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12/04/2018 | FRANCE | N°17-10324

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 avril 2018, 17-10324


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Rémi Z..., salarié depuis 2000 de la société Beurel, cédée à la société Eiffage, a été licencié pour inaptitude le 29 avril 2010 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale en harcèlement moral, nullité de son licenciement et en diverses demandes en dommages et intérêt ;

Sur les trois premiers moyens :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens annexés qui ne sont manifestement pas de nature à entraî

ner la cassation ;

Mais sur le quatrième moyen :

Vu l'article L. 1235-4 du code du trava...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Rémi Z..., salarié depuis 2000 de la société Beurel, cédée à la société Eiffage, a été licencié pour inaptitude le 29 avril 2010 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale en harcèlement moral, nullité de son licenciement et en diverses demandes en dommages et intérêt ;

Sur les trois premiers moyens :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens annexés qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le quatrième moyen :

Vu l'article L. 1235-4 du code du travail ;
Attendu qu'après avoir constaté la nullité du licenciement, l'arrêt condamne l'employeur au remboursement à Pôle emploi des indemnités de chômage versées au salarié dans la limite de six mois ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le remboursement des indemnités de chômage ne pouvait être ordonné en cas de nullité du licenciement, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et vu l'article 627 du code de procédure civile après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a ordonné le remboursement par la société Eiffage, en application de l'article L. 1235-4 du code du travail, des indemnités chômage versées par pôle emploi dans la limite de six mois, l'arrêt rendu le 15 novembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel d'Angers ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

DIT n'y avoir lieu à remboursement par l'employeur des indemnités chômage versées par Pôle emploi ;

Laisse à chaque partie la charge des dépens par elle exposés

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze avril deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Eiffage route Ouest

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société EIFFAGE ROUTE SNC à payer la somme de 2.000 € de dommages et intérêts pour harcèlement moral ;

AUX MOTIFS QUE « Sur la modification du contrat de travail, Le contrat de travail qui fait la foi des parties ne peut faire l'objet d'une modification unilatérale de l'employeur. La modification du contrat de travail est celle qui porte sur les éléments essentiels de ce contrat, le salarié ne pouvant pas s'opposer à un simple changement de ses conditions de travail. Les éléments essentiels du contrat de travail sont le lien de subordination juridique, les fonctions et la rémunération et tout autre élément contractualisé comme tel par les parties. Il appartient au salarié qui se prévaut d'une modification de son contrat de travail de le démontrer. Il ne fait pas débat que M. Z... recruté en tant que conducteur de pelles et polyvalent avec un statut d'ouvrier, a été déclaré inapte à son poste le 6 décembre 2005 par le médecin du travail au poste de conducteur d'engin ; qu'à la suite des préconisations médicales, l'employeur l'a affecté à des fonctions de "formateur et de suivi de chantier" à partir du mois de janvier 2006 ; qu'il n'a bénéficié durant cette période d'aucune revalorisation de sa classification N3P2 et de son coefficient maintenu à 165. Le salarié a été déclaré apte à ce nouvel emploi le 20 décembre 2005, et régulièrement en 2007 et en 2008. Les consorts Z... invoquant une modification des fonctions du salarié au cours de la période litigieuse (2006-2009), verse aux débats les attestations d'anciens collègues (M. A... chauffeur livreur, M. B... ouvrier TP, M. C... chauffeur de camion, M. D... chauffeur de pelle, M. E... chef de poste d'enrobés) et d'une salariée d'une entreprise ayant travaillé sur le même chantier ( Mme F...) selon lesquels : - il "donnait des directives aux conducteurs et aux ouvriers de son équipe selon les modalités préalablement convenues avec le conducteur de travaux », " s'occupant de l'implantation, de la commande des fournitures et jusqu'à la finalité d'en chantier" - il était "chargé de la coordination des engins et des camions" ; - il était considéré à ce titre comme chef de chantier », - il assurait également la formation des chauffeurs de pelle (Mme F..., M. A..., M. C...). Les appelants produisent également l'attestation de M. G..., qui a assisté M. Z... lors de l'entretien préalable du 26 avril 2010, selon lequel " M. Z... a demandé s'il pouvait conserver son poste actuel de chef d'équipe, chef de chantier et formateur", Il résulte des pièces produites que M. Z... e été affecté à un poste de conducteur d'engin, après l'avoir été déclaré apte le 20 avril 2009 par le médecin du travail et avoir obtenu le certificat nécessaire à la conduite (CACES) le 4 mai 2009, Les précédentes attributions confiées à M. Z... depuis le mois de janvier 2006, au vu des descriptions fournies par les témoins, salariés ou non de la société Eiffage, ne correspondaient pas une simple évolution des tâches d'un conducteur d'engin et d'un manoeuvre, pour lesquels le salarié avait été déclaré inapte le 6 décembre 2005, ni à sa qualification. En effet, elles incluaient des missions de direction d'ouvriers et de coordination de travaux suivant les consignes d'un conducteur de travaux. Dans la convention collective applicable, les attributions d'un ouvrier de classification N3P2, catégorie dont relevait M. Z..., ne comportent aucune mission d'animation d'équipe, de tutorat ou de transmission de connaissances. En revanche, de telles missions sont prévues pour un emploi d'ouvrier d'un niveau conventionnel plus élevé (niveau 4 position 1 coefficient 180). L'employeur, s'il a bien respecté les préconisations du médecin du travail le 6 décembre 2005 et son avis d'inaptitude au poste de conducteur d'engins sans avoir régularisé par écrit le changement de poste, ne peut pas se prévaloir de sa propre carence pour contester la réalité de cette modification. La société Eiffage se fonde enfin sur deux attestations : - de M. H... responsable d'exploitation, selon lesquels le salarié s'est vu confier à titre temporaire le poste de formateur et de suivi de chantier" le temps de se réhabituer à son emploi initial de conducteur d'engins jusqu'en 2009", - de M. I..., directeur d'établissement " la théorie selon laquelle il aurait été chef de chantier est parfaitement fantaisiste et infondée'', "les conseils prodigués dans le cadre du tutorat pouvaient s'apparenter à des consignes mais le salarié n'avait pas eu pour mission de diriger une équipe ou prendre des décisions d'ordre managérial ou organisationnel de façon autonome" (M. I...). A supposer même que l'employeur ait pu anticiper la fin prévisible de l'inaptitude du salarié au poste de conducteur, ce qui n'est pas établi au regard des documents médicaux, il ne peut pas sérieusement invoquer le caractère "transitoire "du changement des attributions de M. Z..., au regard de la période écoulée de plus de trois ans, alors qu'elle n'a pas jugé opportun de préciser par avenant la durée de la modification et les conditions de retour du salarié dans son poste d'origine. Le témoignage de M. I... sur la nature des attributions confiées à M. Z... au cours de la période d janvier 2006 à mars 2009 n'est guère pertinent puisque le directeur d'établissement n'est entré en fonction qu'au début de l'année 2009. Il n'est produit aux débats aucun compte-rendu de l'évaluation périodique du salarié ce qui aurait permis de mieux apprécier la nature des fonctions décrites par son supérieur hiérarchique et lies perspectives d'évolution du salarié. Il s'ensuit que le poste de formateur et de suivi de chantier occupé par M. Z... ne correspondait pas à un simple aménagement de ses conditions de travail mais à une modification de son contrat de travail impliquant un changement d'attributions, de responsabilités plus importantes et une classification conventionnelle supérieure. Le fait que la société EIFFAGE ait affecté début mai 2009 M. Z..., sans son accord, dans le poste antérieur de conducteur d'engins alors que le salarié avait occupé des fonctions et des responsabilités supplémentaires pendant plusieurs années, constitue une modification unilatérale du contrat de travail de la part de l'employeur » ;

