La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/03/2018 | FRANCE | N°16-26718

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 mars 2018, 16-26718


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé en avril 1986 par la société Aubry Silo, aux droits de laquelle vient la société Presta Silo, en qualité de conducteur routier ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale le 25 octobre 2011 ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal du salarié, pris en ses première, troisième, quatrième, cinquième et septième branches :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande tendant à voir délivrer des photocopie

s des disques chronotachygraphes de 2006 et de 2007 ainsi que de ses demandes de rappel ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé en avril 1986 par la société Aubry Silo, aux droits de laquelle vient la société Presta Silo, en qualité de conducteur routier ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale le 25 octobre 2011 ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal du salarié, pris en ses première, troisième, quatrième, cinquième et septième branches :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande tendant à voir délivrer des photocopies des disques chronotachygraphes de 2006 et de 2007 ainsi que de ses demandes de rappel de salaire sur heures supplémentaires pour la période du 5 janvier 2007 à 2013, d'indemnité pour perte de repos compensateurs concernant les années 2009, 2011 et 2012, et de limiter à une somme l'indemnité pour perte de repos compensateurs pour 2010 et 2013, alors, selon le moyen :

1°/ que selon l'article 14, paragraphe 2, du règlement CEE 3821/85, « l'entreprise conserve, en bon ordre, les feuilles d'enregistrement pendant au moins un an après leur utilisation et en remet une copie aux conducteurs qui en font la demande. Les feuilles sont présentées ou remises à la demande des agents chargés du contrôle » ; que selon l'article 26, paragraphe 3, du règlement CE n° 561/2006 du 15 mars 2006, « L'entreprise conserve, par ordre chronologique et sous une forme lisible, les feuilles d'enregistrement, ainsi que les sorties imprimées chaque fois que de telles sorties imprimées sont produites en application de l'article 15, paragraphe 1, pendant au moins un an après leur utilisation et en remet une copie aux conducteurs concernés qui en font la demande. L'entreprise remet également une copie des données téléchargées depuis les cartes de conducteur aux conducteurs concernés qui en font la demande ainsi que les versions imprimées de ces copies » ; que selon l'article 3, paragraphe 3, alinéas 2 et 3, du décret n° 96-1082 du 12 décembre 1996, « le conducteur a le droit d'obtenir communication, sans frais, et en bon ordre, des feuilles d'enregistrement de l'appareil de contrôle défini par le règlement CEE 3821/85 le concernant, et des documents visés aux paragraphes 2 et 6 (2e alinéa) du présent article 10, ayant servi de base à l'élaboration de ses bulletins de paie ; l'entreprise remet, sans frais, et en bon ordre, une copie de ces documents, dans un format identique à celui des originaux, aux conducteurs intéressés qui en font la demande » ; qu'il résulte de la combinaison de ces textes et des articles 2277 ancien, devenu 2224 du code civil, L. 212-1-1 et L. 143-14 anciens, devenus L. 3171-4 et L. 3245-1 (ancien) du code du travail, que l'employeur doit être en mesure de produire les feuilles d'enregistrement, dans la limite de la prescription quinquennale, lorsqu'il existe une contestation sur le nombre d'heures effectuées par le salarié ; qu'en se bornant à énoncer, pour débouter la salarié de sa demande tendant à voir ordonner à son profit la délivrance des photocopies des disques chronotachygraphes de 2006 et de 2007, qu'il y a pas lieu d'ordonner la production de pièces complémentaires, la cour d'appel a violé les textes susvisés, ensemble l'article 11 du code de la procédure civile ;

