LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu la connexité, joint les pourvois n° C 17-12.789, H 17-12.793, A 17-12.810, B 17-12.811, H 17-12.816, J 17-12.818, Y 17-12.831, A 17-12.833, F 17-12.838, M 17-12.843, X 17-12.853, A 17-12.856, F 17-12.861, H 17-12.862, M 17-12.866, X 17-12.876, K 17-12.888, G 17-12.909, T 17-12.918, Q 17-12.984 et V 17-12.989 ;
Attendu, selon les arrêts attaqués et les pièces de la procédure, que Mme Y... et vingt autres salariées ont été engagées par la société Hôpital service SFGH, aux droits de laquelle vient la société Elior services propreté et santé, laquelle relève de la convention collective nationale des entreprises de propreté ; que, par un protocole de fin de grève conclu le 20 décembre 2000 entre la société Hôpital service SFGH et les délégués syndicaux CFDT et CGT et relatif à l'établissement de l'hôpital Lapeyronie à Montpellier, il a été décidé de l'octroi d'une prime de treizième mois pour les salariés y travaillant ; que, par un accord d'établissement (établissement de Meyreuil) conclu le 28 septembre 2013 entre la société Elior services propreté et santé et les délégués syndicaux CGT, CFDT et CFTC de l'établissement de Meyreuil, il a été décidé de l'octroi de divers avantages de rémunération au profit des salariés affectés sur le site de ST Microelectronics à Rousset, "compte tenu des spécificités techniques et de la forte disponibilité demandée par le client" ; que des salariées ont saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes en application du principe d'égalité de traitement ;
Sur le premier moyen du pourvoi incident des salariées, qui est recevable, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile :
Attendu que les salariées font grief aux arrêts de les débouter de leurs demandes au titre d'une prime d'insalubrité, d'une prime de transport et d'une prime d'assiduité alors, selon le moyen, que la loi ne dispose que pour l'avenir et n'a pas d'effet rétroactif ; qu'en l'espèce, il est constant que les salariés ont saisi, en septembre 2012, le conseil de prud'hommes de Marseille aux fins de réclamer à l'encontre de la société ESPS, sur le fondement du principe de l'égalité de traitement, le paiement de différentes primes dont ils avaient été privées ; que pour les débouter de leurs demandes s'agissant de la prime « d'insalubrité », dite également « de salissure », ainsi que de la prime de transport et de la prime d'assiduité, la cour d'appel a énoncé qu'aux termes de l'article L. 1224-3-2 du code du travail, créé par la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, les salariés de la société ESPS travaillant sur les sites autres que celui de l'hôpital Sainte-Marguerite ne pouvaient prétendre au bénéfice de cet avantage obtenu par les salariés de ce site dont les contrats de travail ont été poursuivis ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a méconnu l'article 2 du code civil, ensemble l'article L. 1224-3-2 par fausse application et le principe d'égalité de traitement par refus d'application ;
Mais attendu, d'abord, que l'évolution générale de la législation du travail en matière de négociation collective et de la jurisprudence en ce qui concerne le principe d'égalité de traitement à l'égard des accords collectifs conduit à apprécier différemment la portée de ce principe à propos du transfert des contrats de travail organisé par voie conventionnelle ;
Attendu, ensuite, que la différence de traitement entre les salariés dont le contrat de travail a été transféré en application d'une garantie d'emploi instituée par voie conventionnelle par les organisations syndicales représentatives investies de la défense des droits et intérêts des salariés et à l'habilitation desquelles ces derniers participent directement par leur vote et les salariés de l'employeur entrant, qui résulte de l'obligation à laquelle est tenu ce dernier de maintenir au bénéfice des salariés transférés les droits qui leur étaient reconnus chez leur ancien employeur au jour du transfert, n'est pas étrangère à toute considération de nature professionnelle et se trouve dès lors justifiée au regard du principe d'égalité de traitement ;
Attendu que les arrêts relèvent que la prime d'insalubrité, la prime d'assiduité et la prime de transport étaient servies à des salariés dont le contrat de travail avait été transféré, en application de l'article 7 de la convention collective nationale des entreprises de propreté, à la société Elior services propreté et santé, et qu'elles correspondaient à des avantages dont ils bénéficiaient chez leur précédent employeur ;
Qu'il en résulte que la société Elior services propreté et santé était fondée à les maintenir au seul bénéfice des salariés transférés sans que cela constitue une atteinte prohibée au principe d'égalité de traitement ;
Que, par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, les décisions déférées se trouvent légalement justifiées en leur dispositif ;
Que le moyen ne peut donc être accueilli ;
Sur le second moyen du pourvoi incident des salariées, qui est recevable, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile :
Attendu que les salariées font grief aux arrêts de les débouter de leur demande d'extension à leur profit de la majoration du travail de nuit et du travail de dimanche et de la prise en charge en totalité de la mutuelle obligatoire, dont bénéficient les seuls salariés affectés sur le site ST Microelectronics de Rousset, alors, selon le moyen :
