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09/05/2018 | FRANCE | N°17-84591

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 09 mai 2018, 17-84591


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

-
Mme Linda X...,

contre l'arrêt de la cour d'assises des ALPES-MARITIMES, en date du 27 juin 2017, qui, pour complicité d'assassinat, l'a condamnée à dix-huit ans de réclusion criminelle, ainsi que contre l'arrêt du même jour par lequel la cour a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 14 mars 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure péna

le : M. Soulard, président, M. Stephan, conseiller rapporteur, M. Castel, conseiller de la cham...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

-
Mme Linda X...,

contre l'arrêt de la cour d'assises des ALPES-MARITIMES, en date du 27 juin 2017, qui, pour complicité d'assassinat, l'a condamnée à dix-huit ans de réclusion criminelle, ainsi que contre l'arrêt du même jour par lequel la cour a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 14 mars 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Stephan, conseiller rapporteur, M. Castel, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : M. Bétron ;

Sur le rapport de M. le conseiller STEPHAN, les observations de la société civile professionnelle SPINOSI et SUREAU, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général WALLON ;

Vu le mémoire produit ;

I - Sur le pourvoi en ce qu'il est formé contre l'arrêt pénal :

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 312, 331, 332, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce qu'il résulte des énonciations du procès-verbal des débats que, le 22 juin 2017 (après-midi) : « le témoin M. Thibault A..., cité à la requête du ministère public, retiré dans la chambre qui lui est réservée, a été ensuite appelé et introduit dans l'auditoire où il a été entendu par le président, oralement. dans les conditions prescrites par l'article 331 du code de procédure pénale et après avoir prêté le serment dans les termes prévus par ledit article et ce, sans opposition des parties ; qu'après la déposition du témoin, les dispositions de l'article 332 dudit code ont commencé à être observées ; que le président a alors demandé aux parties de différer le questionnement du témoin par les parties pour permettre d'entendre M. B..., expert, par l'intermédiaire de la visio-conférence et a fait retirer le témoin M. A... dans la chambre qui lui est réservée ; puis à quinze heures, le président a donné l'ordre d'établir la connexion de visio-conférence entre la salle prévue à cet effet au tribunal de grande instance de Marseille où M. Jean-Christophe B..., expert en informatique, a été convoqué et conformément aux dispositions de l'article 706 71 du code de procédure pénale, cet expert, qui avait été chargé de procéder à des expertises au cours de l'information, a oralement exposé le résultat des opérations techniques auxquelles il a procédé après que le président se soit assuré que tout le monde entend bien et voit bien et après que cet expert ait, sans opposition des parties, prêté le serment prévu par l'article 168 du code de procédure pénale dont toutes les prescriptions ont par ailleurs été observées ; qu'après avoir recueilli l'avis des parties qui n'y ont pas fait opposition, le président a donné l'ordre d'interrompre la communication entre le tribunal de grande instance de Marseille et la cour d'assises à quinze heures quarante-sept minutes ; le procès-verbal des opérations techniques liées à cette visio-conférence est joint au présent procès-verbal ; que le témoin M. A..., retiré dans la chambre qui lui est réservée, a été ensuite rappelé et introduit dans l'auditoire permettre d'observer les dispositions prévues par l'article 332 du code de procédure pénale et ce, sans opposition des parties ;

"alors qu'il résulte des articles 331 et 332 du code de procédure pénale et du principe de continuité des débats, que les témoins ne doivent pas être interrompus dans leur déposition et doivent répondre aux questions du président et des parties ; qu'en l'espèce, le président de la cour d'assises ne pouvait, sans méconnaître ces dispositions ainsi que le principe susvisé, décider de différer l'audition du témoin M. A... pour que soit entendu un expert et ainsi mettre les parties dans l'impossibilité de poser des questions au témoin immédiatement après qu'il a terminé sa déposition" ;

Attendu qu'il résulte du procès-verbal des débats que lors de l'audience du 22 juin 2017, le président a appelé à la barre un témoin, M. A... ; qu'après avoir prêté serment, le témoin a déposé ; qu'à l'issue de la déposition, le président a invité les parties à différer les questions au témoin afin de permettre l'audition par visio-conférence d'un expert, M. B... ; que le témoin s'est retiré dans la chambre destinée à cet effet ; que l'expert ayant été entendu, le témoin a regagné la salle d'audience et a répondu aux questions qui lui étaient posées ;

