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09/05/2018 | FRANCE | N°17-26522

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 09 mai 2018, 17-26522


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 2314-3 et L. 2314-11 du code du travail, dans leur rédaction alors applicable ;

Attendu, selon le premier de ces textes, que sont informées par tout moyen de l'organisation des élections et invitées à négocier le protocole préélectoral les organisations syndicales qui répondent à certaines conditions de qualification ou de représentativité ; que selon le second, lorsqu'au moins une organisation syndicale a répondu à l'invitation à négocier de l'employ

eur et que l'accord mentionné au premier alinéa du présent article ne peut être ob...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 2314-3 et L. 2314-11 du code du travail, dans leur rédaction alors applicable ;

Attendu, selon le premier de ces textes, que sont informées par tout moyen de l'organisation des élections et invitées à négocier le protocole préélectoral les organisations syndicales qui répondent à certaines conditions de qualification ou de représentativité ; que selon le second, lorsqu'au moins une organisation syndicale a répondu à l'invitation à négocier de l'employeur et que l'accord mentionné au premier alinéa du présent article ne peut être obtenu, l'autorité administrative procède à cette répartition entre les collèges électoraux ; qu'il en résulte que, dès lors qu'une organisation syndicale a manifesté son intention de participer à la négociation préélectorale, l'employeur, à défaut d'accord préélectoral valide, a l'obligation de saisir l'autorité administrative pour faire procéder à la répartition des sièges et des électeurs au sein des collèges électoraux ;

Attendu, selon le jugement attaqué, que la société Foodora a invité les organisations syndicales à participer à la négociation préélectorale pour la mise en place de délégués du personnel en son sein en juin 2017 ; que la fédération CGT des sociétés d'études (la CGT) a répondu à l'invitation à négocier, et s'est présentée à la réunion du 23 juin 2017 ; qu'à cette réunion, un report de la négociation a été décidé, pour permettre à l'employeur de fournir au syndicat des éléments sur les effectifs de l'entreprise ; qu'une nouvelle date a été fixée au 17 juillet 2017 ; que le syndicat CGT ayant demandé un report de cette date en raison de l'indisponibilité de ses représentants, l'employeur a fixé seul la répartition des électeurs et des sièges dans les collèges pour les élections dont le premier tour a eu lieu le 4 août 2017, et le second tour le 18 août 2017 ; que le syndicat CGT a saisi le tribunal d'instance d'une demande d'annulation du scrutin ;

Attendu que pour débouter le syndicat CGT de cette demande, le tribunal d'instance retient qu'il n'est pas contesté que lors de la réunion du 23 juin 2017 aucune négociation et accord n'ont été établis et qu'aucun procès-verbal n'a été dressé, et que les demandes d'informations de la fédération CGT lors des échanges entre les parties montrent que l'absence de ces éléments essentiels ne permettait pas le 23 juin 2017 de négocier un protocole préélectoral et que la fédération CGT n'avait pas signalé ses indisponibilités après les jours fériés du 14 juillet 2017, et que dès lors il convient de déduire de ces faits qu'il n'y a pas eu de négociation possible et que la société Foodora France n'était donc pas obligée de saisir la DIRECCTE et pouvait établir unilatéralement un protocole préélectoral ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il avait constaté que la fédération CGT avait manifesté son intention de participer à la négociation préélectorale, et qu'elle n'était pas responsable de l'absence de négociation, le tribunal d'instance a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 21 septembre 2017, entre les parties, par le tribunal d'instance de Paris 10e ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance de Paris 2e ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Foodora France à payer à la fédération CGT des sociétés d'études la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf mai deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour la fédération CGT des sociétés d'études.

Il est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR débouté la Fédération CGT des bureaux d'études de ses demandes tendant à l'annulation des élections du 4 août 2017 et à enjoindre à la société Foodora France de reprendre le processus de négociation du protocole préélectoral.

