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09/05/2018 | FRANCE | N°17-10335

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 09 mai 2018, 17-10335


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., salariée de la société Ergos Intérim (l'employeur) mise à disposition de la société La Cigale dorée, a eu la main gauche écrasée le 3 novembre 2010 par la machine qu'elle nettoyait ; que la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône (la caisse) ayant pris l'accident en charge au titre de la législation professionnelle, l'employeur, que la salariée a attrait devant une juridiction de sécurité sociale en lui imputant une faute in

excusable, a contesté, lors de cette instance, que la décision de la cai...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., salariée de la société Ergos Intérim (l'employeur) mise à disposition de la société La Cigale dorée, a eu la main gauche écrasée le 3 novembre 2010 par la machine qu'elle nettoyait ; que la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône (la caisse) ayant pris l'accident en charge au titre de la législation professionnelle, l'employeur, que la salariée a attrait devant une juridiction de sécurité sociale en lui imputant une faute inexcusable, a contesté, lors de cette instance, que la décision de la caisse lui soit opposable ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale ;

Attendu que constitue des réserves motivées de la part de l'employeur, au sens des dispositions de ce texte, toute contestation de la matérialité de l'accident ou de son caractère professionnel portant sur les circonstances de temps et de lieu de sa réalisation ou encore sur l'existence d'une cause totalement étrangère au travail ;

Attendu que pour dire inopposable à l'employeur la décision de la caisse, l'arrêt énonce qu'en dépit d'une lettre annexée à la déclaration d'accident du travail contenant des réserves motivées expliquant que l'accident était survenu suite à un dysfonctionnement technique de la machine, à savoir un défaut de sécurité fournisseur constaté par l'inspection du travail, la caisse n'a pas procédé à une instruction préalable, ni envoyé de questionnaires ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'employeur ne contestait ni la matérialité de l'accident, ni sa réalisation au temps et au lieu du travail, ni n'invoquait de cause totalement étrangère au travail, de sorte que ses observations ne constituaient pas des réserves, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et, sur le même moyen, pris en sa seconde branche :

Vu l'article R. 441-14 du code de la sécurité sociale ;

Attendu que la décision de prise en charge de l'accident du travail, de la maladie professionnelle ou de la rechute, motivée et notifiée dans les conditions prévues par ce texte revêt à l'égard de l'employeur, en l'absence de recours dans le délai imparti, un caractère définitif qui ne lui permet plus de contester la procédure suivie par la caisse ;

Attendu que pour dire inopposable à l'employeur la décision de la caisse, l'arrêt énonce que celle-ci a reconnu l'accident du travail sans instruction préalable et sans envoyer de questionnaires à l'employeur et à la salariée ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'employeur ne soutenait ni avoir saisi la commission de recours amiable de la caisse d'une contestation de la décision de prise en charge que l'organisme social lui avait notifiée le 22 décembre 2010, ni que cette notification ne satisfaisait pas aux formes de droit, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et attendu que le moyen, qui ne précise pas en quoi les autres parties de l'arrêt attaqué encourent le reproche allégué, ne satisfait pas aux exigences de l'article 978 du code de procédure civile ;

Vu l'article 627 du code de procédure civile, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du même code ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré inopposable à la société Ergos intérim la décision de la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône de reconnaître le caractère professionnel de l'accident survenu le 3 novembre 2010, l'arrêt rendu le 4 novembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Déclare opposable à la société Ergos intérim la décision de la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône de reconnaître le caractère professionnel de l'accident survenu le 3 novembre 2010 ;

Condamne la société Ergos intérim aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes de la société La Cigale dorée et de Mme X... ; condamne la société Ergos intérim à payer à la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône la somme de 2 800 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf mai deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat aux Conseils, pour la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône

Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'Avoir déclaré inopposable à l'employeur, la S.AS. ERGOS INTERIM, la décision de la Caisse primaire d'assurance Maladie des Bouches du Rhône de reconnaître le caractère professionnel de l'accident survenu le 3 novembre 2010 à Mélanie X...,
- jugé que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie des Bouches du Rhône conserve son action récursoire à l'encontre de la S.AS. ERGOS INTERIM à raison des sommes dont elle est tenue de faire l'avance au profit de la victime,
- jugé que l'accident du travail survenu le 3 novembre 2010 à Mélanie X... est imputable à la faute inexcusable de l'employeur, la S.AS. ERGOS INTERIM,
- majoré la rente attribuée à Mélanie X... au taux maximum prévu par la loi, et, avant dire droit sur l'indemnisation
- alloué à Madame X... la somme de 3.000 euros à titre de provision à valoir sur l'indemnisation de ses préjudices, - jugé que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie des Bouches du Rhône doit faire l'avance de l'indemnité provisionnelle à charge pour elle de recouvrer les sommes auprès de l'employeur,
- ordonné une expertise médicale de Mélanie X....