1°/ qu'une différence de traitement entre salariés de sites distincts doit être justifiée par des éléments objectifs et pertinents produits par l'employeur ; qu'en l'espèce, il résultait des propres constatations de la cour d'appel que les salariés produisaient aux débats l'accord de site de Rousset, duquel il ressortait (article 11) une majoration pour le travail de nuit et le travail le dimanche et une prise en charge totale des cotisations mutuelles depuis octobre 2013 (article 14) ; qu'en déboutant néanmoins les salariés au prétexte qu'aucun bulletin de salaire relatif aux salariés du site Rousset n'avait été versé aux débats, quand la différence de traitement était suffisamment établie par l'accord de site, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations et a violé le principe d'égalité de traitement ;
2°/ qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a également inversé la charge de la preuve en ce qu'il appartenait à l'employeur de démontrer objectivement le bien-fondé des avantages accordés aux seuls salariés du site de Rousset et dont ne bénéficiaient pas les salariés exposants, car les différences de traitement entre des salariés appartenant à la même entreprise mais à des sites distincts, ne sont pas présumées justifiées si elles n'ont pas été opérées par voie d'accords d'établissements négociés et signés par les organisations syndicales représentatives au sein de ces établissements, investies de la défense des droits et intérêts des salariés de l'établissement et à l'habilitation desquelles ces derniers participent directement par leur vote, ce dont il incombe également à l'employeur de justifier, de sorte que faute pour l'employeur de le démontrer la cour d'appel a violé le principe d'égalité de traitement et l'article 1315, alinéa 2, du code civil ;
3°/ que commet un déni de justice le juge qui refuse de statuer au prétexte qu'il n'est pas justifié d'éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération avec les salariés du site de Rousset, quand il résulte des écritures des salariés exposants, reprises oralement, qu'ils sollicitaient le remboursement des cotisations mutuelles depuis octobre 2013 et chiffraient leurs demandes au titre de la part salariale mutuelle depuis cette date jusqu'au mois de décembre 2015 ; qu'en affirmant le contraire, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile et 5 du code civil ;
4°/ que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, en affirmant, sans autre motif, que chaque salarié sera débouté de l'ensemble de ses demandes formées au titre de l'accord du site de Rousset, c'est-à-dire en déboutant les salariés de leur demande tendant à obtenir le remboursement des cotisations mutuelles à compter du 1er janvier 2016, en application de la loi de sécurisation de l'emploi qui oblige l'employeur à souscrire pour l'ensemble de ses salariés un contrat complémentaire santé mutuelle, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que les différences de traitement entre des salariés appartenant à la même entreprise de nettoyage mais affectés à des sites ou établissements distincts, opérées par voie d'accords collectifs négociés et signés par les organisations syndicales représentatives, investies de la défense des droits et intérêts des salariés et à l'habilitation desquelles ces derniers participent directement par leur vote, sont présumées justifiées de sorte qu'il appartient à celui qui les conteste de démontrer qu'elles sont étrangères à toute considération de nature professionnelle ;
Et attendu que les arrêts relèvent que la majoration du travail de nuit et du travail du dimanche, ainsi que la prise en charge en totalité de la mutuelle obligatoire au profit des salariés affectés sur le site de Rousset, résultent d'un accord signé le 28 septembre 2013, lequel est un accord d'établissement conclu entre la société Elior services propreté et santé et les délégués syndicaux CGT, CFDT et CFTC de l'établissement de Meyreuil et prenant en compte "les spécificités techniques et la forte disponibilité demandée par le client" sur le site de Rousset, et font ressortir que ces avantages ne sont pas étrangers à des considérations de nature professionnelle ;
Qu'il en résulte que la différence de traitement qu'instituait cet accord était justifiée ;
Que, par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, les décisions se trouvent légalement justifiées en leur dispositif ;
Mais sur le premier moyen du pourvoi principal de l'employeur, qui est recevable :
Vu le huitième alinéa du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 et le principe d'égalité de traitement ;
Attendu, d'une part, qu'un protocole de fin de conflit constitue un accord collectif dès lors que, conclu avant l'expiration de la période transitoire instaurée aux articles 11 à 13 de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale, il a été signé après négociation avec les délégués syndicaux par l'un d'entre eux, et que, conclu postérieurement à l'expiration de la période transitoire précitée, il a été négocié et signé avec des organisations syndicales représentatives dans l'entreprise ou l'établissement dans les conditions visées aux articles L. 2232-12 et L. 2232-13 du code du travail, dans leur rédaction applicable en la cause ;
Attendu, d'autre part, que les différences de traitement entre des salariés appartenant à la même entreprise de nettoyage mais affectés à des sites ou des établissements distincts, opérées par voie d'un protocole de fin de conflit ayant valeur d'accord collectif, sont présumées justifiées, de sorte qu'il appartient à celui qui les conteste de démontrer qu'elles sont étrangères à toute considération de nature professionnelle ;
