susvisées, M. X... ne pouvait plus prétendre au bénéfice du cumul des pensions d'invalidité et de retraite et que la caisse était fondée à lui réclamer les pensions d'invalidité versées à compter de cette date ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... et le condamne à payer à la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un mai deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour M. X....

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné M. X... à restituer à la caisse primaire d'assurance maladie la somme de 11 711,46 euros au titre des pensions d'invalidité indues de la période allant du 1er mars 2010 au 31 mars 2011 ;

Aux motifs que M. X... a perçu de la caisse primaire d'assurance maladie une pension d'invalidité (80 %) à partir du 1er septembre 2007, puis bénéficiant de la loi du 21 août 2003, il a demandé et obtenu une pension de vieillesse par anticipation à partir du 1er juillet 2008, soit à l'âge de 57 ans ; que la caisse primaire d'assurance maladie lui a réclamé le remboursement des pensions d'invalidité de la période allant du 1er juillet 2008 au 31 mars 2011, sur le fondement de les articles L. 341-15, L. 351-1 et L. 351-1-3 du code de la sécurité sociale ; que pour contester cette demande, M. X... a fait valoir que l'article L. 341-14-1 du code de la sécurité sociale qui prévoit que le service de la pension d'invalidité est suspendu lorsque l'assuré bénéficie d'une pension de retraite au titre du départ anticipé n'est entré en vigueur que le 1er mars 2010 et qu'il n'était donc pas applicable au jour de la liquidation de sa pension de vieillesse ; que l'article L. 351-1 tel que modifié par la loi 2003-775 du 21 août 2003 prévoyait que « L'assurance vieillesse garantit une pension de retraite à l'assuré qui en demande la liquidation à partir d'un âge déterminé (...) » ; que l'article R. 351-2 créé par le décret 85-1353 du 17 décembre 1985 applicable jusqu'au 3 juin 2011, disposait que « L'âge prévu au premier alinéa de l'article L. 351-1, est fixé à soixante ans. A partir de cet âge, chaque assuré peut demander la liquidation d'une pension de vieillesse dans les conditions prévues à cet article et à l'article L. 351-8 » ; que l'article L. 341-15 dans sa rédaction en vigueur depuis le 22 août 2003 (loi du 21 août 2003), prévoit que « La pension d'invalidité prend fin à l'âge prévu au premier alinéa de l'article L. 351-1. Elle est remplacée à partir de cet âge par la pension de vieillesse allouée en cas d'inaptitude au travail » ; que l'article R. 341-22 reprend ce même critère du soixantième anniversaire pour fixer la date d'entrée en jouissance de la pension de vieillesse substituée à la pension d'invalidité ; que la rédaction précise de ces textes qui posent expressément une condition d'âge, et leur synthèse permet de dégager le principe général selon lequel un assuré social ne peut pas percevoir, en même temps, une pension d'invalidité et une pension de retraite à partir du jour où il a atteint l'âge de soixante ans ; que les règles de conversion de la pension d'invalidité en pension de vieillesse au titre de l'inaptitude n'avaient donc pas été adaptées pour tenir compte des dispositifs de départs anticipés en retraite mis en oeuvre par la loi de 2003, ce que constatait le rapporteur du projet de loi sur le financement de la sécurité sociale en octobre 2009, en déplorant, en outre, les « pratiques fluctuantes » des caisses de retraite et proposant d'inscrire dans la loi la règle de la « suspension » du versement de la pension d'invalidité en cas de retraite anticipée ; qu'en effet, l'article L. 341-14-1 du code de la sécurité sociale entré en vigueur le 1er mars 2010 a prévu que, « lorsque l'assuré bénéficie des dispositions des articles L. 351-1-1, L. 351-1-3, L. 351-1-4, etc... » du code de la sécurité sociale, la pension d'invalidité est suspendue ; ce texte prévoit donc qu'elle est supprimée par l'effet de la conversion prévue à l'article L. 341-15, même si certains avantages subsidiaires restent acquis ; qu'ainsi, ce nouveau texte qui reprend les termes de l'article L. 341-15, mais en abandonnant toute référence à l'âge de l'assuré social pour n'évoquer que sa situation au regard des dispositifs du départ anticipé à la retraite, étend la règle du non-cumul à cette catégorie de retraités ; que ce texte a donc bien créé une règle nouvelle pour les personnes percevant une pension d'invalidité et susceptibles de bénéficier d'une retraite anticipée ; qu'il n'en demeure pas moins que pendant les sept années qui se sont écoulées entre la loi du 21 août 2003 et la loi du 24 décembre 2010, les caisses nationales de retraite ou de sécurité sociale n'ont pas été en mesure d'adopter une position unique et de donner des instructions précises aux caisses régionales alors que la circulaire du 2004/31 du 1er juillet 2004 qui annonçait « des instructions complémentaires quant à l'impact de la retraite anticipée sur la situation des titulaires de la pension » montre que le problème était connu ; que la caisse primaire, intimée, a évoqué elle aussi ces « pratiques fluctuantes » en estimant toutefois que les textes étaient clairs mais sujets à différentes interprétations ; que la Cour considère que, si chaque texte pris séparément était clair, l'ensemble était incomplet ; que c'est donc à bon droit que M. X... se prévaut d'un vide juridique qui a perduré jusqu'au 1er mars 2010 ; qu'il demande toutefois à bénéficier du cumul des pensions jusqu'au 31 mars 2011, ce que conteste la caisse ; que l'article L. 341-14-1 est d'application immédiate et concerne tous les assurés sociaux puisqu'il ne prévoit aucune disposition qui en limiterait les effets aux seules nouvelles demandes, étant rappelé que la pension d'invalidité est toujours concédée à titre temporaire comme le prévoit l'article L. 341-9 code de la sécurité sociale ; qu'à partir du 1er mars 2010, M. X... ne pouvait donc plus prétendre au bénéfice du cumul des pensions d'invalidité et de retraite ; que la caisse était juridiquement fondée à lui réclamer les pensions d'invalidité versées à tort à partir du 1er mars 2010, M. X... n'ayant d'ailleurs pas contesté la validité de la notification d'indu du 9 mai 2011 ; qu'en conséquence, la Cour infirme le jugement déféré qui a rejeté la totalité de la demande de restitution présentée par la caisse et fait droit à la demande de celle-ci, mais uniquement pour la partie allant du 1er mars 2010 au 31 mars 2011 ;