ET AUX MOTIFS QUE « Sur l'absence de visite médicale de reprise à l'issue de l'arrêt de travail du 29 mai 2009 au 16 juillet 2009, L'article R 4624-21 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige prévoit que le salarié bénéficie d'une visite médicale de reprise à l'issue d'une période d'arrêt de travail d'au moins 21 jours pour un accident ou une maladie non professionnel. Soutenant qu'il y a eu reprise effective du travail par le salarié à l'issue de la période d'arrêt de travail le 16 juillet 2009, les consorts Z... versent à l'appui : - le récapitulatif des indemnités journalières versées permettant de confirmer qu'aucun arrêt de travail n'a eu lieu entre le 16 juillet 2009 et le 27 septembre 2009, - les bulletins de salaire des mois de juillet, août et septembre 2009 confirmant une reprise de travail à l'exception de la période de congés payés du 10 au 23 août 2009. La société Eiffage fait valoir dans ses écritures, et lors de l'audience, que M. Z... n'a jamais repris son Poste après le 16 juillet 2009 puisqu'il a été autorisé à rester à son domicile, qu'il a pris ses congés payés dans l'attente de la visite médicale de reprise organisée le 10 septembre 2009 et qu'il a été placé en arrêt de travail à compter du 25 août 2009. Toutefois, les allégations de l'employeur sont contredites par : la télécopie du 30 juillet 2009 de Mme J... du service de la DRIH sollicitant de la médecin du travail la fixation d'une visite médicale de reprise pour M. Z... « en arrêt de travail du 29 mai au 16 juillet 2009, repris le 20 juillet 2009 et en congés payés du 3 au 24 août 2009", le relevé des heures de travail hebdomadaires effectuées en juillet, août et en septembre 2009 figurant sur les bulletins de salaire, excédant généralement 35 heures par semaine, établissant que M. Z... a bien travaillé du lundi 20 juillet au vendredi 31 juillet 2009, puis du mardi 25 août au 27 septembre 2009, précédant l'arrêt de travail du 28 septembre. L'attestation, non datée, de M. H..., responsable d'exploitation, selon lequel " M. Z... a repris son emploi de conducteur d'engin à l'issue de la visite médicale le déclarant apte à son emploi de mai 2009 à ce jour ?), le salarié a de nouveau été arrêté et n'a pas repris ses activités" est vague et imprécise sur les périodes d'absence litigieuses au cours des mois de juillet à septembre 2009 et ne permet donc pas de remettre en cause les documents susvisés établis par la société Eiffage. La preuve est rapportée que M. Z... a repris dès le 20 juillet 2009 et jusqu'à un nouvel arrêt de travail du 28 septembre 2009, le poste de conducteur d'engins, sans avoir bénéficié d'une visite de reprise obligatoire prévue par l'article R 4624-21 du code du travail. Les ayantsdroits du salarié sont fondés à obtenir une indemnisation de 1.000€ pour défaut d'organisation d'une visite médicale de reprise » ;

