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04/04/2018 | FRANCE | N°17-16043

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 04 avril 2018, 17-16043


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 731-3 et L. 732-18-3 du code rural et de la pêche maritime, dans leur rédaction applicable à la date de la liquidation des droits litigieux ;

Attendu, selon le second de ces textes, que la condition d'âge pour l'ouverture des droits à pension prévue par l'article L. 732-18 est abaissée, dans les conditions qu'il fixe, pour les assurés qui justifient d'une incapacité permanente au sens de l'article L. 752-6 au moins égale à un taux déterminé par

décret, lorsque cette incapacité est reconnue au titre d'une maladie professionn...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 731-3 et L. 732-18-3 du code rural et de la pêche maritime, dans leur rédaction applicable à la date de la liquidation des droits litigieux ;

Attendu, selon le second de ces textes, que la condition d'âge pour l'ouverture des droits à pension prévue par l'article L. 732-18 est abaissée, dans les conditions qu'il fixe, pour les assurés qui justifient d'une incapacité permanente au sens de l'article L. 752-6 au moins égale à un taux déterminé par décret, lorsque cette incapacité est reconnue au titre d'une maladie professionnelle mentionnée au second alinéa de l'article L. 752-2 ou d'un accident du travail mentionné au premier alinéa du même article et ayant entraîné des lésions identiques à celles indemnisées au titre d'une maladie professionnelle ; que, selon le premier, le financement de l'assurance vieillesse et veuvage du régime de protection sociale des non-salariés agricoles est assuré, notamment, par une contribution de la branche Accidents du travail et maladies professionnelles couvrant les dépenses supplémentaires engendrées par les départs en retraite à l'âge prévu à l'article L. 732-18-3 ; qu'il en résulte que seuls les accidents du travail et maladies professionnelles pris en charge, dans les conditions susmentionnées par la branche Accidents du travail et maladies professionnelles du régime de protection sociale des non-salariés agricoles ouvrent droit au bénéfice de la liquidation par anticipation des droits à pension de retraite au titre de l'assurance vieillesse et veuvage du même régime ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'ayant demandé le 3 novembre 2014 à la caisse de mutualité sociale agricole du Limousin (la caisse) de liquider par anticipation sa pension de retraite personnelle à l'âge de soixante ans en raison d'une incapacité permanente partielle due à un accident du travail, M. X..., auquel la caisse a refusé cet avantage, a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;

Attendu que, pour faire droit au recours de M. X..., l'arrêt énonce que, pour retenir que les non-salariés agricoles, victimes d'un accident du travail survenu ou d'une maladie professionnelle déclarée antérieurement au 1er avril 2002 et ayant été exposés à des facteurs de pénibilité pendant l'accomplissement de leur travail, ne se trouvent pas, à l'âge de soixante ans, dans la même situation que ceux victimes d'un accident du travail survenu ou d'une maladie professionnelle déclarée postérieurement au 1er avril 2012 pour l'ouverture d'un droit à une retraite anticipée pour pénibilité et justifier cette inégalité de traitement, l'administration, qui se fonde sur le seul critère de la prise en charge de l'accident du travail ou de la maladie professionnelle par un régime de protection sociale, ajoute ainsi au texte de l'article L. 732-18-3 du code rural et de la pêche maritime ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'incapacité permanente partielle de travail de M. X... procédait d'accidents du travail survenus antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi n° 2001-1128 du 30 novembre 2001, de sorte qu'ils n'avaient pas été pris en charge au titre de la branche Accidents du travail et maladies professionnelles instituée par cette loi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et vu l'article 627 du code de procédure civile, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du même code ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 février 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Limoges ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Rejette le recours de M. X... ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes présentées tant devant les juges du fond que devant la Cour de cassation ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre avril deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour la caisse de mutualité sociale agricole du Limousin.