Attendu que pour faire droit à la demande des salariées en paiement d'une prime de treizième mois, les arrêts, après avoir constaté que celle-ci résultait d'un protocole de fin de conflit du 20 décembre 2000, lequel avait été signé par la société Hôpital service SFGH et les délégués syndicaux CGT et CFDT, et ne concernait que les salariés affectés à l'hôpital Lapeyronie à Montpellier, retiennent que les intéressées caractérisent une inégalité de rémunération entre salariés appartenant à la même catégorie professionnelle et exerçant un travail égal ou de valeur égale, et que l'employeur ne justifie pas d'éléments objectifs et pertinents qui légitimeraient cette différence de traitement ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il ressortait de ces constatations que la différence de traitement résultait d'un protocole de fin de conflit ayant valeur d'accord collectif, ce dont elle aurait dû déduire qu'elle était présumée justifiée et qu'il appartenait à celui qui la contestait de démontrer qu'elle était étrangère à toute considération de nature professionnelle, la cour d'appel a violé le texte et le principe susvisés ;
Et sur le second moyen du pourvoi principal de l'employeur :
Vu l'article 624 du code de procédure civile ;
Attendu que la cassation à intervenir sur le premier moyen du pourvoi principal de l'employeur entraîne la cassation, par voie de conséquence, du chef de dispositif critiqué par le second moyen du pourvoi principal de l'employeur et relatif aux dommages-intérêts alloués au syndicat CGT des entreprises de propreté des Bouches du Rhône et au syndicat Commerce et Services CFDT des Bouches-du-Rhône ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du même code ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'ils condamnent la société Elior services propreté et santé à payer aux salariées un rappel de prime de treizième mois, et des dommages-intérêts au syndicat CGT des entreprises de propreté des Bouches du Rhône et au syndicat Commerce et Services CFDT des Bouches du Rhône, les arrêts rendus le 9 décembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Déboute les salariées de leurs demandes en paiement d'un rappel de prime de treizième mois ;
Déboute le syndicat CGT des entreprises de propreté des Bouches du Rhône et le syndicat Commerce et services CFDT des Bouches-du-Rhône de leur demande de dommages-intérêts ;
Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts partiellement cassés ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente mai deux mille dix-huit.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens communs produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Elior services propreté et santé, demanderesse aux pourvois principaux
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief aux arrêts attaqués d'avoir condamné la société ESPS à verser aux salariés un rappel de prime de 13ème mois ;
Aux motifs propres que [les salariés] sollicite[nt] un rappel au titre d'une prime de 13ème mois, égale à 100% du salaire, en se fondant notamment sur le fait qu'une telle prime bénéficie aux salariés d'autres sites exploités ou qui étaient exploités par la société ESPS, et aux salariés du centre hospitalier Lapeyronie à Montpellier, à la suite d'un protocole de fin de conflit en date du 20 décembre 2000, complété le 21 novembre 2001, qui a porté cette prime à 100% du salaire sur plusieurs années, pièces versées aux débats ; que la société ESPS objecte que ces accords n'ont vocation à régir que les relations de travail au sein d'un établissement déterminé et qu'en conséquence, les salariés qui ne relèvent pas de ces accords d'établissement ne peuvent prétendre subir une discrimination salariale au seul motif qu'ils n'en bénéficient pas, l'égalité salariale ne devant être analysée qu'au seul regard du périmètre de l'établissement ; qu'elle ajoute que l'avantage ainsi accordé aux salariés dans le cadre de l'exécution d'un accord d'établissement conclu après négociation collective place nécessairement ces salariés dans une situation différente de celle des salariés qui n'y sont pas employés, différence de situation d'ailleurs présumée ; attendu que si les différences de traitement entre catégories professionnelles ou entre salariés exerçant, au sein d'une même catégorie professionnelle, des fonctions distinctes, opérées par voie de conventions ou d'accords collectifs, négociés et signés par les organisations syndicales représentatives, sont effectivement présumées justifiées, de sorte qu'il appartient à celui qui les conteste de démontrer qu'elles sont étrangères à toute considération de nature professionnelle, une telle présomption ne peut trouver à s'appliquer entre salariés d'établissements différents d'une même entreprise, appartenant à la même catégorie professionnelle et exerçant un travail égal ou de valeur égale ; que dans une telle hypothèse, et par application de l'article 1315 du Code civil, il appartient au salarié qui invoque une atteinte à ce principe de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, mais il incombe à l'employeur de rapporter la preuve des éléments objectifs et pertinents, matériellement vérifiables, pouvant justifier cette différence ; qu'en l'espèce, [les salariés] établi[ssen]t, notamment par la production aux débats des bulletins de salaire de Monsieur W... XX... « agent très qualifié de service » et de Madame Michèle YY... « agent qualifié de service » qu'à partir de 2004, ces deux salariés, dont il n'est pas contesté qu'ils étaient employés au centre hospitalier Lapeyronie de Montpellier, ont perçu de la société ESPS, jusqu'en 2009, année de la perte du marché, une prime de fin d'année égale à 100% de leur salaire alors que [eux-mêmes], qui appartien[nen]t à la même catégorie professionnelle et qui exerce[nt] un travail égal ou de valeur égale, également en milieu hospitalier, ne perçoi[ven]t pas une telle prime ainsi que cela résulte de l'examen de [leurs]
