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05/04/2018 | FRANCE | N°16-26855

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 05 avril 2018, 16-26855


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Papeete, 9 juin 2016), que Mme X..., épouse Y... a été engagée en juillet 1971 par le syndicat FSPF devenu la confédération des syndicats des travailleurs de Polynésie française - Force Ouvrière (CSTP-FO) ; que, par contrat du 12 juin 1996 non soumis à la convention collective des agents non fonctionnaires de l'administration de la Polynésie française et visant la loi n° 86-845 du 18 juillet 1986 et les délibérations prises pour son application ainsi que la délibération

n° 95-129 AT du 24 août 1995 portant création de cabinets auprès du prési...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Papeete, 9 juin 2016), que Mme X..., épouse Y... a été engagée en juillet 1971 par le syndicat FSPF devenu la confédération des syndicats des travailleurs de Polynésie française - Force Ouvrière (CSTP-FO) ; que, par contrat du 12 juin 1996 non soumis à la convention collective des agents non fonctionnaires de l'administration de la Polynésie française et visant la loi n° 86-845 du 18 juillet 1986 et les délibérations prises pour son application ainsi que la délibération n° 95-129 AT du 24 août 1995 portant création de cabinets auprès du président et des membres du gouvernement et fixant les conditions de recrutement et le régime indemnitaire des membres du cabinet, le président du gouvernement de la Polynésie française a recruté Mme X... à compter du 28 mai 1996 en qualité de réceptionniste et l'a engagée à titre personnel comme collaboratrice ; que, par arrêté du 21 mai 2001 visant la fin de son mandat, le président du gouvernement de la Polynésie française a mis fin au contrat de travail de la salariée à compter du 17 mai 2001 au soir ; que, par contrat de travail du premier août 2001 conclu dans les mêmes conditions, le président du gouvernement de la Polynésie française a recruté Mme X... à compter du 18 mai 2001 au soir et l'a engagée à titre personnel comme collaboratrice ; que, par "convention d'assistance technique à titre de régularisation" du 15 novembre 2001 conclue entre la Polynésie française et la CSTP-FO, Mme X... a été mise à la disposition de la confédération à plein temps à compter du 18 mai 2001 ; que, par arrêté du 11 juin 2004 visant la fin de son mandat, le président de la Polynésie française a mis fin au contrat de travail de la salariée à compter du 9 juin 2004 au soir ; que, par contrat à durée déterminée du 9 juin 2004, la CSTP-FO a engagé Mme X... en qualité d'employé de bureau du 10 au 30 juin 2004, sur le fondement de l'article 24 5° de la délibération n°91-2 AT du 16 janvier 1991 "afin de préserver l'emploi de Mme X... pour cette période et dans l'attente d'une recherche du financement en vue d'essayer de pérenniser son poste" ; que, par acte du 30 juin 2004, le secrétaire général de la CSTP-FO a certifié que la salariée a cessé son activité à la confédération le 30 juin 2004 ; que Mme X... a demandé à partir à la retraite le 30 juin 2004 ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la CSTP-FO fait grief à l'arrêt de mettre hors de cause la Polynésie française et de juger qu'elle a été l'employeur de la salariée, de dire le licenciement de la salariée par la confédération sans cause réelle et sérieuse et abusif et de dire que la CSTP-FO devrait lui payer des dommages et intérêts pour licenciement irrégulier et sans cause réelle et sérieuse et pour licenciement abusif alors, selon le moyen :