ET AUX MOTIFS QUE « en l'espèce, les consorts Z... considérant que les agissements répétés de la société Eiffage dans le but de faire partir son salarié, ont eu pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et sa dignité et d'altérer sa santé physique et mentale., invoquent les faits suivants : 1 - la modification du contrat imposée au salarié au printemps 2009 au mépris des précédents avis médicaux, 2- le retour du salarié sur le poste de conducteur d'engins en l'absence d'une visite médicale de reprise le 20 juillet 2016, 3- la dégradation de son état de santé. Ils évoquent la volonté du nouveau directeur M. I..., arrivé début 2009, dans un contexte de réduction des effectifs, de vouloir "écarter" M. Z... de l'entreprise en le réaffectant en mars 2009 sur le poste de conducteur d'engins alors que le salarié avait été déclaré inapte à ce poste depuis décembre 2005 et qu'il bénéficiait d'un emploi de formateur et de suivi de chantier pour tenir compte des restrictions médicales, Les appelants versent aux débats ; - l'avis du médecin du travail du 6 décembre 2005 d'inaptitude au poste de conducteur d'engins, - le second avis du même jour d'aptitude à un poste de formateur et de suivi de chantier, - l'avis médical du 20 décembre 2005 d'aptitude au poste de formateur et de suivi de chantier, - les avis médicaux périodiques des 14 septembre 2007 et 24 septembre 2008 d'aptitude au poste de formateur et de suivi de chantier, l'avis médical du 26 mars 2009 d'aptitude avec des réserves au poste d'ouvrier TP, - le second avis médical daté du 20 avril 2009 d'aptitude avec des réserves au poste de conducteur d'engin, - les deux certificats des 2 mars et 16 mars 2010 d'inaptitude au poste de conducteur d'engins et d'aptitude avec, des réserves à un travail de bureau, d'entretien, sans gros effort physique ni port de charge lourde. - les bulletins de salaire, - le certificat délivré par le médecin hospitalier de Lamballe (22) attestant du suivi médical de M. Z... depuis le mois de juin 2009, - le courrier du 7 avril 2010 de M. Z... adressé à la société Eiffage sollicitant un poste de reclassement " je ne peux pas réintégrer le poste de chauffeur d'engins suite à mon état physique aggravé par une période de reprise - en mai 2009 - de conduite d'engins pendant 3 semaines sans accord par le médecine du travail " , "j'ai déjà montré par le passé que je suis capable d'intégrer d'autres fonctions et je veux aussi vous rappeler que je veux rester au service d'Eiffage TP" l'attestation de M. G..., conseiller qui a assisté M. Z... lors de l'entretien préalable du 26 avril 2010 à M. Z... qui demandait s'il pouvait conserver son poste actuel en tant que chef d'équipe, chef de chantier et formateur, M. I... a répondu qu'il était chauffeur d'engin et vu la conjoncture actuelle, il n'avait aucun poste approprié à lui proposer" - l'attestation de M. D... chauffeur " M. I... est antipathique envers les ouvriers et cherche à éliminer le maximum le personnel dans les agences région Bretagne et tous les moyens sont bon " - la modification unilatérale du contrat de travail, Il a été démontré seIon les motifs ci-dessus exposés que M. Z..., affecté au poste de formateur et de suivi de chantier depuis plusieurs années, a subi, sans son accord, une modification de ses attributions et de ses responsabilités lorsque son employeur lui a confié au printemps 2009 le poste de conducteur d'engins qu'il occupait précédemment, Même si le médecin du travail e établi un avis d'aptitude le 26 mars 2009 pour le poste d'ouvrier TP et 20 avril 2009 pour le poste de conducteur d'engins, l'employeur ne pouvait pas, sous couvert de respecter les derniers avis médicaux, modifier unilatéralement les tâches et les responsabilités du salarié qui lui étaient confiées depuis plusieurs années dans le cadre d'un reclassement, La réalité du grief est ainsi établie. 2- le retour du salarié sur le poste de conducteur d'engins en l'absence d'une visite médicale de reprise le 20 juillet 2016, L'employeur, tenu d'une obligation de sécurité et de résultat, ne pouvait pas laisser un salarié reprendre le travail à l'issue d'un arrêt de travail de plus de 21 jours, selon les dispositions réglementaires en vigueur, sans le faire bénéficier d'une visite médicale destinée à apprécier son aptitude. En l'espèce, il est établi que M. Z..., en arrêt de travail entre le 29 mai 2009 et le 16 juillet 2009, a repris effectivement le poste de conducteur d'engins le 20 juillet 2009 et a travaillé durant plusieurs semaines, à l'exception d'une période de trois semaines en août 2009, avant que la visite médicale de reprise obligatoire ne soit organisée le 10 septembre 2009 et que le médecin du travail rende un avis d'inaptitude au poste de conducteur d'engin et un avis d'aptitude à un travail sans gros effort physique ni port de charges lourdes .La matérialité du second grief est donc démontrée. 3- la dégradation de son état de santé, Les consorts Z... soutiennent que les agissements de l'employeur ont conduit à une dégradation de l'état de santé du salarié et ont abouti à son inaptitude définitive alors qu'il aurait pu continuer à exercer le poste de formateur et de suivi de chantier, sans contrainte physique. Il est justifié par les appelants que : l'aptitude de M. Z... au poste de formateur et de suivi de chantier a été régulièrement constatée les 20 décembre 2005, 14 septembre 2007 et 24 septembre 2008, - le salarié a été placé en arrêt de travail le 29 mai 2009, quelques semaines après son affectation au poste de conducteur d'engin, - de retour au travail le 20 juillet 2009 et après plusieurs semaines d'activité, il a été déclaré inapte au poste de conducteur le 10 septembre 2010 et a subi une rechute avec un arrêt de travail ininterrompu entre 28 septembre 2009 et le 1er mars 2010, période à l'issue de laquelle il a été déparé définitivement inapte au poste de conducteur d'engin et apte à un travail de bureau, d'entretien. La dégradation de l'état de santé de M. Z... à partir de la modification de son contrat de travail, est ainsi avérée. La société Eiffage ne prouve pas que les faits exposés par les consorts Z... ne sont pas constitutifs de harcèlement moral à l'égard de M. Z... et que ses actes et décisions étaient justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, Au terme de l'article L 1152-3 du code du travail, toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions de l'article L1152-1 et L 1152-2, est nulle. Dans ces conditions, il convient de prononcer la nullité du licenciement de M. Z... intervenu le 29 avril 2010 au regard des faits de harcèlement moral dont le salarié a été victime, par voie d'infirmation du jugement Sur les conséquences du licenciement nul, Les ayants droits de M. Z... dont le licenciement est nul, sont fondés à obtenir l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du égale à six mois de salaire quels que soient son ancienneté ainsi que l'indemnité compensatrice de préavis équivalente à un salaire brut de 2 302 € par mois. Il n'a pas retrouvé d'emploi après le licenciement notifié le 29 avril 2010. Il a perçu des indemnités par mois durant une période de 3 ans. Une pension d'invalidité lui a été allouée en 2015. Il est décédé le [...] . Compte tenu de l'âge du salarié (51 ans) et de son ancienneté (10 ans) au moment de la rupture, de sa capacité à retrouver un emploi, la cour dispose des éléments nécessaires pour fixer à 33 000 € le montant des dommages et intérêts propres à réparer le préjudice subi par M. Z.... Il leur sera également alloué au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, la somme de 4 604 € et 460.40 € de congés payés y afférents. Sur la demande de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi par suite du harcèlement moral, Les consorts Z... sont fondés à obtenir réparation du préjudice moral lié aux faits de harcèlement moraI subis et distincts de la perte de l'emploi du salarié. En l'absence d'éléments plus précis, il leur sera alloué la somme de 2.000 € » ;