bulletins de salaire ; que ces éléments de fait sont susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération entre salariés de sites différents d'une même entreprise, appartenant à la même catégorie professionnelle et exerçant un travail égal ou de valeur égale, étant précisé qu'il est indifférent que les salariés dont les bulletins de salaire sont produits à titre d'éléments comparatifs ne soient plus employés par la société ESPS, dans la mesure où ils l'ont été pendant la période concernée par la réclamation [des salariés] : que la société ESPS, qui ne peut valablement soutenir qu'au jour de la signature de ces accords elle se trouvait dans une situation de reprise de marché, ne justifie nullement d'éléments objectifs et pertinents qui légitimeraient cette différence de traitement entre salariés de sites distincts car si elle soutient que la situation des salariés ayant bénéficié de tels accords doit être appréciée de façon globale au regard notamment de sujétions particulières de certains sites, elle ne verse aux débats aucun document en ce sens ; qu'en conséquence le jugement sera confirmé en ce qu'il a fait droit à la demande [des salariés] à ce titre ;
Et aux motifs éventuellement adoptés des jugements entrepris du 31 mars 2015 qu'en application de l'article 1315 du Code civil, s'il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe « à travail égal, salaire égal », de soumettre au juge les éléments de faits susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, il incombe à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs pertinents justifiant cette différence ; que l'égalité de traitement entre les salariés doit être observée par l'employeur, ne peut s'appliquer qu'à la condition expresse que les salariés en question se trouvent dans la même situation au regard de l'avantage en cause ; que la partie demanderesse verse aux débats des bulletins de salaire de 3 salariés différents (la partie défenderesse n'ayant jamais contesté que ces 3 salariés étaient affectés et travaillaient sur le site de Montpellier) : Monsieur ZZ... , agent très qualifié de service, niveau ATQS, a perçu pour le mois de décembre 2007, un salaire de base de 1 363,51 € et une prime de fin d'année du même montant (1 363,51 €), Monsieur XX..., agent très qualifié de service, niveau ATQS, pour le mois de décembre 2009 a perçu en salaire de base et en prime de fin d'année la même somme soit 1 515,17 €, Mademoiselle Michèle YY..., agent qualifié de service, niveau AQS a été payée en décembre 2009 avec un salaire de base de 1 393,85 € et a perçu ce même mois de décembre 2009 une prime de fin d'année du même montant soit 1 393,85 € ; que la partie demanderesse verse aussi 5 autres bulletins de salaires de Monsieur XX... et 7 autres bulletins de salaire de Mademoiselle Michèle YY... et le Conseil constate à chaque fois le versement d'une prime de fin d'année pour ces 2 salariés affectés sur le site de Montpellier ; que le Conseil ayant comparé les bulletins de salaire de la partie demanderesse et ceux des 3 salariés affectés sur le site de Montpellier, constate le versement pour ces 4 salariés d'une prime de transport et d'expérience ; que la partie défenderesse ne fournit aucun tableau comparatif entre les salariés des deux sites, démontrant que ceux de Montpellier (bénéficiant de la prime de 13ème mois) n'avaient pas une rémunération globale annuelle supérieure, et que l'attribution de cette prime pour le site de Montpellier avait pour objet de ramener les salariés de ce site à la hauteur de la rémunération des salariés affectés dans d'autres établissement de la société, conformément à l'accord conclu en novembre 2001 « La gratification annuelle est déterminée en fonction du salaire de base en vigueur au moment de son versement soit le salaire du mois de décembre
elle est versée pour le personnel en contrat à durée indéterminée ainsi que les salariés en contrat à durée déterminée ayant plus d'un an d'ancienneté, en fonction du temps de présence » ; que la partie défenderesse argue de l'argument que la société a perdu le site du CHU Lapeyronie depuis avril 2010 ; que le Conseil ne retient pas cet argument car les salariés du site de Montpellier faisaient bien partie de l'effectif de la société ELIOR SERVICES PROPRETE ET SANTE quand l'accord a été conclu en novembre 2001 ; qu'au vu de ce qui vient d'être exposé, le Conseil fait droit à la demande de prime de fin d'année pour la partie demanderesse ;
Et aux motifs éventuellement adoptés du jugement entrepris du 15 novembre 2012 que la règle « à travail égal, salaire égal » oblige l'employeur à payer un salaire égal à tous les salariés occupant un emploi de valeur égale et placés dans une situation identique sauf pour lui de démontrer que cette différenciation repose sur des éléments objectifs matériellement vérifiables ; qu'il n'est pas contesté par les salariés auxquels les demandeurs se comparent effectuent un travail de même valeur que le leur et que, pour autant, ils ont perçu à partir de l'année 2001 une gratification de fin d'année qui n'est pas prévue par la convention collective de la propreté et que les demandeurs, eux, ne perçoivent pas ; que l'employeur fait valoir qu'en réalité cette différence n'affecte que la structure de la rémunération et que la rémunération globale de tous ces salariés est égale ; qu'il ne produit cependant aucun élément objectif pour le démontrer, tels des tableaux comparatifs qui feraient apparaître à la fois la structure des rémunérations et le montant de la rémunération globale de chacun, tant dans l'établissement concerné que dans ceux où sont affectés les demandeurs ; qu'il sera en conséquence retenu qu'à valeur égale, les demandeurs ne reçoivent pas un salaire égal à ceux du site de l'hôpital Lapeyronie à Montpellier (dont le marché a depuis été perdu) puisqu'ils ne perçoivent pas la gratification de fin d'année qui est versée à ces derniers ;