2°/ que tenus, à peine de nullité, de motiver leur décision, les juges doivent préciser et analyser, au moins succinctement, les éléments de preuve sur lesquels ils se fondent ; qu'en affirmant qu'il est versé aux débats le compte rendu de la réunion de la délégation unique du personnel du 7 février 2000, au cours de laquelle a été constitué le comité d'entreprise et où l'employeur a recueilli l'avis de la délégation concernant le décompte des heures supplémentaires au mois pour le personnel roulant, quand ledit compte rendu, ainsi qu'il avait été soutenu par le salarié, n'identifiait pas la filiale du groupe de sociétés concernée, la cour d'appel, qui n'a ni précisé ni analysé, au moins sommairement, les éléments sur lesquels elle s'est fondée pour procéder à une telle affirmation, n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

3°/ que les décisions de justice doivent être motivées et que les juges du fond doivent examiner les moyens des parties et y répondre ; que, dans ses écritures délaissées, le salarié avait soutenu que l'avis des institutions représentatives du personnel n'avait pas été recueilli régulièrement ; qu'en s'abstenant de répondre à ce chef des conclusions, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

4°/ que les juges doivent statuer conformément aux règles de droit applicables ; qu'éléments de preuve à l'appui, le salarié avait soutenu avoir effectué des heures de travail au-delà de son forfait heures ; qu'en retenant, pour le débouter de sa demande en paiement d'un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires de 2008 à 2013, qu'elle avait la « conviction » que le salarié avait été rempli de ses droits, la cour d'appel a violé l'article 12 du code de procédure civile ;

5°/ qu'en retenant qu'à partir de l'année 2007, s'applique le décret n° 2007-13 du 4 janvier 2007 selon lequel le salarié requiert un jour de repos compensateurs pour une durée de travail trimestrielle du travail comprise entre 600 et 638 heures, 1,5 jours de repos compensateurs pour une durée trimestrielle du travail comprise entre 639 et 667 heures et 2,5 jours de repos compensateurs pour une durée trimestrielle du travail supérieure à 667 heures, quand les institutions représentatives du personnel n'avaient émis aucun avis sur un tel décompte trimestriel de la durée du travail, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 4 et 5 du décret n° 2007-13 du 4 janvier 2007 ;

Mais attendu qu'ayant relevé que la délégation unique du personnel avait émis, le 7 février 2000, un avis majoritairement favorable à la mensualisation du calcul de la durée du travail pour le personnel roulant, la cour d'appel, qui n'avait pas à rechercher si l'employeur avait réitéré cette consultation postérieurement à l'entrée en vigueur du décret n° 2007-13 du 4 janvier 2007 qui ne lui en faisait pas l'obligation, a légalement justifié sa décision ; que le moyen, qui ne tend pour le surplus qu'à remettre en cause l'appréciation des juges du fond qui, au vu des décomptes produits respectivement par les parties, et sans qu'il y ait lieu d'ordonner la production de pièces complémentaires, ont estimé que le salarié avait été rempli de ses droits, n'est pas fondé ;

Sur le second moyen du pourvoi principal du salarié :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le premier moyen du pourvoi principal du salarié, pris en sa deuxième branche, en ce qu'il vise la demande au titre des heures supplémentaires et des repos compensateurs pour la période antérieure au 5 janvier 2007 :

Vu l'article 4 du décret 83-40 du 26 janvier 1983 dans sa rédaction issue du décret 2009-19 du 27 juin 2000, en ce qu'il vise la demande au titre des heures supplémentaires et des repos compensateurs pour la période postérieure au 5 janvier 2007 ;

Attendu que pour débouter le salarié de sa demande en paiement d'un rappel de salaire sur heures supplémentaires pour la période antérieure au 5 janvier 2007, l'arrêt retient qu'est versé aux débats le compte-rendu de la réunion de la délégation unique du personnel du 7 février 2000, au cours de laquelle a été constitué le comité d'entreprise et où l'employeur a recueilli l'avis de la délégation concernant le décompte des heures supplémentaires au mois pour le personnel roulant, laquelle a émis un avis majoritairement favorable à la mensualisation du calcul de la durée du travail des conducteurs poids-lourds ;