Alors que la loi ne dispose que pour l'avenir et n'a pas d'effet rétroactif ; que si la loi nouvelle, de caractère impératif, s'applique, en principe, même aux situations établies ou aux rapports juridiques formés avant sa promulgation, c'est à la condition de ne pas léser les droits acquis ; que selon l'article 67 de la loi de finances pour la sécurité sociale pour 2010, l'article L. 341-14-1 du code de la sécurité sociale qui prévoit que « Le service de la pension est suspendu lorsque l'assuré bénéficie des dispositions des articles L. 351-1-1, L. 351-1-3, L. 351-1-4, L. 634-3-2 ou L. 634-3-3 du présent code des articles L. 732-18-1, L. 732-18-2, L. 732-18-3 du code rural et de la pêche maritime ou des troisième et quatrième alinéas du II de l'article 41 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 » est entré en vigueur le 1er mars 2010 ; qu'en appliquant néanmoins l'article L. 341-14-1 du code de la sécurité sociale à M. X..., alors que sa pension a été liquidée le 1er juillet 2008, la cour d'appel qui a remis en cause les droits acquis de ce dernier, a violé l'article 2 du code civil, ensemble l'article L. 341-14-1 du code de la sécurité sociale.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 16-26932
Date de la décision : 31/05/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 12 octobre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 31 mai. 2018, pourvoi n°16-26932


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : SCP Boutet et Hourdeaux, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.26932
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