qu'il ressort des pièces qui ont été produites que la prime de fin d'année qui a été payés à tout le personnel affecté sur ce site, qui est un établissement distinct, a pour origine l'application d'un protocole d'accord de fin de conflit entre la société HOPITAL SERVICE et le syndicat CFDT ; que ce protocole signé au mois de novembre 2001 fixe le taux applicable à la gratification annuelle pour les années 2001 à 2004 de la façon suivante : en 2001 : entre 50% du salaire de base pour les salariés ayant moins de cinq ans d'ancienneté et 70% du salaire de base pour les salariés ayant 10 ans d'ancienneté ou plus une gratification annuelle sur le salaire du mois de décembre ; pour atteindre en 2004 : 80% du salaire de base pour les salariés ayant moins de cinq ans d'ancienneté et 100% du salaire de base pour les salariés ayant 10 ans d'ancienneté et plus ; que la différence de rémunération résulte en conséquence de la négociation collective au niveau de cet établissement ; que la chambre sociale de la Cour de cassation a écarté le statut collectif comme seule source de différenciation ; que si par un arrêt du 27 octobre 1999, elle a retenu que « la négociation collective au sein d'un établissement distinct permet d'établir par voie d'accords collectifs des différenciations de traitement entre les salariés qui, n'entrant pas dans le champ d'application d'un accord d'établissement, ne peuvent faire état d'une discrimination aux motifs qu'ils ne bénéficient pas de cet accord », son arrêt du 18 janvier 2006 est venu préciser « qu'un accord d'entreprise peut prévoir qu'au sein de certains de ses établissements, compte tenu de leurs caractéristiques, des modalités de rémunération spécifiques soient déterminées par voie d'accord d'établissement », ce qui signifie qu'il est nécessaire pour l'employeur de donner des raisons objectives à cette différenciation et que l'accord collectif ne peut à lui seul la justifier ; que la Haute Juridiction a confirmé cette position dans son arrêt du 21 janvier 2009 : « Il ne peut avoir de différence de traitement entre salariés d'établissements différents d'une même entreprise exerçant un travail égal ou de valeur égale que si elle repose sur des raisons objectives dont le juge doit contrôler concrètement la réalité et la pertinence » ; que le Conseil constate que l'employeur n'a donné aucune raison objective matériellement vérifiable à la différenciation opérée par l'accord de fin de conflit, tenant notamment aux spécificités de l'établissement concerné, qui pourrait justifier la différence de traitement des salariés de l'établissement du site de l'hôpital Lapeyronie à Montpellier qui exercent un travail égal ou de valeur égale à celui des demandeurs ; qu'il sera jugé en conséquence que la différence de rémunérations entre les salariés de Montpellier et les demandeurs qui exercent un travail égal ou de valeur égale est illicite et qu'il sera fait droit aux demandeurs dans les termes de leurs conclusions en condamnant la société ESPS, venant aux droits de la société HOPITAL SERVICE SFGH à payer à chacun un rappel de prime ;
Et aux motifs éventuellement adoptés du jugement entrepris du 27 mars 2014 qu'au titre du principe « travail égal, salaire égal », l'employeur doit payer un même salaire à tous les salariés qui occupent un emploi de même valeur et qui sont placés dans une situation identique sauf si les situations sont différentes et reposent sur des éléments objectifs matériellement vérifiables ; que ELIOR fait valoir que le site de Montpellier constitue un établissement distinct avec des conditions de travail et des rémunérations propres, ainsi que cela a été reconnu par un arrêt de la Cour de cassation du 14 février 2007, ce qui permettait la désignation d'un délégué syndical ; que cependant, il est de jurisprudence constante qu'il ne peut y avoir de différences de traitement entre salariés d'établissements différents d'une même entreprise exerçant un travail égal ou de valeur égale, que si ces différences reposent sur des raisons objectives dont le juge doit contrôler concrètement la réalité et la pertinence ; que l'employeur précise qu'ELIOR a maintenu la rémunération globale des salariés et que la seule structure de celle-ci peut varier en fonction de l'origine du salarié ; qu'il ressort des pièces versées au débat qu'il existe dans ce secteur d'activité des primes qui répondent à la spécificité de certains postes, telle la prime de morgue ou la prime de salissure pour des postes particulièrement exposés, ou des primes de panier dans certaines situations ; qu'à l'issue d'un conflit au sein de l'hôpital Lapeyronnie à Montpellier, l'employeur a attribué aux salariés de ce seul établissement une gratification annuelle de fin d'année déterminée en fonction du salaire de base en vigueur au moment de son versement, soit le salaire du mois de décembre, ainsi qu'il l'est précisé dans le protocole d'accord de novembre 2011 entre la société SPHG HOPITAL SERVICE et le syndicat CFDT ; que cette gratification revêt un caractère général et concerne l'ensemble des salariés, quelque soit leur poste et leur situation ; qu'or, il n'est pas démontré que les salariés des autres agences, dont celle de Marseille à laquelle appartient [le salarié] n'occupent pas des postes de valeur égale à ceux de leurs collègues de Montpellier ; que l'employeur indique que cette gratification était le moyen d'amener les salariés de Montpellier au même niveau de rémunération que leurs collègues d'autres agences, cette différence originelle des salaires constituant alors l'élément objectif permettant un traitement différent ; que l'employeur verse au débat des tableaux de synthèse des salaires perçus par les salariés de Montpellier, comparés avec celui [du salarié] ; que ce document ne démontre pas la différence de situation objective entre les salariés ; qu'en effet, si le taux horaire de base dont bénéficie [le salarié] est supérieur (de très peu) à ceux de ses collègues de Montpellier tels qu'indiqués dans ce document, il convient de rappeler que ce taux horaire est fonction de l'ancienneté [du salarié] ; qu'il est donc impossible de procéder à une comparaison objective, d'autant que la prime de fin d'année, adossée au salaire, est elle aussi différente selon l'ancienneté et évolue ainsi selon le cheminement professionnel du salarié ; que l'employeur ne démontre donc pas en quoi la rémunération des agents de Montpellier était à ce point inférieure à celle des agents d'autres établissements pour constituer un élément objectif permettant de traiter différemment la structure de leurs rémunérations respectives ; que cette différence de traitement entre [le salarié] et ses collègues de l'agence de Montpellier n'est donc pas licite et la société ELIOR, venant aux droits de la société SFGH HOPITAL SERVICE sera condamnée à payer à la salariée un rappel de prime ;
ALORS, D'UNE PART, QUE les différences de traitement entre des salariés appartenant à la même entreprise mais à des établissements distincts, opérées par voie d'accords d'établissement négociés et signés par les organisations syndicales représentatives au sein de ces établissements, investies de la défense des droits et intérêts des salariés de l'établissement et à l'habilitation desquelles ces derniers participent directement par leur vote, sont présumées justifiées, de sorte qu'il appartient à celui qui les conteste de démontrer qu'elles sont étrangères à toute considération de nature professionnelle ; qu'en affirmant, pour condamner l'exposante à verser aux salariés un rappel de prime de 13ème mois prévue par l'accord d'établissement du site de Lapeyronie dont ils ne f[on]t pas partie, que la société « ne justifie nullement d'éléments objectifs et pertinents qui légitimeraient cette différence de traitement entre salariés de sites distincts car si elle soutient que la situation des salariés ayant bénéficié de tels accords doit être appréciée de façon globale au regard notamment de sujétions particulières de certains sites, elle ne verse aux débats aucun document en ce sens », quand il appartenait aux salariés, et non à la société ESPS, de démontrer que la différence de traitement litigieuse était étrangère à toute considération de nature professionnelle, la Cour d'appel a violé le huitième alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, le principe d'égalité de traitement ainsi que le protocole d'accord d'établissement du site de Lapeyronie du 21 novembre 2001 ;
ALORS, D'AUTRE PART et subsidiairement, QUE repose sur une raison objective et pertinente la stipulation d'un accord collectif qui institue une différence de traitement, dès lors que cette différence de traitement a pour objet ou pour but de prendre en compte les spécificités de la situation des salariés relevant d'une catégorie déterminée, tenant notamment aux conditions d'exercice des fonctions, à l'évolution de carrière ou aux modalités de rémunération ; qu'en condamnant l'exposante à verser à l'ensemble de ses salariés un rappel de salaire correspondant à la prime de 13ème mois réservée, par voie d'accord d'établissement, aux salariés du site de Lapeyronie, quand cet accord d'établissement de fin de conflit constituait nécessairement une raison objective justifiant la différence de traitement avec les salariés des autres établissements de la société et tenant à l'évolution de carrière toute particulière des salariés rattachés à l'établissement de Lapeyronie, la Cour d'appel a derechef violé le principe d'égalité de traitement, outre l'accord d'établissement susvisé.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief aux arrêts attaqués d'avoir condamné la société ESPS à verser au syndicat CGT des entreprises de propreté des Bouches du Rhône et au syndicat Commerce et Services CFDT des Bouches du Rhône des dommages et intérêts ;
Aux motifs que la société ESPS fait valoir que l'intervention volontaire de ces deux syndicats est irrecevable car les mesures critiquées ne portent pas atteinte à l'intérêt collectif de la profession, le syndicat CGT des entreprises de propreté des Bouches du Rhône étant d'ailleurs signataire de la convention collective applicable et des accords signés sur les différents sites de la société et ne pouvant, en conséquence, se prévaloir de sa propre turpitude ; que non-respect par l'employeur des droits individuels des salariés, comme en l'espèce le principe d'égalité de traitement, constitue une atteinte à l'intérêt collectif de la profession que représentent les syndicats qui leur permet d'agir en justice par application de l'article L 2132-3 du Code du travail ; que par ailleurs, si le rôle des syndicats est de participer à la négociation collective, ceux-ci conservent la possibilité de faire sanctionner la méconnaissance par l'employeur de certaines règles et notamment celles tenant au champ d'application des accords collectifs ; qu'en conséquence, ces deux interventions volontaires seront déclarées recevables et il leur sera alloué à chacun la somme de 10 € en réparation des atteintes portées par la société ESPS à l'intérêt collectif de la profession ;
ALORS QUE la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation entraînera, par voie de conséquence, la cassation sur le deuxième moyen, en application de l'article 625 du Code de procédure civile. Moyens communs produits par la SCP Coutard et Munier-Apaire, avocat aux Conseils, pour Mme Y... et les vingt autres salariées, demanderesses aux pourvois incidents
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief aux arrêts attaqués d'AVOIR débouté les salariées de leurs demandes relatives au paiement d'une prime d'insalubrité, d'une prime de transport et d'une prime d'assiduité.