ALORS QU'il appartient au salarié qui se prétend victime d'un harcèlement moral d'établir des faits concrets et précis qui permettent de présumer des agissements répétés ayant eu pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'en déduisant le harcèlement moral de Monsieur Z... des constats selon lesquels, d'une part, la société EIFFAGE TP avait procédé à une modification unilatérale du contrat de travail du salarié et omis d'organiser une visite médicale de reprise et, d'autre part, le salarié avait connu une dégradation de son état de santé, cependant que de telles constatations n'étaient pas à elles-seules de nature à caractériser l'existence « d'agissement répétés de harcèlement moral » au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail.

DEUXIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR prononcé la nullité du licenciement de Monsieur Z... pour harcèlement moral et d'AVOIR condamné la société EIFFAGE ROUTE SNC à payer les sommes de 4.604 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés y afférents, et de 33.000 € de dommages et intérêts pour licenciement nul ;

AUX MOTIFS QUE « Sur la modification du contrat de travail, Le contrat de travail qui fait la foi des parties ne peut faire l'objet d'une modification unilatérale de l'employeur. La modification du contrat de travail est celle qui porte sur les éléments essentiels de ce contrat, le salarié ne pouvant pas s'opposer à un simple changement de ses conditions de travail. Les éléments essentiels du contrat de travail sont le lien de subordination juridique, les fonctions et la rémunération et tout autre élément contractualisé comme tel par les parties. Il appartient au salarié qui se prévaut d'une modification de son contrat de travail de le démontrer. Il ne fait pas débat que M. Z... recruté en tant que conducteur de pelles et polyvalent avec un statut d'ouvrier, a été déclaré inapte à son poste le 6 décembre 2005 par le médecin du travail au poste de conducteur d'engin ; qu'à la suite des préconisations médicales, l'employeur l'a affecté à des fonctions de "formateur et de suivi de chantier" à partir du mois de janvier 2006 ; qu'il n'a bénéficié durant cette période d'aucune revalorisation de sa classification N3P2 et de son coefficient maintenu à 165. Le salarié a été déclaré apte à ce nouvel emploi le 20 décembre 2005, et régulièrement en 2007 et en 2008. Les consorts Z... invoquant une modification des fonctions du salarié au cours de la période litigieuse (2006-2009), verse aux débats les attestations d'anciens collègues (M. A... chauffeur livreur, M. B... ouvrier TP, M. C... chauffeur de camion, M. D... chauffeur de pelle, M. E... chef de poste d'enrobés) et d'une salariée d'une entreprise ayant travaillé sur le même chantier ( Mme F...) selon lesquels : - il "donnait des directives aux conducteurs et aux ouvriers de son équipe selon les modalités préalablement convenues avec le conducteur de travaux», " s'occupant de l'implantation, de la commande des fournitures et jusqu'à la finalité d'en chantier" - il était "chargé de la coordination des engins et des camions" ; - il était considéré à ce titre comme chef de chantier », - il assurait également la formation des chauffeurs de pelle (Mme F..., M. A..., M. C...). Les appelants produisent également l'attestation de M. G..., qui a assisté M. Z... lors de l'entretien préalable du 26 avril 2010, selon lequel " M. Z... a demandé s'il pouvait conserver son poste actuel de chef d'équipe, chef de chantier et formateur", Il résulte des pièces produites que M. Z... e été affecté à un poste de conducteur d'engin, après l'avoir été déclaré apte le 20 avril 2009 par le médecin du travail et avoir obtenu le certificat nécessaire à la conduite (CACES) le 4 mai 2009, Les précédentes attributions confiées à M. Z... depuis le mois de janvier 2006, au vu des descriptions fournies par les témoins, salariés ou non de la société Eiffage, ne correspondaient pas une simple évolution des tâches d'un conducteur d'engin et d'un manoeuvre, pour lesquels le salarié avait été déclaré inapte le 6 décembre 2005, ni à sa qualification. En effet, elles incluaient des missions de direction d'ouvriers et de coordination de travaux suivant les consignes d'un conducteur de travaux. Dans la convention collective applicable, les attributions d'un ouvrier de classification N3P2, catégorie dont relevait M. Z..., ne comportent aucune mission d'animation d'équipe, de tutorat ou de transmission de connaissances. En revanche, de telles missions sont prévues pour un emploi d'ouvrier d'un niveau conventionnel plus élevé (niveau 4 position 1 coefficient 180). L'employeur, s'il a bien respecté les préconisations du médecin du travail le 6 décembre 2005 et son avis d'inaptitude au poste de conducteur d'engins sans avoir régularisé par écrit le changement de poste, ne peut pas se prévaloir de sa propre carence pour contester la réalité de cette modification. La société Eiffage se fonde enfin sur deux attestations : - de M. H... responsable d'exploitation, selon lesquels le salarié