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29/03/2018 | FRANCE | N°17-15017

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 29 mars 2018, 17-15017


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. et Mme X... sont propriétaires à Sain-Bel, dans le département du Rhône, d'une maison d'habitation assurée depuis le 1er septembre 1998 auprès de la Mutuelle d'assurances du corps de santé français (la MACSF), en vertu d'une police multirisques habitation ; qu'à la suite d'une première série de désordres ayant affecté cet immeuble en 1989, une expertise judiciaire a été confiée à M. B..., qui a conclu qu'ils résultaient d'un tassement différentiel des f

ondations dû à une erreur de conception et d'exécution de ces fondations, et...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. et Mme X... sont propriétaires à Sain-Bel, dans le département du Rhône, d'une maison d'habitation assurée depuis le 1er septembre 1998 auprès de la Mutuelle d'assurances du corps de santé français (la MACSF), en vertu d'une police multirisques habitation ; qu'à la suite d'une première série de désordres ayant affecté cet immeuble en 1989, une expertise judiciaire a été confiée à M. B..., qui a conclu qu'ils résultaient d'un tassement différentiel des fondations dû à une erreur de conception et d'exécution de ces fondations, et a préconisé leur reprise totale avec une mise en place de micropieux ; qu'une deuxième série de désordres, dus à une canicule de faible intensité survenue en 1998, a fait l'objet d'une déclaration de sinistre auprès de la MACSF, qui a refusé de le prendre en charge au motif que M. et Mme X... n'avaient pas réalisé les travaux de soutènement préconisés par M. B... en 1990 ; que M. et Mme X... ont fait réaliser ces travaux par la société Rhône Alpes fondations, au mois de janvier 2003 ; que de nouveaux désordres sont apparus dans le courant de l'été suivant, marqué par une forte sécheresse qui a eu pour conséquence la publication, pour la commune de Sain-Bel, d'un arrêté de catastrophe naturelle en date du 11 janvier 2005 ; que M. et Mme X... ont assigné la MACSF afin d'obtenir le paiement du coût de reprise des désordres causés par l'épisode caniculaire de 2003 ; qu'une expertise a été confiée, avant dire droit, à M. C... ;

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Attendu que la MACSF fait grief à l'arrêt de dire qu'elle doit prendre en charge le sinistre dans le cadre de la garantie catastrophe naturelle du contrat d'assurance souscrit par M. et Mme X... et de la condamner en conséquence à leur verser la somme de 254 498,98 euros, sous déduction de la franchise légale de 1 520 euros, ainsi que celle de 19 913,40 euros au titre des dépenses d'investigations techniques, alors, selon le moyen, que seuls les désordres ayant eu pour cause déterminante l'intensité anormale d'un agent naturel ayant fait l'objet d'un arrêté de classement sont considérés comme les effets d'une catastrophe naturelle ; qu'en retenant que la sécheresse de l'été 2003, classée catastrophe naturelle, avait été la cause déterminante des désordres apparus sur le fonds de M. et Mme X..., tout en constatant qu'ils s'étaient manifestés lors d'épisodes de sécheresse antérieurs n'ayant pas fait l'objet d'arrêté de classement et qu'ils se reproduiraient lors de chaque épisode de sécheresse dès lors que le bâtiment était affecté d'un vice de conception, comme ne disposant pas, à l'origine, d'un complexe de fondations la mettant à l'abri des mouvements du sol, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article L. 125-1 du code des assurances ;

Mais attendu qu'après avoir exactement énoncé que l'article L. 125-1 du code des assurances n'exige pas que l'agent naturel constitue la cause exclusive des dommages, c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain que la cour d'appel a estimé, au vu des conclusions techniques circonstanciées du second expert judiciaire, qu'en dépit du vice de construction affectant les fondations du bâtiment sinistré, qui ne disposait pas à l'origine d'un complexe de fondations le mettant à l'abri des mouvements du sol, et alors que l'aggravation importante de la fissuration de ses murs et cloisons était survenue dans le mois ayant suivi l'épisode caniculaire d'une exceptionnelle intensité de l'année 2003, après que les travaux de confortement préconisés par le premier expert judiciaire avaient été réalisés par une entreprise hautement spécialisée, ces nouveaux désordres trouvaient leur cause directe et déterminante dans cet épisode de sécheresse exceptionnelle classée en catastrophe naturelle ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen, pris en ses trois dernières branches, et sur le troisième moyen, annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le deuxième moyen :