Qu'en se déterminant ainsi, alors qu'il ne résultait pas de ses constatations que l'employeur justifiait de l'autorisation de l'inspecteur du travail de calculer la durée hebdomadaire de travail sur une durée supérieure à la semaine pour la période en litige, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et attendu qu'en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation sur la deuxième branche du moyen entraîne, par voie de conséquence, la censure de l'arrêt du chef des repos compensateurs non pris pendant la même période ;

Et sur le moyen unique du pourvoi incident de l'employeur :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu qu'après avoir retenu dans sa motivation que le salarié, qui ne justifie pas d'un préjudice distinct, non réparé par l'octroi des intérêts légaux de sa créance sera débouté de sa réclamation, la cour d'appel, dans son dispositif, confirme le jugement notamment en ce qu'il a reconnu au salarié le droit à réparation pour préjudice financier ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui a entaché sa décision d'une contradiction entre les motifs et le dispositif, a violé le texte susvisé ;

Et vu l'article 627 du code de procédure civile, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du même code ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. X... de sa demande en paiement d'un rappel de salaire sur heures supplémentaires pour la période antérieure au 5 janvier 2007 ainsi que de sa demande d'indemnité pour perte de repos compensateurs pour la même période et en ce qu'il reconnaît au salarié le droit à réparation pour préjudice financier, l'arrêt rendu le 29 septembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi de ce dernier chef ;

Déboute le salarié de sa demande en réparation pour préjudice financier ;

Renvoie la cause et les parties devant la cour d'appel de Besançon pour qu'il soit statuer sur les deux autres points restant en litige (rappel de salaire sur heures supplémentaires et indemnité pour perte de repos compensateur pour la période antérieure au 5 janvier 2007) ;

Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit mars deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour M. X..., demandeur au pourvoi principal

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté le salarié de sa demande tendant à voir ordonner à son profit la délivrance des photocopies des disques chronotachygraphes de 2006 et de 2007 et à voir condamner l'employeur à lui payer un rappel de salaire sur heures supplémentaires de 2008 à 2013 et une indemnité pour perte de repos compensateurs pour 2008 et 2009 et d'AVOIR limité la condamnation de la société Presta Silo à payer au salarié, à titre d'indemnité pour perte de repos compensateurs pour 2010 à 2013 et de congés payés afférents, les sommes de 687,59 € et de 68,75 €.

AUX MOTIFS QUE selon l'article L. 3171-4 du code du travail, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, que le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié pour étayer sa demande, après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; qu'il résulte de ce texte que si la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant au salarié, pour étayer sa demande, de fournir préalablement au juge des éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur d'y répondre ; que M. X... formule à hauteur d'appel, ce qu'il s'était abstenu de faire en première instance, une demande en paiement d'heures supplémentaires pour la période de 2008 à 2013 en expliquant que s'il bénéficie d'un salaire forfaitaire pour 199,33 heures par mois, soit 46 heures hebdomadaires, il est fondé à prétendre au paiement des heures supplémentaires effectuées en sus du forfait convenu et qu'en l'absence d'avis des institutions représentatives du personnel, la durée de travail doit se calculer sur une semaine conformément à l'article 4 du décret du 26 janvier 1983 et non au mois comme l'a fait la société Presta Silo ; mais attendu qu'est versé aux débats le compte rendu de la réunion de la délégation unique du personnel du 7 février 2000, au cours de laquelle a été constitué le comité d'entreprise et où l'employeur a recueilli l'avis de la délégation concernant le décompte des heures supplémentaires au mois pour le personnel roulant, laquelle a émis un avis majoritairement favorable à la mensualisation du calcul de la durée du travail des conducteurs poids-lourds ; qu'au vu des décomptes produits respectivement par les parties, et sans qu'il y ait lieu d'ordonner la production de pièces complémentaires, la cour a la conviction que M. X... a été rempli de ses droits et qu'il y a lieu de le débouter de sa réclamation ; que s'agissant des repos compensateurs, pour l'année 2006, le décret du 22 décembre 2003 s'applique en raison de l'annulation, qu'en application du décret n° 2007-13 du 4 janvier 2007, le salarié acquiert un jour de repos compensateurs pour une durée trimestrielle de travail comprise entre 600 et 638 heures, 1,5 jours de repos compensateurs pour une durée trimestrielle du travail comprise entre 639 et 667 heures et 2,5 jours de repos compensateurs pour une durée trimestrielle du travail supérieure à 667 heures ; que le calcul doit être effectué, comme pour les heures supplémentaires, selon un décompte mensuel, sans intégration des jours fériés chômés et congés payés et sur une base trimestrielle ; qu'au vu des justificatifs produits et des repos compensateurs pris, il reste dû à M. X... pour les années 2010 à 2013, une somme de 687,59 €, outre 68,75 € de congés payés afférents.