Attendu qu'en procédant ainsi, en l'absence d'observation des parties, le président a fait un usage régulier de son pouvoir de direction des débats ; qu'en effet, s'il résulte de l'article 331, alinéa 4, que le témoin ne peut être interrompu durant sa déposition, aucune disposition légale n'interdit, à l'issue de la déposition, de différer les questions lorsque le bon déroulement des débats, en particulier les contraintes techniques liées à la visio-conférence, le nécessite ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 168, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce qu'il résulte du procès-verbal des débats que le 21 juin 2017, « Mme Pauline C..., expert chimiste, qui avait été chargé de procéder à des expertises au cours de l'information, a été appelé et a oralement exposé le résultat des opérations techniques auxquelles il a proc...; qu'après son audition, l'expert susnommé a été autorisé à se retirer de la salle d'audience et ce, sans opposition des parties » ;

"1°) alors que les experts ne peuvent déposer qu'après avoir individuellement prêté serment d'apporter leur concours à la justice en leur honneur et en leur conscience ; qu'en outre, le procès-verbal des débats doit permettre à la Cour de cassation, de vérifier l'accomplissement des formalités légales substantielles, à l'instar des formalités prévues par les dispositions de l'article 168 du code de procédure pénale ; qu'en l'espèce, il ne résulte ni du procès-verbal des débats ni de l'arrêt de condamnation que Mme C..., entendue en qualité d'expert, ait prêté le serment requis par la loi avant de déposer devant la cour d'assises des Alpes-Maritimes ;

"2°) alors qu'aux termes de l'article 168 du code de procédure pénale et du principe du contradictoire, les avocats des parties doivent avoir été en mesure d'interroger l'expert entendu par une cour d'assises après son audition ; qu'en l'espèce, a méconnu ces dispositions et ce principe, la cour d'assises qui a condamné l'accusé lorsqu'il ne résulte ni du procès-verbal des débats, ni de l'arrêt de condamnation que les parties aient été en mesure d'interroger Mme C..., auditionnée par la cour d'assises des Alpes-Maritimes le 21 juin 2017" ;

Vu l'article 168 du code de procédure pénale ;

Attendu que, selon ce texte, les experts qui exposent à l'audience le résultat des opérations techniques auxquelles ils ont procédé doivent prêter serment d'apporter leur concours à la justice en leur honneur et leur conscience ; que des questions peuvent leur être posées, notamment par les avocats des parties ;

Attendu qu'il ne résulte pas des mentions du procès-verbal des débats que Mme C..., citée en qualité d'expert chimiste, ait prêté serment avant d'être entendue par la cour ; qu'au surplus, la Cour de cassation n'est pas en mesure de s'assurer que des questions ont pu lui être posées par les avocats des parties ;

D'où il suit que la cassation est encourue ;

II- Sur le pourvoi en ce qu'il est formé contre l'arrêt civil :

Attendu que la cassation de l'arrêt pénal entraîne celle de l'arrêt civil ;

Par ces motifs, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de cassation proposés :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'assises des Alpes-Maritimes, en date du 27 juin 2017, ensemble la déclaration de la cour et du jury et les débats qui l'ont précédée ;

CASSE et ANNULE, par voie de conséquence, l'arrêt du même jour par lequel la cour a prononcé sur les intérêts civils ;

Et vu l'article 612-1 du code de procédure pénale ;

DIT que l'intérêt d'une bonne administration de la justice commande que la cassation aura lieu à l'égard de M. D...             qui ne s'est pas pourvu ;

Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'assises des Bouches du Rhône, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'assises des Alpes-Maritimes et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le neuf mai deux mille dix-huit ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 17-84591
Date de la décision : 09/05/2018
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'assises des Alpes-Maritimes, 27 juin 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 09 mai. 2018, pourvoi n°17-84591, Bull. crim.
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle

Composition du Tribunal
Président : M. Soulard (président)
Avocat(s) : SCP Spinosi et Sureau

Origine de la décision
Date de l'import : 23/05/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.84591
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