s'est vu confier à titre temporaire le poste de formateur et de suivi de chantier" le temps de se réhabituer à son emploi initial de conducteur d'engins jusqu'en 2009", - de M. I... , directeur d'établissement " la théorie selon laquelle il aurait été chef de chantier est parfaitement fantaisiste et infondée'', "les conseils prodigués dans le cadre du tutorat pouvaient s'apparenter à des consignes mais le salarié n'avait pas eu pour mission de diriger une équipe ou prendre des décisions d'ordre managérial ou organisationnel de façon autonome" (M. I...). À supposer même que l'employeur ait pu anticiper la fin prévisible de l'inaptitude du salarié au poste de conducteur, ce qui n'est pas établi au regard des documents médicaux, il ne peut pas sérieusement invoquer le caractère "transitoire "du changement des attributions de M. Z..., au regard de la période écoulée de plus de trois ans, alors qu'elle n'a pas jugé opportun de préciser par avenant la durée de la modification et les conditions de retour du salarié dans son poste d'origine. Le témoignage de M. I... sur la nature des attributions confiées à M. Z... au cours de la période d janvier 2006 à mars 2009 n'est guère pertinent puisque le directeur d'établissement n'est entré en fonction qu'au début de l'année 2009. Il n'est produit aux débats aucun compte-rendu de l'évaluation périodique du salarié ce qui aurait permis de mieux apprécier la nature des fonctions décrites par son supérieur hiérarchique et lies perspectives d'évolution du salarié. Il s'ensuit que le poste de formateur et de suivi de chantier occupé par M. Z... ne correspondait pas à un simple aménagement de ses conditions de travail mais à une modification de son contrat de travail impliquant un changement d'attributions, de responsabilités plus importantes et une classification conventionnelle supérieure. Le fait que la société EIFFAGE ait affecté début mai 2009 M. Z..., sans son accord, dans le poste antérieur de conducteur d'engins alors que le salarié avait occupé des fonctions et des responsabilités supplémentaires pendant plusieurs années, constitue une modification unilatérale du contrat de travail de la part de l'employeur » ;

ET AUX MOTIFS QUE « Sur l'absence de visite médicale de reprise à l'issue de l'arrêt de travail du 29 mai 2009 au 16 juillet 2009, L'article R 4624-21 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige prévoit que le salarié bénéficie d'une visite médicale de reprise à l'issue d'une période d'arrêt de travail d'au moins 21 jours pour un accident ou une maladie non professionnel. Soutenant qu'il y a eu reprise effective du travail par le salarié à l'issue de la période d'arrêt de travail le 16 juillet 2009, les consorts Z... versent à l'appui : - le récapitulatif des indemnités journalières versées permettant de confirmer qu'aucun arrêt de travail n'a eu lieu entre le 16 juillet 2009 et le 27 septembre 2009, - les bulletins de salaire des mois de juillet, août et septembre 2009 confirmant une reprise de travail à l'exception de la période de congés payés du 10 au 23 août 2009. La société Eiffage fait valoir dans ses écritures, et lors de l'audience, que M. Z... n'a jamais repris son Poste après le 16 juillet 2009 puisqu'il a été autorisé à rester à son domicile, qu'il a pris ses congés payés dans l'attente de la visite médicale de reprise organisée le 10 septembre 2009 et qu'il a été placé en arrêt de travail à compter du 25 août 2009. Toutefois, les allégations de l'employeur sont contredites par : la télécopie du 30 juillet 2009 de Mme J... du service de la DRIH sollicitant de la médecin du travail la fixation d'une visite médicale de reprise pour M. Z... « en arrêt de travail du 29 mai au 16 juillet 2009, repris le 20 juillet 2009 et en congés payés du 3 au 24 août 2009", le relevé des heures de travail hebdomadaires effectuées en juillet, août et en septembre 2009 figurant sur les bulletins de salaire, excédant généralement 35 heures par semaine, établissant que M. Z... a bien travaillé du lundi 20 juillet au vendredi 31 juillet 2009, puis du mardi 25 août au 27 septembre 2009, précédant l'arrêt de travail du 28 septembre. L'attestation, non datée, de M. H..., responsable d'exploitation, selon lequel " M. Z... a repris son emploi de conducteur d'engin à l'issue de la visite médicale le déclarant apte à son emploi de mai 2009 à ce jour ?), le salarié a de nouveau été arrêté et n'a pas repris ses activités" est vague et imprécise sur les périodes d'absence litigieuses au cours des mois de juillet à septembre 2009 et ne permet donc pas de remettre en cause les documents susvisés établis par la société Eiffage. La preuve est rapportée que M. Z... a repris dès le 20 juillet 2009 et jusqu'à un nouvel arrêt de travail du 28 septembre 2009, le poste de conducteur d'engins, sans avoir bénéficié d'une visite de reprise obligatoire prévue par l'article R 4624-21 du code du travail. Les ayantsdroits du salarié sont fondés à obtenir une indemnisation de 1.000€ pour défaut d'organisation d'une visite médicale de reprise » ;