AUX MOTIFS QUE « [les salariées] [sollicitent], à titre principal, un rappel au titre d'une prime dite « prime d'insalubrité », en fait « prime de salissure », correspondant à la somme de 0,305 euros de l'heure travaillée, prime dont [elles] [indiquent] qu'elle bénéficie à titre d'avantage acquis aux salariés travaillant pour la société ESPS sur le site de l'hôpital Sainte-Marguerite à Marseille ; que la société ESPS réplique que cette prime est attribuée à des salariés effectuant des travaux dangereux, insalubres incommodes ou salissants, [les salariées] ne justifiant pas relever de cette catégorie de salariés. [Elles] ajoute[nt] que cette prime ne correspond pas à une prise en charge de frais d'entretien de tenues de travail ; qu'il n'est pas contesté que, sur le site de l'hôpital Sainte-Marguerite, cette prime relève d'un avantage acquis qui existe au moins depuis 2004, date de reprise des contrats des salariés par la société ESPS, et bénéficie aux employés affectés sur ce site en raison de l'avantage dont ils bénéficiaient préalablement à la reprise du marché ; qu'aux termes de l'article L. 1224-2 du code du travail, créé par la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 « lorsque les contrats de travail sont, en application d'un accord de branche étendu, poursuivis entre deux entreprises prestataires se succédant sur un même site, les salariés employés sur d'autres sites de l'entreprise nouvellement prestataire et auprès de laquelle les contrats de travail sont poursuivis ne peuvent invoquer utilement les différences de rémunération résultant d'avantages obtenus avant cette poursuite avec les salariés dont les contrats de travail ont été poursuivis » ; qu'en application de ce texte, les salariés de la société ESPS travaillant sur les sites autres que celui de l'hôpital Sainte-Marguerite ne peuvent prétendre au bénéfice de cet avantage obtenu par les salariés de ce site dont les contrats de travail ont été poursuivis ; que [les salariées], [affectées] sur le site du CHE de Provence [seront], en conséquence, [déboutées] de [leurs] [demandes] en principal » ;
ET AUX MOTIFS QUE « [les salariées] [faisaient] valoir que les salariés de la société ESPS affectés sur le site de l'hôpital Sainte-Marguerite à Marseille perçoivent un complément d'indemnité de transport de 28,05 euros mensuels, en plus de ce que prévoit la convention collective nationale des entreprises de propreté, dont ils bénéficient au titre du maintien de primes acquises antérieurement et produit en ce sens huit contrats de travail justifiant de la reprise de salariés avec maintien des avantages acquis dont ladite prime, outre plusieurs bulletins de salaire concernant Mmes AA..., BB... et CC... ; que la société ESPS réplique que [les salariées] ne [justifient] pas des conditions exigées par la convention collective (justificatif de titre de transport collectif, justificatif de défaut d'existence de transport collectif pour se rendre sur le site) et se [comparent] à des salariés bénéficiant d'avantages acquis ; qu'il convient de constater que les contrats de travail produits correspondent effectivement à la reprise de contrats dans le cadre d'une reprise de marché avec maintien des avantages acquis en vertu de la convention collective des entreprises de nettoyage et que les bulletins de salaire des trois employées susvisées sont insuffisant[s] à déterminer que celles-ci bénéficieraient de ces primes à un autre titre, de sorte qu'en application de l'article L. 1224-3-2 du Code du travail dont il a été vu supra qu'il prohibe l'extension d'avantages obtenus par reprise du contrat à des salariés d'autres sites, [les salariées seront déboutées] de [leurs] [demandes] de ce chef » ;
ET AUX MOTIFS QUE « [les salariées] [sollicitent] un rappel au titre d'une prime d'assiduité de 914,70 euros par an, se fondant sur les bulletins de Mmes Nathalie B... et Nadine A..., employées sur le site de La Casamance à Aubagne, dont [elles] [soutiennent] qu'elles perçoivent une telle prime depuis au moins l'année 2004, versée à hauteur de 50% en juin et en décembre de chaque année, au titre d'avantage acquis ; que cependant, comme vu supra, un tel avantage, dont [elles] [admettent] qu'il résulte de la reprise de leurs contrats de travail par reprise du marché, n'a pas vocation à s'appliquer à des salariés d'autres sites, étant précisé que [les salariées] ne [justifient] pas travailler actuellement, voire même au jour de la demande, sur le site de la Casamance, indiquant d'ailleurs exercer [leur] activité sur celui du CHE de Provence » ;
ALORS QUE la loi ne dispose que pour l'avenir et n'a pas d'effet rétroactif ;