Vu l'article A. 125-1, Annexe 1, f), du code des assurances ;

Attendu, selon ce texte, que l'assureur doit verser l'indemnité due au titre de la garantie dans un délai de trois mois à compter de la date de remise par l'assuré de l'état estimatif des biens endommagés ou de la date de publication de l'arrêté interministériel constatant l'état de catastrophe naturelle lorsque celle-ci est postérieure ; qu'à défaut, et sauf cas fortuit ou de force majeure, l'indemnité due par l'assureur porte, à compter de l'expiration de ce délai, intérêts au taux de l'intérêt légal ;

Attendu que, pour fixer au 29 janvier 2007 le point de départ des intérêts au taux légal dus par la MACSF sur la somme de 254 498,98 euros qu'il la condamne à payer à M. et Mme X..., l'arrêt retient que l'évaluation du coût des travaux de remise en état nécessaires préconisés par l'expert judiciaire dans son rapport déposé le 27 février 2013 n'est pas contestée par la MACSF, qui sera par conséquent condamnée à leur payer cette somme, laquelle portera intérêts aux taux légal à compter de la demande en justice du 29 janvier 2007 valant mise en demeure ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si M. et Mme X... avaient remis un état estimatif des biens endommagés à la MACSF qui faisait valoir que le point de départ des intérêts ne pouvait être antérieur à l'expiration d'un délai de trois mois après le dépôt du rapport de l'expert judiciaire, dès lors qu'aucun état estimatif n'avait été établi antérieurement, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il fixe au 29 janvier 2007 le point de départ des intérêts au taux légal dus par la MACSF sur la somme de 254 498,98 euros qu'il la condamne à payer à M. et Mme X..., l'arrêt rendu le 5 janvier 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ;

Condamne M. et Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf mars deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par Me Le Prado  , avocat aux Conseils, pour la Mutuelle d'assurances du corps de santé français

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR dit que la Macsf doit prendre en charge le sinistre dans le cadre de la garantie catastrophe naturelle du contrat d'assurance multirisque habitation souscrit par les époux X... et de l'avoir en conséquence condamnée à leur verser la somme de 254 498,98 euros avec intérêts au taux légal capitalisés annuellement dans les conditions de l'article 1154 du code civil à compter du 29 janvier 2007, sous déduction de la franchise légale de 1 520 euros, et la somme de 19 913,40 euros au titre des dépenses d'investigations techniques ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « Il est soutenu par les époux X... :

• qu'il résulte clairement des opérations d'expertise judiciaire que tous les désordres trouvent leur origine exclusive dans l'épisode de sécheresse de l'année 2003, qui a entraîné un phénomène naturel de gonflement et de retrait du sol argileux d'une intensité anormale,
• que toutes les mesures «habituelles» de prévention avaient été prises, puisque les travaux de remise en état préconisés par le premier expert judiciaire (B...) avaient été intégralement exécutés par une entreprise hautement spécialisée avant la survenance du nouveau sinistre.

Il est répliqué par l'assureur :

• que selon les deux experts commis les désordres sont la conséquence d'une erreur de conception et de construction du bâtiment du fait de l'absence du micro pieux en terrain argileux, l'épisode de sécheresse n'ayant été qu'un facteur déclenchant,
• que la garantie catastrophe naturelle n'est donc pas acquise en l'absence de lien de causalité exclusif entre la sécheresse et la survenance des désordres.