ET AUX MOTIFS QUE « en l'espèce, les consorts Z... considérant que les agissements répétés de la société Eiffage dans le but de faire partir son salarié, ont eu pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et sa dignité et d'altérer sa santé physique et mentale., invoquent les faits suivants : 1 - la modification du contrat imposée au salarié au printemps 2009 au mépris des précédents avis médicaux, 2- le retour du salarié sur le poste de conducteur d'engins en l'absence d'une visite médicale de reprise le 20 juillet 2016, 3- la dégradation de son état de santé. Ils évoquent la volonté du nouveau directeur M. I..., arrivé début 2009, dans un contexte de réduction des effectifs, de vouloir "écarter" M. Z... de l'entreprise en le réaffectant en mars 2009 sur le poste de conducteur d'engins alors que le salarié avait été déclaré inapte à ce poste depuis décembre 2005 et qu'il bénéficiait d'un emploi de formateur et de suivi de chantier pour tenir compte des restrictions médicales, Les appelants versent aux débats ; - l'avis du médecin du travail du 6 décembre 2005 d'inaptitude au poste de conducteur d'engins, - le second avis du même jour d'aptitude à un poste de formateur et de suivi de chantier, - l'avis médical du 20 décembre 2005 d'aptitude au poste de formateur et de suivi de chantier, - les avis médicaux périodiques des 14 septembre 2007 et 24 septembre 2008 d'aptitude au poste de formateur et de suivi de chantier, l'avis médical du 26 mars 2009 d'aptitude avec des réserves au poste d'ouvrier TP, - le second avis médical daté du 20 avril 2009 d'aptitude avec des réserves au poste de conducteur d'engin, - les deux certificats des 2 mars et 16 mars 2010 d'inaptitude au poste de conducteur d'engins et d'aptitude avec, des réserves à un travail de bureau, d'entretien, sans gros effort physique ni port de charge lourde. - les bulletins de salaire, - le certificat délivré par le médecin hospitalier de Lamballe (22) attestant du suivi médical de M. Z... depuis le mois de juin 2009, - le courrier du 7 avril 2010 de M. Z... adressé à la société Eiffage sollicitant un poste de reclassement " je ne peux pas réintégrer le poste de chauffeur d'engins suite à mon état physique aggravé par une période de reprise - en mai 2009 - de conduite d'engins pendant 3 semaines sans accord par le médecine du travail " , "j'ai déjà montré par le passé que je suis capable d'intégrer d'autres fonctions et je veux aussi vous rappeler que je veux rester au service d'Eiffage TP" l'attestation de M. G..., conseiller qui a assisté M. Z... lors de l'entretien préalable du 26 avril 2010 à M. Z... qui demandait s'il pouvait conserver son poste actuel en tant que chef d'équipe, chef de chantier et formateur, M. I... a répondu qu'il était chauffeur d'engin et vu la conjoncture actuelle, il n'avait aucun poste approprié à lui proposer" - l'attestation de M. D... chauffeur " M. I... est antipathique envers les ouvriers et cherche à éliminer le maximum le personnel dans les agences région Bretagne et tous les moyens sont bon " - la modification unilatérale du contrat de travail, Il a été démontré seIon les motifs ci-dessus exposés que M. Z..., affecté au poste de formateur et de suivi de chantier depuis plusieurs années, a subi, sans son accord, une modification de ses attributions et de ses responsabilités lorsque son employeur lui a confié au printemps 2009 le poste de conducteur d'engins qu'il occupait précédemment, Même si le médecin du travail e établi un avis d'aptitude le 26 mars 2009 pour le poste d'ouvrier TP et 20 avril 2009 pour le poste de conducteur d'engins, l'employeur ne pouvait pas, sous couvert de respecter les derniers avis médicaux, modifier unilatéralement les tâches et les responsabilités du salarié qui lui étaient confiées depuis plusieurs années dans le cadre d'un reclassement, La réalité du grief est ainsi établie. 2- le retour du salarié sur le poste de conducteur d'engins en l'absence d'une visite médicale de reprise le 20 juillet 2016, L'employeur, tenu d'une obligation de sécurité et de résultat, ne pouvait pas laisser un salarié reprendre le travail à l'issue d'un arrêt de travail de plus de 21 jours, selon les dispositions réglementaires en vigueur, sans le faire bénéficier d'une visite médicale destinée à apprécier son aptitude. En l'espèce, il est établi que M. Z..., en arrêt de travail entre le 29 mai 2009 et le 16 juillet 2009, a repris effectivement le poste de conducteur d'engins le 20 juillet 2009 et a travaillé durant plusieurs semaines, à l'exception d'une période de trois semaines en août 2009, avant que la visite médicale de reprise obligatoire ne soit organisée le 10 septembre 2009 et que le médecin du travail rende un avis d'inaptitude au poste de conducteur d'engin et un avis d'aptitude à un travail sans gros effort physique ni port de charges lourdes .La matérialité du second grief est donc démontrée. 3- la dégradation de son état de santé, Les consorts Z... soutiennent que les agissements de l'employeur ont conduit à une dégradation de l'état de santé du salarié et ont abouti à son inaptitude définitive alors qu'il aurait pu continuer à exercer le poste de formateur et de suivi de chantier, sans contrainte physique. Il est justifié par les appelants que : l'aptitude de M. Z... au poste de formateur et de suivi de chantier a été régulièrement constatée les 20 décembre 2005, 14 septembre 2007 et 24 septembre 2008, - le salarié a été placé en arrêt de travail le 29 mai 2009, quelques semaines après son affectation au poste de conducteur d'engin, - de retour au travail le 20 juillet 2009 et après plusieurs semaines d'activité, il a été déclaré inapte au poste de conducteur le 10 septembre 2010 et a subi une rechute avec un arrêt de travail ininterrompu entre 28 septembre 2009 et le 1er mars 2010, période à l'issue de laquelle il a été déparé définitivement inapte au poste de conducteur d'engin et apte à un travail de bureau, d'entretien. La dégradation de l'état de santé de M. Z... à partir de la modification de son contrat de travail, est ainsi avérée. La société Eiffage ne prouve pas que les faits exposés par les consorts Z... ne sont pas constitutifs de harcèlement moral à l'égard de M. Z... et que ses actes et décisions étaient justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, Au terme de l'article L 1152-3 du code du travail, toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions de l'article L1152-1 et L 1152-2, est nulle. Dans ces conditions, il convient de prononcer la nullité du licenciement de M. Z... intervenu le 29 avril 2010 au regard des faits de harcèlement moral dont le salarié a été victime, par voie d'infirmation du jugement Sur les conséquences du licenciement nul, Les ayants droits de M. Z... dont le licenciement est nul, sont fondés à obtenir l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du égale à six mois de salaire quels que soient son ancienneté ainsi que l'indemnité compensatrice de préavis équivalente à un salaire brut de 2 302 € par mois. Il n'a pas retrouvé d'emploi après le licenciement notifié le 29 avril 2010. Il a perçu des indemnités par mois durant une période de 3 ans. Une pension d'invalidité lui a été allouée en 2015. Il est décédé le [...] . Compte tenu de l'âge du salarié (51 ans) et de son ancienneté (10 ans) au moment de la rupture, de sa capacité à retrouver un emploi, la cour dispose des éléments nécessaires pour fixer à 33 000 € le montant des dommages et intérêts propres à réparer le préjudice subi par M. Z.... Il leur sera également alloué au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, la somme de 4 604 € et 460.40 € de congés payés y afférents. Sur la demande de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi par suite du harcèlement moral, Les consorts Z... sont fondés à obtenir réparation du préjudice moral lié aux faits de harcèlement moraI subis et distincts de la perte de l'emploi du salarié. En l'absence d'éléments plus précis, il leur sera alloué la somme de 2.000 € » ;