1°/ que la preuve de l'existence d'un lien de subordination pèse sur celui qui s'en prévaut ; qu'en présence d'un contrat de travail apparent ou écrit, il appartient à celui qui en conteste la réalité de le prouver ; qu'en l'espèce, pour faire droit aux prétentions de Mme X..., la cour d'appel a considéré que, nonobstant les contrats de cabinet signés entre cette dernière et le gouvernement de Polynésie française, ce dernier ne pouvait être considéré comme l'employeur de Mme X..., dès lors que l'exercice par le gouvernement de Polynésie française de son pouvoir de direction et de contrôle n'était pas établi et que « l'existence d'un lien de subordination entre Nella X..., épouse Y... et la Polynésie française n'est ainsi pas démontrée » ; qu'en statuant ainsi, bien que, en l'état de contrats de travail écrits conclus avec le gouvernement de Polynésie française régulièrement produits aux débats, il appartenait, d'une part, à ce gouvernement de prouver que lesdits contrats étaient fictifs, ce qui, en l'état du contrat de mise à disposition conclu avec la CSTP-FO, ne pouvait pas résulter du seul fait que Mme X... avait travaillé pour la CSTP-FO, et, d'autre part, à Mme X... de prouver qu'elle avait été soumise à un lien de subordination envers la CSTP-FO, et non pas à cette dernière de démontrer l'existence d'un lien de subordination entre la demanderesse et le gouvernement de Polynésie française, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil dans sa version applicable au présent litige ;

2°/ que l'existence d'un contrat de travail étant indépendante de la volonté des parties, elle s'apprécie in concreto au regard des modalités réelles d'exercice de son activité par le salarié et ne peut être retenue que s'il est démontré que celle-ci s'est effectuée dans le cadre d'un lien de subordination ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que Mme X... avait exercé son activité sous la subordination de la CSTP-FO, aux motifs que les contrats la liant au gouvernement de Polynésie française étaient fictifs ; qu'en statuant ainsi sans caractériser in concreto que Mme X... avait exercé ses fonctions dans le cadre d'un lien de subordination envers l'exposante et que cette dernière dirigeait et contrôlait son activité et disposait d'un éventuel pouvoir de sanction à son égard, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1211-1 du code du travail de Polynésie française, ensemble l'article L. 1221-1 du code du travail ;

3°/ que les juges du fond doivent répondre aux conclusions opérantes des parties ; qu'en l'espèce, la CSTP-FO faisait valoir que l'arrêté du 31 août 1999 et la délibération du 14 décembre 1995 fixant les conditions dans lesquelles les agents de la Polynésie française peuvent être mis à disposition d'organismes extérieurs prévoyaient expressément que le président de la Polynésie française conservait l'exercice du pouvoir disciplinaire sur les salariés mis à disposition et soulignait qu'en application de ces règles, le contrat de travail de Mme X... avait pris fin par décision du président de la Polynésie française et avait donné lieu au versement par la Polynésie française, qui avait auparavant réglé seule le salaire de Mme X..., d'une indemnité compensatrice de préavis ; qu'en ne répondant pas à ces conclusions, qui démontraient que la Polynésie française était bien restée employeur de Mme X..., ce qui était de nature a minima à caractériser une situation de co-emploi, la cour d'appel a violé l'article 268 du CPCPF ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui a constaté, d'une part, qu'il était établi par les pièces versées aux débats que Mme X... avait toujours exercé de 1991 jusqu'en juin 2004 les fonctions de secrétaire à la FSPF et la CSTP/FO, d'autre part , qu'il résultait de décisions pénales définitives que les contrats de cabinet conclus avec la Polynésie Française, alors que la salariée était employée de la confédération syndicale, avaient eu pour seul objet de faire prendre en charge ses traitements par le Territoire et étaient fictifs, l'intéressée n'ayant jamais occupé ces postes, a, sans inverser la charge de la preuve, et répondant aux conclusions, légalement justifié sa décision ;

Sur le second moyen :

Attendu que la CSTP-FO fait grief à l'arrêt de dire le licenciement de la salariée par la confédération sans cause réelle et sérieuse et abusif et de dire que la CSTP-FO devrait lui payer des dommages et intérêts pour licenciement irrégulier et sans cause réelle et sérieuse et pour licenciement abusif alors, selon le moyen :