Sur ce : Aux termes de l'article L 125 -1 du code des assurances, qui impose à l'assureur de dommages aux biens situés en France de garantir l'assuré contre les effets des catastrophes naturelles, «sont considérés comme les effets des catastrophes naturelles les dommages matériels directs non assurables ayant pour cause déterminante l'intensité anormale d'un agent naturel, lorsque les mesures habituelles à prendre pour prévenir ces dommages n'ont pu empêcher leur survenance ou n'ont pu être prises» ; il résulte des informations recueillies par l'experte judiciaire  C..., qui a été désigné par jugement du 10 mai 2010 après échec de la première mesure d'instruction technique confiée à Madame Isabelle D...:

• qu'à la suite de la première série de fissurations survenue en 1989 une expertise a été confiée à Monsieur B... qui a estimé le 29 juin 1990 que les désordres étaient dus à un tassement de la maison en raison d'une mauvaise conception des fondations et qui a préconisé de fonder l'ensemble des murs porteurs sur des micropieux,
• que les maîtres d'ouvrage ont été indemnisés par les constructeurs et leur assureur, mais n'ont pas immédiatement entrepris les travaux de confortement préconisés par l'expert sur les conseils d'une entreprise de maçonnerie qui avait estimé que les tassements étaient stabilisés,
• que de nouveaux désordres sont survenus en "1998, qui n'ont pas toutefois été pris en charge par l'assureur multirisque habitation à défaut de réalisation des micro pieux ; que c'est dans ce contexte que les époux X... ont fait réaliser au cours des mois de décembre 2002 et de janvier 2003 par l'entreprise Rhône Alpes Fondations les travaux préconisés par l'expert judiciaire B...,
• que de nouveaux désordres importants dans les cloisons sont toutefois survenus au cours du mois de septembre 2003 à la suite de la canicule de l'été 2003, qui a fait l'objet le 11 janvier 2005 d'un arrêté de catastrophe naturelle classant la commune de SAIN BEL en zone sinistrée,
• qu'une aggravation des désordres existants et de nouveaux désordres sont apparus en 2005 (désolidarisation du mur pignon de la charpente du garage, fissures dans le sol du garage et aggravation des fissures en façade et dans les cloisons).

Après avoir entrepris des investigations géotechniques confiées à un maître d'oeuvre spécialisé, lequel a considéré que compte tenu de la nature du sol argileux très sensible aux phénomènes de gonflement et de retrait la solution de traitement de sol par injection, de résine n'était pas envisageable, l'expert judiciaire C..., en accord avec l'expert de la Macsf  , a considéré que le remède le plus adapté consistait en la création d'une dalle portée sur longrines et micropieux dans la partie habitation.

Analysant la cause des désordres survenus à la suite de l'épisode caniculaire de 2003, l'expert C... a notamment constaté et estimé :

• qu'il résultait clairement et sans ambiguïté de l'ensemble des investigations que les désordres sont liés à la nature du sol argileux très sensible aux phénomènes de gonflement et de retrait,
• que l'expert B..., qui n'a pas disposé de données géotechniques sur le degré de sensibilité du sol aux variations hydriques, a considéré que les premiers désordres étaient dus au tassement différentiel des fondations sous les murs porteurs, ce qui l'a amené à ne préconiser la pose de micropieux que sous les semelles,
• que la non prise en compte des caractéristiques des argiles est à l'origine des désordres constatés à chaque sécheresse,
• que la canicule de l'été 2003 a causé les désordres constatés en septembre 2003, puisque le dallage était flottant et qu'aucune reprise en sous oeuvre n'avait été réalisée sur cette partie de l'ouvrage.