ALORS, D'UNE PART, QUE la cassation entraîne, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; que, par application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation, sur le fondement du premier moyen de cassation, des chefs de dispositif de l'arrêt retenant le harcèlement moral entraînera, par voie de conséquence, la cassation du chef de dispositif prononçant la nullité du licenciement en raison de ce harcèlement moral, au regard du lien de dépendance nécessaire qui existe entre ces deux chefs de l'arrêt ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE l'annulation d'un licenciement en raison du harcèlement moral dont un salarié a fait l'objet ne peut être prononcée que s'il est établi que celui-ci a été licencié pour avoir subi ou refusé de subir de tels agissements ; qu'en l'absence au contraire de lien établi avec le harcèlement, le licenciement n'est pas entaché de nullité ; qu'en se bornant à retenir qu' « il convient de prononcer la nullité du licenciement de Monsieur Z... intervenu le 29 avril 2010 au regard des faits de harcèlement dont le salarié a été victime », sans constater l'existence d'un lien concret et direct entre le harcèlement moral reproché à l'employeur et le licenciement pour inaptitude du salarié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1226-2, L. 1226-4, L. 1152-2 et L.1152-3 du code du travail.

TROISIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société EIFFAGE ROUTE SNC à payer les sommes de 1.000 € pour défaut de visite médicale et de 3.000 € de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de formation et d'adaptation ;