1°/ que, seuls les faits anormaux, contraires aux apparences, devant être prouvés, il appartient à celui qui prétend avoir été contraint de prendre sa retraite pour obtenir l'indemnisation de la rupture de son contrat de travail de le démontrer ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que la rupture du contrat de travail de Mme X... devait s'analyser en un licenciement irrégulier, au motif qu'elle alléguait avoir été contrainte de prendre sa retraite et que l'employeur ne prouvait pas que la rupture serait intervenue du commun accord des parties ; qu'en statuant ainsi, bien qu'il ait appartenu à Mme X... de démontrer que, contrairement aux apparences créés par les actes juridiques auxquels elle avait souscrit près de sept ans auparavant et par son comportement pendant cette période, elle avait été contrainte de prendre sa retraite, la cour d'appel, qui a fait droit aux prétentions de la salariée sur le fondement de ses seules déclarations, a inversé la charge de la preuve et a violé l'article 1315 du code civil, applicable au présent litige, ensemble l'article 4 du code de procédure civile de Polynésie française et l'article 6§1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

2°/ que les juges du fond ne peuvent se contenter de simples affirmations pour motiver leurs décisions et doivent préciser les pièces sur lesquelles ils se fondent ; qu'en l'espèce, les premiers juges ont considéré le licenciement comme dépourvu de cause réelle et sérieuse et abusif, en se contentant d'affirmer qu'il apparaissait contraint, sans préciser de quels éléments de preuve ils tiraient cette conviction, ni prendre en considération la situation factuelle propre de Mme X... ; qu'à supposer que la cour d'appel ait adopté ce motif, elle a ainsi privé sa décision de motifs et violé l'article 268 du code de procédure civile de la Polynésie française ;

Mais attendu qu'ayant retenu, par motifs propres et adoptés, que le départ à la retraite de Mme X..., salariée depuis juillet 1971 de la FSPF devenue la CSTP-F0, le 30 juin 2004, n'a été finalisé par aucun document, la cour d'appel a, sans inverser la charge de la preuve, fait ressortir qu'il résultait des circonstances antérieures et contemporaines au départ à la retraite de la salariée qu'à la date à laquelle il a été décidé, celui-ci était équivoque ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu que le pourvoi revêt un caractère abusif ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la Confédération des syndicats des travailleurs de Polynésie - Force ouvrière aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la Confédération des syndicats des travailleurs de Polynésie - Force Ouvrière à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros et rejette les autres demandes ;

Condamne la Confédération des syndicats des travailleurs de Polynésie - Force ouvrière à payer une amende de 3 000 euros envers le Trésor public ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq avril deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la Confédération des syndicats des travailleurs de Polynésie- Force Ouvrière

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR, confirmant partiellement le jugement entrepris, mis hors de cause la Polynésie Française et donc jugé que la CSTP-FO avait été l'employeur de Madame Y..., qualifié le licenciement de Madame Y... d'irrégulier et dénuée de cause réelle et sérieuse la rupture de l'engagement de Madame Y... par la CSTP-FO, dit le licenciement de Madame Y... abusif et dit que la CSTP-FO devrait verser à Madame Y... 3.000.000 FCP d'indemnité pour licenciement irrégulier et sans cause réelle et sérieuse et 500.000 FCP d'indemnité pour licenciement abusif ;