1°/ ALORS, d'abord, QUE selon l'article 14, paragraphe 2, du règlement CEE 3821/85, « l'entreprise conserve, en bon ordre, les feuilles d'enregistrement pendant au moins un an après leur utilisation et en remet une copie aux conducteurs qui en font la demande. Les feuilles sont présentées ou remises à la demande des agents chargés du contrôle » ; que selon l'article 26, paragraphe 3, du règlement CE n° 561/ 2006 du 15 mars 2006, « L'entreprise conserve, par ordre chronologique et sous une forme lisible, les feuilles d'enregistrement, ainsi que les sorties imprimées chaque fois que de telles sorties imprimées sont produites en application de l'article 15, paragraphe 1, pendant au moins un an après leur utilisation et en remet une copie aux conducteurs concernés qui en font la demande. L'entreprise remet également une copie des données téléchargées depuis les cartes de conducteur aux conducteurs concernés qui en font la demande ainsi que les versions imprimées de ces copies » ; que selon l'article 3, paragraphe 3, alinéas 2 et 3, du décret 96-1082 du 12 décembre 1996, « le conducteur a le droit d'obtenir communication, sans frais, et en bon ordre, des feuilles d'enregistrement de l'appareil de contrôle défini par le règlement CEE 3821/85 le concernant, et des documents visés aux paragraphes 2 et 6 (2e alinéa) du présent article 10, ayant servi de base à l'élaboration de ses bulletins de paie ; l'entreprise remet, sans frais, et en bon ordre, une copie de ces documents, dans un format identique à celui des originaux, aux conducteurs intéressés qui en font la demande » ; qu'il résulte de la combinaison de ces textes et des articles 2277 ancien, devenu 2224 du code civil, L. 212-1-1 et L. 143-14 anciens, devenus L. 3171-4 et L. 3245-1 (ancien) du code du travail, que l'employeur doit être en mesure de produire les feuilles d'enregistrement, dans la limite de la prescription quinquennale, lorsqu'il existe une contestation sur le nombre d'heures effectuées par le salarié ; qu'en se bornant à énoncer, pour débouter la salarié de sa demande tendant à voir ordonner à son profit la délivrance des photocopies des disques chronotachygraphes de 2006 et de 2007, qu'il y a pas lieu d'ordonner la production de pièces complémentaires, la cour d'appel a violé les textes susvisés, ensemble l'article 11 du code de la procédure civile.