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir annulé la décision de la commission de recours amiable et d'avoir renvoyé la CMSA du Limousin à procéder à l'examen du droit de M. X... à être admis au bénéfice d'une retraite anticipée pour pénibilité au regard des seules conditions posées par les articles L. 732-18-3 et L. 752-6 du code rural et de la pêche maritime, à savoir, un taux d'incapacité permanente fixé en fonction du barème indicatif d'invalidité mentionné à l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale relatif à l'assurance contre les accidents du travail et les maladies professionnelles et sur avis conforme d'une commission des rentes non salariés agricoles et un taux d'incapacité permanente au moins égal à un taux déterminé par décret, reconnu au titre d'un accident du travail mentionné au premier alinéa de l'article L. 752-2 du code rural et de la pêche maritime et ayant entraîné des lésions identiques à celles indemnisées au titre d'une maladie professionnelle, et sans que puisse lui être opposé un fait générateur de l'incapacité permanente antérieur au 1er avril 2002 ;

AUX MOTIFS QUE la loi n° 2010-1330 du 09 novembre 2010 portant réforme des retraites a ouvert un droit de retraite anticipée à taux plein dès l'âge de soixante ans au lieu de soixante-deux ans pour les personnes justifiant d'une incapacité permanente reconnue au titre d'une maladie professionnelle ou d'un accident du travail d'au moins 20%, ainsi qu'après avis d'une commission pluridisciplinaire, pour celles justifiant d'un taux d'incapacité permanente compris entre 10% et 20%, sous réserve qu'elles aient été exposées pendant dix-sept années à des facteurs de risques professionnels et que l'incapacité permanente soit directement liée à cette exposition ; que l'article 83 de cette loi codifié sous l'article L. 732-18-3 du code rural et de la pêche maritime relatif à l'assurance vieillesse des non-salariés agricoles, dispose que la condition d'âge de soixante-deux ans prévue à l'article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale pour être admis au bénéfice de cette assurance est abaissée, dans des conditions fixées par décret, pour les assurés qui justifient d'une incapacité permanente au sens de l'article L. 752-6 au moins égale à un taux déterminé par décret, lorsque cette incapacité est reconnue au titre d'une maladie professionnelle mentionnée au second alinéa de l'article L. 752-2 ou d'un accident du travail mentionné au premier alinéa du même article et ayant entraîné des lésions identiques à celles indemnisées au titre d'une maladie professionnelle ; que l'article L. 752-6 du code rural et de la pêche maritime, issu de la loi n° 2001-1128 du 30 novembre 2001 entrée en vigueur le 1er avril 2002 et ayant créé au sein de la protection sociale des personnes non-salariées agricoles la branche accident du travail-maladie professionnelle (dite ATEXA), prévoit que le taux d'incapacité permanente est déterminé par l'organisme assureur d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime, compte tenu du barème indicatif d'invalidité mentionné à l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale relatif à l'assurance contre les accidents du travail et les maladies professionnelles et sur avis conforme d'une commission des rentes des non-salariés agricoles dont le taux proposé ne peut être inférieur à celui proposé par le service du contrôle médical de la Caisse de mutualité sociale agricole ; que dans des annexes 2 et 3 à une circulaire du 18 avril 2011 du ministère du travail, de l'emploi et de la santé portant sur la mise en oeuvre de la retraite à raison de la pénibilité, il est mentionné que le droit à retraite est apprécié par le régime - soit régime général, soit régime de protection sociale des professions agricoles - au titre duquel l'incapacité permanente a été reconnue et rappelé que le régime des non-salariés agricoles dit ATEXA ne couvre que les maladies professionnelles et les accidents du travail constatés ou survenus à compter du 1er avril 2002 ; qu'en outre, dans une réponse du 1er janvier 2013 à une question écrite devant l'Assemblé Nationale portant sur la situation des non-salariés agricoles victimes d'un accident du travail survenu avant le 1er avril 2002, le ministre de l'agriculture, de