AUX MOTIFS QU' « un contrat de travail se définit comme l'engagement d'une personne d'exercer pour le compte d'une autre et sous sa subordination une activité moyennant rémunération. L'élément essentiel de ce contrat est le lien de subordination qui se caractérise par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de ses subordonnés. Par ailleurs, l'existence d'une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité. Dans ces conditions, le seul fait que Nella X... épouse Y... ait signé deux contrats de cabinet en 1996 et 2001 et qu'elle ait fait l'objet d'une convention de mise à disposition de la CSTP/FO par la Polynésie française ne permet pas de lui conférer la qualité de salariée de la Polynésie française. Les pièces versées aux débats font, au contraire, ressortir que Nella X... épouse Y... n'a jamais cessé de travailler pour le compte de la CSTP/FO et que la Polynésie française n'a jamais été son employeur. En effet, le relevé de cotisations d'assurance vieillesse et de périodes validées Tranche A émis le 16 janvier 2012 par la caisse de prévoyance sociale de la Polynésie française révèle que Nella X... épouse Y... a été engagée au mois de juillet 1971 par la FSPF qui est devenue la CSTP/FO et qu'elle était l'employée de cette confédération syndicale lorsqu'en mai 1991, elle a été déclarée par la présidence du gouvernement comme employé de cabinet. Les attestations de Bellinda A... épouse B..., de Jean-Robert C...,  épouse D... et de Heiarii E... démontrent que Nella X... épouse Y... a exercé les fonctions de secrétaire à la FSPF et la CSTP/FO de 1991 jusqu'en juin 2004. Il n'est, d'ailleurs, pas établi, ni même prétendu, qu'elle ait occupé le poste de réceptionniste à la présidence, ni celui de collaboratrice du président du gouvernement de la Polynésie française. Nella X... épouse Y..., qui n'a ainsi jamais acquis la qualité d'agent de cabinet, ne saurait se prévaloir de l'arrêté n°1172 CM du 31 août 1999 fixant les conditions de mise à disposition des agents de cabinet auprès de personnes morales, ni arguer de la validité de la convention d'assistance technique. La CSTP/FO verse aux débats un extrait du jugement rendu le 4 octobre 2011 par le tribunal correctionnel de Papeete qui ne fait l'objet d'aucune critique et qui souligne que Nella X... épouse Y... a bénéficié d'un contrat de cabinet et d'une mise à disposition de la CSTP/FO alors qu'elle était déjà employée par ce syndicat ; qu'elle n'a jamais travaillé comme collaboratrice du cabinet du président et que « le seul mobile de (son) recrutement était de faire prendre en charge (ses) traitements par le Territoire». La déclaration de la salariée à la caisse de prévoyance sociale de la Polynésie française et le paiement du salaire par la Polynésie française, qui sont les conséquences de contrats et convention fictifs et donc inefficaces, ne constituent pas des éléments de preuve d'un contrat de travail ayant lié Nella X... épouse Y... et la Polynésie française. Et, en raison du caractère fictif du contrat de cabinet, la rupture de ce contrat intervenu par arrêté du 11 juin 2004, ne saurait produire un quelconque effet. Enfin, aucun élément n'établit que la Polynésie française ait organisé le travail de Nella X... épouse Y... ; ni qu'elle ait défini ses horaires et ses tâches ; ni qu'elle ait contrôlé sa façon d'exercer ses fonctions ; ni qu'elle lui ait accordé des congés ; ni qu'elle lui ait donné directives, ordres et avertissements. L'existence d'un lien de subordination entre Nella X... épouse Y... et la Polynésie française n'est ainsi pas démontrée. Le jugement attaqué doit donc être confirmé en ce qu'il dit que la CSTP/FO est le seul employeur de Nella X... épouse Y... » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QU'« il n'est pas contesté que Mme Y... n'a jamais travaillé effectivement pour la Polynésie française et qu'elle a poursuivi, sous l'empire d'un contrat de cabinet, ses fonctions au sein de la CSTP-FO ; que la délibération 95-219 AT du 14 décembre 1995 relative aux différentes positions des fonctionnaires de la Polynésie française n'est pas applicable à la situation de Mme Y..., qui n'avait pas la qualité de fonctionnaire ; que la convention d'assistance technique du 15 novembre 2001 précise que Mme Y... continue à percevoir sa rémunération par la Polynésie française, qui gère administrativement son dossier, cependant que la CSTP-FO fixe l'organisation du service et des congés ; Qu'il n'est rien prévu quant à l'autorité titulaire du pouvoir disciplinaire ; que la possibilité d'un arrêt immédiat de la mise à disposition, en cas de faute disciplinaire, n'est pas réservée à la Polynésie française ; que l'ensemble de ces éléments démontrent que le lien de subordination ayant lié Mme Y... à la CSTP-FO n'a pas été interrompu par son engagement sous contrat de cabinet par la Polynésie française, qui n'avait pour seul but que de financer ce poste ; Que la CSTP-FO est donc restée l'employeur de Mme Y... ; que le recrutement de Mme Y... sous contrat de cabinet et sa rémunération, alors que l'intéressée travaillait déjà pour la CSTP-FO et n'a exercé aucune activité pour la Polynésie française, caractérise clairement que son engagement n'avait d'autre but que de financer son travail auprès du syndicat ; qu'il appartiendra à la juridiction pénale, saisie en appel, de se prononcer sur la légalité de ce mode de subvention ; que la qualité d'employeur, qui est ainsi fictive, ne sera pas retenue à l'égard de la Polynésie française » ;