Répondant aux dires des parties l'expert a enfin constaté qu'aucun des experts présents, pas même celui de la Macsf   , n'a exprimé à l'origine des réserves quant à la solution technique préconisée par l'expert B... ; en conclusion l'expert C... a considéré que la canicule de l'été 2003 a causé les désordres constatés à défaut de reprise en sous oeuvre du dallage flottant, que si la reprise de cette partie de l'ouvrage avait été réalisée après la première expertise judiciaire, tous les travaux intérieurs et extérieurs décrits par l'expert B... auraient dû être déjà réalisés, ce dont il résulte que toutes les réparations des désordres doivent être imputées à la catastrophe naturelle de l'été 2003. ; en considération de ces conclusions techniques circonstanciées, et nonobstant le fait que la construction implantée en terrain argileux est affectée d'un vice de conception, comme ne disposant pas à l'origine d'un complexe de fondations la mettant à l'abri des mouvements du sol, les nouveaux désordres survenus en 2003 trouvent leur cause directe et déterminante dans l'épisode de sécheresse exceptionnelle de l'année 2003 classée en catastrophe naturelle, au sens de l'article L.125-1 susvisé, qui n'exige pas que l'agent naturel constitue la cause exclusive des dommages ; à cet effet la cour observe qu'en dépit du vice de construction affectant les fondations du bâtiment sinistré, la sécheresse exceptionnelle de 2003 doit être considérée comme la cause prépondérante des nouveaux désordres, alors que l'aggravation importante de la fissuration des murs et des cloisons est survenue dans le mois qui a suivi un épisode caniculaire d'une exceptionnelle intensité et après que les travaux de confortement préconisés par le premier expert judiciaire ait été réalisés par une entreprise hautement spécialisée, il ne peut en outre être sérieusement soutenu que «les mesures habituelles» pour prévenir les dommages n'ont pas été prises, dès lors que c'est sur la base de conclusions expertales, dont la pertinence technique était admise par tous, et sur la préconisation de l'assureur lui.-même, qui avait refusé sa garantie au titre d'une deuxième série de désordres survenue en 1998, que les maîtres d'ouvrage ont fait réaliser à la fin de l'année 2002 et au tout début de l'année 2003 les travaux de renforcement des fondations par pose de micropieux sous les semelles, dont rien ne laissait présumer à l'époque qu'ils se révéleraient insuffisants en raison de l'extrême sensibilité du sol argileux aux phénomènes de gonflement et de retrait, qui n'a été révélée qu'à la faveur d'études géotechniques poussées (des échantillons de sol ont dû être prélevés et étudiés en laboratoire) ; par voie de réformation du jugement déféré, la Macsf sera par conséquent condamnée à prendre en charge les conséquences dommageables du sinistre en application de la garantie catastrophe naturelle du contrat d'assurance multirisque habitation souscrit par les époux X... ».

1) ALORS QUE seuls les désordres ayant eu pour cause déterminante l'intensité anormale d'un agent naturel ayant fait l'objet d'un arrêté de classement sont considérés comme les effets d'une catastrophe naturelle ; qu'en retenant que la sécheresse de l'été 2003, classée catastrophe naturelle, avait été la cause déterminante des désordres apparus sur le fonds des époux X..., tout en constant qu'ils s'étaient manifestés lors d'épisodes de sécheresse antérieurs n'ayant pas fait l'objet d'arrêté de classement et qu'ils se reproduiraient lors de chaque épisode de sécheresse dès lors que le bâtiment était affecté d'un vice de conception, comme ne disposant pas, à l'origine, d'un complexe de fondations la mettant à l'abri des mouvements du sol, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article L.125-1 du code des assurances.

2) ALORS subsidiairement QUE ne sont pas les effets d'une catastrophe naturelle les dommages matériels directs ayant pour cause déterminante l'intensité anormale d'un agent naturel, dès lors que n'ont pas été prises, alors qu'elles pouvaient l'être, les mesures habituelles pour les prévenir ; qu'en retenant que toutes les mesures habituelles pour prévenir les désordres survenus sur le fonds des époux X... lors de la sécheresse de l'été 2003 n'avaient pu être prises, après avoir constaté qu'ils avaient attendu décembre 2002 et janvier 2003 pour réaliser les travaux de consolidation par micropieux préconisés dès 1990 par le premier expert désigné lors de la sécheresse de 1989, que de nouveaux désordres étaient survenus à la suite de la sécheresse de 1998, et que ces travaux étaient également préconisés par le second expert désigné après les désordres survenus en 2003, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations en violation de l'article L. 125-1 du code des assurances ;

3°) ALORS enfin QU'en énonçant, pour dire que les époux X... avaient pris toutes les mesures habituelles pour prévenir les désordres causés par la sécheresse de l'été 2003, qu'ils avaient fait réaliser, en décembre 2002 et janvier 2003, des travaux de renforcement des fondations dont rien ne laisser présumer qu'ils se révéleraient insuffisants dès lors que « l'extrême sensibilité du sol argileux aux phénomènes de gonflement et de retrait n'avait été révélée qu'à la faveur d'études géotechniques poussées » réalisées par l'expert C... en 2013, cependant que l'expert B... avait, dès son rapport de 1990, relevé qu'« à partir du niveau -0,40 env. ces fondations se trouvent situées dans une couche d'agrile humide, donc molle et que ces fondations dans une couche d'argile humide et donc mole expliquent les tassements différentiels auxquelles elles ont été soumises », la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de ce dernier rapport en violation de l'article 1134 du code civil dans sa version antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.