AUX MOTIFS QUE Sur la négociation d'un protocole préélectoral. Qu'en application des articles L. 2314-3-1 et L. 2314-11 du code du travail « lorsqu'au moins une organisation syndicale a répondu à l'invitation à négocier de l'employeur et que l'accord
ne peut être obtenu, l'autorité administrative procède à la répartition entre les collèges électoraux » ; qu'a contrario il convient de déduire que si aucune négociation n'a eu lieu, il n'y a pas lieu de saisir le Direccte ; qu'en l'espèce il convient donc d'apprécier si la rencontre du 23-06-17 constitue un début de négociation ; qu'il ressort des débats que le 23-06-17 se sont rencontrés la représentante des ressources humaines Mme X... et deux représentants de la fédération CGT ; que certes la lettre de convocation du 06-06-17 indique « réunion de négociation du protocole préélectoral » ; que toutefois il n'est pas contesté par les parties que le 23-06-17 aucune négociation et accord n'ont été établis et qu'aucun procès-verbal n'a été dressé ; que certes, de même, la seconde convocation du 10-07-17 mentionne « une première réunion de négociation du protocole préélectoral s'est tenue le vendredi 23-06-17 » ; que toutefois cette mention formelle ne recouvre pas les exigences d'une véritable négociation et examen d'un projet de protocole préélectoral ; que les demandes d'informations de la fédération CGT lors des échanges entre les parties montrent que l'absence de ces éléments essentiels ne permettait pas le 23-06-17 de négocier un protocole préélectoral ; que dès lors il convient de déduire de ces faits qu'il n'y a pas eu de négociation possible et que la société Foodora France n'était donc pas obligée de saisir la Direccte et pouvait établir unilatéralement un protocole préélectoral. Sur la loyauté de la société Foodora France pour convoquer une réunion de négociation ; que les parties n'ont pu se mettre d'accord sur une date de négociation avant la fin du mois de juillet 2017 ; que les échanges démontrent que la société Foodora France n'a pas été réticente à organiser cette réunion ; que la fédération CGT n'a pas signalé ses indisponibilités après les jours fériés du 14 juillet ; que dès lors la société Foodora France a eu un comportement loyal avec les organisations syndicales ; que les demandes de la Fédération CGT sont rejetées.

1°) ALORS QU'il résulte de l'article L. 2314-11 du code du travail que lorsqu'au moins une organisation syndicale a répondu à l'invitation de négocier de l'employeur et que l'accord sur le protocole électoral n'a pu être obtenu, l'autorité administrative doit être saisie ; que pour débouter la Fédération CGT des sociétés d'études de sa demande d'annulation des élections, le tribunal a retenu que le 23 juin 2017, aucune négociation ni accord n'ont été établis et qu'aucun procès-verbal n'a été dressé ; qu'en statuant ainsi après avoir constaté que les organisations syndicales avaient été convoquées pour le 23 juin 2017 à une « réunion de négociation du protocole préélectoral » ; qu'à cette date les deux représentants de la Fédération CGT des sociétés d'études et la représentante des ressources humaines se sont réunis et qu'aucun accord n'a pu être trouvé à l'issue de cette réunion, le tribunal n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles L. 2314-3 et L. 2314-11 du code du travail ;

2°) ALORS QU'en subordonnant l'existence d'une réunion de négociation du protocole préélectoral à la rédaction d'un accord ou d'un procès-verbal, le tribunal a ajouté à la loi une condition qu'elle ne comporte pas et a, derechef, violé les articles L. 2314-3 et L. 2314-11 du code du travail ;

3°) ALORS QUE dans le cadre de la négociation préélectorale, l'employeur doit, en application de son obligation de loyauté, fournir aux syndicats participant à cette négociation, s'ils le demandent, les éléments nécessaires au contrôle des effectifs et des listes électorales ; que pour débouter la Fédération CGT des sociétés d'études de sa demande d'annulation des élections, le tribunal a retenu que la rencontre du 23 juin 2017 ne constituait pas une réunion de négociation, dès lors que les demandes d'information de la Fédération CGT montrent que l'absence de ces éléments essentiels ne permettait pas de négocier un protocole préélectoral ; qu'en statuant ainsi quand il résultait de ses constatations que l'employeur, en s'abstenant de fournir les éléments nécessaires au contrôle des effectifs, avait manqué à son obligation de loyauté, le tribunal a violé les articles L. 2314-3 et L. 2314-11 du code du travail ;