2°/ ALORS, ensuite, QUE selon l'article 4 § 3 du décret n° 83-40 du 26 janvier 1983 dans ses versions issues de l'article 2 du décret n° 2000-69 du 27 janvier 2000 et de l'article 2 du décret n° 2007-13 du 4 janvier 2007 successivement applicables au litige, le calcul de la durée hebdomadaire de travail sur une durée supérieure à la semaine requiert soit la conclusion d'un accord collectif, soit l'avis du comité d'entreprise ou à défaut des délégués du personnel, accompagné dans la version issue du décret du 27 janvier 2000 de l'autorisation de l'inspecteur du travail des transports territorialement compétent ; que, pour débouter le salarié de sa demande en paiement d'un rappel de salaire sur heures supplémentaires de 2008 à 2013, l'arrêt attaqué retient qu'il est versé aux débats le compte rendu de la réunion de la délégation unique du personnel du 7 février 2000, au cours de laquelle a été constitué le comité d'entreprise et où l'employeur a recueilli l'avis de la délégation concernant le décompte des heures supplémentaires au mois pour le personnel roulant, laquelle a émis un avis majoritairement favorable à la mensualisation du calcul de la durée du travail des conducteurs poids-lourds ; qu'en statuant ainsi, sans constater que l'employeur avait justifié, pour la période allant de janvier 2000 au 5 janvier 2007, des raisons techniques d'exploitation rendant impossible l'organisation du travail sur une semaine et de l'autorisation de l'inspecteur du travail de calculer la durée hebdomadaire du travail sur une durée supérieure à la semaine, d'une part, que l'employeur avait provoqué, postérieurement au 5 janvier 2007, l'avis du comité d'entreprise ou des délégués du personnel, d'autre part, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 4 § 3 du décret 83-40 du 26 janvier 1983 dans ses versions applicables au litige, ensemble au regard de l'article 2.1.1 de l'accord « salaires personnel roulant : grands routiers ou longue distance » du 23 avril 2002 et des articles L. 3121-22 et L. 3171-4 du code du travail.

3°/ ALORS QUE tenus, à peine de nullité, de motiver leur décision, les juges doivent préciser et analyser, au moins succinctement, les éléments de preuve sur lesquels ils se fondent ; qu'en affirmant qu'il est versé aux débats le compte rendu de la réunion de la délégation unique du personnel du 7 février 2000, au cours de laquelle a été constitué le comité d'entreprise et où l'employeur a recueilli l'avis de la délégation concernant le décompte des heures supplémentaires au mois pour le personnel roulant, quand ledit compte rendu, ainsi qu'il avait été soutenu par le salarié, n'identifiait pas la filiale du groupe de sociétés concernée, la cour d'appel, qui n'a ni précisé ni analysé, au moins sommairement, les éléments sur lesquels elle s'est fondée pour procéder à une telle affirmation, n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile.

4°/ ALORS, en tout cas, QUE les décisions de justice doivent être motivées et que les juges du fond doivent examiner les moyens des parties et y répondre ; que dans ses écritures délaissées, le salarié avait soutenu que l'avis des institutions représentatives du personnel n'avait pas été recueilli régulièrement ; qu'en s'abstenant de répondre à ce chef des conclusions, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile.

5°/ ALORS QUE les juges doivent statuer conformément aux règles de droit applicables ; qu'éléments de preuve à l'appui, le salarié avait soutenu avoir effectué des heures de travail au-delà de son forfait heures ; qu'en retenant, pour le débouter de sa demande en paiement d'un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires de 2008 à 2013, qu'elle avait la « conviction » que le salarié avait été rempli de ses droits, la cour d'appel a violé l'article 12 du code de procédure civile.

6°/ ALORS QUE la cassation à intervenir sur la deuxième et/ou troisième et/ou quatrième et/ou cinquième branche(s) du moyen entraînera, par voie de conséquence, la censure de l'arrêt du chef des repos compensateurs non pris, en application de l'article 624 du code de procédure civile.

7°/ ALORS, en toute hypothèse, QU'en retenant qu'à partir de l'année 2007, s'applique le décret n° 2007-13 du 4 janvier 2007 selon lequel le salarié requiert un jour de repos compensateurs pour une durée de travail trimestrielle du travail comprise entre 600 et 638 heures, 1,5 jours de repos compensateurs pour une durée trimestrielle du travail comprise entre 639 et 667 heures et 2,5 jours de repos compensateurs pour une durée trimestrielle du travail supérieure à 667 heures, quand les institutions représentatives du personnel n'avaient émis aucun avis sur un tel décompte trimestriel de la durée du travail, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 4 et 5 du décret n° 2007-13 du 4 janvier 2007.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté le salarié de sa demande en paiement de rappels de primes de 13e mois, de primes de section et de primes de lavage pour la période de 2006 à 2013.