qu'en l'espèce, il est constant que les salariées ont saisi, en septembre 2012, le conseil de prud'hommes de Marseille aux fins de réclamer à l'encontre de la société ESPS, sur le fondement du principe de l'égalité de traitement, le paiement de différentes primes dont elles avaient été privées ; que pour les débouter de leurs demandes s'agissant de la prime « d'insalubrité », dite également « de salissure », ainsi que de la prime de transport et de la prime d'assiduité, la cour d'appel a énoncé qu'aux termes de l'article L. 1224-3-2 du code du travail, créé par la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, les salariées de la société ESPS travaillant sur les sites autres que celui de l'hôpital Sainte-Marguerite ne pouvaient prétendre au bénéfice de cet avantage obtenu par les salariés de ce site dont les contrats de travail ont été poursuivis ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a méconnu l'article 2 du code civil, ensemble l'article L. 1224-3-2 par fausse application et le principe d'égalité de traitement par refus d'application.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief aux arrêts attaqués d'AVOIR débouté les salariées de leurs demandes d'extension à leur profit d'avantages résultant de l'accord du site de Rousset et tendant à dire et juger que les dispositions de l'article 11 (relatif aux jours fériés et de dimanches travaillés) doit s'appliquer à l'ensemble des salariées concluantes, dans sa globalité et à ordonner à l'employeur de procéder au paiement des majorations de salaire découlant de ces dispositions sous astreinte de 100 € par jour de retard pour tous les salariées concernées et d'AVOIR débouté les salariées de leurs demandes relatives au remboursement des cotisations mutuelles depuis octobre 2013 et à la prise en charge de la cotisation mutuelle (article 14 de l'accord de site Rousset) et du bénéfice de la mutuelle ;
AUX MOTIFS QUE « sur l'extension d'avantages accordés par l'accord du site de Rousset, [les salariées] sollicite[nt] l'application à [leur] profit des dispositions de l'article 11 de l'accord du site ST microelectronics, signé le 28 septembre 2013, entre la société ESPS et les organisations syndicales, relatif à une majoration du travail de nuit et du travail du dimanche, sans pour autant préciser le montant réclamé à ce titre. Si le salarié verse au débat l'accord de site dont il se prévaut, qui ne concerne d'ailleurs pas un établissement de santé mais un site industriel, [elles] ne produit aucun bulletin de salaire relatif à des salariés de ce site, dont on ignore de quelle catégorie ils relèveraient, quelles seraient leurs fonctions et s'ils bénéficient à ce jour de la mise en application de cet accord, ne justifiant pas d'éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération avec les salariés de ce site. En conséquence, [elles seront] débouté de l'ensemble des demandes formées au titre de cet accord » ;
1°) ALORS, D'UNE PART, QU' une différence de traitement entre salariés de sites distincts doit être justifiée par des éléments objectifs et pertinents produits par l'employeur ; qu'en l'espèce, il résultait des propres constatations de la cour d'appel que les salariées produisaient aux débats l'accord de site de Rousset, duquel il ressortait (article 11) une majoration pour le travail de nuit et le travail le dimanche et une prise en charge totale des cotisations mutuelles depuis octobre 2013 (article 14) ; qu'en déboutant néanmoins les salariées au prétexte qu'aucun bulletin de salaire relatif aux salariés du site Rousset n'avait été versé aux débats, quand la différence de traitement était suffisamment établie par l'accord de site, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations et a violé le principe d'égalité de traitement ;
2°) ALORS, D'AUTRE PART, QU'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a également inversé la charge de la preuve en ce qu'il appartenait à l'employeur de démontrer objectivement le bien-fondé des avantages accordés aux seuls salariés du site de Rousset et dont ne bénéficiaient pas les salariés exposants, car les différences de traitement entre des salariés appartenant à la même entreprise mais à des sites distincts, ne sont pas présumées justifiées si elles n'ont pas été opérées par voie d'accords d'établissements négociés et signés par les organisations syndicales représentatives au sein de ces établissements, investies de la défense des droits et intérêts des salariés de l'établissement et à l'habilitation desquelles ces derniers participent directement par leur vote, ce dont il incombe également à l'employeur de justifier, de sorte que faute pour l'employeur de le démontrer la cour d'appel a violé le principe d'égalité de traitement et l'article 1315 alinéa 2 du Code civil ;
3°) ALORS, EN OUTRE, QUE commet un déni de justice le juge qui refuse de statuer au prétexte qu'il n'est pas justifié d'éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération avec les salariés du site de Rousset, quand il résulte des écritures des salariées exposantes, reprises oralement, qu'ils sollicitaient le remboursement des cotisations mutuelles depuis octobre 2013 et chiffraient leurs demandes au titre de la part salariale mutuelle depuis cette date jusqu'au mois de décembre 2015 ; qu'en affirmant le contraire, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile et 5 du Code civil ;
4°) ALORS, ENFIN, QUE le défaut de de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, en affirmant, sans autre motif, que chaque salarié sera débouté de l'ensemble de ses demandes formées au titre de l'accord du site de Rousset, c'est-à-dire en déboutant les salariées de leur demande tendant à obtenir le remboursement des cotisations mutuelles à compter du 1er janvier 2016, en application de la loi de sécurisation de l'emploi qui oblige l'employeur à souscrire pour l'ensemble de ses salariés un contrat complémentaire santé mutuelle, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.