l'agro-alimentaire et de la forêt a retenu que seuls devaient être pris en compte pour le droit à retraite anticipée les maladies professionnelles constatées ou les accidents du travail survenus à compter du 1er avril 2002 puisque les personnes non-salariées agricoles, victimes d'une maladie professionnelle ou d'un accident du travail antérieurs au 1er avril 2002, en ont été indemnisées au titre de la loi n° 66-950 du 22 décembre 1966 ayant institué une obligation d'assurance contre les maladies et les accidents professionnels et qu'elles ne relevaient pas d'un régime de protection sociale mais d'un régime purement assurantiel dans lequel les prestations étaient attribuées par l'organisme assureur selon des critères d'appréciation différents de ceux de l'ATEXA dont le dispositif, en l'absence de dispositions particulières, n'a pas eu d'effet rétroactif ; que c'est en se fondant sur cette différenciation de prise en charge de l'accident ou de la maladie professionnelle par un régime de protection sociale ou par un régime assurantiel que l'administration retient, au visa de l'article L. 732-18-3 du code rural et de la pêche maritime, que seuls peuvent être pris en compte, pour apprécier le droit à une retraite anticipée pour pénibilité, les maladies professionnelles ou les accidents du travail survenus à compter du 1er avril 2002 et pris en charge par le nouveau régime de protection sociale des non-salariés agricoles ; que donc et selon l'administration, les non-salariés agricoles, victimes d'un accident du travail survenu ou d'une maladie professionnelle déclarée antérieurement au 1er avril 2002 et ayant été exposés à des facteurs de pénibilité pendant l'accomplissement de leur travail, ne se trouvent pas, à l'âge de soixante ans, dans la même situation que ceux victimes d'un accident du travail survenu ou d'une maladie professionnelle déclarée postérieurement au 1er avril 2012 pour l'ouverture d'un droit à une retraite anticipée pour pénibilité ; que cette inégalité de traitement repose pour l'administration sur le seul critère de la prise en charge de l'accident du travail ou de la maladie professionnelle par un régime de protection sociale, alors qu'ainsi elle ajoute au texte de l'article L. 732-18-3 du code rural et de la pêche maritime qui, par sa référence à « une incapacité permanente au sens de l'article L. 752-6 » prévoit seulement que la détermination de l'incapacité permanente de l'assuré qui demande à être admis au bénéfice de la retraite anticipée pour pénibilité soit examinée par la Caisse de mutualité sociale agricole au regard des critères d'appréciation de cette incapacité posés par l'article L. 752-6, indépendamment de sa prise en charge antérieure sur le fondement de ce même texte par sa branche accident du travail-maladie professionnelle dite ATEXA ; que lorsque, comme en l'espèce, l'incapacité permanente est consécutive à un accident du travail, la demande d'être admis au bénéfice de la retraite anticipée pour pénibilité ne peut prospérer que sous les conditions posées par les articles L. 732-18-3 et L. 752-6 du code rural et de la pêche maritime, à savoir : - un taux d'incapacité permanente fixé en fonction du barème indicatif d'invalidité mentionné à l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale relatif à l'assurance contre les accidents du travail et les maladies professionnelles et sur avis conforme d'une commission des rentes des non-salariés agricoles ; - un taux d'incapacité permanente au moins égal à un taux déterminé par décret, reconnu au titre d'un accident du travail mentionné au premier alinéa de l'article L. 752-2 du code rural et de la pêche maritime et ayant entraîné des lésions identiques à celles indemnisées au titre d'une maladie professionnelle ; qu'il convient en conséquence, sans qu'il n'ay ait lieu à se prononcer sur le moyen pris de l'inconventionnalité de l'article L. 732-18-3 du code rural et de la pêche maritime mais en écartant l'analyse qui en est faite par l'administration, d'annuler la décision de la commission de recours amiable du 29 janvier 2015 et de renvoyer la Caisse de mutualité sociale agricole à apprécier le droit de M. X... à être admis au bénéfice d'une retraite anticipée pour pénibilité au regard des seules conditions ci-dessus énoncées ;