AUX MOTIFS QUE M. X... fait valoir qu'il bénéficiait au sein de la société Aubry d'une prime de 13ème mois versée en deux fois, pour partie au mois de juin et le reste au mois de décembre et que lors de son transfert à la société Presta Silo, en 2000, cette prime n'a pas été maintenue ; qu'il produit les bulletins de salaire des mois de juin et décembre 1998 portant la mention du versement d'une gratification en deux fractions ; que la note d'information adressée à l'ensemble du personnel Aubry transféré à la société Charles André précise que tous les contrats de travail des personnels concernés subsisteront avec le nouvel employeur et se poursuivront dans les mêmes conditions qu'avant le transfert, avec conservation de l'ancienneté et de tous les éléments de rémunération, dont le droit à 13ème mois ; que lors de la réunion extraordinaire du comité d'entreprise de la société Trans Service du 25 février 2000, la direction a dénoncé les usages afférents à la rémunération des salariés « ex-Aubry » ; que les salariés en ont été informés individuellement et que le 23 juillet 2000, M. X... a signé un document d'adhésion aux éléments de rémunération des conducteurs pratiqués par la société Trans Service, où figurent les éléments fixes de sa rémunération ne comprenant pas la prime de 13ème mois, mais une clause de sauvegarde lui garantissant le niveau de rémunération dont il bénéficiait au sein la société Aubry, et qui n'a pas dénoncé ces conditions avant l'expiration du délai de réflexion de quinze jours qui lui avaient été imparti ; qu'ainsi, lors du transfert du contrat de travail du salarié de la société Trans Service vers la société Presta Silo, l'indemnité de 13ème mois avait déjà été supprimée et que l'intéressé ne peut prétendre à aucun rappel à ce titre ; que le jugement sera infirmé en ce qu'il a fait droit à sa réclamation.

ET AUX MOTIFS QUE M. X... fonde ses demandes sur la même argumentation que celle développée au titre du rappel de prime de 13ème mois en invoquant la structure de la rémunération qu'il percevait au sein de la société Aubry qui aurait dû être transférée à la société Presta Silo ; que pour les mêmes motifs que ceux développés ci-dessus, le salarié ne peut prétendre au paiement de ces primes qui ne faisaient plus partie de sa rémunération lors de son transfert au sein de la société Presta Silo ; qu'au demeurant il y a lieu de relever que la société Presta Silo a mis en place un système de primes de lavage de citerne, intégré à la clause de sauvegarde jusqu'en 2010, puis payée sous l'intitulé « primes » ou « travaux annexes », de sorte que l'intéressé a été rempli de ses droits ; que le jugement sera également infirmé sur ce point.

1°/ ALORS QUE tenus, à peine de nullité, de motiver leur décision, les juges doivent préciser et analyser, au moins succinctement, les éléments de preuve sur lesquels ils se fondent ; que la cour d'appel, qui n'a ni précisé ni analysé, au moins sommairement, les éléments sur lesquels elle s'est fondée pour affirmer que les salariés ont été informés individuellement de la dénonciation des usages afférents à la rémunération des salariés « ex-Aubry », n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile.