4) ALORS en tout état de cause et subsidiairement QUE ne sont pas les effets d'une catastrophe naturelle les dommages matériels directs ayant pour cause déterminante l'intensité anormale d'un agent naturel, dès lors que n'ont pas été prises, alors qu'elles pouvaient l'être, les mesures habituelles pour les prévenir ; qu'en retenant, pour dire que les époux X... avaient entrepris toutes les mesures habituelles pour prévenir les désordres causés par la sécheresse de l'été 2003, que c'est sur la base de conclusions expertales de 1989 de M. B... qu'ils avaient finalement réalisé, fin 2002 et début 2003, des travaux de renforcement des fondations par pose de micropieux, et que rien ne leur permettait alors de prévoir qu'ils se révéleraient insuffisants en raison de l'extrême sensibilité des sols argileux aux phénomènes de retrait qui n'avait été révélée qu'à la faveur d'études géotechniques poussées menées par M. C... en 2013, mais sans rechercher, comme elle y était invitée, si cette extrême sensibilité n'avait pas déjà été soulignée par M. B... en 1989 et si les époux X... avaient bien respecté toutes les préconisations faites par ce premier expert, la cour d'appel privé sa décision de base égale au regard de l'article L.125-1 du code des assurances.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné la Macsf à payer aux époux X... la somme de 254 498,98 euros avec intérêts aux taux légal capitalisés annuellement dans les conditions de l'article 1154 du code civil à compter du 29 janvier 2007, sous déduction de la franchise légale de 1520 euros

AUX MOTIFS QUE « analysant les divers devis soumis à son appréciation, l'expert judicaire a évalué le coût des travaux de remise en état nécessaires y compris les honoraires de maîtrise d'oeuvre et de relogement des maîtres d'ouvrage pendant la durée des travaux à somme globale de 263 775,44 euros TTC ; qu'il a par ailleurs vérifié les dépenses engagées par les époux X... au cours des opérations d'expertise pour les besoins de l'étude géotechnique qu'il a chiffrées à la somme de 19 913,40 euros TTC ; que cette évaluation n'est pas contestée par la Macsf qui sera par conséquent condamnée à payer aux époux X... les sommes réclamées de 254 498, 98 euros et de 19 913,40 euros ; que la condamnation au paiement de la somme de 254 498, 98 euros portera intérêts aux taux légal avec capitalisation annuelle dans les conditions de l'article 1154 du cde civil à compter de la demande en justice valant mise en demeure par assignation du 29 janvier 2007 ».

ALORS QUE l'assureur doit verser l'indemnité due au titre de la garantie dans un délai de trois mois à compter de la date de remise par l'assuré de l'état estimatif des biens endommagés ou de la date de publication de l'arrêté interministériel constatant l'état de catastrophe naturelle lorsque celle-ci est postérieure ; qu'à défaut, et sauf cas fortuit ou de force majeure, l'indemnité due par l'assureur porte, à compter de l'expiration de ce délai, intérêt au taux légal ; qu'en fixant le point de départ des intérêts légaux au 29 janvier 2007, date de la demande en justice des époux X..., sans rechercher, comme elle y était invitée, si à cette date, ils avaient remis à la Macsf un état estimatif de leurs biens endommagés, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.125-2 et A. 125-1 - Annexe 1 - du Code des assurances.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
, subsidiaire

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté la Macsf de son recours en garantie à l'encontre de la société Rhône Alpes Fondations,

AUX MOTIFS QUE « La compagnie d'assurances Macsf recherche à titre subsidiaire la responsabilité décennale de la société X... en faisant notamment valoir:

• que les désordres qui portent atteinte à la solidité de l'ouvrage et le rendent impropre à sa destination constituent des dommages de nature décennale, • que contrairement à ce qui est soutenu les désordres n'affectent pas seulement le dallage flottant, alors que les deux experts judiciaires ont conclu à l'existence de défauts intrinsèques à la construction,
• que le constructeur est également responsable de plein droit du vice du sol en application de l'article 1792 du code civil,
• que la nature particulière du sol imposait à la société X... de prendre en compte ce facteur,
• qu'il n'existe pas en l'espèce de cause étrangère exonératoire, puisque la constatation de l'état de catastrophe naturelle n'est pas en soi constitutive de la cause étrangère qui implique l'existence d'un événement imprévisible et irrésistible.