ALORS QUE le dispositif de retraite anticipée pour pénibilité vise exclusivement les accidents de travail au sens strict, considérés dans le cadre de la réglementation du régime de protection sociale des accidents du travail et des maladies professionnelles des salariés ou non-salariés agricoles, ou dans celui des salariés du régime général ; que seuls les assurés justifiant d'une incapacité permanente au sens de l'article L. 752-6 du code rural et de la pêche maritime au moins égale à un taux déterminé par décret bénéficient de ce dispositif ; que l'article L. 752-6 du code rural et de la pêche maritime est issu de la loi n° 2001-1128 du 30 novembre 2001 qui a créé la branche accidents du travail et maladies professionnelles au sein de la protection sociale des personnes non-salariées agricoles, entrée en vigueur le 1er avril 2002 ; qu'antérieurement à cette date, les non-salariés agricoles victimes d'un accident du travail ne relevaient pas de la branche accidents du travail et maladies professionnelles au sein de la protection sociale des non-salariés agricoles, laquelle a substitué l'inaptitude médicale à l'état d'incapacité, objectivé par un barème médical et apprécié par les services du contrôle médical de la caisse de mutualité sociale agricole ; qu'il en résulte que la détermination du taux d'incapacité permanente au sens de l'article L. 752-6 du code rural et de la pêche maritime, exigé pour bénéficier du dispositif, ne peut pas être transposée antérieurement à la date d'entrée en vigueur de cette loi ; qu'ainsi, les non-salariés agricoles ayant eu un accident du travail avant le 1er avril 2002 ne peuvent prétendre au dispositif de retraite anticipée pour pénibilité, qui subordonne son bénéfice à une incapacité permanente atteignant un certain taux ; qu'en considérant néanmoins que M. X... pouvait bénéficier du dispositif de retraite anticipée pour pénibilité, peu important la date de son accident du travail, la cour d'appel a violé les articles L. 732-18-3 et L. 752-6 du code rural et de la pêche maritime.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 17-16043
Date de la décision : 04/04/2018
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Analyses

SECURITE SOCIALE, ALLOCATION VIEILLESSE POUR PERSONNES NON SALARIEES - Généralités - Pension - Liquidation - Liquidation anticipée pour pénibilité - Bénéfice - Conditions - Détermination - Portée

AGRICULTURE - Sécurité sociale - Assurances des non-salariés agricoles - Vieillesse - Pension - Liquidation - Liquidation anticipée pour pénibilité - Cas - Accidents du travail et maladies professionnelles - Loi n° 2001-1128 du 30 novembre 2001 - Application dans le temps - Détermination

Il résulte des articles L. 731-3 et L. 732-18-3 du code rural et de la pêche maritime, dont le premier prévoit que le financement de l'assurance vieillesse et veuvage du régime de protection sociale des non-salariés agricoles est assuré, notamment, par une contribution de la branche Accidents du travail et maladies professionnelles couvrant les dépenses supplémentaires engendrées par les départs en retraite à l'âge prévu à l'article L. 732-18-3, que seuls les accidents du travail et maladies professionnelles pris en charge par la branche Accidents du travail et maladies professionnelles du régime de protection sociale des non-salariés agricoles, donc survenus depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 2001-1128 du 30 novembre 2001, ouvrent droit au bénéfice de la liquidation par anticipation des droits à pension de retraite au titre de l'assurance vieillesse et veuvage du même régime


Références :

articles L. 731-3 et L. 732-18-3 du code rural et de la pêche maritime

Décision attaquée : Cour d'appel de Limoges, 06 février 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 04 avr. 2018, pourvoi n°17-16043, Bull. civ.Bull. 2018, II, n° 71
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Bull. 2018, II, n° 71

Composition du Tribunal
Président : Mme Flise
Avocat(s) : SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret

Origine de la décision
Date de l'import : 24/03/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.16043
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