AUX MOTIFS QUE «Sur l'inopposabilité à l'employeur de la décision de la caisse de prendre en charge l'accident du travail et ses conséquences : L'employeur a annexé à sa déclaration d'accident du travail une lettre contenant des réserves motivées. En effet, il a expliqué que l'accident était survenu suite à un dysfonctionnement technique de la machine, à savoir un défaut de sécurité fournisseur constaté par l'inspection du travail. La caisse a reconnu l'accident du travail le 22 décembre 2010 sans instruction préalable et sans envoyer de questionnaires à l'employeur et à la salariée. La caisse a ainsi violé les prescriptions de l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale. En conséquence, la décision de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie des Bouches du Rhône de reconnaître le caractère professionnel de l'accident survenu le 3 novembre 2010 à Mélanie X... doit être déclarée inopposable à l'employeur, la S.AS. ERGOS INTERIM. Le jugement entrepris doit être infirmé. Mélanie X... a initié l'action en reconnaissance de faute inexcusable par lettre du 15 avril 2013 adressée à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie. L'article L. 452-3-1 du code de la sécurité sociale issu de la loi n°2012-1404 du 17 décembre 2012 s'applique à la cause. Conformément aux dispositions de ce texte, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie des Bouches du Rhône conserve son action récursoire à l'encontre de la S.AS. ERGOS INTERIM à raison des sommes dont elle est tenue de faire l'avance au profit de la victime. »
ALORS D'UNE PART QUE l'obligation de susciter un débat sur le dossier de l'assuré ne pèse pas sur la caisse lorsque sa décision de prise en charge repose sur le seul fondement de la déclaration d'accident du travail adressée sans réserve par la société et complétée d'un certificat médical descriptif des lésions dont faisait état cette déclaration ; que les réserves visées à l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale ne peuvent porter que sur les circonstances de temps et de lieu de celui-ci ou sur l'existence d'une cause totalement étrangère au travail ; que ne constituent donc pas des réserves, au sens de ce texte, les explications de l'employeur qui, loin de remettre en cause le fait que l'accident est bien survenu aux temps et lieu du travail à la salariée alors même qu'elle se livrait à son travail, explique que l'accident est « dû à un dysfonctionnement technique de la machine (défaut sécurité fournisseur) constaté par l'inspection du travail ce jour, » qu'en retenant le contraire pour dire inopposable à la société ERGOS INTERIM PROVENCE la décision de la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches du Rhône de reconnaître d'emblée la nature professionnelle de l'accident du travail dont Madame Mélanie X... avait été victime le 3 novembre 2010, la cour d'appel a violé l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale.

ALORS D'AUTRE PART QUE la décision de prise en charge de l'accident du travail, de la maladie professionnelle ou de la rechute, motivée et régulièrement notifiée revêt à l'égard de l'employeur, en l'absence de recours dans le délai imparti, un caractère définitif, ne fait pas obstacle à ce que celui-ci conteste, pour défendre à l'action en reconnaissance de la faute inexcusable, le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie; que cependant, dans le cadre d'une telle action engagée par un assuré, les juges du fond, lorsqu'ils sont saisis d'un tel moyen de défense (c'est-à-dire à la remise en cause du caractère professionnel de l'accident par l'employeur) ne peuvent revenir sur le caractère définitif à l'égard de l'employeur de la décision de prise en charge de la caisse à son égard pour une raison procédurale; qu'aussi, en retenant l'inopposabilité à l'égard de la société ERGOS INTERIM PROVENCE de la décision de la Caisse primaire centrale d'assurance Maladie des Bouches du Rhône reconnaissant le caractère professionnel de l'accident survenu le 3 novembre 2010 à Mélanie X... alors même que cet employeur ne prétendait même pas avoir saisi la commission de recours amiable de la caisse d'une contestation de la décision de prise en charge que la caisse lui avait notifiée le 22 décembre 2010, la cour d'appel a violé l'article R. 441-14 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable en l'espèce.
Le greffier de chambre


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 17-10335
Date de la décision : 09/05/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 04 novembre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 09 mai. 2018, pourvoi n°17-10335


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Boutet et Hourdeaux, SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.10335
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