La société Rhône Alpes Fondations réplique :

• qu'elle est intervenue en janvier 2003 pour réaliser les micros pieux sous les fondations selon les préconisations du premier expert judiciaire,
• que ses travaux, dont la qualité n'est pas critiquée, n'est pas la cause des nouveaux désordres qui proviennent du dallage flottant de la maison,
• qu'elle n'a donc pas manqué à son obligation de résultat, "' qu'elle n'a pas plus manqué à son devoir de conseil alors qu'il n'est pas techniquement établi qu'une intervention sur le dallage aurait permis d'éviter de façon certaine la survenance du sinistre.

Que, sur ce, la société X... a été chargée par les époux X... de réaliser les travaux de renforcement des fondations préconisés par l'expert judiciaire B... consistant en la pose de micro pieux sous l'ensemble des murs porteurs de la construction ; qu'en raison de leur nature, de leurs caractéristiques, de leur importance (la facture de la société s'élève à la somme de 26 032, 13 €) et du fait qu'ils sont indissociables de la structure de la construction, les travaux litigieux doivent être regardés en eux-mêmes comme un au sens de l'article 1792 du code civil, ce qui au demeurant n'est pas contesté ; que s'il résulte des investigations techniques menées par l'expert judiciaire C... que les nouveaux désordres survenus en septembre 2003 sont dus à l'absence de reprise en sous oeuvre du dallage flottant, et non pas à une exécution défectueuse des travaux de pose des micropieux sous les semelles de fondation, la société Rhône Alpes Fondations a néanmoins accepté de sécuriser la construction affectée par les phénomènes de gonflement et de retrait du sol argileux et est susceptible à ce titre de devoir répondre des conséquences dommageables de l'insuffisance du remède appliqué dans le cadre de la garantie décennale de plein droit qu'elle doit aux maîtres d'ouvrage ; que l'impropriété à la destination et l'atteinte à la solidité de l'ouvrage doivent, en effet, être appréciées au niveau de l'existant, puisque les travaux litigieux de renforcement des fondations devaient permettre d'assurer la stabilité du bâtiment ; bien que la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle ne soit pas en soi constitutive de la cause étrangère exonératoire de la responsabilité des constructeurs, il résulte cependant des circonstances propres à l'espèce que l'aggravation importante des désordres quelques mois seulement après l'exécution des travaux litigieux trouve son origine dans un événement présentant les caractères d'irrésistibilité et d'extériorité de la force majeure, alors qu'il est constant que la canicule de l'été 2003 a constitué un phénomène météorologique d'une exceptionnelle rareté, durée et intensité, que la société Rhône Alpes Fondations s'est strictement conformée aux préconisations du premier expert judiciaire dont les conclusions étaient admises par tous, y compris par l'expert de l'assureur des maîtres d'ouvrage, et que l'extrême sensibilité du sol argileux aux phénomènes de gonflement et de retrait n'a été révélée que bien postérieurement dans le cadre de la seconde expertise judiciaire après étude en laboratoire d'échantillons de sol ; que la compagnie Macsf sera par conséquent déboutée de son recours formé à l'encontre de la société Rhône Alpes Fondations ».

ALORS QUE pour être constitutif d'un cas de force majeure, l'évènement doit être extérieur, irrésistible et imprévisible ; qu'en jugeant, pour écarter l'action en garantie de la Macsf contre la société Rhône alpes Fondations, que la sécheresse de 2003 à l'origine des désordres survenus après les

travaux entrepris par cette société constituait un cas de force majeure dès lors qu'elle présentait les caractères d'extériorité et d'irrésistibilité, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si cet événement présentait un caractère imprévisible, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 17-15017
Date de la décision : 29/03/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 05 janvier 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 29 mar. 2018, pourvoi n°17-15017


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Alain Bénabent , SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.15017
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