4°) ALORS QUE l'employeur est tenu, dans le cadre de la négociation préélectorale, à une obligation de loyauté ; que pour dire que la société Foodora avait satisfait à cette obligation, en organisant une réunion le 17 juillet 2017, le tribunal a retenu que les parties n'ont pu se mettre d'accord sur une date de négociation avant la fin du mois de juillet, que la société Foodora n'a pas été réticente à organiser cette réunion et que la fédération CGT n'a pas signalé ses possibilités après les jours fériés du 14 juillet 2017 ; qu'en statuant ainsi quand la fédération produisait aux débats un courriel de son représentant en date du 14 juillet 2017 informant l'employeur que « nous sommes en congés la semaine qui vient, mon collègue étant présent la semaine d'après, il sera disponible. Pour ma part je serai présent sur l'ensemble du mois d'août. Ou nous pouvons rester aussi sur le mois de septembre comme prévu antérieurement », le tribunal a dénaturé ce document par omission et violé le principe selon lequel le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-26522
Date de la décision : 09/05/2018
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Analyses

ELECTIONS PROFESSIONNELLES - Comité d'entreprise et délégué du personnel - Opérations électorales - Modalités d'organisation et de déroulement - Protocole d'accord préélectoral - Négociation - Obligations de l'employeur - Inobservation - Cas - Défaut de saisine de l'autorité administrative - Sanction - Annulation de l'élection

ELECTIONS PROFESSIONNELLES - Comité d'entreprise et délégué du personnel - Collèges électoraux - Répartition des sièges et des électeurs - Accord entre l'employeur et les organisations syndicales intéressées - Défaut - Compétence de l'autorité administrative - Absence de saisine - Portée

Attendu, selon l'article L. 2314-3 du code du travail dans sa rédaction alors applicable, que sont informées par tout moyen de l'organisation des élections et invitées à négocier le protocole préélectoral les organisations syndicales qui répondent à certaines conditions de qualification ou de représentativité ; que selon l'article L. 2314-11 du code du travail dans sa rédaction alors applicable, lorsqu'au moins une organisation syndicale a répondu à l'invitation à négocier de l'employeur et que l'accord mentionné au premier alinéa du présent article ne peut être obtenu, l'autorité administrative procède à cette répartition entre les collèges électoraux ; qu'il en résulte que, dès lors qu'une organisation syndicale a manifesté son intention de participer à la négociation préélectorale, l'employeur, à défaut d'accord préélectoral valide, a l'obligation de saisir l'autorité administrative pour faire procéder à la répartition des sièges et des électeurs au sein des collèges électoraux. Doit en conséquence être censurée la décision qui valide un processus électoral organisé par l'employeur sans saisine de la DIRECCTE, alors que le tribunal d'instance avait constaté qu'une organisation syndicale avait manifesté son intention de participer à la négociation préélectorale, et qu'elle n'était pas responsable de l'absence de négociation


Références :

articles L. 2314-3 et L. 2314-11 du code du travail dans leur rédaction applicable au litige

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Paris 10ème, 21 septembre 2017

Sur l'obligation pour l'employeur de saisir l'autorité administrative en cas d'absence d'accord avec les organisations syndicales sur la répartition des sièges et des électeurs au sein des collèges électoraux, à rapprocher :Soc., 9 novembre 2011, pourvoi n° 11-60029, Bull. 2011, V, n° 255 (rejet), et les arrêts cités


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 09 mai. 2018, pourvoi n°17-26522, Bull. civ.Bull. 2018, V, n° 79
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Bull. 2018, V, n° 79

Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer

Origine de la décision
Date de l'import : 01/09/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.26522
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