1°) ALORS QUE la preuve de l'existence d'un lien de subordination pèse sur celui qui s'en prévaut ; qu'en présence d'un contrat de travail apparent ou écrit, il appartient à celui qui en conteste la réalité de le prouver ; qu'en l'espèce, pour faire droit aux prétentions de Madame Y..., la cour d'appel a considéré que, nonobstant les contrats de cabinet signés entre cette dernière et le gouvernement de Polynésie Française, ce dernier ne pouvait être considéré comme l'employeur de Madame Y..., dès lors que l'exercice par le gouvernement de Polynésie Française de son pouvoir de direction et de contrôle n'était pas établi et que « l'existence d'un lien de subordination entre Nella X... épouse Y... et la Polynésie Française n'est ainsi pas démontrée » ; qu'en statuant ainsi, bien que, en l'état de contrats de travail écrits conclus avec le gouvernement de Polynésie Française régulièrement produits aux débats, il appartenait, d'une part, à ce gouvernement de prouver que lesdits contrats étaient fictifs, ce qui, en l'état du contrat de mise à disposition conclu avec la CSTP-FO, ne pouvait pas résulter du seul fait que Madame Y... avait travaillé pour la CSTP-FO, et, d'autre part, à Madame Y... de prouver qu'elle avait été soumise à un lien de subordination envers la CSTP-FO, et non pas à cette dernière de démontrer l'existence d'un lien de subordination entre la demanderesse et le gouvernement de Polynésie Française, la cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil dans sa version applicable au présent litige ;

2°) ALORS QUE l'existence d'un contrat de travail étant indépendante de la volonté des parties, elle s'apprécie in concreto au regard des modalités réelles d'exercice de son activité par le salarié et ne peut être retenue que s'il est démontré que celle-ci s'est effectuée dans le cadre d'un lien de subordination ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que Madame Y... avait exercé son activité sous la subordination de la CSTP-FO, aux motifs que les contrats la liant au gouvernement de Polynésie Française étaient fictifs ; qu'en statuant ainsi sans caractériser in concreto que Madame Y... avait exercé ses fonctions dans le cadre d'un lien de subordination envers l'exposante et que cette dernière dirigeait et contrôlait son activité et disposait d'un éventuel pouvoir de sanction à son égard, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1211-1 du Code du travail de Polynésie Française, ensemble l'article L. 1221-1 du Code du travail ;

3°) ALORS QUE les juges du fond doivent répondre aux conclusions opérantes des parties ; qu'en l'espèce, la CSTP-FO faisait valoir que l'arrêté du 31 août 1999 et la délibération du 14 décembre 1995 fixant les conditions dans lesquelles les agents de la Polynésie Française peuvent être mis à disposition d'organismes extérieurs prévoyaient expressément que le président de la Polynésie Française conservait l'exercice du pouvoir disciplinaire sur les salariés mis à disposition et soulignait qu'en application de ces règles, le contrat de travail de Madame Y... avait pris fin par décision du Président de la Polynésie Française et avait donné lieu au versement par la Polynésie française, qui avait auparavant réglé seule le salaire de Madame Y..., d'une indemnité compensatrice de préavis (V. concl. n° 2, p. 2, in fine à p. 4, in fine) ; qu'en ne répondant pas à ces conclusions, qui démontraient que la Polynésie Française était bien restée employeur de Madame Y..., ce qui était de nature a minima à caractériser une situation de co-emploi, la cour d'appel a violé l'article 268 du CPCPF ;