AUX MOTIFS QUE « Sur l'absence de visite médicale de reprise à l'issue de l'arrêt de travail du 29 mai 2009 au 16 juillet 2009. L'article R 4624-21 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige prévoit que le salarié bénéficie d'une visite médicale de reprise à l'issue d'une période d'arrêt de travail d'au moins 21 jours pour un accident ou une maladie non professionnel. Soutenant qu'il y a eu reprise effective du travail par le salarié à l'issue de la période d'arrêt de travail le 16 juillet 2009 , les consorts Z... versent à l'appui : - le récapitulatif des indemnités journalières versées permettant de confirmer qu'aucun arrêt de travail n'a eu lieu entre le 16 juillet 2009 et le 27 septembre 2009, - les bulletins de salaire des mois de juillet, août et septembre 2009 confirmant une reprise de travail à l'exception de la période de congés payés du 10 au 23 août 2009. La société Eiffage fait valoir dans ses écritures, et lors de l'audience, que M. Z... n'a jamais repris son Poste après le 16 juillet 2009 puisqu'il a été autorisé à rester à son domicile, qu'il a pris ses congés payés dans l'attente de la visite médicale de reprise organisée le 10 septembre 2009 et qu'il a été placé en arrêt de travail à compter du 25 août 2009. Toutefois, les allégations de l'employeur sont contredites par : la télécopie du 30 juillet 2009 de Mme J... du service de la DRH sollicitant de la médecin du travail la fixation d'une visite médicale de reprise pour M. Z... « en arrêt de travail du 29 mai au 16 juillet 2009, repris le 20 juillet 2009 et en congés payés du 3 au 24 août 2009", le relevé des heures de travail hebdomadaires effectuées en juillet, août et en septembre 2009 figurant sur les bulletins de salaire, excédant généralement 35 heures par semaine, établissant que M. Z... a bien travaillé du lundi 20 juillet au vendredi 31 juillet 2009, puis du mardi 25 août au 27 septembre 2009, précédant l'arrêt de travail du 28 septembre. L'attestation, non datée, de M. H..., responsable d'exploitation, selon lequel "M. Z... a repris son emploi de conducteur d'engin à l'issue de la visite médicale le déclarant apte à son emploi de mai 2009 à ce jour ?), le salarié a de nouveau été arrêté et n'a pas repris ses activités" est vague et imprécise sur les périodes d'absence litigieuses au cours des mois de juillet à septembre 2009 et ne permet donc pas de remettre en cause les documents susvisés établis par la société Eiffage. La preuve est rapportée que M. Z... a repris dès le 20 juillet 2009 et jusqu'à un nouvel arrêt de travail du 28 septembre 2009, le poste de conducteur d'engins, sans avoir bénéficié d'une visite de reprise obligatoire prévue par l'article R 4624-21 du code du travail. Les ayantsdroits du salarié sont fondés à obtenir une indemnisation de 1.000 € pour défaut d'organisation d'une visite médicale de reprise » ;

ET AUX MOTIFS QUE « Sur la demande de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de formation et d'adaptation, L'employeur doit assurer en vertu de l'article L 6321-1 du code du travail l'adaptation des salariés à leur poste de travail et veiller au maintien de leur capacité à occuper un emploi au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations. Les entreprises et groupes d'entreprises employant au moins 50 salariés doivent par ailleurs en application de l'article L 1233-1 du code du travail organiser un entretien professionnel pour les salariés de plus de 45 ans au cours duquel il informe le salarié notamment de ses droits en matière d'accès à un bilan d'étape professionnelle, à un bilan de compétence ou urge action de professionnalisation. Les appelants font valoir, pour la première fois en cause d'appel, que M. Z... n'a bénéficié durant sa période d'activité professionnelle d'aucune formation ni de l'entretien professionnel visé dans l'article L1233-1 du code du travail. La société Eiffage se borne à invoquer le fait que le salarié a passé avec succès les tests CACES le 4 mai 2010. Toutefois, ces tests de compétences sont nécessaires à la conduite des engins de chantier et ne correspondent pas à une action de formation proprement dite. En tout état de cause, ils se déroulent sur une demi-journée et sont manifestement insuffisants pour permettre à M. Z... de compléter et d'approfondir ses connaissances et d'évoluer vers des postes de niveau supérieur. A défaut, il convient de constater que l'employeur ne justifie pas avoir satisfait à son obligation de formation à l'égard de M. Z... au cours des 9 années d'activité professionnelle (2000-2009) ni à son obligation d'organiser un entretien professionnel au moment du 45ème anniversaire de son salarié. Les consorts Z... ont ainsi fondés à obtenir une indemnisation de 3000 euros au titre du manquement de l'employeur à ses obligations légales de formation et d'adaptation » ;

1) ALORS QUE le juge ne peut condamner l'employeur au paiement de dommages et intérêts au motif que le salarié a subi un préjudice nécessaire ; qu'en se bornant à retenir que le salarié n'avait pas bénéficié de mesures de formation et d'adaptation suffisantes au cours de sa carrière pour accorder à ses héritiers des dommages et intérêts à ce titre, sans précisément rechercher si cela avait engendré un préjudice concret à Monsieur Z... ou à ses ayants droits, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction applicable au litige, ensemble le principe de réparation intégrale.

2) ALORS QUE des dommages et intérêts ne peuvent être alloués sans que soient caractérisés une faute et un préjudice en résultant ; que pour condamner l'exposante au paiement de dommages et intérêts au titre du défaut d'organisation d'une visite de reprise, sans constater que ce défaut de visite de reprise avait engendré un préjudice à Monsieur Z... ou à ses ayants droits, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction applicable au litige, ensemble le principe de réparation intégrale.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR ordonné le remboursement par la société en application de l'article L. 1235-4 du code du travail, auprès de Pôle emploi des allocations de chômage de ces services ont été dans l'obligation de débourser pour Monsieur Z... du licenciement à ce jour, dans la limite de trois mois ;

AUX MOTIFS QUE « la société Eiffage devra en application de l'article L. 1235-4 du code du travail, être tenue au remboursera au Pôle emploi des allocations de chômage que ces services ont été dans l'obligation de débourser pour M. Z... du licenciement à ce jour, dans la limite de trois mois » ;

ALORS QUE le remboursement par l'employeur des indemnités de chômage servies par le Pôle emploi au salarié ne peut être ordonné en cas de nullité du licenciement ; qu'en condamnant la société au remboursement au Pôle emploi des indemnités de chômage perçues par le salarié dans la limite de six mois tout en prononçant la nullité de son licenciement, la cour d'appel a violé l'article L. 1235-4 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-10324
Date de la décision : 12/04/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Angers, 15 novembre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 12 avr. 2018, pourvoi n°17-10324


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.10324
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