2°/ ALORS QUE la dénonciation par l'employeur d'un usage doit, pour être régulière, être précédée d'un préavis suffisant pour permettre les négociations et être notifiée aux représentants du personnel et à tous les salariés individuellement s'il s'agit d'une disposition qui leur profite ; qu'un usage non régulièrement dénoncé demeure en vigueur et qu'il en résulte que les salariés peuvent réclamer l'avantage résultant de cet usage jusqu'à la dénonciation régulière de celui-ci ou la conclusion d'un accord d'entreprise ayant le même objet que cet usage ; que ni la signature d'un document qui se borne à faire figurer les éléments fixes de la rémunération ni la contractualisation de l'avantage ne peut suppléer la procédure de la dénonciation d'un usage ; que pour débouter le salarié de sa demande en paiement d'un rappel de primes de 13ème mois, de section et de lavage, après avoir affirmé péremptoirement que les salariés en ont été informés individuellement, l'arrêt retient que, le 23 juillet 2000, le salarié a signé un document d'adhésion aux éléments de rémunération des conducteurs pratiqués par la société Trans Service, où figurent les éléments fixes de sa rémunération ne comprenant pas la prime de 13ème mois, mais une clause de sauvegarde lui garantissant le niveau de rémunération dont il bénéficiait au sein la société Aubry et que pour ces mêmes raisons, le salarié ne peut prétendre au paiement des primes de section et de lavage ; qu'en statuant ainsi, quand, d'une part, l'employeur n'avait ni soutenu ni, a fortiori, établi avoir informé individuellement les salariés, dont le salarié, de la modification de leur statut collectif et avoir respecté un délai de prévenance raisonnable et quand, d'autre part, il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que le document du 23 juillet 2000 n'avait pas pour objet et/ou pour effet d'informer le salarié de la dénonciation des usages litigieux, la cour d'appel a violé les règles régissant la dénonciation des usages.

3°/ ALORS, en toute hypothèse, QU'en s'abstenant de vérifier, ainsi qu'elle y était invitée, si le salarié ne pouvait pas bénéficier des primes de 13ème mois, de section et de lavage en application du principe d'égalité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard dudit principe.

4°/ ALORS, en toute hypothèse encore, QU'en se bornant à énoncer que le salarié a signé un document d'adhésion aux éléments de rémunération des conducteurs pratiqués par la société Trans Service, où figurent les éléments fixes de sa rémunération ne comprenant pas la prime de 13ème mois, mais une clause de sauvegarde lui garantissant le niveau de rémunération dont il bénéficiait au sein de la société Aubry, sans préciser en quoi consistait cette clause de sauvegarde et, en tout cas, sans vérifier si le niveau de la rémunération dont le salarié avait bénéficié au sein de la société Aubry avait été respectée et, par conséquent, si l'employeur avait versé au salarié non seulement le salaire ou traitement ordinaire de base ou minimum, mais aussi tous les autres avantages et accessoires payés, directement ou indirectement, en espèces ou en nature et, donc, la prime de 13ème mois, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail et de l'article 1134 du code civil, alors applicable.

5°/ ALORS, en toute hypothèse encore, QU'en affirmant que l'employeur a mis en place un système de primes de lavage de citerne, intégré à la clause de sauvegarde jusqu'en 2010, puis payée sous l'intitulé « primes » ou « travaux annexes », de sorte que l'intéressé a été rempli de ses droits, sans préciser en quoi consistait cette clause de sauvegarde et, en tout cas, sans vérifier que le niveau de rémunération dont bénéficiait le salarié au sein de la société Aubry, rémunération qui incluait les primes litigieux, avait été maintenu, la cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail et de l'article 1134 du code civil, alors applicable.
Moyen produit par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Presta Silo, demanderesse au pourvoi incident

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il a reconnu à Monsieur X... le droit à réparation pour préjudice financier ;

AUX MOTIFS QUE « M. X... ne justifie pas d'un préjudice distinct, non réparé par l'octroi des intérêts légaux de sa créance, et sera débouté de sa réclamation » ;

ALORS QUE la contradiction entre les motifs et le dispositif d'une décision de justice équivaut à un défaut de motif ; qu'en confirmant le jugement en ce qu'il a reconnu à Monsieur X... le droit à réparation pour préjudice financier, dans le dispositif de sa décision, après avoir pourtant reconnu, dans les motifs de sa décision, que Monsieur X... ne justifiait pas d'un préjudice distinct non réparé par l'octroi des intérêts légaux de sa créance, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-26718
Date de la décision : 28/03/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle partiellement sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Dijon, 29 septembre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 mar. 2018, pourvoi n°16-26718


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (président)
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.26718
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award