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmant partiellement le jugement entrepris, qualifié le licenciement de Madame Y... d'irrégulier et dénuée de cause réelle et sérieuse la rupture de l'engagement de Madame Y... par la CSTP-FO, dit le licenciement de Madame Y... abusif et dit que la CSTP-FO devrait verser à Madame Y... 3.000.000 FCP d'indemnité pour licenciement irrégulier et sans cause réelle et sérieuse et 500.000 FCP d'indemnité pour licenciement abusif ;

AUX MOTIFS QUE « la CSTP/FO étant demeurée liée à Nella X... épouse Y... par un contrat de travail à durée indéterminée, il est inutile de se prononcer sur la nature exacte du contrat de travail à durée déterminée signé le 9 juin 2004. Il résulte du certificat de cessation de travail que le contrat de travail a été rompu le 30 juin 2004 et il convient dès lors de rechercher à qui est imputable ladite rupture. La démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail et elle ne se présume pas. Il appartient donc à l'employeur d'en rapporter la preuve. Or, Nella X... épouse Y... affirme qu'elle a été contrainte de partir à la retraite et la CSTP/FO ne verse aux débats aucun élément permettant de conclure, ni même de supposer, que le contrat de travail a été rompu d'un commun accord. La rupture est donc imputable à la CSTP/FO et elle a eu lieu sans respect de la procédure de licenciement qui impose notamment l'organisation d'un entretien préalable et l'envoi d'une lettre motivée qui fixe les limites du litige. Il s'agit donc d'un licenciement irrégulier et dénué de cause réelle et sérieuse» ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTÉS QUE « le contrat à durée déterminée vise sans ambiguïté la recherche du financement de l'emploi de Mme X... en vue de pérenniser son poste, solution que le syndicat ne soutient pas avoir trouvé ; que son départ à la retraite n'a été finalisé par aucun document entre les parties ; qu'il apparaît, en tout état de cause dans ce contexte, contraint et rend la rupture imputable à l'employeur ; que cette rupture doit s'analyser comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse, en l'absence du respect de la procédure imposée par l'article 13 de la délibération 91-002 AT du 16 janvier 1991 alors applicable ; que par défaut de lettre motivée de licenciement, ce dernier est réputé sans cause réelle et sérieuse » ;

1°) ALORS QUE, seuls les faits anormaux, contraires aux apparences, devant être prouvés, il appartient à celui qui prétend avoir été contraint de prendre sa retraite pour obtenir l'indemnisation de la rupture de son contrat de travail de le démontrer ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que la rupture du contrat de travail de Madame Y... devait s'analyser en un licenciement irrégulier, au motif qu'elle alléguait avoir été contrainte de prendre sa retraite et que l'employeur ne prouvait pas que la rupture serait intervenue du commun accord des parties ; qu'en statuant ainsi, bien qu'il ait appartenu à Madame Y... de démontrer que, contrairement aux apparences créés par les actes juridiques auxquels elle avait souscrit près de sept ans auparavant et par son comportement pendant cette période, elle avait été contrainte de prendre sa retraite, la cour d'appel, qui a fait droit aux prétentions de la salariée sur le fondement de ses seules déclarations, a inversé la charge de la preuve et a violé l'article 1315 du Code civil, applicable au présent litige, ensemble l'article 4 du Code de procédure civile de Polynésie Française et l'article 6§1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

2°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent se contenter de simples affirmations pour motiver leurs décisions et doivent préciser les pièces sur lesquelles ils se fondent ; qu'en l'espèce, les premiers juges ont considéré le licenciement comme dépourvu de cause réelle et sérieuse et abusif, en se contentant d'affirmer qu'il apparaissait contraint, sans préciser de quels éléments de preuve ils tiraient cette conviction, ni prendre en considération la situation factuelle propre de Madame Y... ; qu'à supposer que la cour d'appel ait adopté ce motif, elle a ainsi privé sa décision de motifs et violé l'article 268 du Code de procédure civile de la Polynésie Française.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-26855
Date de la décision : 05/04/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Papeete, 09 juin 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 05 avr. 2018, pourvoi n°16-26855


Composition du Tribunal
Président : Mme Farthouat-Danon (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Monod, Colin et Stoclet, SCP de Chaisemartin, Doumic-Seiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.26855
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